La flotte d’escorte était finalement arrivée et les premières heures furent employées à amarrer l’Akasha à l’Icordia, un dreadnought. Entre les restes du Bearington et l’imposant vaisseau de ligne, le bâtiment de Feyn avait l’air d’une olive entre deux tranches de pain. Pour être honnête, l’Icordia à lui seul aurait pu contenir les deux autres sans soucis. Les autres vaisseaux de la flotte : une frégate d’artillerie, un mini-porte nef et une corvette de sauvetage s’étaient placés en formation à des distances écartant tout danger de collision.

Une autre flottille était aussi en route vers les restes de l’assaillant. Sur le radar, Feyn estimait qu’il s’agissait d’une autre canonnière, d’un vaisseau sauvetage et d’un vaisseau de récupération. Beaucoup plus loin, d’autres vaisseaux de Suan étaient en approche : une flottille de récupérateurs venus collecter tous les débris dangereux qui avaient pu être tracés.

Bien qu’amarrés, aucun échange physique n’avait encore eu lieu entre les deux vaisseaux. Le commandement de l’Icordia faisait preuve d’un grand effort pour rassurer le petit couple de l’Akasha tout en temporisant les échanges au maximum.

« C’est une quarantaine Idle : on est allé à bord et les procédures impliquent d’éviter tout contact tant qu’on n’est pas certains qu’on a pas récupéré un virus ou un truc dangereux. », tente-t-il d’expliquer à son amie. Mais Idle avait du mal à y croire et lui aussi commençait à avoir des doutes : lorsqu’on commence une quarantaine, le plus rapide est de l’annoncer clairement. Akasha avait transmis les données qu’ils avaient collectées et depuis plus de réponse en dehors des préoccupations bienveillantes de Maxine qui semblait centraliser tous les échanges entre l’Akasha et le reste du monde.

En attendant, l’équipage du vaisseau avait pris le temps de vérifier tous les systèmes du vaisseau et de réparer les quelques dégâts ci et là. Idle en avait beaucoup appris sur le vaisseau au cours de ces heures et elle ne se tarissait pas de question. Quand les dernières réparations furent terminées, ils durent se contraindre à attendre, vivant une petite vie parfois ennuyante. Akasha avait encore de très nombreux vivres – le vaisseau était conçu pour effectuer des vols interplanétaires – mais la lassitude prenait lentement le pas.

Enfin, une nouvelle communication parvient à l’Akasha : « Bonjour Feyn, Bonjour Idle. Nous avons du nouveau. La situation diplomatique s’est stabilisée de notre côté et nous avons l’autorisation de vous escorter jusqu’à l’orbite de Titan. Là votre vaisseau et ce qui reste du Bearington seront placés en « cale sèche » pour étude.

– Des ennuis diplomatiques : on sait enfin à qui est ce vaisseau ? demande Feyn espérant ne pas avoir été l’étincelle qui déclencherait une nouvelle guerre.

– Nous n’avons aucune idée du propriétaire actuel du vaisseau. En fait, nous avons dû vous faire patienter car Mars est très fortement intéressé par votre découverte, révèle la coordinatrice.

– Mars. Ça a donc bien un rapport avec l’Héméra ? Insiste-t-il.

– Nous n’en savons encore rien mais votre propre rapport appuie considérablement cette thèse et à défaut de mieux nous allons devoir l’étudier.

– Et Mars veut venir ?

– Ils ont commencé à uploader des spécialistes qui doivent être en train de s’occuper de la paperasse. Après ça, ils vont devoir préparer le quai pour vous recevoir. Ils auront quelques questions, leur explique-t-elle avec un sourire laissant entendre que tout se passera bien.

– Je suppose donc qu’on va se mettre en marche bientôt ?

– Oui, dès que le filet sera en place. Vous n’utiliserez pas votre propre propulsion, plusieurs drones de remorquages s’en chargeront.

– Quand aura lieu la poussée ? demande Feyn pour savoir s’il doit paniquer dès maintenant.

– Dans trois heures approximativement. Prenez un peu de temps pour vous reposer, nous vous préviendrons quand vous aurez besoin de gagner votre pont de commandement.

– Merci pour les nouvelles. », termine Feyn. Les choses ont enfin commencé à se bouger un peu ce qui ne va pas sans lui déplaire.

« Pourquoi un filet Feyn ? lui demande Idle.

– Ils vont nous entourer dans un filet très fin et très solide pour éviter que des petits morceaux soient perdus pendant le voyage, explique le raton laveur entourant son poing de son autre main.

– On perd des morceaux ? s’étonne Idle.

– Pas nous, mais le Bearington est vraiment dans un sale état, déplore-t-il.

– On rentre au nid alors ? explose la peluche blanche avec enthousiasme.

– C’est temporaire et puis on va voir des savants parmi les meilleurs aussi !

– Ooh ?

– Tu veux manger un peu ? lui demande-t-il sur un ton un peu paternaliste.

– Oui ! », termine Idle en rangeant soigneusement les éléments virtuels de l’interface en RA.

Les deux astronautes se dirigent vers le mess : un petit repas avant une poussée, ce n’est jamais une bonne idée, mais on en a toujours envie.