7 Juillet 2017

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Ma nuit est courte, agitée, je me réveille plusieurs fois en sueur, cherchant sa présence à mes côtés, dans ma petite tente. Depuis hier une idée me trotte dans la tête, que je tente de repousser mais qui s’impose à moi, un peu comme une évidence. Si seulement…

C’est ainsi qu’il n’est même pas encore sept heures, alors que le soleil commence tout juste à illuminer l’horizon, quand je quitte le camping, laissant un petit mot à Raymond pour le remercier et m’excuser de ce départ précipité.

Pendant l’heure qui suit, les larmes ne se tarissent pas et je roule sans vraiment voir clairement les paysages, un peu comme guidé par mon instinct pour rejoindre le Château d’Aguilar. Je n'avais pas prévu une visite du château, mais simplement de m’y arrêter un moment, ce qui tombe assez bien, puisque j’arrive près de deux heures avant l’ouverture. Je monte jusqu’au pied de la forteresse et emprunte le sentier qui la contourne en poussant mon vélo qui dépasse allègrement les vingt kilos.

Du pied de la muraille, la vue est toujours aussi magnifique, je trouve un endroit plutôt dégagé, à l'écart, pour m’installer. Assis sur une pierre, je profite du calme et du silence en plongeant mes yeux larmoyants dans le paysage légèrement brumeux.

Depuis trois mois, je n’avais plus ressenti cette tristesse, me noyant dans les études, le boulot et le sport, mais revenir ici, cinq ans après mon premier passage, me replonge dans les méandres de ma vie passée. Je repense à tous ces échecs sentimentaux, doutant de plus en plus de ma capacité à construire quelque chose à deux finalement.

Nuit très tranquille, pour une fois. Je viens de rentrer, je dors deux heures et je prends la route. Je me languis déjà de te retrouver. Bisous. Clems.”

“ Bonne nouvelle… Pas trop le moral ce matin… J’ai besoin des bras de ma petite sœur…Tu me manques énormément… A très vite. Juss.”

Ce petit message me redonne un peu de baume au cœur et après avoir réchauffé un peu d’eau, bu une tasse de thé et mangé quelques biscuits, je me sens plus serein pour reprendre la route. Une heure et demie plus tard, j’entre enfin dans Duilhac et retrouve François devant l’entrée du gîte.

Nos retrouvailles sont émouvantes, nous nous prenons dans les bras comme de vieux amis, et je sens les larmes qui montent encore, mais je décide de les garder pour plus tard.

- Je suis heureux de te revoir Justin. T’as bien changé depuis la dernière fois… Les piercings, les tatouages, les cheveux longs, ça te fait paraître plus adulte, plus sérieux.

- C’est possible, j’avais besoin de changement pour démarrer une nouvelle vie.

- Et Clémence?

- Elle devrait arriver en début d'après-midi, elle a eu une nuit assez calme à l'hôpital, du coup elle partira plus tôt.

- Je ne parlais pas de ça… Mais de vous deux.

- Ah… La distance a eu rapidement raison de nous, c’était trop compliqué, avec les études, de se voir régulièrement, parfois pendant plusieurs semaines… Ça nous a épuisé à la longue, mais ça n’a pas changé grand-chose entre nous, on est toujours aussi proche.

- On a été tristes quand on a su pour vous deux, mais si tu me dis que ça n'a rien changé… C’est Marinka qui va être contente.

- Comment va-t-elle?

- Impatiente de vous retrouver, elle avait un rendez-vous à Perpignan ce matin, mais elle sera là pour midi. Tu veux dîner avec nous?

- C’est gentil, mais je vais attendre Clémence ici, elle a prévu notre repas. Puis j’ai besoin d’une bonne douche et de repos. J’ai fait presque deux cent bornes en quatre jours et les deux derniers jours ont été un peu compliqués moralement.

- Je comprends, on se retrouve plus tard pour monter au château? Après la chaleur…

- Avec plaisir.

- A toute à l’heure. Repose toi bien.

- Une douche et je file me poser dans le spa…

Je profite du calme de la fin de matinée, confortablement installé au milieu des bulles et des jets massants pour me détendre en musique et fermer les yeux, faire le vide dans mon esprit bouillonnant. Me laissant gagner par la douce musique de fond et la fatigue accumulée, je sombre en quelques minutes dans une somnolence paisible.

Ce sont trois coups rapides à la porte qui me tirent de ma torpeur et je me précipite, manquant de m’étaler sur le carrelage au passage, pour ouvrir à l'ouragan qui trépigne sur le palier.

- Putain, t’en a mis du temps!!!

- Bonjour Clémence…

- Dégage, faut que j’aille pisser!

- Amis de la poésie bonjour.

- Deux minutes et je redeviens une vraie fille! Promis…

Lorsqu’elle revient, j’ai enfin droit à un vrai bonjour, nous ne nous sommes quittés que depuis quatre jours, mais je dois dire que la serrer contre moi me procure beaucoup de réconfort et de bien-être. Si j’en juge par son soupir et la façon qu’elle a de venir se blottir contre moi, je ne suis pas le seul à m'être langui de ces retrouvailles.

Après un bon repas et une petite sieste pour Clémence, qui a besoin de récupérer un peu de sa nuit, nous retrouvons François et Marinka au pied de la forteresse. Je sens l’émotion me gagner lorsque je devine l’arrondi du ventre de la jeune femme.

- François? T’as pas oublié de me dire quelque chose ce matin?

- Non, je vois pas… Ah si… On va bientôt être parents!!!

- Wahou… Ca, c’est une belle surprise… Félicitations.

- Merci. Au fait chéri, tu peux aller acheter de la peinture rose!

Le sourire ému de François et les deux larmes qui roulent sur ses joues en disent long sur sa joie, lorsqu’il soulève sa compagne pour l’embrasser. Le clin d'œil de Clems me fait comprendre que nous devons nous éloigner quelques instants pour les laisser savourer cet instant de bonheur.

- C’est trop bien pour eux! Je suis vraiment contente… C’est quoi ce regard?

- Rien… L’émotion…

- Juss?

- Laisse tomber… Je repense à certains rêves que j’ai fait… Où… Non, rien…

- Où quoi?

- Laisse tomber… On en reparle plus tard…

- Bon les jeunes, on se la fait cette visite?

- Avec plaisir!!!

Nous constatons les travaux réalisés depuis notre première visite, des murs rebâtis comme à l'époque, l’accès réhabilité au donjon San Jordi, les sentiers de visite nettoyés. La ballade est plus courte cette fois-ci et rapidement nous nous retrouvons tous les deux plongés dans le spa.

- Juju, t’as des choses à me dire?

- Pas spécialement… À part que tu me manques…

- Sérieusement!

- Clems, c’est rien… Juste mon cerveau qui déraille… J’ai du mal à ne pas repenser au passé, c’est tout… Me retrouver ici, te retrouver ici… Ça remue des choses…

- Et?

- Et rien… T’es chiante là!

- C’est bon, j'arrête. Désolée…

- Non, c’est moi… Je devais profiter de cette semaine pour essayer de passer à autre chose, profiter d’un peu de temps avec toi, mais c’est tout le contraire, je ressasse le passé depuis que je t’ai quittée.

- Ça va aller Frérot! Bon! Demain, Rennes?

- Oui, mais ne te sens pas obligée.

- Pas du tout, en y réfléchissant bien, c’est une bonne idée en fait…

Nous passons la soirée chez nos amis, à discuter de nos vies, nous leur racontons notre, trop courte, histoire, Nicolas, Amy, Gaby, trinquons à leur futur bébé et les convainquons de nous accompagner le lendemain à Rennes-le-Château.

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