Chapitre 1 : Landry

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( pas corrigé, pas relu - assurance de retrouver mon texte si mon pc ou disque externe meurent à nouveau )

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Dix-huit ans plus tard, capitale de Francessia.

Je n'arrivais pas à le croire.

Mon père emmené au poste de police après une interaction avec un membre de son club.

Les collectionneurs d'art et leur égo.

Je m'en fichais au plus haut point. Comment dire que j'avais d'autre préoccupation.

Mon collègue m'avait prévenu dès qu'il avait franchi le commissariat. J'étais de garde la veille et m'apprêtais à rentrer chez nous. Ma mère était encore bien fatiguée et mes sœurs la faisait tourner en bourrique. Mais c'était mal connaître la charmeuse des planches. Lomdélia la minutieuse, la travailleuse, l'acharnée.

Ma mère était cette femme forte, dont la carrière de danseuse avait été courte, vite remplacé par des enfants et par la vie de famille.

Je fixais mon père, lui aussi avait été danseur classique. Il était assis sur une chaise, débraillé, une main bandée et une arcade sourcilière rougie. L'autre type n'était pas mieux mis. Je secouai la tête. Que lui prenait-il ces derniers temps ?

Un geste du montant suffit à mon père pour se lever et me rejoindre. Je saluai mon collègue, m'en détournais et sortis du commissariat avec mon père sur les talons.

Je marchai droit devant moi, saluai des agents plus âgés. Il y avait toujours du monde dans les rues le matin. J'essayai de leur sourire, sans y parvenir, alors je hochai la tête, respectueux. Je n'avais jamais vraiment compris mon père et les années renforçaient ce sentiment.

Je bifurquai dans une ruelle, plus éloignée du poste, et m'arrêtai dans l'ombre de deux bâtiments. Il y faisait bien plus sombre que je ne m'y étais attendu.

— À quoi jouez-vous ? Croyez-vous que vous puissiez vous permettre de vous battre impunément ? Vous êtes censé être à la maison, épauler ma mère, votre femme et garantir une vie de famille à mes sœurs. Moi, je n'ai pas eu droit à votre présence. Vous qui étiez trop souvent sur les planches et pendant si longtemps. Mère est fatiguée, elle ne se plaint pas elle ne le fait plus depuis que les jumelles ont sept ans. Pourtant, je le sais, et vous aussi, elle cherche encore votre présence auprès d'elle. Elle l'espère. Dois-je vous rappeler que votre plus jeune fille à cinq ans ? Dally voit son père en coup de vent, et la danse ne peut être un prétexte pour elle, n'est-ce pas ? Vous êtes toujours ailleurs ou dans votre fichu bureau. Et quand il vous arrive de passer un peu de votre précieux temps avec nous, vous pensez à autre chose.

J’avais du mal à contrôler les tremblements de mes mains. Ce n’était pas la première fois que je disais ce que je pensais à mon père. Si un jour, je l’avais adulé, aujourd’hui le tenait pour responsable de la tristesse de chaque membre de notre famille.

— Dally a besoin de ses deux parents. Je ne veux pas qu’elle comprenne trop vite quel genre de famille nous sommes. Prenez soin d’elle, profitez de ses sourires au lieu de vous battre inutilement dans un bar huppé avec un de vos confrères.

J’aurais voulu lui dire tout autre chose. Lui demander pourquoi il s’était marié s’il n’aimait pas ma mère ? Pourquoi lui avait-il fait des enfants ?

Je ne cache pas ma fadeur. J’étais suffisamment fatigué pour deux. Et quand la fatigue appuyait sur mon cœur, je pouvais devenir cruel. Mon père en avait déjà fait les frais. Je savais le blesser. En revanche, lui, il ne se doutait jamais de combien il pouvait faire mal par son absence.

— Entendez-moi bien. Au prochain coup, vous irez en cellule et je laisserais ma mère venir vous chercher. Je ne suis agent que depuis cinq mois. Et c’est la troisième fois qu’on vous amène au post. Bon sang, qu’avez-vous ? Se battre vous ressemble si peu.

D’où lui venait cette colère ? À qui la devait-il ?

Je l’avais si souvent vu les yeux emplis d’un chagrin profond. À quoi ressemblait son regard quand il se battait ? J’aurais voulu connaître la raison, mais il se butait dans sa bêtise.

Mon père était un homme qui avait vécu un drame. Lui et ma mère gardaient en eux l’ombre d’un secret. Ce secret qui me ferait connaître toute leur histoire.

Il me regarda. Toujours dans les yeux. Mon père détournait très rarement le regard, même quand il avait tort. Il aimait savoir ce que l’on pensait, quand lui nous cachait tout.

—Tu es déçu ? dit-il seulement.

—Impatient. Tu sembles oublié que je suis débutant. Qu’à force de voir mon père amener au post, mes collègues risquent de na plus me prendre au sérieux.

— Tu sembles déjà être respecté, fils.

Je distinguais de la fierté dans ses yeux brun éclaté de vert. Plus il vieillissait plus ses yeux éclaircissaient. Enfant j’aimais le contempler. Je le faisais pour le comprendre, pour qu’il sache que quelqu’un le voyait. Oui, j’avais passé mon temps les yeux braqués sur lui pour être certain qu’il était bien là, et qu’il ne disparaitrait pas une fois en dehors de mon champ de vision.

Aujourd’hui, cet homme que j’adulai, j’espérais ne jamais devenir comme lui : rongé par le passé. Parce que c’était cela.

— Oui. Respecté et jalousé. Je suis apprécié pour l’instant, mais je sais où se trouve ma place et quel grade est le mien.

Plus que le respect mes collègues me regardaient avec « envie ». Je faisais des jaloux depuis que l’inspecteur Tae m’avait chargé de relire et réécrire ses notes. Un étrange personnage toujours vêtu de noir. Seul couleur, le bracelet en velours jaune à son poignet. Il me faisait appeler tous les trois jours environs, plus ces derniers temps – un criminel d’envergure international était revenu à la capitale. Je restais des heures à écouter ses méninges travailler, je me plongeai dans ce qui le tracassait dans une affaire et je remettais toutes ses notes en ordres. Pour qu’il puisse organiser ses pensées divagantes, parfois. Je savais qu’il ne serait bientôt question que je sois un simple agent. J’étais en liste pour devenir second de l’inspecteur. Tae choisissait qui travaillait avec lui, ce n’était pas nouveau. Les supérieurs lui laissaient du zeste. C’était un surdoué du crime après tout. Pas une affaire ne lui résistait longtemps. Tae était dévenu mon protecteur, ou quelque chose qui s’y en approchait.

— Ecoutez père, je n’ai pas le temps pour vous ou vos chamailleries de collectionneur d’art. Les portes de la capitale croulent sur les incidents depuis que le Loup est revenu. J’ai des dossiers à ne plus savoir quoi en faire sur mon petit bureau et que je partage avec mes collègues. Chaque jour plus d’une cinquantaine plainte sont déposée. Ça part de l’insignifiant problème de voisinage à l’homicide. Il y a des tueurs plus sanguinaires qui rodent. J’ai vu des photos qui m’ont soulevé le cœur. M’entendez-vous ?

Mon père ne baissa pas la tête, mais gardait le silence, et moi, à bout de nerf, j’agitais la main dans le vide.

Le Loup était de retour. Ce criminel qui avait laissé un cadavre sous mes yeux. J’étais entré à la police pour le traquer. Ce tueur n’avait rien de normal. Il éviscérait ses victimes et se prônait, vengeur.

Je quittais la ruelle, mon père derrière moi. Je sentis son regard dans mon dos. Je n’en avais que faire. J’avais envie de rentrer et de m’allonger, j’avais envie de voir ma fiancée, mais à cette heure-ci, elle devait être au travail. Alors, je tournais au carrefour et filais droit vers l’appartement qui m’avait vu grandir. Bientôt, j’emménagerai avec ma fiancée. Ma douce Suzy.

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