Pacte et rencontre
Oh… Alyana… Je te sens… Je sais que tu n’es pas loin…
Encore cette voix… Cette sensation… Je me sens attirée… Comme un aimant... Je veux savoir qui tu es… A qui appartiennent ces magnifiques prunelles océans?
Une langue râpeuse me caresse le visage. L’aurore se lève. Je me réveille en riant et repousse doucement Galadryelle. Je lui caresse la tête et elle ronronne de plaisir. Je la remercie encore une fois de nous avoir sauvé, mon petit prince et moi. Elle s’approche de moi et pose son front contre le mien. J’entoure son cou de mes bras.
Laisse moi te mordre.
Je ne comprends pas. Encore une fois, j’ai entendu la voix de Galadryelle dans ma tête.
- Quoi ?
- Laisse moi te mordre...
Je tends malgré moi mon bras gauche. Galadryelle y plante ses crocs doucement juste pour imprimer une marque et faire couler un peu mon sang. Je grimace de douleur. Elle s’arrête, et avec ses crocs rougis, se mord elle-même la patte. Son sang d’un vert émeraude se mélange alors au mien et je sens comme une petite brûlure au niveau de ma plaie. Elle pousse son hurlement, à mi-chemin entre le cri du loup et le rugissement du tigre, et cette fois-ci elle me fait franchement mal. J’émets un petit cri en tenant mon bras de mon autre main. Sous mes yeux étonnés, un tatouage apparaît à la place de ma blessure : un double cercle entre lesquels une série de signes apparaît, un peu comme ceux des l’alphabet cyrillique, et en son centre, celui de l’infini. Je lève la tête vers Galadryelle, interloquée.
Pour appeler Galadryelle. Sang sur clé de porte.
Un immense cercle de lumière apparaît derrière elle : elle s’y engouffre et disparaît sous mes yeux. Je mets un temps avant de comprendre. Vite, je prends ma dague et coupe un petit bout sur mon pouce avant de le passer sur mon nouveau tatouage. Le cercle de lumière réapparaît et Galadryelle en sort. Elle s’approche et tapote sa tête contre moi en recherche de caresses. J’exauce son souhait et termine par lui faire un énorme câlin. Elle lèche le visage et s’en va à travers ce fameux portail.
Encore merci pour tout Galadryelle.
Je m’éloigne le plus possible du champ de bataille. Je suis le petit ruisseau et une fois que j’estime être assez loin, je m’approche de la petite source d’eau afin de laver mon visage pour reprendre la route. Lorsque je vois mon reflet, j’ai un petit pas de recul. Je me penche au-dessus de l’eau et me regarde à nouveau. J’ai un magnifique oeil droit aux bords noirs, mon arcade sourcilière gauche est ouverte, mes lèvres sont bouffies et rouges et dans mon cou deux grosses marques bleues sont apparues... Je n’ose même pas regarder sous mes vêtements : je dois être bleue de partout, vu le traitement peu amène que j’ai reçu il y a deux jours… Je soupire et me mets à préparer un onguent afin de tenter de rattraper un peu les dégâts.
A cette allure, je n’arriverai jamais à Lachea…
Je perds encore une demi-journée à me soigner : jamais je ne pourrais me présenter en ville avec un visage aussi tuméfié ! Je soupire. Je suis morte de faim ! Je me prépare une soupe avec les restes de légumes en ma possession bien que je rêve d’une bonne viande rôtie… Même un œuf sur le plat me donnerait entière satisfaction ! J’avale tout de même mon repas frugal. Après avoir mangé, je me sens de nouveau fatiguée et réalise que même si Galadryelle a veillé sur moi, je n’ai dormi que quelques heures cette nuit. Je cherche des yeux un endroit où je pourrais m’endormir en toute sécurité… Difficile.. Je ne me trouve pas très loin de la route avec que des champs à perte de vue…
Finalement, j’enfile ma cape sur mes épaules, abaisse ma capuche sur mon visage blessé et me décide à marcher : il va bien falloir avancer si je ne veux pas passer une nouvelle nuit dehors. Je me sens si faible… Aoi doit le ressentir aussi car il m’envoie un peu de sa propre énergie : je la perçois au fond de moi.
Merci mon petit prince…
Je continue tout droit… Ma vision commence à se brouiller et le souvenir de l’incendie que j’ai causé chez Roc me revient en mémoire : je n’ai aucune envie que cela recommence. Je m’arme du peu de courage qu’il me reste et traîne des pieds.
Pas très élégant pour une noble…
Je souris à ma propre idiotie. Je sens que je dérive... J’arrive à un croisement. Un panneau m’indique Lachea, l’autre Arachnya. Je prends le premier chemin… J’entends derrière moi des bruits de sabots de dragnirs… Des bruits de calèches que l’on tire… qui me semblent venir de loin… de très loin… Ma tête me tourne... Une voix ordonne que l’on s’arrête…
Je connais cette voix...
J’essaie de me retourner pour faire face à cette personne mais je perds pied. Je me sens tomber comme au ralenti. Une main saisit la mienne et lorsqu’elles se touchent un brasier s’allume dans mes veines. Son emprise s’accentue jusqu’à broyer mes doigts…
Ressentirait-il la même chose?
Des bras puissants me rattrapent avant que je ne touche le sol et je sens toutes mes fibres corporelles s’électrifier à son contact. Il me soulève comme un fétu de paille contre lui et je devine ses muscles qui se contractent lorsque mon corps touche le sien. La sensation est magique. Je sens son cœur et le mien battre à l’unisson et leurs pulsations augmentent ensemble, dans une danse affolante, un tam-tam entraînant. Ma main posée sur son torse et ma tête contre son épaule, je ne me suis jamais sentie aussi en sécurité.
Alors que je ne sais même pas qui tu es...
Je peux sentir son odeur : un mélange de menthe, d’épices et de… chocolat ? Je ne sais pas mais c’est doux et sucré. Une odeur affriolante. Il resserre son étreinte autour de moi d’un geste possessif et je ne peux m’empêcher de me lover un peu plus contre lui. Je sens que ma capuche s’est baissée car un vent frais caresse mes cheveux déployés. J’entrouvre les yeux afin d’essayer de l’apercevoir, d’apercevoir cet homme, ce Titan qui a fait naître autant de contradictions dans mon corps et dans mon esprit… lorsque mes prunelles croisent les siennes couleur de l’océan, mon coeur rate un battement : j’y vois une expression de stupeur s’y peindre avant de sombrer dans le noir le plus profond.
Annotations