Chapitre 12
Anne regardait à la loupe les différentes photographies. Des originales, pas des reproductions. Cela l’avait mise dans un état pas possible, la plongeant dans un silence obstiné. Elle décortiquait le moindre recoin, les visages, les grades… Tower avait étalé sur le sol cinq sac-à-dos. Au début, c’était trois, mais Elodie et Jean-Paul étaient arrivés à l’improviste et avaient insisté pour venir tant et si bien qu’Yvan avait cédé, en désespoir de cause. Le légionnaire avait fait quelques allers et retours de la maison à son break aménagé. Il répartissait les équipements, identiques, pour chaque participant. On aurait pu croire que des armes s’y trouveraient mais il n’en était pas question. Tower et Yvan savaient très bien ce qu’il pouvait survenir en cas de perte de contrôle de quelqu’un possédant une arme létale. L’autre raison était bien plus prosaïque : les esprits ne craignaient pas les armes…
- Impossible, murmura Anne en se relevant, une photographie dans sa main gauche. Bien sûr tu n’as pas internet… Mais j’ai pensé à tout. J’ai ce qu’il me faut dans un de mes cartables… Ici… non, ici… Là !
Anne laissa tomber un classeur personnel, épais comme deux grosses bibles, sur un coin de la grande table à manger. Elle l’ouvrit à la page désirée et compara l’homme sur la photographie.
- Pas de doute possible. Il s’agit bien du Reichsgeschäftsführer Wolfram Sievers… Le directeur de l’Ahnenerbe. Un nazi…
Elodie se pencha sur la photographie que tenait l’historienne. On y voyait trois soldats allemands de la seconde guerre mondiale, dont deux en uniforme de la Kriegsmarine. Le troisième affichait le sinistre et maudit costume à tête de mort.
- Que venait faire ce gars à Sète ? demanda-t-elle en s’éloignant.
- L’Ahnenerbe, la Société pour la recherche et l'enseignement sur l'héritage ancestral, était une organisation nazie qui menait toutes sortes de recherches autour de théories fumeuses sur les Aryens, les renseigna Anne.
- Ce bateau, là, il n’a pas de nom… Mais juste un code, fit remarquer Jean-Paul.
- C’est un bateau de ravitaillement. Il devait certainement être attaché à un sous-marin. Les missions de l’institut revêtaient tellement de facettes, qu’il ne serait pas étonnant de voir un U-Boot affecté à une expédition.
- Cette autre photo montre la maison dans son état d’alors et un camion allemand garé devant. C’est le même gars, non, sur le trottoir ? demanda Jean-Paul en montrant le document à Anne.
- Oui, c’est lui. Regardez les caisses : marquées du symbole de l’Ahnenerbe. Elles sont particulièrement grandes et profondes.
Yvan grimaça.
- Bon… On ne va pas se voiler la face. Les nazis ont apporté quelque chose ici, à Sète. Peut-être qu’ils ont pu l’envoyer ailleurs en Europe, peut-être pas. Il y a de fortes chances pour que les manifestations que j’ai ressenties là-bas en soient la conséquence.
- Les nazis… Je hais ces gars-là, marmonna Anne.
Ils se regardèrent en silence avant d’éclater de rire en entendant une citation d’un film culte utilisé aussi bien à propos.
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