Décembre 2016- 58 Ely
— Et si on partait quelques jours pour ton anniversaire.
Je fermai une boîte métallisée que je gardais dans un coin de mon studio de musique. Eden lui jeta un vite regard avant de s’en détourner.
Je marchais vers lui. Il resta dans l’embrassure de la porte.
— Alors ? Tu en penses quoi ?
— Ça me plait bien. Tu as une idée pour la destination ?
Je sortai, l’obligeant à reculer, et refermai la porte derrière moi. J’avais encore pas mal de boulot. Trois chapitres à réécrire.
— Tu as parlé de Prague la dernière fois. Pourquoi ne pas y passer un peu de temps ensemble. Je te trouve un peu morose depuis mon retour.
Je m’approchai de lui, passai mes bras autour de sa taille en souriant.
— Et tu sais que ma morosité n’a absolument rien à voir avec toi, n’est-ce pas ?
— J’ai cru comprendre que tu étais en conflit avec ton inspiration.
Hier, j’avais été éloquent. J’avais passé ma soirée à insulter mon pc et l’écran blanc. Plus j’avais écrit, plus j’avais crié en me relisant. Résultat, tout avait de nouveau été effacé et je m’étais couché ronchon.
— Je m’occupe des billets d’avion et de l’hôtel. Toi, concocte-moi des vacances reposantes.
Il n’avait pas renouvelé son contrat à la superette. Deux gros contrats avaient été signés avec un auteur indépendant - pour trois de ses sorties annuelles - et une maison d’édition - pour deux intégrales collectors. Eden devait plancher sur plusieurs couvertures et une bonne vingtaine d’illustrations couleurs en tout.
— Reposantes ? dit-il avec un sourire en coin.
Je l’embrassai en plein milieu du jardin. L’air se rafraichissait encore et l’idée de plonger sous la couette m’inspira d’une toute autre manière.
— J’ai envie de toi, murmurai-je à son oreille.
Il sourit et mordit sa lèvre.
— On devrait faire honneur à ton cadeau.
Celui qu’on avait commandé quelques semaines plutôt et qu’il m’avait offert le lendemain de Noël.
Je tirai sur son bras pour l’emmener à l’intérieur. Il me suivit en riant. J’aimais cette façon qu’il avait d’être lumineux.
Dans la chambre, je l’observai se déshabiller. Lentement. Sûr de lui. Eden n’était pas timide pour un centime. Il se savait beau. Il l’était. Et il le montrait chaque fois que je le ramenai dans un endroit sombre. Un endroit où sa lumière était encore plus évidente.
J’aurais voulu lui dire qu’il finirait par se noircir les plumes à mon contact. Qu’un jour, je le ferais souffrir, mais c’était devenu mon seul rempart valable contre un certain « petit con » qui se croyait malin.
Mathys était parti le matin de Noël après qu’on ait tous ouvert nos cadeaux. Il ne passerait pas le nouvel an en famille ni ses dix-sept ans.
En rentrant chez moi et en défaisant mon sac, j’avais trouvé un petit paquet carré et quand je l’avais ouvert, j’étais tombé sur un bracelet en cordon où se suspendait un médaillon en forme de guitare et de violon. Le lien avait été vite fait et une rage vive m’avait fait balancer ce cadeau à l’autre bout de la pièce en hurlant. Je n’avais pas reconnu ma voix dans ce cri ulcéré. Je ne détestais pas qu’il puisse m’aimer. Je ne concevais tout bonnement pas que toutes ses attentions puissent me toucher au point que je l’avais constamment dans mon esprit. Il me faisait le désirer. Il me faisait le voir. Il me faisait croire que nous pourrions avoir une belle histoire. Mais tout me rapportait à son âge, à la possible emprise que j’avais sur lui. Je restais son auteur préféré… Je ne le repoussai pas toujours quand il le fallait. Et surtout, je lui donnais une importance trop remarquable. Combien de temps je passais à me brûler les yeux sur son corps, sur ses lèvres, à l’intérieur de son regard ?
J’avais beau le garder à distance, je lui criai que j’avais envie de lui. C’était… Inacceptable !
Puis avec ce bracelet, il y avait eu cette lettre. Enfin… plutôt une réécriture de la chanson que je lui avais fait encadrer, je ne savais plus auquel de ses anniversaires.
« Grand.e Ely, tu vois là-bas, au fond de mes entrailles, c’est mon cœur qui bat, et tu verras, lorsque tu vieilliras, qu’il chantera encore pour toi… ».
Cette phrase en particulier m’avait foutu en l’air et j’avais déchiqueté cette lettre… avant de la ranger avec le bracelet dans la boîte métallique. Je ne savais pas jeter les cadeaux de Tys. J’en étais incapable. Cela aurait été comme foutre son cœur à la poubelle.
Eden monta sur le lit où je l’attendais, encore dans mon jean. Je n’étais pas bien certain de savoir utiliser ce que j’avais entre les jambes. En soi, c’était toujours une prothèse pénienne, mais portée comme une seconde peau. Une sorte de short avec un pénis en silicone réaliste et dur. C’était comme si je portais une érection, comme si mon corps, sexuellement parlant, était plus à l’aise avec l’envie qui montait.
— Alors ? demanda Eden. Comment tu te sens ?
— Je ne sais pas trop. Bien… Mais je pense que je vais acheter le boxer harnais. La texture de ce short est un peu trop… glissante.
Je ris sur les lèvres d’Eden tandis qu’il caressa mon torse, levant un frisson sur ma peau.
— Une nouvelle prothèse alors ?
— Hum… j’en ai les moyens, soufflai-je.
Il s’assit à califourchon sur moi, embrassa mon cou, mes épaules, avant de glisser la tête entre mes jambes et de dégrafer mon jean.
C’était terrible à dire, mais dès qu’il empoigna ce sexe en silicone, un choc électrique remonta dans ma poitrine. Je l’observais lécher ce bout rose qui serait bientôt le mien pendant quelques semaines avant de repasser une commande qui me conviendrait mieux encore.
Inexplicablement, je sentais la langue d’Eden sur moi, entre mes jambes, alors qu’il ne s’agissait pas vraiment de ma peau.
— Tu aimes, murmura-t-il en faisant remonter sa main sur ma cuisse.
— Hum… Continue, surtout, ne t’arrête pas.
C’était bon, mais il m’en fallait plus, et lorsqu’Eden serpenta à nouveau jusqu’à mes lèvres, je ne sus pas ce qui se passa dans mon esprit. Je l’attrapai par les cuisses, le soulevai. Il n’était pas plus lourd que moi. Je le fis chavirer sur le lit, caressai son corps, embrassai sa peau, la mordai comme affamé par sa chair.
Il se retourna, se tortilla, rit. Je palpais ses fesses avant qu’un tremblement plus violent que les autres me fasse attraper le lubrifiant et lui en badigeonner la fente. Je glissai mon pénis plusieurs fois en retenant ma respiration. Les gémissements d’Eden me criaient de lui faire de vilaines choses. Et j’écoutai, complétement hypnotisé par cette nouveauté. J’enserrai le bout. Lentement. Visualisant chaque étape. Ressentant chaque mouvement provenant de mon cœur. En m’enfonçant, j’entendis Eden me réclamer.
J’étais là. En lui. Je commençai de longs va-et-vient à l’intérieur de lui, tout en me gorgeant de ses plaintes succulentes.
Une main sur ses reins, l’autre crochetée à son épaule, je me sentais vivant, tellement moi, tellement mieux à chaque poussée.
Visiblement, il me manquait quelque chose.
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