Je commençais à faire le tour du laboratoire, entre les hauts murs du bâtiment et la barrière, espérant trouver une entrée, lorsque Schrödinger se mit à l'arrêt, pointant les oreilles. Deux bergers allemands venaient de se profiler, dans un coin du jardin. L'un deux aboya, et Schrödi se mit à courir, ventre à terre. J'eus à peine le temps de me jeter dans un bosquet. Les chiens passèrent sous mes oreilles sans s'inquiéter. Peu après, deux hommes arrivèrent.

• Ce n'est qu'un chat, Dédounet !
• Arrête de m'appeler Dédounet. Mon prénom c'est André. Dédé, pour les intimes.
• Un chat, Dédé. Pas un lapin.
• Pourtant, j'aurais juré... là, à l'instant. D'une drôle de couleur...
• Un chat. C'est lui qui a fait sonner l'alarme en touchant la barrière.
• Parce qu'un chat, ça résiste à 10.000 volts ?
• C'est vrai, ça. C'est pas normal. Et puis, il y a un vélo tout tordu, avec une casquette par terre, de l'autre côté dans le gazon.
• Quelqu'un a du foncer dans la barrière.
• Il est pas mort ?
• On aura enlevé le corps ?
• C'est peut-être le chat.
• A vélo ?
• Les chats ont sept vies, on dit.
• Peut-être, mais ils font pas du vélo.
• Tu as raison.

Ils en étaient là, à se gratter le sommet du crâne, lorsque les aboiements se firent à nouveau entendre. Schrödinger n'avait pas réussi à trouver la sortie, il avait fait le tour et revenait. Il était coincé.

• Regarde qui va là, Dédounet ! C'est le chat !
• Arty, ne m'appelle plus Dédounet. Combien de fois je vais le dire ?
• Mais l'autre, le professeur, il s'appelle André. Alors je fais comment, moi ?
• Tu dis Monsieur Wertmann, et moi, tu m'appelles André.

Ils parlaient de mon père, André Wertmann ! Il y avait un autre André au laboratoire, mais ce n'était pas mon père. J'étais heureuse, car il me restait un doute, tout de même.

• Tu as vu que l'autre André est revenu au laboratoire ?
• Non. Mais j'ai senti l'odeur de vanille. Il est revenu pour quoi ?
• Il paraît qu'il aurait trouvé un Anneau magique.
• Tu sais ce que j'en pense. Pour moi, la magie, c'est des histoires pour les gosses. Il faut être fou pour dépenser autant d'argent dans un laboratoire ! Et pour quoi ? Pour rien. Ça fait des années qu'y cherchent, et qu'y a rien qui se passe.

Ils se grattèrent à nouveau la tête, regardant les chiens, qui avaient coincé Schrödinger derrière le local à ordures.

• Bon. En attendant, on va pas laisser le chat ici. On le jette de l'autre côté ?
• T'es pas fou ? De toute façon, il se laissera pas faire.
• Tu as raison.Alors on va le faire entrer dans le laboratoire, et on le fera sortir.

Mais oui, c'était ça l'idée, je n'avais pas besoin d'entrer, par effraction, dans ce bloc hyper-sécurisé ! Ils allaient m'y emmener ! Je sortis de mon bosquet dans le dos des gardiens, et couru en agitant mes oreilles, passant devant les chiens, l'un d'eux, surpris, bondit, avala une dizaine de mètres et m'attrapa. Il me ramenait maintenant à son maître, Arty, en remuant la queue. Je connaissais déjà le scénario. Je pendouillais, faisant la morte.

• Et bien, le voilà ton lapin, mon Dédounet ! C'est une jolie peluche rose.
• Pourtant, j'aurais jurais l'avoir vu courir !
• C'est ça, Dédounet. Bien sûr. Certainement un lapin magique ? Un lapin qui vole ?
• Pourtant...
• La Magie n'existe pas, Dédounet, crois-moi.
• Tu as certainement raison, Arty. Allons faire notre rapport au directeur, Monsieur Merlin.
• C'est bien, Dédé. Fais ton travail, et dors. Tout ira mieux.