Episode Seize : Questions-Réponses
La vie se réveille tôt dans les montagnes. Dès que les premiers oiseaux chantent, les bergers conduisent leurs troupeaux vers les paturâges. Les fleurs ouvrent leurs pétales pour recevoir la précieuse lumière du soleil et la journée peut commencer. Chaque créature s'affaire et donne de son mieux pour pouvoir boire, manger et répondre au rôle précis qu'elle occupe dans ce vaste tableau. Et sur un petit plateau dissimulé par la forêt, sur un flanc inexploré du mont du Gardien, un jeune garçon affronte son aîné, beaucoup plus vieux.
Tous deux sont très rapides et les coups à mains nues s'enchaînent. Aucun ne semble prendre l'avantage. En fait, aucun ne parvient même à toucher l'autre, tant l'esquive et la parade sont d'une précision chirurgicale. Tous les deux portent ce qui s'apparente à des gants de cuir, sans doute pour ne pas trop abîmer leurs phalanges.
Et puis soudainement, le vieil homme parvient à repousser le garçon. Il profite d'une faille dans sa garde pour placer ses deux mains au niveau de son estomac et les tourne de quelques centimètres. Le garçon tombe à genoux et vomit sur le sol.
- Recommençons, Kyundo. Nous ne nous arrêterons pas tant que tu ne m'auras pas fait la même chose.
- Pourquoi est-ce que je ne peux pas utiliser le Souffle ? demanda-t-il en essuyant ce qu'il lui restait sur la bouche.
- Pourquoi ? C'est une bonne question.
Le vieil homme prit un morceau de bois et commença à tracer des lignes sur le sol.
- Lorsque l'on construit une maison, on commence par creuser la terre et y installer ce que l'on appelle des fondations. A partir de là, on construit les murs, la charpente, on isole le toit et on le couvre.
Le jeune garçon était très attentif.
- Le Souffle peut-être très fort chez l'homme, mais il est loin d'être évident de s'en servir. En fait, on peut vivre une vie entière sans même connaître cette force enfouie en soit. Ce qui est évident, par contre, c'est de bouger tes bras et tes jambes, puis de parler, puis de te servir de tes neurones. Il est très, très important de connaître tes propres fondations avant de t'attaquer aux murs et à la charpente.
- Alors, il faut que je sois très fort pour bouger, et ensuite, très fort pour réfléchir, et ensuite, très fort pour dériver ?
- Tu as tout compris ! Et c'est valable pour tout. Tout ce que je t'ai enseigné, ce sont tes fondations. Mais un jour, tu devras bâtir ta propre maison.
- Comment je ferais ?
- Pour quoi ?
- Pour savoir quelle maison construire ?
- C'est une très bonne question, dit-il encore.
Et puis, après avoir réfléchi une petite seconde à comment formuler sa réponse, celui-ci répondit à son disciple.
- Part toujours de ce que tu connais, et va vers ce que tu ne connais pas.
Le schéma dessiné par le vieil homme était très simple, une petite maisonnette séparée en trois parties : les fondations, les murs et le toit. Il se releva et se mit en garde.
- Allez, maintenant... Attaque-moi !
- Oui ! sourit le petit Kyundo.
La nuit tomba un certain nombre de fois depuis cette époque. Et même les conversations marquantes ne résistent pas toujours à l'épreuve du temps.
- Reprenons depuis le début, sans nous emporter.
A nouveau, le thé coulait dans les quatre tasses et tous étaient déterminés à comprendre ce qu'il se passait. Kyundo s'était assis dans le fauteuil qui se trouvait juste sous sa petite bibliothèque. Keldan, Dysill et Lurian étaient toujours assis autour de la petite table et ne savaient pas par où commencer. Keldan, un peu gêné par le manque de sang-froid dont il avait fait preuve, commença.
- Pardonnez-moi pour...
Kyundo leva le doigt pour lui dire d'arrêter. Il but une gorgée de thé, il fit reposer ses coudes sur ses cuisses et s'exprima.
- Vous êtes venus poser des questions et j'y répondrais, dit Kyundo. Mais chacun son tour. Ne nous mentons pas. Une question chacun, une seule à la fois. Soyons précis et concis dans nos réponses. Et puisque vous m'en avez déjà demandé beaucoup, je vais poser la première : Comment êtes vous entrés en possession de la carte en premier lieu ?
Les enfants regardèrent Keldan, celui à qui avait été remis la carte.
- Et ben, pour commencer...
- Concis. Précis, demanda Kyundo.
Keldan réfléchit un instant.
- Soto, mon maître. Il me l'a donnée avant de mourir.
- Qui était ce Soto, pour toi ?
Dysill interrompit la réponse de Keldan.
- Vous aviez dit une question chacun. Maintenant, ce n'est plus votre tour.
- C'est juste, dit Kyundo. Keldan, c'est à vous.
Keldan réfléchit à une question courte, vu la situation, c'était bien difficile.
- C'était quoi cet oiseau, dehors ?
- Un Camoufleur. J'abrite des espèces rares dans cette forêt.
C'était au tour de Lurian, celui-ci fit signe à Keldan de lui demander "Pourquoi vous cachez-vous ici ?"
- Je vous l'ai déjà dit. Je veille sur le domaine de Nicolas Gath. Il y abrite une sagesse introuvable ailleurs.
Dysill posa à son tour sa question.
- Les habitants du village d'en bas parlent d'une ombre qu'ils n'aperçoivent que....
- Concis. Précis.
- Vous aidez les habitants de Laydear ?
- Oui.
- Pourquoi ?
- C'est mon tour, maintenant. Qu'attendiez-vous de Nicolas Gath ? Vous pouvez y répondre tous les trois.
Keldan tentait de donner la réponse la plus concise possible.
- Je voulais battre un homme.
"Moi aussi", dit Lurian à travers Keldan. Ce dernier se rendit alors compte qu'il avait abandonné son voeu de retrouver la parole, simplement pour aider Keldan.
- Moi aussi, dit Dysill en souriant et en regardant ses amis. Et soigner un ami.
Keldan continua du tac au tac, se prenant au jeu.
- Qui était réellement Gath, pour vous ?
- Je ne souhaite pas répondre, dit Kyundo.
- Vous avez précisé que nous ne devions pas mentir, dit Dysill. Retenez la vérité et vous brisez votre propre contrat. Rien ne nous empêchera de trouver un subterfuge pour vous mentir.
- Il y a des informations qui peuvent compromettre la sécurité de cet endroit, et je ne peut pas me permettre de...
- Concis. Précis, demanda Dysill.
Kyundo souffla et leva les yeux au plafond. Après tout, il avait fait confiance à Dysill, deux enfants ne plus n'allaient pas changer grand chose.
- Nicolas Gath était mon père adoptif, et mon maître en ce qui concerne toutes les sciences.
Lurian continua dans la lancée de Keldan. Il s'était longtemps demandé si il devait poser cette question délicate.
"Avez-vous vraiment vu mourir Nicolas Gath de vos propres yeux ?"
- Oui.
Dysill continua.
- Ne vous avait-il vraiment jamais parlé de son message ?
- Non. Jamais. Avez-vous déjà été en contact avec lui ? Vous ou votre maître ?
- Pour moi non, pour mon maître, je ne sais pas, dit Keldan.
Il réfléchit un instant et demanda :
- Y'a-t-il quelque chose au delà de la mer ?
Kyundo parut bien plus choqué par cette question que par toutes les autres.
- Oui.
"Quoi ?" demanda Lurian.
- Je ne vous mentirais pas, mais vous le dire pourrait vous mettre en danger. Vous êtes sûrs que ça en vaut la peine ?
Les amis se regardèrent et se mirent d'accord.
- Non... En fait, non, dit Keldan.
Dysill reprit, posant la question fatidique :
- Pensez-vous avoir une solution à nos problèmes ?
Kyundo hésita. Il réfléchit peu à peu aux questions qu'ils avaient posé.
- Si vous êtes prêts à certains sacrifices, oui.
Et puis, il enchaîna directement avec une ultime question.
- Allez-vous parler de cette conversation à qui que ce soit ? demanda-t-il à Dysill.
- Si vous nous le demandez, non, répondit-elle.
- Et vous, allez-vous nous aider ? continua Keldan sans attendre.
- Si vous me le demandez, oui. Dit-il.
Il finit alors son thé et posa sa tasse sur la table. la séance de questions-réponses était terminée.
- Mais comme je vous l'ai dit, cela impliquera de grands sacrifices. Vous apprendrez des choses que vous ne devrez jamais dire à personne. Vous devrez vous endurcir physiquement comme mentalement, et ce pour le reste de votre vie. Seriez-vous prêts à subir un telle formation ?
- En quoi consiste-t-elle ? demanda Dysill.
- Dès l'instant où je vous le dirais, elle aura déjà commencé. Mais malgré toute la souffrance que celle-ci vous apportera, ce que vous en gagnerez vous servira pour toujours, et changera votre vie.
Les trois enfants étaient un peu perplexes quant à ce que Kyundo essayait de leur dire. Tout cela était assez cryptique, mais il avait sans doute ses raisons. Ils se rapprochèrent pour en discuter à voix basse, et Dysill se leva pour demander à Kyundo :
- Est-ce qu'on peut y réfléchir ?
- Ma foi, oui ! Prenez tout votre temps. Vous pouvez utiliser les deux chambres à l'étage, je dormirais au sous-sol.
- Quoi ? Mais...
- Si vous devez rester ici, je ne vais pas vous laisser dormir dans des tentes. Ici, vous serez à l'abri du froid et des créatures qui rôdent dans le coin.
- C'est très gentil à vous, Kyundo... Mais si ça ne vous dérange pas, nous allons en discuter dehors.
- Allez-y, je vais préparer vos chambres.
Dysill et Lurian sortirent alors dès que possible, Keldan prit son temps et se retrouva seul avec Kyundo, en qui il ne faisait pas complètement confiance. Il lui demanda cependant avec beaucoup de courtoisie :
- Il y a une chose que j'ai du mal à comprendre. Pourquoi nous aider ?
Kyundo se força à sourire. Celui-ci n'avait visiblement pas eu de contact humain depuis longtemps et il lui était très difficile d'exprimer certaines émotions de manière visible. Cependant, il était vraiment amusé par la question de Keldan.
- Pourquoi pas ?
Il sortit avec les autres un petit instant et tous trois revinrent avec un regard qui voulait manger le monde.
- C'est d'accord, dit Dysill. On accepte.
- Très bien, dit Kyundo. Nous commencerons demain à la première heure. Pour le moment gardez vos vêtements, mais pour la suite il vaudrait mieux que je vous en fabrique.
- Ce sera physique ? demanda Keldan.
- Physique. Mental. Spirituel. Vous devez vous tenir prêts à vous entraîner sur tous les plans. En fait...
- En fait ? demanda Keldan en voyant qu'il ne trouvait pas de fin à sa phrase.
- Qu'est-ce que je disais, déjà ? Ah oui, en fait, vous allez devoir vous ouvrir à un tout nouveau monde.
Quelques minutes plus tard, alors que le soleil allait bientôt se coucher, il réunit les trois enfants dehors et leur demanda de retirer tout ce qui pouvait être un poids. Pas de sac, pas de sacoche, pas de trop gros manteau.
- Pour commencer, il faudra travailler sur vos prédispositions. Et là, je ne parle pas de ce que vous êtes capables de faire physiquement, mais de votre force d’âme la plus enfouie, de votre Rhôg.
Kyundo fit alors le tour des trois jeunes gens et commença à soulever leurs bras et leurs jambes dans tous les sens. Cela fit presque tomber Keldan, qui pesta.
- C’est fini, oui ?
- Toi, tu es très fort, c’est indéniable, tant du point de vue de l'entraînement que génétiquement. Tu as de bonnes insertions musculaires, tu as un système nerveux très fort et des muscles endurcis. Dysill, tu as des muscles très souples et une bonne détente. Quand à toi, Lurrihan, tes réflexes sont presque surhumains.
Il s'assit alors sur un petit rocher et les observa, tous debouts.
- Mais ça ne représente qu’une infime partie de votre potentiel. Ce que je vais essayer de faire sortir de vous, ce sont vos talents les plus enfouis. Ce dont votre âme est capable, et ce qui va naturellement renforcer votre corps et votre volonté.
- Comment est-ce qu’on réveille ce genre de choses ? demanda Dysill, interloquée. Elle n'était pas sûre de comprendre ce que Kyundo voulait dire.
- Parfois, cela reste endormi pour toute une vie. Parfois, c'est apparent aux autres, mais pas à nous. Parfois, on connaît toutes nos limites instinctivement. Mais dans tous les cas, on a tous en nous ce brin d’âme qui fait que l’on est nous et personne d’autre. Tout le monde peut avoir du courage, par exemple, mais personne n’aura le même courage, pas sous la même forme.
Il prit une pause pour réfléchir, car il venait encore une fois de perdre le fil de ses pensées.
- Ah oui, prenez les militaires, par exemple. Eux, ils vont chercher à supprimer cette individualité au profit d’une unité commune. Alors ce que vont faire leurs supérieurs, c’est de les forcer à marcher au pas, à avoir une condition physique similaire, en bref, à les faire rentrer dans le rang pour qu’ils puissent fonctionner ensemble.
- Et ça, ça supprime leur Rhôg, si j’ai bien compris ? demanda Keldan, tentant de comprendre de quoi Kyundo leur parlait.
- Au contraire ! Tous mis sur un pied d’égalité, c’est là que se créent les plus grandes démarcations. Puisque tous ont les mêmes habitudes et les mêmes capacités, c’est là que l’on remarque ce qui les différencie, ce qui fait leurs forces individuelles. Le problème des soldats, c’est qu’ils ne se servent pas souvent de cet atout. C’est à ça que va servir cet entraînement, vous pousser à adopter une discipline impeccable, une rigueur dans la maîtrise du combat et des arts martiaux et dans la compréhension des sciences. Je vais vous pousser à tous donner le meilleur de vous-même dans le même cadre, pour pouvoir ensuite révéler tout ce que vous avez à donner. C’est compris ?
- Compris ! répondit Dysill, déjà au garde à vous.
- Non... dit Keldan. Moi, je comprends pas trop. En quoi est-ce que ça va nous aider à battre Ensh'Idai ? Je vais pas lui filer des coups de poing, quand même ?
- Bonne question, Keldan. Tu sais pourquoi j'ai besoin de connaître chacun d'entre vous ? Vos forces et faiblesses ? Votre Rhôg ?
- Non ?
- Et tu voudrais le savoir ?
- Ben, oui !
- Tu es sûr ?
- Oui, enfin ! Qu'est-ce que c'est que cette question ?
- Excuse-moi, je te taquine, rien de plus.
Kyundo prit un ton un peu plus grave.
- Parce que quelque chose vient après le Rhôg. N'importe quel idiot peut comprendre qui il est, mais qui peut parvenir à en tirer une réalité physique ? C'est pourtant possible. A partir de conceptions pûrement abstraites de notre esprit, on peut obtenir de la matière, des forces, de nouvelles perspectives. Ce n'est pas simple, bien sûr, et cela demande beaucoup d'acharnement, mais on peut y arriver, surtout lorsqu'on est encore jeune.
- Attendez... demanda Dysill. Vous voulez qu'on apprenne la magie, j'ai bien compris ?
Kyundo s'amusa.
- Non, Dysill. Pas vraiment. La magie impliquerait que son fonctionnement doit rester inconnu, mais ce que je vais vous apprendre est tout le contraire...
Soudainement, tout le monde sentit une légère chaleur émaner de Kyundo, comme si il était un feu de cheminée. Il se leva et quelque chose de brillant sembla circuler dans ses veines à toute vitesse, On aurait juré qu'il s'agissait d'un papillon qui volait autour de lui.
- ...c'est la révélation de ce qui est caché.
Alors, une pression énorme entoura l'homme, et la lumière qui s'était emparée de son sang envahit son système nerveux. On aurait crû qu'une immense toile d'araignée lumineuse se traçait sur tout son corps, avant que celle-ci ne soit relâchée en un instant dans une onde de choc qui projetta les enfants au sol. Le corps entier de Kyundo émettait maintenant une très faible lueur, mais il semblait être en pleine possession d'elle. Ses yeux, devenus légèrement plus jaunes regardaient ses nouveaux élèves.
- Voici le processus que l'on appelle "le Souffle".
A nouveau, dans les montagnes, les coups pleuvent. L'entraînement est rude et Nicolas Gath ne ménage pas son apprenti. Kyundo donne le meilleur de lui-même et ne donne plus aucune attention au monde extérieur. Il est maintenant presque aussi grand que son adversaire et cette allonge supplémentaire donne du fil à retordre à son enseignant. Tenir à distance, entrer dans la zone de percussion de son adversaire, agir, sortir de la zone, tenir à distance, Kyundo répète des enchaînements extrêmements simples, mais ceux-ci sont encrés en lui.
- Plus souple, mon fils. Sinon, c'est très bien.
Kyundo marcha lentement pour reprendre son souffle autour de la petite arène qu'ils s'étaient tracés dans le sable, quelques centaines de mètres en bas de la maisonnette. Nicolas retirait ses gants de cuir pour les mettre dans une petite sacoche. Il avait beau avoir l'air d'un vieil homme, son énergie n'avait visiblement pas de limite. Il se tenait droit et avait de la poigne. Son esprit était lucide, vif et il prêtait attention à chaque détail. Il mit la sacoche sur son épaule et commença à remonter près de la maisonnette. Kyundo le rejoignit en se dépéchant. Arrivé à son niveau, il posa ses gants en cuir dans le sac de Gath et le saisit pour le lui porter.
- Merci, Kyundo. C'est gentil.
- Où est-ce qu'on va, maintenant ? demanda le jeune garçon, les bras pleins.
- On va "les" voir. Qu'est-ce que tu en dis ?
Un large sourire illumina le visage du petit disciple qui allait bientôt avoir douze ans, ce qui ravit le vieil homme.
- Oh, oui ! Génial !
Quelques minutes plus tard, les deux hermites se trouvaient au sommet de l'un des sapins qui surplombaient les rochers de Laydear. Ils y voyaient la petite ville s'affairer, acheter, vendre, cultiver, pêcher. C'était un spectacle qu'adorait Kyundo : voir de vrais gens mener une vie simple, difficile mais belle. Il ignorait les noms des habitants mais avait surnommé tous ceux qu'il voyait passer régulièrement. Nicolas prit un petit sachet dans sa sacoche et le tendit à Kyundo, c'étaient de petits morceaux de viande séchée et tous les deux le partagèrent en regardant le soleil émerger de la mer.
- Tiens, il est important de manger quelques acides aminés pour récupérer de ton entraînement. C'est ce qui va réparer ton corps et le rendre opérationnel pour demain.
- Compris ! dit-il en savourant la viande salée.
Tous deux finirent le sachet en peu de temps, tant ils semblaient avoir faim. Bien sûr, c'était surtout Kyundo qui s'était régalé. Gath rangea le sachet.
- Pourquoi est-ce qu'on n'y est jamais allés ? J'aimerais bien, moi, demanda Kyundo.
- Je ne te l'ai jamais interdit.
- Oui. Mais moi je fais comme vous. Et vous, vous n'y allez pas. Pourquoi ?
Gath regarda un instant l'horizon et répondit au jeune garçon.
- Parce que c'est le choix que j'ai fait, Kyundo. Rester à l'écart du monde n'est pas un choix plus honorable que de demeurer en son sein, et ça ne l'est pas moins.
- Et pourtant, vous dites que c'est avec les autres que l'on grandit.
- C'est vrai, Kyundo. C'est vrai.
Il désigna alors une jeune fille assez ronchon assise sur un tronc d'arbre.
- Elle, c'est Oumi, aujourd'hui c'est son anniversaire et elle est déçue que tout le monde l'ait oublié.
- Comment vous le savez, ça ?
Nicolas Gath toucha deux fois son nez en regardant Kyundo et continua son monologue.
- Ce n'est pas un très gros problème, et je pense qu'elle s'en remettra vite... Mais tu sais, certaines personnes ont du mal à cacher leur mauvaise humeur, et une seule fille grincheuse peut vite faire tourner la journée au vinaigre.
La jeune fille se leva et rentra un instant chez elle pour se préparer. Aujourd'hui, elle devait aller porter le linge à la rivière avec sa mère, et ça n'avait pas l'air de l'enchanter. Mais arrivée dans sa chambre, à l'étage, un sourire sembla s'afficher sur son visage, Kyundo et Gath la voyaient toujours par sa fenêtre.
- Ah, on dirait qu'Oumi a reçu quelque chose pour son anniversaire. Je crois me souvenir qu'elle adorait collectionner les coquillages quand elle était petite.
Kyundo vit alors qu'elle tenait une petite coquille enroulée sur elle-même dans ses mains.
- C'est celle d'un cérithe, et je suis presque sûr qu'elle ne l'avait pas.
La jeune fille essuya la larme qui coulait de ses yeux et rangea précieusement l'objet dans un tiroir au côté d'autres coquillages. Elle partit ensuite joyeusement pour aider sa mère.
- C'est vous qui avez fait ça ? demanda Kyundo.
- Qui sait ?
Les deux hommes continuèrent à regarder en silence l'activité des habitants de la ville.
- Personne ne saura jamais que c'est vous qui faites ce genre de choses. Personne ne sait même qui vous êtes.
- Et c'est pour ça que j'ai fait ce choix. Mais toi, tu feras les tiens. Tu descendras à la ville si tu le veux, et tu resteras ici si tu le veux. Peut-être que tu feras un autre choix, un choix que je n'aurais pas vu venir.
- Il n'y a pas grand chose que vous ne voyez pas venir, rit Kyundo.
- Non, en effet, dit Gath en nettoyant ses lunettes.
- J'ai toujours l'impression que je suis incapable de vous suivre, Nicolas. En fait, je suis souvent largué, je crois que je ne comprends pas toujours ce que vous cherchez à m'apprendre.
- Tu ne devrais pas. Je suis très fier de toi Kyundo, vraiment.
Gath remit ses lunettes, alors que Kyundo se rapprochait de son père adoptif, sur l'arbre.
- Tu as une grande curiosité, tu me poses toujours des questions, et au lieu de remettre la faute sur autrui, tu la prends toujours sur toi. Tu es exigent avec toi-même et tu ne fais jamais preuve de paresse.
Gath repensa aux années de bonheur que lui avait donné son jeune disciple, depuis le jour où il l'avait trouvé sur les rives de Laydear. Celui-ci s'était allongé et sa tête reposait sur ses genoux.
- Mais par dessus-tout, Kyundo. Tu sais servir. Tu as toujours compris à quoi servait l'humilité.
Il tapota la petite tête blonde.
- Le propre du serviteur, c'est qu'il travaille. Travailler, c'est apprendre, apprendre, c'est comprendre, et comprendre, c'est maîtriser. Retiens bien ce que je vais te dire, Kyundo : personne n'est un meilleur maître qu'un serviteur. Et toi, tu seras le plus grand de tous.
Kyundo s'était endormi, et Gath, dans toute son omniscience, ne l'avait même pas remarqué.
- Je pense qu'on verra ça demain.
Il prit alors une touffe de cheveux de son élève dans la main.
- D'ailleurs, il faudra couper ça...
- ... ou les attacher. Si vous voulez combattre efficacement, vous ne pouvez pas vous permettre d'avoir les cheveux qui tombent dans vos yeux, finit Kyundo, 20 ans plus tard.
Dysill n'avait pas trop à se plaindre, elle se coupait régulièrement les cheveux et ne les laissait jamais vraiment être plus longs que ceux d'un garçon. Mais Keldan et Lurian voyageaient depuis longtemps et leurs tignasses allaient vite devenir un problème si ils transpiraient un peu trop. Lurian qui travaillait le cuir et le tissu leur fabriqua à chacun un bandeau pour retenir leurs cheveux.
Le matin s'était levé après une nuit à dormir dans la maison de Kyundo. Enfin, "dormir" était un grand mot. Disons plutôt que le contrecoup de leurs émotions du jour les avait poussé au sommeil. Leur nouveau maître se tenait devant eux, prêt à leur enseigner ses secrets.
- Le Souffle ne s'acquière pas, il s'éveille. Tout le monde est a priori en possession des organes nécessaires pour le faire fonctionner. Ce sont votre coeur, vos muscles, et le plus important, votre cortex spinal, situé à la base de votre système nerveux.
Une des habitudes de Kyundo était de faire les cent pas pour ne pas oublier à quoi il était entrain de penser. Lorsqu'il parlait à ses trois élèves, il tournait tellement autour d'eux que Keldan crut qu'il allait vomir.
- Mais une fois réveillée, elle ne se contrôle pas si facilement. En fait, le verbe "contrôler" n'est pas très adéquat. Je dirais plutôt que l'on apprivoise le souffle. On le dompte.
Il marqua tout de même une pause pour se rappeler du sujet dont il parlait. En fait, il n'était pas difficile pour lui de se souvenir des informations qu'il cherchait à transmettre, mais plutôt de savoir si il les avait déjà données.
- Dans l'état actuel des choses, vous pourriez peut-être réveiller votre cortex spinal pour "allumer" le Souffle. Mais il tenterait de vous mettre à genoux, de s'emparer de vous. Vous pourriez ne pas supporter cette sensation et devenir fous. Tout ça parce que votre corps et votre esprit ne sont pas prêts à le recevoir. Aussi, je ne vous livrerais ses secrets qu'après un lourd entraînement.
- Wow, wow, attendez... Vous êtes entrain de nous dire que le Souffle, là... C'est vivant ?
- Bien sûr qu'il est vivant, tu es vivant, ton corps est vivant, et le Souffle passe à travers lui pour le vivifier encore plus. C'est l'essence même du vivant.
- Dégueu... dit Dysill.
- Pour te répondre plus sérieusement, non. Le Souffle n'est pas vivant au sens où tu l'entends. Il ne l'est qu'au même titre que ton sang ou tes sucs gastriques. Il n'a pas de conscience propre.
- J'ai eu peur, j'ai cru que vous vouliez qu'on soit possédés par des esprits, ou quelque chose comme ça.
- Tu lis trop de journaux de science-fiction... dit Dysill.
- Mais, dit Kyundo, faire l'expérience du Souffle n'est pas toujours agréable. Savez-vous pourquoi on l'appelle le Souffle, d'ailleurs ? Parce qu'à partir de l'instant où il coule en nous, on a l'impression de sentir une seconde respiration, quelque part au fond de nous. On s'y habitue très vite, mais c'est une expérience assez spéciale.
- Ca fait rêver, dis donc... dit Keldan.
- Quoi qu'il en soit, ce n'est qu'avec le Souffle que vous battrez de puissants ennemis. De ce que tu m'as dit d'Ensh'Idai, il le manipule certainement. Et pour avoir battu une si grande armée, il doit avoir un Qwer très puissant.
- Un Qwer ? demanda Dysill.
- Le Souffle est un terme générique pour parler de l'énergie qui circule lorsqu'on ouvre son cortex spinal. Mais en vérité, chaque individu relâche une forme différente de Souffle. Chacune possède ses avantages et ses inconvénients, ses forces et ses faiblesses. Elles dépendent du Rhôg de chacun. Le Qwer, c'est la forme que prend notre Souffle.
- Rhög, Qwer, Souffle... C'est pas super évident, dit Keldan.
- Mon Qwer par exemple, dit-il en relâchant son Souffle d'un seul coup, provocant encore une petite onde de choc, a attrait à tout ce qui touche à la lévitation.
Kyundo décolla du sol sans avoir d'ailes et vint s'asseoir sur le toit de la maison.
- Wooooow ! Ca c'est extra-super-chouette ! dit Dysill, émerveillée.
Keldan, pourtant impressionné par la performance était quand même un peu dubitatif.
- Je vois l'idée, mais en quoi est-ce que ça, ça peut m'aider contre une panthère, un buffle ou tout simplement un type costaud ? A part pour prendre la fuite, je veux dire.
Kyundo souleva à distance un tout petit caillou qui ne devait pas faire plus de quelques millimètres de diamètre. Il semblait être capable d'attirer des objets à lui en ouvrant la main et de les expulser en la fermant. C'est d'ailleurs ce qu'il fit avec le caillou, lentement, comme on jette une balle en l'air lorsque l'on s'ennuie.
- Le Souffle est exactement comme tout le reste de ton corps. Il n'est qu'un soutien à ton esprit, lui-même soutien à ton âme.
Kyundo saisit alors le petit caillou fermement entre ses doigts mais continua à faire pression sur lui, comme s'il l'expulsait.
- Le Souffle qui est en toi peut t'accorder d'immenses facultés, te faire aborder le monde d'une nouvelle manière, faire de toi un homme craint ou aimé de tous.
La pression s'accumulait sur le petit caillou.
- Ou alors, il peut prendre la forme de quelque chose qui paraît inutile, de premier abord. Mais comme pour toutes les cartes que tu as à jouer dans la vie, il suffit d'être très malin...
Kyundo relâcha d'un seul coup le caillou sur lequel une pression monstrueuse s'était accumulée et celui-ci partit encore plus vite qu'une balle de fusil. Il vint transpercer un immense arbre qui se trouvait à l'entrée de la forêt, laissant un trou de 10 centimètres de diamètre à l'intérieur.
- ...et tout peut devenir très, très fort.
Il descendit du toit de la maison et se tint près de l'arbre qu'il venait de bousiller. Il lui donna une tape amicale, comme pour lui dire "Désolé, vieux copain. C'était pour la démonstration". Tous s'approchèrent de lui à toute vitesse.
- Du coup ? Cet entraînement ? Pourquoi est-ce qu'on a pas encore commencé ? demanda Keldan.
Kyundo était heureux que son disciple trouve enfin de l'intérêt à sa formation. Sans volonté, il ne serait pas allé très loin.
- Force, Endurance, Vitesse, Souplesse, Agilité, Vivacité, Réflexes, Précision, Volonté... voilà ce sur quoi vous serez évalués. Puisque c'est le premier jour, je vais voir ce que vous pouvez faire. Commençons par une petite course d'endurance. Vous pouvez partir de l'arbre troué et courir jusqu'à la maison. Il doit y avoir cent mètres, alors cinq cent aller-retours suffiront. Prenez votre temps.
Dysill, Keldan et Lurian s'éxecutèrent. Tous semblaient à l'aise sur les premiers kilomètres, mais Keldan, s'il ne respirait pas plus fort que les autres, commença à ralentir dès les 300 aller-retours. La condition physique de Dysill et Lurian semblait excellente. A la fin de la session, Kyundo, assis sur le toit de sa maisonnette notait quelque chose sur son carnet. Il portait de petites lunettes qui l'aidaient à lire ce qu'il écrivait.
- Oui, d'accord, je vois. Maintenant, force, dit-il en désignant la petite arène de sable située en contrebas de la maison. Là bas se trouvaient déjà des sacs de tailles diverses et des barres de fer.
Le petit groupe s'y déplaça, Kyundo enleva ses lunettes pour leur expliquer ce qu'ils devraient faire.
- Ces sacs sont remplis avec des matériaux plus ou moins lourds. Du sable, du tissu, du fer. Le but de cet exercice est de connaître la force maximale de vos muscles. Vous ferez la série d'exercices que je vous donnerais et je pourrais estimer la force générale de votre corps.
Kyundo les invita à échauffer chacun de leurs membres. Et puis, comme prévu, il leur montra cinq exercices censés évaluer leur force. Pour Keldan, ce n'était pas très difficile. Même s'il n'avait pas pû s'entraîner pendant un moment et qu'il avait perdu du poids, il avait un long passé de Porteur et connaissait déjà les exercices proposés par Kyundo. Il afficha les énormes scores de 440 livres de puissance dans les jambes, 350 livres dans la poitrine et les bras, 360 livres dans le dos, 220 livres dans les épaules et 530 livres pour tout le corps.
Ce fut ensuite le tour de Dysill, qui, si elle était agile ne disposait pas d'une très grande force. 110 livres de puissance dans les jambes, 80 dans la poitrine et les bras 100 dans le dos, 60 dans les épaules et 130 dans tout le corps.
Et enfin, Lurian afficha les étonnants scores de 240, 175, 180, 100 et 285 livres. Comme quoi, ce petit gars avait tout de même un peu de force.
Et l'entraînement dura ainsi toute la journée : Kyundo prenait encore des mesures, imaginait ce qui pourrait être visé pendant l'entraînement et ce qui ne le pourrait pas. Test de vitesse, test de souplesse, de mobilité, de respiration, de réflexes, de lancer de précision... A la fin de la journée, les enfants étaient vannés. Kyundo reprit ses fidèles lunettes pour leur faire un topo.
- Bon, ce n'est pas trop mal... Vous partez tous d'une bonne base, visiblement... Keldan, tu es en effet très fort, et malgré ça tu es quand même capable d'endurance musculaire... Seulement, j'ai peur que de courir ne te traumatise trop les articulations. Je veillerais à ça. Lurian, tu as une excellente condition physique. Je pense que tu subiras un entraînement légèrement plus poussé que les autres. Quant à toi, Dysill... Ce n'est pas encore ça.
Dysill était à la fois déçue et gênée, elle avait fait de son mieux pour afficher les meilleures performances, mais elle ne valait pas grand chose face à ses deux amis. D'accord, c'était une fille (pas très grande ni très épaisse, de surcroît), mais elle n'avait aucune envie de ne plus servir à rien lorsqu'ils auraient besoin d'elle.
- D'accord, dit-elle en retenant une larme.
- Maintenant, je sais comment calibrer votre entraînement. Ca me prendra un peu de temps et quelques mesures, mais ce devrait être prêt demain.
Lurian leva la main.
- Oui ? répondit le maître.
"Je croyais qu'on devait tous suivre le même programme, à égalité."
- Bonne remarque, Lurian. Sur la forme, oui, vous ferez le même genre de choses. Mais pas avec les mêmes charges, les mêmes durées, les mêmes équipements. Je dois m'assurer que vous puissiez tous progresser sans vous ennuyer ou être écrasés par le travail. Est-ce que vous savez tous lire l'alphabet courant ?
- Oui, répondirent Keldan et Dysill à l'unisson.
Lurian fit un "non" de la tête. Celui-ci ne pouvait lire que le Khenasien ancien. Keldan l'expliqua à Kyundo.
- Alors vous aurez tous les trois votre programme demain à la première heure. Ce ne devrait pas être difficile de le traduire en ancien Khenasien, si j'ai toujours ma bible de traduction.
- Vous ne nous supervisez pas ? demanda Dysill.
- Pas demain, non. J'aurais du travail. Mais je laisserais toutes les instructions nécessaires pour que vous compreniez quoi faire. Des questions ?
Le silence se fit, alors que le soleil se couchait sur leur premier jour d'entraînement.
- Moi j'en ai une, dit Keldan. Mais ça n'a rien à voir.
- Si tu y penses maintenant, c'est que ça à sans doute un rapport.
- Vous nous avez bien dit que le Souffle changeait selon la personne, c'est ça ? Que ça n'avait pas toujours l'air d'être un truc qui brille, comme vous.
- Oui.
- Parce que... Est-ce que vous croyez que c'est possible de ressembler à un genre de serpent ? Avec des écailles, et tout ?
Dysill et Lurian eurent soudainement froid dans le dos en comprenant à quoi Keldan faisait référence.
- Ce n'est pas impossible. Pourquoi, tu en as déjà rencontré ?
- Ouais... Et quand j'y pense, on a déjà vu un paquet de trucs bizarres pendant le voyage...
- ...et même avant, dit Dysill en repensant au Coeur de Caldis et à Sica.
- C'est comme lorsque l'on prend conscience de la vie et de la mort, hein ? Au début, on ne veut pas y croire, mais quand on y réfléchit, on se rend compte que ça explique bien des choses. Où est passé Moustache le Chat ? Pourquoi Tatie ne vient plus nous rendre visite ? En fait, il est même probable que vous ayez connu le Souffle toute votre vie sans jamais le remarquer. Il y a des choses en ce monde qui savent passer inaperçues.
- Mais pourquoi ? demanda Dysill. Pourquoi est-ce personne n'est au courant ?
Kyundo parut gêné par cette question, il en avait déjà beaucoup dit.
- Un ordre de fer est tombé sur ce monde.
Il se racla la gorge et poursuivit ses explications.
- En fait, il est possible que tu sois tombé sur quelqu'un qui manipule un Qwer animique. Ils peuvent donner un aspect vaguement bestial à ceux en qui ils coulent mais ce n'est pas de là que viennent leurs principales facultés. En fait, ils puisent leur force dans un trait de caractère très puissant, dans une force d'âme qui leur est propre. D'où le nom d'"animique".
- Quel genre de trait de caractère ? demanda Dysill.
- Et bien, ça dépend. Ceux qui prennent un aspect plutôt canin ont tendance à être sages. D'autres sont plutôt honnêtes, et ressemblent à des boeufs. Ceux qui ressemblent à des créatures sous-marines peuvent être justes... ou rebelles, ça dépend.
- C'est pas tout à fait l'image qu'on se fait de ces animaux, dit Dysill.
- Non, en effet. Après tout, on ne parle pas d'animaux mais d'êtres humains qui prennent, pour une raison ou pour une autre, certains de leurs traits.
- Et donc Moord, ce type qu'on connaît... Ce serait quoi, lui ? La ruse ? La trahison ? demanda Keldan.
- Non, non, tu ne suis pas du tout... Un vrai serpent, peut-être, mais je doute que les "qualités" que tu viens de citer puissent animer quelqu'un au point de lui faire dépasser les limites de l'humain.
Kyundo réfléchit une seconde, levant les yeux au ciel.
- Pour ce qui est de ceux qui ont un aspect reptilien, ça dépend, encore une fois.... Mais je dirais que ce qui définit un grand nombre d'entre eux c'est...
Il regarda Keldan dans les yeux.
-...la loyauté.
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