Ely

Je me sentais bien avec Eden. Il avait des casseroles comme moi et une façon de faire l’amour à se damner. Sortir avec lui était loin des prises de tête que j’avais pu connaître. Déjà deux mois, et je ne comptais pas mettre un terme à cette relation. Je me fascinais. Moi qui ne cherchais rien en règles générales, je me retrouvais en Eden. Pendant des années, il s’était occupé de sa grand-mère. Il avait coupé les ponts avec ses parents. Des personnes toxiques qui l’ont toujours laissé se débrouiller seul. Il m’avait avoué que s’il n’avait pas eu sa grand-mère avec lui, peut-être qu’il ne serait pas là avec moi. Comme moi, ses poignets attestaient de quelques travers avec lui-même.

Eden était facile à comprendre, facile à faire sourire. Je n’avais pas toujours besoin de m’expliquer pour qu’il comprenne que j’avais parfois besoin de silence.

Ce soir, je l’invitais chez moi.

En passant le pas de la porte, deux truffes commencèrent à l’inspecter. Narcisse lécha ses doigts, ce qu’elle ne faisait qu’avec une seule personne en dehors de moi : Mathys. Narcisse aimait les humains de façons différentes pour chacun. Plus elle aimait, plus elle embrassait. Les doigts étaient une partie qu’elle léchait, seulement par grand amour. Et à peine avait-elle vu Eden qu’elle lui avait offert son cœur. Cerninos renfla ici et là, avant de retrouver son panier et reprendre sa sieste où il l’avait laissé.

Eden était le bienvenu à la maison et, quelque part, j’avais su que ça fonctionnerait avec lui et les chiens.

Eden, c’était un peu moi avec un sourire plus large et une envie de vivre plus prononcée.

Je l’invitai à s’asseoir sur le canapé et allai vers une étagère pour y chercher un vieux film de Jean Cocteau. Eden n’avait jamais eu le temps de le voir, alors je lui avais proposé qu’on se le mate.

Il m’attendait patiemment. Je posai un plateau avec boisson et quelques friandises sur la table basse, avant de lancer le film.

Quand il glissa son corps contre le mien, je l’accueillis dans mes bras. Il laissa reposer sa tête contre mon épaule. Je souris, inspirant le parfum de fleur dans ses cheveux blonds. Mais lorsque je m’attardais dans le reflet de la fenêtre devant moi, je ne trouvais pas Eden à mes côtés. Éclairé seulement par la télévision, je m’apercevais que l’homme, sur moi, avait les traits d’un adolescent. Je retrouvais, sous le jeu des ombres, la seule personne dont j’espérai éteindre la flamme dans mon cœur. L’étouffer avant qu’elle ne prenne encore trop d’ampleur.

Je détournai les yeux comme je savais si bien le faire et me forçai à regarder un film dont je connaissais toutes les chansons.

Quand le générique défila, Eden leva la tête vers moi et me caressa le visage.

— Je vais rentrer chez moi, murmura-t-il.

J’entendis la fatigue qui se dégageait de sa voix, et ne voulant absolument pas l’ignorer, je souris en secouant la tête.

— Non, tu vas rester ici et partir demain matin.

— Une proposition ?

Il arqua un sourcil.

— En tout bon, tout honneur. Je n’aurais la force que de me blottir dans tes bras et dormir.

— Hum… j’aime la perspective de cette nuit. Elle me plait plutôt bien.

Eden m’embrassa doucement dans le cou, avant de demander ma salle de bain et la possibilité de m’emprunter un pyjama.

Il n’aimait pas dormir sans rien, même après une séance de sport romantique.

J’écoutais longuement l’eau couler, me rappelant nettement mes douches avec Eden. De son corps se tortillant sous mes mains, de ses regards langoureux, de sa façon féline de frotter sa joue contre la mienne. Les images de notre dernière soirée me revinrent, levant en moi une envie brûlante au bas de mes reins. Je repoussais ce désir. Pas ce soir. J’avais besoin d’autre chose, besoin de repos, besoin d’un câlin simple et de doux mots murmurée à l’oreille.

Le bruit de la serrure déverrouillée me fit allonger le pas jusqu’à ma chambre un peu avec précipitation.

Assis sur le lit, j’observais Eden avancer vers moi dans un pyjama qui lui allait parfaitement. Un pyjama que je n’utilisais plus, parce que j’avais appris à dormir nu chez moi. Seulement chez moi.