XII. La montre aux mille aiguilles

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La montre aux mille aiguilles

Le temps ment, le temps vole,

Chacun de nos poignets

Porte un pesant muret,

D’un assassin l’obole,

La montre aux mille aiguilles

Marquée d’une estampille:

“Propriété de tous,

Mais de peu de personnes,

Qui dans le noir nous pousse,

Où nos œuvres résonnent”.

Certains veulent y voir

Leur visage sans âge,

S’y perdre sans miroir,

D’autres - ce sont les sages -

N’y voient que de l’espoir.

Aucun homme pourtant

Ne saurait la construire.

Rois, savants ou brigands

Ne peuvent la détruire.

Objet sempiternel

Qui hante nos réels.

Chacune de ses pointes

Marche, marche puis meurt.

Une épopée succincte

Où elle a cherché l’heure,

La bonne, la très belle,

Celle de l’oublieur,

Où rien ne se révèle.

Les aiguilles de fer

Parfois s’immobilisent,

La peur du cimetière

Les prend, les paralyse.

L’affreux gouffre des mortes

Couleur de cochenille,

La mécanique aorte

Du monstre aux mille aiguilles.

Bientôt elles repartent

Dans leur course forcée,

Chancelante sur l’ombre,

Marionnettes percées,

Mortels fils du diables,

Fins enfants de l’enfer,

Funambules instables,

Moribondes prières ;

Toujours anihilables.

Bien avant de mourir,

Quand elles s’avancèrent

Sur ce pont des soupirs,

Sous les débris de verre

Que ceux d’avant expirent,

Ces singularités,

Automates fringants,

Burent toute beauté,

Dansèrent l’ouragan,

Sans jamais s’arrêter.

“Taciturne silence

Ô toi qui nous éveilles !

Pourrais-tu de ta lance

Nous rendre tout vermeil ?

Vois mes génuflexions !

Je te supplie, t’implore,

Toi, l’assassin du son,

Exile nous encore,

Le bruit nous perçait,

Je ne peux vivre encore...

Le bruit me berçait !”

Malgré la mélopée

Des longues vie fétides,

Brûle la canopée ;

Les oiseaux migrateurs,

Vent de cendres arides,

Meurent tels des acteurs.

Enfin tout part en vrille

Dernier regard lucide :

Montres aux mille aiguilles,

Rêve d’immuns atolls,

Rares humains qui brillent,

Un petit bout de sol.

Le temps ment, le temps vole !

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