6 – Ney : Pas de bagages, pas de problèmes
Le spatioport de Pretty Sand est directement connecté à la gare qui relie la cité à Ombrenade, Tandjan et Krissem. Vu du ciel, il ressemble à un grand triangle sombre dont les bords se fragmentent en d’autres triangles, le processus se répétant plusieurs fois à la manière d’une fractale. De cet amas, d’autres grands triangles, beaucoup plus clairs, émergent et constituent les pistes d’atterrissage. Vu du sol, de l’intérieur même, on aurait dit l’un de ces grands centres commerciaux, tout en vitrines et escalators.
Au terminal 11, le vol orbital PSD-22F à destination de Stir-M, attend ses passagers. La semi-renarde guette les allées et venues de l’enfant, un petit garçon de 9 ans qui se fait appeler Sam par sa tutrice. Samuel Oliverti, un terrien perdu à plus d’une heure douze lumière de chez lui.
Les haut-parleurs accompagnent les flux de réalité augmentée et annoncent que leur navette est prête à recevoir ses passagers. Comme deux substances séparées par décantation, la foule commence à se diviser entre ceux qui partent et ceux venus leur dire au revoir. Ney se rapproche sensiblement de l’enfant et constate que la tutrice fait partie de la seconde catégorie.
Cette première anomalie semble indiquer que les ennuis ont déjà commencé. Mais un autre détail interpelle la chimère : la peau de la femme est visiblement synthétique et le visage correspond à celui d’un syntha ordinaire. La personne emploie une enveloppe cybernétique standard, généralement empruntée par les voyageurs en upload, ou par les personnes opérant sous couverture et qui ne souhaitent pas compromettre leur enveloppe régulière.
Employant ses foglets, la technophile dessine quelques motifs éphémères sur la tunique de la femme, laissant transparaître une arme illusoire. Rapidement, deux robots patrouilleurs viennent la contrôler. Ney en profite pour sniffer la requête des agents et la réponse encodée de la suspecte. Au besoin, elle aura de quoi la faire identifier si elle devait la recroiser. Et avec de la puissance de calcul et du temps, elle pourrait même s’offrir le certificat.
L’incident en arrière-plan prend rapidement fin tandis que la peluche, sous son air adorable, suit les autres voyageurs et monte à bord de la navette. L’espace intérieur qui lui est accessible est organisé sur deux niveaux. Les deux principales salles contiennent de nombreux sièges organisés en arcs de cercles. L’enfant s’est installé dans un coin de la salle, comme pour être seul. Ney choisi un siège en plein milieu, encadrée par une femme imposante et un homme très – trop – bavard.
À peine installée, Ney connecte son interface réseau avec l’équipement de bord, discrètement. Si quelque chose doit se produire, la protectrice souhaite le voir venir. En attendant, elle positionne les différents éléments de son fauteuil avec une aisance qui surprend sa voisine de gauche. Les cales pieds, les accoudoirs, le repose-tête et les sangles ajustées, elle laisse son corps se détendre : bientôt, il encaissera un peu plus de deux G.
Connectée au réseau de surveillance de la navette, ainsi qu’à tous les systèmes de contrôle, la peluche observe avec attention les événements à venir. De toute évidence, l’enfant qui donne un peu de fil à retordre au préparateur tentant de l’aider à ajuster son siège n’est pas très à l’aise. « Ce n’est que le début du voyage. », lui adresse-t-elle en pensée.
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