Mickaël

Le matin du 20 janvier

Madame ? Qui êtes-vous ? L'obscurité m'entoure, je ne distingue presque rien, seulement l'image floue d'une femme qui s'avance vers ma position. Je lui ordonne de faire connaître son identité, elle s'approche de plus en plus de ma personne. Je n'arrive à apercevoir qu'une robe blanche surplombant des... interminables jambes. Les battements de mon cœur s'accélèrent, je n'arrive plus à absorber et rejeter l'air de mon corps. Soudain, un homme se glisse derrière sa chevelure blonde, elle se retourne vers lui et repousse ses avances déconcertantes. Il ne semble pas décider à la laisser tranquille, il attrape une pierre et la frappe ! Pourquoi cet homme ne la laisse-t-il pas en paix ? Ses cris de douleur ne se font bientôt plus entendre, alors que son agonie touche à sa fin, et qu'elle passe de vie à trépas. J'essaye de toutes mes forces de tenter de la secourir, mais mes jambes ne m'obéissent pas et j'assiste impuissant à ce macabre spectacle.

Cette scène me paraît curieusement si familière, tout comme cet homme. Lorsque je découvre le visage du meurtrier devant moi, je comprends dès lors qu'il n'est qu'une représentation du pire aspect de mon être. Comment ai-je pu agir de la sorte ? Cet homme n'est pas celui que je veux être, j'ai tué Sandrine sans être conscient de mes actes. Le vrai meurtrier est cette personnalité qui obsède mon esprit, et que je souhaiterai tellement faire disparaître. Mon libre arbitre n'existe pas, je suis contraint de lui obéir à cause de réalités qui me dépassent. Ma psycologue d'enfance aurait identifié ce phénomène comme étant mon insconcient psychique, qui surpasse de loin ma raison et le pouvoir de ma conscience sur mes décisions. Tandis qu'une partie de mon insconcient ne désire que protéger Célia et en finir avec ma violence, l'autre côté réprime mes envies et libère un monstre, sans que je ne puisse connaître la causalité. Elle aurait certainement souligné ma manière de vulgariser la pensée freudienne, comme n'importe quelle personne ayant un minimum de connaissances sur le sujet d'ailleurs. Ce n'est pas en me réfugiant dans une bancale réflexion psycologique que cet autre moi va s'évaporer de mes pensées.

Les mètres qui me séparent de lui, je les vois diminuer petit à petit, il sera incessamment sous peu à mes côtés. Je me mets de dos, n'ayant pas le courage de regarder en face, celui en qui je me suis transformé lorsque la nuit est tombé ce 12 janvier. Je sens sa main saisir mon épaule et sa bouche se coller à mon oreille, il me souffle de me débarrasser de Célia. Il ne me la prendra pas, cette fois-ci je l'empêcherai d'aller au bout de ses desseins. Jamais, il ne me l'arrachera, ma vie ne lui appartient pas. Je ressens des vibrations dans tout mon corps, que ce passe-t-il maintenant ?

Je me réveille enfin sur un lit d'hôpital. Une infirmière vient de m'enlever de mon sommeil particulièrement agité et m'adresse un regard inquiet. Elle m'informe calmement de la situation dans laquelle je me trouve. Cette femme dans la fleur de l'âge remet ses lunettes rondes imprimées léopard en place, sûrement afin de donner un air sérieux à ces paroles. Elle mentionne ma chance d'avoir une femme comme Célia, elle a passé ses dernières journées à attendre mon réveil. Elle m'indique aussi qu'une certaine Elia lui a parfois rendu visite.

L'infirmière procède ensuite à un rapide contrôle de santé, afin de constater si tout va bien. Avant de répondre à l'appel pressant d'un médecin, elle m'informe que je me porte comme un charme et que je sortirai sûrement bientôt après avoir passé quelques examens. Je sors délicatement Célia de sa sieste, elle me saute immédiatement dans les bras. Malgré la légère douleur que je ressens, je garde le silence afin de profiter de ce moment. Nos cœurs battent à l'unisson, et je l'enlace tendrement.