Janvier 2023- 94 Elyas

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— Ely, Je ressens beaucoup de tristesse en vous depuis quelque temps déjà. J’aimerais savoir si cela a à voir avec votre transformation ou avec un sujet que vous évitez libéralement de parler.

— Ma mélancolie n’a rien à voir avec ma transition. Je n’ai eu aucune appréhension concernant ma dernière opération. Je me sens moi.

— Bien. Et cela vous convient ?

— Oui.

Je me passais la main dans mes cheveux, les faisant glisser sur mes longueurs. Je ne mettais pas résolu à les couper. C’était ma marque.

—J’avoue que, je réalise au fond que je serai toujours un mérou. J’ai vécu femme, puis j’ai hésité… et finalement, je suis devenu un homme. Mais ça ne retire pas ce que je suis… Un mélange de tout. Je la sens encore, ma part de féminité. Elle me cajole. Je crois que ce n’est pas toujours bien clair d’être humain, d’être soi... De s’arrêter sur une image ou un ressenti. J’avais besoin et surtout, envie d’avoir ce corps d’homme pour me connaître dans mon entièreté. Je crois que c’est ce que je suis… Un mérou. Je suis heureux de poursuivre ma vie en tant qu’homme et je la finirai ainsi. Il y a des facilités à être un homme.

— Ravie de vous l’entendre dire. Voulez-vous qu’on parle de ce qui vous chagrine ?

J’en avais envie. Chaque jour un peu plus. Madame Careult le savait. Elle essayait de m’aider, sentant peut-être la déprime s’enrouler trop souvent autour de moi.

— Plus tard.

— Comme il vous plaira.

Je lisais la date sur le calendrier. Nous étions le 4 janvier.

Mathys venait de fêter ses vingt-trois ans alors qu’Eden organisait avec mes amis mon quarante-et-unième anniversaire.

Je ne savais pas trop pourquoi, j’avais sorti de la boite métallique le bracelet que Tys m’avait offert des années plutôt.

Depuis ce matin huit heures, je l’avais autour du poignet. Ça donnait de la beauté à mon bras sacrifié. J’observais un instant la cicatrice alors que mon polo en dévoilait un infime morceau. Cette peau qui reprenait une forme plus esthétique. Cette main qui retrouvait son autonomie.

En quittant la séance, je rencontrai le froid mordant de l’hiver. Même sous mon manteau, je sentais le vent se glisser. Depuis quand ne m’étais-je pas réchauffé ? Mon cœur se givrait à mesure que les années passaient.

***

En manipulant mon pénis, Eden sourit. Au bout de six mois, ma prothèse semi-rigide me donnait une nouvelle sensation. Ma peau était plus tendue, plus sensible. J’avais toujours un peu de mal à ressentir quoi que ce soit au bout de ma queue, mais quand Eden lécha sa longueur, il me vola un frisson.

Je la lui laissai entre les mains, ne m’occupant plus de rien.

Ma nuque partie en arrière. Les doigts de mon époux me cajolaient. Ça me faisait des chatouilles. Il prit mon sexe en main, glissa ses lèvres sur la chair. La chaleur qui m’engloutit eut l’assurance de me faire oublier que je n’avançais pas sur mon dernier roman. J’avais tout en tête, le schéma des chapitres sur un brouillon, mais j’étais incapable d’écrire. Je bloquai.

Selon Adès et Max, j’avais beaucoup trop travaillé. Quatre romans en deux ans, ce pouvait être très peu pour certains et énorme pour moi. Ils mettaient aussi ma transition en cause. Une trop grande fatigue. Eden me parlait de vacances depuis des semaines. Mais je n’avais envie de rien. Ou bien si.

Une petite maison à la campagne. Au calme. Seul.

—Tu aimes ? demanda Eden en caressant mes cuisses d’une main et en me branlant de l’autre.

Il chercha ce dont j’étais démuni. Il ne comprenait pas pourquoi j’avais préféré un pénis sans testicules. Pour lui, j’étais un eunuque. Et ça m’allait très bien. Je n’avais pas besoin de bourse pour aimer sa langue enroulée sur mon membre.

Je hochai la tête pour toute réponse.

Nos rapports sexuels reprenaient doucement, après une baisse violente de libido me concernant. L’impact des opérations sur mon corps, sur mon moral.

Il serra mon manche à la basse et me masturba tout en embrassant la peau. Le frottement me procura du plaisir et rapidement, je laissais échapper un petit gémissement. J’avais toujours retenu ma voix, comme si je savais qu’elle était destinée à une personne en particulier. Même toutes ces années avec Eden, j’avais gardé ma voix pour moi. Ne lui cédant qu’un échantillon.

Je déplorai mon incapacité à le quitter.

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