Un silence se fit. Alan fixait Bow l'air hébété, Cléo était gênée, Vic un peu perdu, Erin commençait à comprendre. Les ayant tous dévisagés, Bow se tourna finalement vers elle et explosa, d'hilarité et de fureur.

- Mais il s'appelle pas "Alan" ! ... Je ... C'est juste le nom qu'on a balancé en même temps que lui il y a 7 ans. Donner son vrai nom était risqué. Mais on allait revenir le chercher.

Il s'arrêta.

Inspirant à fond, choisissant ses mots, il reprit.

- OK on n'est pas revenus. Ça a été un peu la merde pour nous ... Mais qui garde une couverture pendant 7 ans ? Même nous on n'est plus qui on était à l'époque. On venait te chercher en espérant que tu sois plus là. Que tu sois reparti casser des gueules et infiltrer des camps de pirems.

- J'ai pas vraiment eu le choix.

- Ouais ça je vois. Calé dans un fauteuil avec des copines moi aussi je me serais persuadé que j'avais pas le choix.

Erin se retint de sourire. La remarque était odieuse mais elle résonnait étrangement avec son propre ressenti vis-à-vis d'Alan. Bien sûr qu'il n'avait pas eu d'autre choix que de rester, mais à partir du moment où il avait compris qu'il ne repartirait pas de Teccis il s'était laissé vivre et avait opté pour la voie de la facilité, dans tous les aspects de sa vie. Sa relation avec Cléo, gamine solitaire et paumée, dégoûtait Erin pour cette raison.

Bow renchérit :

- "Patience et Agilité" ça se passe comment du coup ?

Se tournant vers Erin.

- Il vous a jamais montré son badge avec sa devise ?

- Bow ...

- Oh ta gueule Vic.

- Tu vas nous cramer.

Marquant un temps d'arrêt le sniper se retourna vers son pilote allongé sur une civière et haussa encore le ton.

- Qui nous a cramé Vic ? Qui nous a enterré ici en crashant le vaisseau, en tuant au passage le meilleur homme qui ait jamais fait partie de cette escouade ?

- Ils nous ont touché, j'ai rien pu ...

- Je t'ai dit de fermer ta gueule ! J'étais sur le toit, j'ai tout vu. T'as pas été touché, t'as planté le vaisseau tout seul.

Le pilote secoua la tête et se laissa retomber sur son matelas, trop fatigué pour argumenter davantage, laissant un boulevard au monologue de Bow.

- Il faut que chacun prenne bien sa part de responsabilités : Vic a crashé le vaisseau et tué Wandar, moi j'ai fait l'erreur de nous amener ici pour retrouver un vieux légume à roulettes.

Cette fois Erin grinça des dents. Si ce type affichait le même mépris violent pour ses patients que les brutes de Teccis, l'indulgence pleine d'opportunisme qu'elle lui accordait depuis son arrivée ne durerait pas. Elle avait bien conscience que le leader des mercenaires était en plein trauma après la mort du géant blond dans le crash du vaisseau, mais pour l'heure il y avait mieux à faire que régler ses comptes.

Bow détecta un changement d'attitude chez la médecin et se tourna vers elle. Erin ne lui laissa pas le temps d'en placer une.

- Vous voulez faire quoi ?

- ...

- Dans 4 heures le jour se lève, "les bouseux" (elle mit une emphase ironique sur le terme) vont revenir. Ils sont nombreux.

- Faut pas rester là alors. Votre hosto c'est pas une forteresse. Y'a déjà une brèche là-bas.

D'un signe de tête il indiqua la direction de la réserve qu'il avait lui-même faite exploser. Erin ne releva pas la provocation et attendit qu'il expose la suite de son plan.

- On va aller ... se cacher. On profite de la nuit pour sortir, on se cache et on réfléchit. La solution se présentera d'elle même.

- Bow, faut qu'on appelle ...

Vic s'était de nouveau redressé sur son matelas. Erin le repoussa d'une main ferme et rebondit sur sa remarque avant que Bow ne place une nouvelle punchline.

- Vous avez du renfort ?

- On a peut-être moyen de ...

Erin n'avait aucune intention d'attendre la réponse du leader.

- Vous n'avez aucun moyen de les appeler, et on ne vous aidera pas tant que vous ne direz pas qui vous êtes. A commencer, s'il vous plait, par lui.

Elle désignait du doigt celui qu'elle avait toujours connu sous le nom de "Alan".

L'intéressé semblait sidéré et incapable de répondre. Son vieux pote trouvait la situation comique et faisait durer le suspense. Ce fut Cléo qui rompit le silence.

- Larry, il s'appelle Larry.