On l'a tous déjà vue, cette personne. Un coup ci, un coup ça. Peut-être qu'on a tous cru un jour qu'elle cachait une peau de caméléon sous ses pulls, vestes et autres t-shirts, ou que dans ses bouteilles, il y avait une formule capable de lui faire changer d'apparence. Homme, femme, autre, c'est un être qui déambule dans notre monde, c'est un être qui veut s'accrocher à nous et aspirer tout ce que l'on a, tout ce que l'on est. Au départ sympathique, cet être semble se gorger de notre essence, pour nous ressembler, pour qu'on l'apprécie davantage peut-être. Il copie nos gestes, nos mots, puis copie ensuite notre physique, nos goûts... Quel est son but ? Je ne saurais le dire. Mais cet être-éponge ne peut exister que par les autres, et lorsqu'il se gorge d'une existence, il semble perdre son intérêt, alors il aspire quelqu'un d'autre. Il est volage, cet être. Il est volage, et malgré son caractère très spongieux, il fait terriblement mal. Surtout si on lui résiste, il essaye d'aspirer encore plus fort, il doit finir le travail. Puis il est fourbe ; il peut se montrer sympathique, esseulé, torturé, malheureux, agréable, gentil, doux... Il sait arborer les visages les plus beaux, pour se greffer à quelqu'un, et prendre le sien, de visage. Et à la fin, quand il est bien accroché à vous, que vous le tenez pour un être à part entière, sans même que vous le sachiez, il vous a aspiré tout entier, et il s'arrache en laissant une marque fantôme. Parfois, il se décroche avant, presque sans douleur, parce qu'on l'a percé à jour, parce qu'il a fait une erreur, alors on le repousse et on le voit errer, et éponger quelqu'un, encore. Cet être n'a pas de forme, ni de définition, c'est une éponge, et elle prend l'apparence de quelqu'un, puis elle erre. Une coquille banale dans ce monde d'apparences. Cependant, elle, elle est vide, et elle n'attend qu'un geste, une attention qu'elle va voir comme une invitation, pour se greffer à nous. L'être-éponge n'est personne, et pourtant, peut devenir tout le monde.