08 - Manoir

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La grille grinça dans un sinistre bruit. Le vent secoua les arbres et en les voyant arriver, un groupe de corbeaux s’envola en croissant bruyamment. Le petit groupe s’avança doucement, observant avec attention le chemin bordé de ronce qui les menait jusqu’à l’entrée de la sinistre demeure.

—Rappelez-moi qui est l’idiot qui a voulu venir ici, chuchota l’un d’entre eux d’une voix légèrement étranglée.

Le manoir aux pierres autrefois immaculées se dressait désormais devant eux. Les marches menant à la porte d’entrée étaient recouvertes d’un tapis de poussière et le lierre avait envahit la façade, cassant certaines des fenêtres pour venir s’immiscer à l’intérieur même de la bâtisse.

—Parce qu’il est inhabité depuis que le comte Van der Naert a disparu.

—Disparu ?

—Oui, on raconte qu’il vivait seul avec sa femme et ses chiens dans cet immense manoir. Il aurait passé un pacte avec le Diable pour se débarrasser de ses ennemis et pour l’honorer, on dit qu’il a tué sa femme puis a sombré dans la folie. Pendant des années, on pouvait le voir déambuler dans les jardins ou assis derrière la grille à regarder les passants. Et un jour, il a disparu. On ne sait pas quand, on ne sait pas où ni pourquoi ou comment. Il s’est simplement évaporé. Comme s’il n’avait jamais existé, raconta une jeune femme du nom de Mia en chuchotant.

—C’est juste une histoire qu’on raconte aux enfants pour leur faire peur et pas qu’ils s’approchent du manoir, marmonna un autre tout en poussant les lourdes portes d’entrée en chêne, on est sûrement pas les premiers à venir. C’est même pas fermé.

—Ou alors, continua-t-elle, c’est un piège. Après tout, vous saviez que le compte était un descendant d’un grand seigneur guerrier. Il aurait fait couler tellement de sang qu’une rivière a prit sa source à l’endroit où il se tenait quand la victoire a été déclarée, expliqua-t-elle en montrant du doigt la direction dans laquelle la rivière du village prenait sa source.

Malgré lui, le groupe fut secoué par un frisson, pendant que Mia poursuivait.

—Mais comme Cédric l’a dit, ce n’est qu’une légende. Venez, j’ai envie de voir où est la crypte.

—La ? La crypte ? Comment ça ?

Mia se retourna pour cacher son sourire amusé. Elle expliqua ensuite à son groupe d’amis que la famille Van der Naert avait jadis été bannie du cimetière du village et leur caveau scellé à tout jamais. Le comte de l’époque avait alors construit une crypte dans laquelle ses descendants et lui reposeraient, en-dessous même des pierres du manoir. Quand le prêtre l’avait appris, il était entré dans une rage folle et avait voulu faire déterrer les corps. Le comte avait alors répliqué qu’il en était libre, mais que quiconque n’étant pas du sang des Van der Naert et qui osait pénétrer dans leur domaine, se verrai effroyablement puni. La légende s’arrêtait là. L’homme d’église avait disparu et on n’avait jamais su ce qui lui était arrivé. Puis, sans un mot de plus elle entra et disparut à l’intérieur du manoir, avalée par les ombres du sombre secret qu’il renfermait.

Le groupe d’amis ne réfléchit alors pas plus et se précipita à la suite de leur amie. Après quelque minutes de marches, ils traversèrent un long couloir qui était autrefois bordée par de grandes et longues fenêtres. Il ne restait désormais plus que des débris de verres qui jonchaient le tapis rouge, et quelques feuilles de lierre qui grimpaient le long des murs, allant jusqu’à posséder et transpercer une toile représentant le septième comte de Neart. Ils continuèrent leur chemin jusqu’une grande porte en bois, finement sculptée. Cédric, qui menait ses amis depuis le début, passa un doigt sur le chêne abîmé par le temps, appréciant cependant la qualité du travail, ignorant la trace de poussière qui habillait désormais son pull.

Ils entrèrent ensuite dans une grande pièce sombre. De lourds rideaux de velours vert venaient couvrir les fenêtres. Au centre de la pièce trônait un bureau en marbre blanc, recouvert de différents papiers et ouvrages tandis que les murs étaient tous recouverts d’immenses étagères remplies de divers livres, manuscrits et ouvrages en tous genre.

Curieux, Cédric se dirigea jusqu’au bureau. Il examina les feuilles volantes. Certaines étaient des comptes, d’autres semblaient être écrites dans une langue étrangères et quelques-unes couvertes d’étranges dessins. Mais alors qu’il allait l’étudier plus en profondeur, un hoquet de surprise attira son attention. C’était un de ses amis qui, penché sur un tapis, semblait ramasser quelque chose. Quand il se releva, quelque chose brillait au creux de sa main. Le groupe retint sa respiration en reconnaissant la gourmette de leur amie.

Le silence et la peur avaient pris possession de leur corps. Mia était celle qui s’amusait le plus des légendes et croyances locales pourtant celle-ci semblait être réelle.

—Je savais que c’était une mauvaise idée de venir ici ! C’est pas pour rien qu’il est interdit d’entrer dans ce manoir ! Il est maudit ! Et Mia a disparu ! On ne la…
—Bouh !

Ils hurlèrent.

Et Mia se tenait devant eux, hilare, fière de sa plaisanterie et de la frayeur qu’elle venait de faire à ses amis.

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