Juin 2024 - 105Elyas
— Les ventes enflent. Je n’ai jamais vu ça.
Max était clairement abasourdi.
J’avais eu sa belle-sœur au téléphone la veille pour me faire exactement la même réflexion.
Je l’écoutai me faire un nouveau bilan de mon dernier roman sorti, avant qu’il ne s’intéresse à ma nouvelle rédaction.
— Tu avances bien sur le petit nouveau ?
— Mieux qu’avec le dernier en tout cas. Ce ne sera pas un gros pavé. Juste de l’introspection et du voyage. Rien de fantastique. Pas d’univers lointain, seulement un personnage qui se trouve d’une ligne à l’autre. Une jeune femme, la trentaine, qui part voyager en lançant des dés. Et un rêve qui persiste dans sa tête.
— Déjà un premier chapitre ?
— Plutôt des paragraphes un peu mi dans tout les sens.
— OK, c’est cool.
Je sentais qu’il avait envie de parler, mais je ne savais pas ce qui le retenait. Alors je lui posais une simple question :
— C’est Lucien, cette inquiétude dans ta voix ?
Lucien, ce gamin tellement adorable, sage et curieux avait vrillé sans que personne ne le remarque. Un jour, il n’a plus été le même, il a commencé à mal parlé à ses parents, à sa famille, puis il a commencé à fréquenter des mauvaises frappes. À seize ans, il avait un casier judiciaire pour vol répété chez un voisin. Après le troisième vol preuve à l’appui, le voisin avait porté plainte. La justice était allée dans son sens.
La semaine prochaine Lucien viendrait vivre chez Margot et Carl sous la « tutelle » de Pola et de Perséphone. Avec ces deux-là, peut-être qu’il arrêterait de faire le couillon.
— Je sais plus comment le prendre. Je ne comprends pas pourquoi il ne communique plus qu’avec de la violence. J’ai tout foiré avec ce gamin.
— C’est faux. Il a eu une très belle enfance. C’est la dernière année de collège qui l’a flingué.
— J’aurais dû le retirer de cette école quand il a commencé à faire le con. Mais avec Eunaisyl qui tombait malade une semaine sur deux… putain, je l’ai laissé complétement à côté. Et à cause de moi, sa vie est déjà bousillée. Un casier judiciaire à 16 ans. C’était obligé.
— Max, j’aurais adoré avoir un père aussi attentionné que toi, et qui s’intéresse à ce que je fais. Crois-moi. Si Lucien a vrillé se doit être pour une tout autre raison. Tu n’es pas dans sa tête, tu n’es pas lui. Tu ne réfléchis pas comme lui. Vous êtes différents. Rassures-toi sur le fait que tu l’as bien élevé, mais que par un coup du sort, d’autres ont été plus persuasif que toi et qu’il s’est rangé derrière eux.
— Je me demande si Persé et Pola, parviendront à le remettre sur la bonne voie.
Je serais pas te dire. On fera notre possible. Crois-moi.
— Tu te rends comptes ? Il ne veut plus parler à ses sœurs, ni à son frère, lui qui était toujours collés à eux plus jeune.
J’écoutais mon ami, sans pouvoir lui offrir les réponses qu’il cherchait et tout en me demandant si le fait que Lucien se soit trouvé sans plus personne à un moment particulier de son adolescence, est-ce que ce n’était pas ça le vrai fond de notre problème ?
Carmen et Nathalie ont une famille à elle.
Mathys… est à l’autre bout du monde.
Et Eunaisyl qui était toujours fourrée avec Lucien, avait commencée à s’émanciper et à vouloir êtres avec ses amis.
Est-ce que ce gamin, sensible, n’avait pas eu l’impression de tout perdre ? N’avait-il pas pris la seule main qu’on voulait bien lui tendre, alors qu’il sombrait sans qu’on ne le voie ? Sans qu’on ne l’entende ?
En parlant avec Mélodie quelques semaines plutôt, je m’étais laissé distraire par un accident qui s’était passé à peu près quand Lucien avait eu cette envie de trainer avec des caïdes. Un élève de son établissement s’était fait tabasser. On ne savait rien du pourquoi ? Le gamin n’avait rien dit. Ses parents l’avaient retiré de l’école et puis la vie à continuer. Et si c’était là qu’il fallait creuser ? Est-ce que Lucien ne le connaissait vraiment pas ? Mon instinct me dictait de faire des recherche.
— Max arrête de ruminer, prends un bain chaud et laisse Lucien venir avec nous. Je ne sais pas si il reviendra à lui, mais je sais que Pola pourrait lui remettre les pendule à l’heure. Pour Perséphone… comment tu dire que c’était une mauvaise idée. Persé n’est pas très diplomate.
— Parce que Pola l’est ?
— Pola sait ce que c’est d’être une ado en révolte. Quant à Persé, elle sait surtout mettre le bordel.
— Dis-moi que tu trouveras les mots, toi.
Il était désespéré.
— Je ne te promets rien, Max. Mais je vais creuser.
— Ely…
— Ne me remercie pas.
Bientôt les vacances d’été.
J’embarquerai Lucien avec moi, Evack, Mike et Armand. L’air de la montagne lui ferait le plus grand bien. C’est là que j’attaquerai, là, que je le mettrai au coin du mur. Là où il ne pourra pas fuir.
Petit Lucien, on trouvera qui t’a fait si mal.
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