Chapitre 29
Le soir même German se décida à se rendre chez Eva. Il frappa à la porte, un « Entre » traversa le bois. Visiblement, elle attendait quelqu'un, peut-être l’autre, son estomac se contracta douloureusement.
Il la trouva assise en tailleur sur son canapé, les cheveux lâchés, une large chemise en guise de pyjama. Elle était magnifique. Bouche entrouverte pour mettre une poignée de pop-corn dans sa bouche, elle suspendit son geste en apercevant German.
Elle plongea ses yeux émeraude dans les siens. Il nota le creux bleu qui les soulignait. Les traits tirés par le manque de sommeil lui donnaient l’air d’une branche sur le point de se casser. Il s’approcha, elle le dévisageait toujours méfiante.
« Il faut qu’on parle Eva.
Elle garda le silence. Il s’assit à ses côtés. Il prit la boîte de pop-corn qu'elle tenait entre ses jambes pour la poser sur la table basse. Il remit une mèche de cheveux derrière son oreille, ses yeux se dirigèrent sur sa bouche avec désir puis remontèrent vers ses prunelles embuées.
- Eva, je ne sais pas ce que tu me fais mais ça me rend dingue de te voir comme ça.
- Je…
- Écoute, je t’ai vu le soir du quatre juillet avec cet homme. J’ai eu mal Eva, comme jamais. Il faut que tu m’expliques, car je t’ai vu vendredi partir avec lui sauf que je t’ai bien regardé et en y repensant cette histoire cloche… J’ai juste besoin de savoir. Si tu es avec ce gars, je te laisserai tranquille, mais quand je te vois là comme ça, je ne comprends pas.
Mon Dieu songea, Eva, il l’avait vu avec Stéphane, c’était donc ça. S'il savait, mais comment lui raconter. Elle ne pouvait pas. Elle ne voulait pas, que penserait-il d’elle après.
- Tu as pensé…
- Que voulais-tu que je pense d’autre, il avait sa main sur tes reins, il t’enlaçait, t’embrassait ! Et tu le laissais faire !
- Non ! S’exclama Eva qui ne pouvait plus contenir ses larmes qui roulèrent sur ses joues.
Alors il l’embrassa presque à lui faire mal enserrant sa nuque. Elle se renversa sur le canapé, la suivant dans son mouvement, il approfondit son baiser. Soudain, Peter entra tenant à la main des DVD :
- Ma chérie, je nous ai sélectionné trois films… Il s’arrêta net, voyant German et Eva à demi allongés.
- Bon, bien, je crois que l’on va devoir reporter notre soirée dépression. Dit-il en sortant.
German sourit, soulagé de voir qu'Eva attendait Peter et non pas l’autre.
- C’est Peter que tu attendais ce soir.
C’était plus une affirmation qu’une question.
- Oui… Tu ne pensais tout de même pas…
- Eva. Dit-il dans un soupir. Je t’avoue ne pas savoir quoi penser.
Eva se dégagea de son étreinte à contrecœur et se remit droite sur le canapé, les yeux fixant un point imaginaire.
- Qui est ce type Eva ?
Elle tourna la tête vers lui. Ses yeux exprimaient un désespoir profond mélangé à du regret. Le cœur de German se contracta. Elle ne niait pas, mais n’affirmait rien non plus. Elle venait de décrocher le fil qui les raccordait en se muant dans un silence obscur, éloquent.
- Eva, j’ai besoin que tu me réponde, cette histoire ne pourra pas aller loin si tu ne me fais pas confiance.
Il la suppliait presque.
- Je ne peux pas, German. Dit-elle d’une toute petite voix honteuse.
Il sentit la colère monter, violente, soudaine.
- Tu ne peux pas ou tu ne veux pas ?
- German s'il te plaît. Dit-elle les larmes aux bords des cils.
- C’est bon Eva, j’ai compris. Dit-il en se levant et commençant à avancer vers la porte d’entrée.
- German…
Mais il ne se retourna pas et claqua la porte derrière lui, laissant Eva à son désarroi qui ne retint plus ses sanglots.
Eva resta prostrée chez elle plusieurs jours, elle n’alla pas au travail, elle n’en trouva pas la force. Le voir, l’entendre au quotidien lui paraissait ingérable. Si seulement il pouvait comprendre. Stéphane était fou, que se passerait-il s’il apprenait l’existence de German dans sa vie ? L’angoisse la tenaillait, elle ne supporterait pas qu’il lui arrive quoi que ce soit ou qu’il la voit avilie. Elle se sentait aussi perdue que lorsque sa mère était partie.
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