Ma veste, toujours négligemment tenue d’une main, rejetée en arrière sur mon épaule, me gêne.

Pensée qui est mienne ou non, je suis soudainement convaincu que la porter avec tant de désinvolture est une hérésie !

Hors de question de me présenter ainsi à la foule.

Mes yeux s’arrondissent, signe d'embarras, tandis que mon regard se détourne des danseurs et danseuses et que mon assurance se volatilise.

Mes jambes dorénavant de plomb flageolent ; impossible pour moi de continuer à aller de l’avant. Pourvu même qu’ils – tous ces gens déchaînés – ne m’aient pas vu.

Vite, c'est indéniable, cette veste, il est grand temps qu’elle regagne sa place, c’est-à-dire mon dos !

Arrêté, je ne pense donc plus à avancer, et pire ‒ si tant est que ce soit réellement dramatique ‒ j’entreprends de faire deux pas en arrière avant de me rhabiller convenablement.

Et alors que je prends le temps de l’enfiler ‒ je vous passe le d’abord le bras droit et ensuite le bras gauche ‒, alors que, soigneux, je prends le temps de l’ajuster, tirant machinalement sur le col et fermement sur les deux pans, je me rends compte – et vous l'aurez également noté – que toute notion d'urgence pour l'endosser a disparu.

Ma panique était-elle exagérée ?

Peu m’importe, de toute façon la simple idée de raisonner ou de comprendre m’apparaissant vaine, autant continuer et en ressortir impeccable. Alors, minutieux, je termine en frottant énargiquement cette satanée veste pour en chasser plis et impuretés.

Une fois bien dans ma peau, bien dans ma sacrée veste et au final pas peu fier du résultat, je bombe le torse, relève la tête et tourne à nouveau mon attention vers la foule.

Depuis le début, On a voulu que je porte ma veste de façon désinvolte. On a voulu que je trouve cette façon de la tenir inconvenante. On a voulu que j’ajuste ma veste, en prenant tout mon temps.

Et ce laps de temps, nécessaire bien qu’injustifiable, fut juste la durée précise, à la seconde près, qui me permit d’accrocher son regard.

Sans cela, je serais passé à côté d’elle.