35 – Nightly : Ombrenade by Night

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La cité d’Ombrenade présente un jeu d’éclairage surprenant durant son cycle de nuit. La plupart des éclairages « externes » sont très fortement atténués et les lampes du dôme ne présentent plus cette lumière vive et directionnelle. À la place, ces dernières dessinent un ciel étoilé où la plupart des constellations sont reconnaissables. À vrai dire, les informations publiques d’Ombrenande confirment même que leur position est précisément celle des vraies étoiles dehors, tant que les observateurs restent en contrebas de la cité.

L’air frais et le bruit de grillons rappelle ces images fantasmées des nuits sur les bords méditerranéens de l’Europe – celle de la Terre. Quelques lucioles donnent aux parcs du bas un aspect féerique, bien qu’Eve ne parvienne pas à déterminer s’il s’agit vraiment d’insectes ou d’un autre artifice. Pour passer plus discrètement en ville, elle a rangé son bandeau et retrouvé ses cheveux roux. Sa cape, vêtement mimétique, s’est changée en une sorte de poncho pourpre sous lequel son équipement est caché. Histoire d’éviter des contrôles inutiles, elle affiche ostensiblement sa licence d’agente indépendante rattachée à Mars sur le canal réservé aux forces de sécurité.

Son message vient d’obtenir une réponse. En l’ouvrant, l’avatar de Ney apparaît dans son espace privé de réalité augmenté : un construct.

« Hey Nightly ! Ça me fait plaisir d’avoir de tes nouvelles, lance la peluche de façon particulièrement dynamique.

– Bonsoir Ney. », répond l’enfant, plus calmement, se prenant au jeu du construct. L’entité virtuelle n’est qu’une petite IA embarquant des informations et qui les restitue lors d’un simple dialogue. Certes, il est possible de déplier un construct pour en afficher les informations de façon plus linéaire, mais Eve a remarqué que ceux de la technophile relèvent presque de l’art. Non seulement les réponses sont complètes, mais le schéma de fonctionnement est élégamment direct, évitant au correspondant d’avoir à deviner les questions à poser. Quant au langage, qu’il soit verbal ou corporel, il transporte la bonne humeur et la gentillesse de Ney et, rien que pour ça, Eve tient à le lire normalement. Surtout après les événements récents.

La réponse de Ney va dans ce sens : « Pour commencer, je vais bien et l’enfant est entre les meilleures mains qui étaient à ma portée.

– Tu n’imagines pas à quel point je suis soulagée.

– Il y a eu de la casse mais rien que la sécurité ne puisse gérer. Je devine à ton message que les choses ont eu une fin moins glorieuse de ton côté.

– Oui, on peut dire ça. Est-ce que tu connaîtrais une certaine Sanaë ? Je dois entrer en contact avec et rapidement.

– Ce nom me dit quelque chose, il faudrait qu’on se voie. », répond la peluche virtuelle.

C’est là une partie du génie de Ney : en plus de l’architecture habituelle des constructs elle a ajouté une série de mot clé qui l’intéresse. Si l’un d’eux est évoqué durant la conversation, l’entité virtuelle lance automatiquement une invitation. Visiblement, Ney a déjà entendu parler de Sanaë alors qu’Eve n’en avait pas fait mention lors de son message : pour la justicière c’est une bonne nouvelle qui peut lui faire gagner beaucoup de temps. En dépliant le construct elle ne l’aurait d’ailleurs peut-être pas trouvé.

« C’est une très bonne idée, Ney. Tu sais où on peut se voir ? demande la justicière.

– Le parc « Alice », le numéro 7. Dans… disons vingt minutes, ça t’irait ? propose le construct.

– Oui, répond Nightly.

– Ça marche, renvoie juste la réponse, lance la peluche avec un clin d’œil.

– À tout de suite ! », termine Eve en activant la réponse automatique du construct, immédiatement un message auto-généré est envoyé.

Le parc numéro 7 est situé plus haut, vers le milieu de la muraille des habitations. La psion pourrait s’envoler par la force de son implant, mais une certaine fatigue mentale commence à beaucoup la travailler et s’il y a bien une chose qu’il vaut mieux éviter, c’est de se servir de son implant sans tous ses moyens. Et puis le calme nocturne de la cité l’apaise, autant en profiter.

Sur les hauteurs de la cité, la tour centrale n’en paraît que plus majestueuse. L’éclairage morcelé qui traverse les vitres des habitations donne un sentiment de complexité et de grandeur à la cité. Le parc 7 est vide : en accédant au canal de réalité augmenté, la jeune fille constate qu’il a en effet été réservé. Toutefois, son certificat d’identité semble accepté.

Elle n’a pas le temps de s’asseoir que Ney arrive, accompagnée d’un autre nevian. Dans la pénombre Eve peine à remarquer ce qui cloche : « Que t’est-il arrivé Ney ?

– Oh, c’est Nevi qui s’est planté dans le pseudo code ADN de ma nouvelle enveloppe : elle a inversé les gradients de couleurs. Du coup, au lieu d’être rousse avec le ventre blanc… ben je suis blanche avec le ventre roux, dit-elle sur un ton exagérément et faussement outré.

– Ça se soigne ? demande-elle.

– Avec une nouvelle enveloppe oui. On en commandera une autre plus tard : tu es pressée je crois, non ? rappelle la peluche avec un certain amusement.

– Oui, tu connais Sanaë ? demande Eve sans détours.

– La solar wardner ? Oui, elle est à bord de l’Akasha, lui-apprend Ney.

– Je ne connais pas ce vaisseau, remarque l’enfant.

– Il va être très connu dans quelques jours, je pense. Peut-être pas autant que le Bearington, remarque, explique succinctement Ney.

– Je ne le connais pas non plus, déplore Nightly.

– Tu vois l’Héméra ?

– Oui, bien sûr, j’ai fait partie de la seconde vague de réplicants sur les premiers tests de l’implant, explique naturellement la psion.

– On a peut-être la même chose : on dit que les scientifiques sont en ébullition.

– Ok. Elle va pas être simple à joindre alors. Merde ! s’exclame Eve.

– Tu sais qu’on a notre Idle sur l’Akasha ? indique Ney comme si elle révélait sa main au poker.

– Vous avez une backdoor ? s’interroge-t-elle.

– Non, Idle, notre amie… Tu ne l’as pas encore rencontré. Elle est heu…

– Un peu cassée mais très attachante, la coupe l’autre nevian.

– Bref, on peut la contacter assez facilement. Tu veux lui envoyer un message ? » lui demande la peluche.

Comme libérée d’un étrange, mais pesant fardeau, Eve accepte l’offre. Il lui faut préparer le message à Sanaë et l’aide de la technophile pourrait lui être très utile pour transmettre ces informations sans trop se faire remarquer.

Ensuite, si elle n’a pas d’autres urgences, une bonne toilette et une nuit de repos lui feraient beaucoup de bien.

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