Chapitre 37H: janvier 1788

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Nous laissâmes donc Marie - Camille et ses trois petits enfants pour rejoindre le repère où Étienne et quelques uns de ses comparses se cachaient, situé au rez de chaussée d'un immeuble abandonné mais encore totalement meublé et solide. Je soutenais Gustavine et l'assied sur un siège, pour qu'elle se repose. Deux hommes apparurent soudainement, intrigués.

—'' Que faites - vous là? Qui vous a autorisées a entrer?

Étienne sortit d'une pièce.

—'' C'est moi. Laissez-les tranquilles. Voici mon épouse et sa belle - mère.

—'' C'est donc elle... Elle est bien mignonne ta petite femme. Combien ça lui fait?

—''Laisse-la tranquille. Si tu t'avises de la toucher tu connaîtras mes poings. Étienne s'approcha de l'homme au sourire en coin. Tu m'entends ?

Après l'avoir maintes fois réclamée auprès des comparses d’Étienne, je servais une soupe a Gustavine qui n'en toucha rien. Elle se plaignait de plus en plus de ces douleurs au ventre, et cela n'inspirait rien de bon. La nuit suivante, elle coucha avec moi, dans un lit trop petit. Elle bougeait beaucoup, se retournant, gémissant, retirant et remettant sans cesse la couverture sur elle, je sentais qu'elle n'allait pas bien. Tôt le lendemain matin, je su par ses mouvements qu'elle quittait le lit. Intriguée par le fait qu'elle ne revienne pas se coucher, je me levais moi aussi. Ce que je pu voir ne m'inspirait que du dégoût.

Gustavine était assise sur l'unique chaise de la pièce, sa robe de nuit relevée sur son ventre, les jambes complètement découvertes, un peu ouvertes, exposant son intimité. De ses entrailles coulait un flot de sang, qui venait former un ruisseau sur l'assise puis s’écoulait en bas de la chaise, sur un vieux linge qu'elle avait exprès déposé qui prenait maintenant une teinte rouge vive. Son expression de visage montrait qu'elle était au bord des larmes, impuissante face à ce que la nature ne voulait pas lui laisser. Enceinte depuis trop peu de temps, elle ne mit cette fois pas au monde d'enfant. Je l'aidais à reprendre ses esprits, et à retourner se coucher. Je repliais rapidement le linge avec lequel j’essuyais la chaise, avant de m’empresser d'aller la consoler.

—''Cela peut paraître ridicule mais j’ai peur Louise de ne jamais avoir d’enfant.

—'' Vous en aurez, c’est sûr. A chaque fois, c’est un accident. La prochaine fois que vous tomberez enceinte, je suis sûre que vous irez jusqu'au bout de votre grossesse. Courage.

Étienne et ses deux comparses patrouillaient je ne sais où, alors nous restâmes dans leur repère toute la journée. Nous fûmes bientôt rejoints par Marie–Camille et ses trois petits enfants, qui, harassés, avaient passés la nuit dehors après nous avoir suivis, de peur qu’Étienne ne se fasse arrêter en nous rejoignant. Profondément réaliste, elle me confia l’air grave :

  • Nous devons partir d’ici Louise. Qu’allons-nous devenir sans logement? Je propose que l’on quitte Paris sur nos deniers et que Étienne nous rejoigne plus tard, lorsqu’il le voudra.
  • Je voudrais bien mais André et Étienne…
  • Nous irons les chercher. Si vous êtes d’accord, nous partirions pour Rouen demain.
  • Pourquoi donc Rouen ?
  • C’est là où vivent les tantes de Jean–Charles. J’ignore si elles sont encore vivantes mais essayons.

J’étais d’accord, et le soir, lorsqu’il rentra, Étienne acquiesça aussi sur cette idée. Nous ignorions où étaient Jean–Charles et Jacques, mais en attendant, précipitées par les allers-retours des soldats devant l’immeuble où nous vivions, nous ramenâmes André et Étienne, dont le couvent avait été abîmé par les révoltants. André était évidemment fou de joie de me retrouver, ayant détesté les quelques mois qu’il avait passé chez les jésuites.

Le soir de notre départ, Gustavine embrassa comme elle ne l’avait pas pu depuis longtemps son mari, cet homme qu’elle avait aimé si fort et pour lequel elle éprouvait toujours un amour indéfectible. Étienne nous promit de chercher du mieux qu’il pouvait et d’essayer de nous faire rejoindre à Rouen son père et son frère, qui étaient introuvables depuis notre départ de l’appartement. Il promettait aussi à sa jeune épouse de la rejoindre aussi tôt que possible, pour ne plus jamais la quitter.

Je savais mener mais on insista pour nous conduire à Rouen. André, qui n’avait presque jamais quitté Paris de sa vie, collait son visage contre la vitre pour observer ce nouveau paysage rural et calme qui défilait au rythme du trot des chevaux. Mon fils n’avait jamais encore vu de vaches, de poules ou même de champs, et tout cela le subjuguait.

Le voyage dura une journée, où nous arrivâmes en milieu d’après-midi devant cette grande bâtisse de pierre plongée dans la campagne, entourée d’arbres et de haies, parfois on pouvait entendre les tirs des chasseurs, ou croiser un cerf qui courait pour leur échapper. Une vieille femme presque chauve sortit de la maison appuyée sur sa canne, marchant petits pas par petits pas et se demandant bien qui nous étions.

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