Cette nuit du 14 juillet...
Mickaël
12 janvier
Elle était ma Vénus de Milo, celle que j'aurais tant voulu présenter à ma défunte mère. Elle se nommait Sandrine. Cette altesse de mon cœur s'élevait au-delà de ce sinistre monde, si splendide comme une nuit d'aurores boréales illuminant mon existence. Elle pensait pouvoir changer le monde par la force de ses convictions, elle se battait pour donner un toit aux sans-abris, et ne manquait pas chaque soir de faire la lecture aux personnes âgées. Cette amazone des temps modernes luttait de toutes ses forces contre les violences domestiques.
Derrière ses magnifiques yeux transfigurant l'obscurité en lumière, il se cachait une vie faite de souffrance et de tristesse. Tous les jours, elle embrassait la photo de son fils, parti tellement tôt sous les coups de son propre père. Avant que ce tragique événement se produise, ce professeur de philosophie, respecté, violentait sa douce épouse réduite à la simple fonction de ménagère. Elle me souriait chaque matin, comme si j'étais la personne la plus importante du monde, mais je ne demeurais que le voisin l'observant à travers la fenêtre. Celui qui l'aimait, qui aurait tout fait pour la combler et la rendre heureuse. J'arrivais à séduire n'importe quelle femme, seulement devant elle, je me retrouvais être une chose craintive perdue dans le cruel océan de ses yeux bleus d'azur. Elle ne m'avait jamais vraiment parlé, mais nous étions des âmes sœurs, je le savais.
Cette nuit du 12 juillet, elle marchait devant moi avec sa robe moulante blanche, qui dessinait sa silhouette d'ange et ses interminables jambes. Elle s'avançait d'un pas sûr prête à passer une belle soirée. Mon imagination m'offrait un aperçu de ce que pourrait être ma vie en sa compagnie. Je l'attendrais vêtu d'un costume noir, et la verrais dans sa robe blanche venir me rejoindre à l'hôtel. Je me suis soudain rendu compte, que mes pensées m'avait amené à me trouver juste devant elle. Je n'ai pu que lui dire « je t'aime et je te veux », ces mots ont provoqué un cataclysme de peur au cœur du calme de l'océan de ses yeux. Elle m'a violemment repoussé, suite à cette déclaration, dont elle ne partageait pas les sentiments. Je ne contrôlais plus mes gestes, je hurlais à ce corps de s'arrêter, mais j'ai encore ressenti cette impuissance à l'intérieur de moi. Mes mains l'ont poussé au sol, puis elles ont pris le premier objet qui leur sont tombés sous la main, et elles l'ont frappé une fois, puis encore une nouvelle fois... J'ai vu une dernière fois ses beaux yeux se fermer pour l'éternité. Je l'aime tellement...
Ce trouble qui s'est emparé ce jour-là de mon esprit, en réalité chaque jour, je le subis. Cela fait bien longtemps temps que mon cerveau est rongé par une altération, qui prend la forme d'une autre personnalité. J'ai essayé de l'ignorer, et même d'oublier jusqu'à l'existence d'un passé qui l'avait sûrement créé. Cette soirée a eu raison de tous mes efforts, je me demande pour quelle raison je lutte encore, alors que je lui appartiens irrémédiablement. Dorénavant, j'ai perdu la dernière personne qui m'offrait un minimum de bonheur sur cette terre, Sandrine.
L'enquêteur Jean Michel Lapsir ouvrit ensuite une enquête, concernant le meurtre de Sandrine. Il ne trouva aucune preuve ni piste qui lui aurait permis de me suspecter. De toute façon, j'avais soigneusement nettoyé la scène de crime. Le maire a exigé une enquête très rapide, afin de ne pas handicaper sa réélection, vue l'ampleur que prenait l'affaire. Il a aussi pris en compte le fait que ma famille représentait un investisseur décisif de sa campagne. Orienté par différents supérieurs hiérarchiques, le médecin légiste a ainsi établi le suicide de ma délicate fleur, Sandrine. Cela fait quelques mois que l'enquête a été classée de cette manière. Je me remémore tous ces événements, car je viens de découvrir avec stupeur sa sœur, une femme avide de vérités. Elle se prénomme : Célia. Elle paraît être une femme stricte, sévère et petite dans son sombre tailleur. Elle ne m'apparaît pas très belle, seule sa carrière réussie de détective privée lui assure une place dans les plus hautes sphères de la société. Elle me pose de nombreuses questions sur Sandrine, mon caractère flegmatique l'empêche de pouvoir lire au plus profond de mon âme. Je rêve de Sandrine tous les soirs, c'est comme si elle possédait une emprise sur moi. Ce sang qui se répandait partout sur son visage terrifié, coulait aussi sur mes mains, ces mains qui ont causé la mort de celle que j'aime. Cela a réveillé une effusion de souvenirs absolument incompréhensibles, je ne comprends rien de ce que cela symbolise. Malgré tout, je ne laisserai pas Célia briser ma vie, et ma famille ne lui permettra pas de faire jaillir la vérité même si je le souhaitais. Mes horribles parentés détesteraient que notre nom soit entaché par une quelconque affaire, qui porterait préjudice à notre réputation respectable. Je me débarrasserai donc le plus vite possible de cet individu, en me passant le plus possible de leur assistance. Elle ne manquera à personne de toute manière.
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