Prologue : Le Murmure des Anciens

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Il y a très, très longtemps, bien avant que votre professeur d’histoire puisse vous en parler – et croyez-moi, il en sait moins que vous ne le pensez – il existait un temps où la Terre n’était pas juste une grosse boule de terre et d’eau flottant dans l’espace. Non, elle était vivante. Pas comme, "Oh, elle a de jolis arbres et des papillons". Non, je parle de vraiment vivante. Les rivières chantaient des chansons que seuls les plus sages pouvaient entendre, les montagnes racontaient des histoires qui faisaient frissonner les étoiles, et les forêts… ah, les forêts étaient la demeure des esprits les plus anciens, des créatures si puissantes que même les dieux les respectaient.

Et parmi tous ces esprits, il y en avait un qui régnait en maître. Cernunnos. Vous n'avez peut-être jamais entendu parler de lui. Normal. Il n’a pas Twitter, ni Instagram, et encore moins un compte TikTok. Mais à une époque, il était la superstar de la nature. Le Seigneur des Bois, le Protecteur des Créatures, et le type qui pouvait se promener avec des bois de cerf sur la tête sans que personne ne trouve ça bizarre. Si vous pensiez que le cerf dans *Bambi* était majestueux, vous n'avez jamais vu Cernunnos.

Les animaux le suivaient comme des groupies, les arbres se courbaient pour le saluer, et même les rivières changeaient de cours si cela lui convenait. Cernunnos avait un seul objectif : maintenir l’équilibre. Vous savez, cet équilibre fragile entre la nature et les humains, un truc que nous, aujourd’hui, avons totalement oublié. À cette époque, les hommes respectaient les esprits de la nature. Ils offraient des sacrifices, chantaient des chants sacrés, et en retour, la Terre leur donnait tout ce dont ils avaient besoin. Mais bon, on sait tous comment ça se passe : les choses changent, les gens oublient, et avant que vous ne le sachiez, cet équilibre fragile s’effondre comme un château de cartes.

Les siècles ont passé. Les hommes ont commencé à construire des villes, à abattre les forêts pour faire de la place à leurs fermes, et à creuser la terre pour en tirer des trésors qu’ils pensaient éternels. Ils ont cessé d’écouter les murmures de la Terre. Plus de rituels. Plus de respect. Juste un flot continu de "Qu’est-ce qu’on peut faire d’autre pour obtenir plus de choses ?"

Pour Cernunnos, c’était comme regarder son équipe favorite perdre match après match, sans pouvoir rien faire. Chaque arbre coupé était un coup de poignard. Chaque rivière polluée, une insulte. Ses pouvoirs, jadis immenses, commencèrent à faiblir. Les esprits de la nature, autrefois si vibrants, se fanèrent, devenant des ombres de ce qu’ils avaient été. Finalement, même Cernunnos lui-même n’eut d’autre choix que de se retirer, s’enfonçant dans un sommeil profond au cœur des bois. Il espérait que l’humanité se réveillerait avant qu’il ne soit trop tard. Mais les siècles passèrent, et ce réveil n’eut jamais lieu.

Le monde continua à tourner, les hommes poursuivirent leur course folle vers la modernité, et les anciens dieux furent relégués aux légendes. Les forêts, jadis pleines de vie, se réduisirent à des souvenirs, et les animaux, autrefois si nombreux, disparurent peu à peu. Les hommes avaient tout oublié.

Mais ici, c’est là que ça devient intéressant.

Vous voyez, la Terre n’était pas tout à fait prête à abandonner. Même après tout ce temps, elle continuait de murmurer, espérant que quelqu’un, quelque part, entendrait son appel. Ce quelqu’un ? Une adolescente du Vermont, ordinaire en apparence. Du moins, elle le croyait. Et pour être honnête, c’est ce que tout le monde croyait aussi. Emma Duval, 17 ans, lycéenne, aimant les pizzas, les séries Netflix, et détestant les devoirs de maths. Rien de plus normal, n’est-ce pas ?

Mais la Terre avait d’autres projets pour Emma. Car un matin, alors qu’elle se préparait pour une journée typique de cours, quelque chose d’étrange se produisit. Le ciel, au lieu d’être bleu ou gris comme d’habitude, devint… vert. Pas un vert moche, non. Un vert étrange, presque surnaturel, comme si la nature elle-même avait décidé de faire une petite démonstration de force. C’était le genre de ciel qui ferait dire à n’importe quel météorologue : « Hum, c’est bizarre. »

Emma ne s’en inquiéta pas trop au début. Elle se contenta de penser que c’était juste une journée bizarre, comme on en voit parfois. Mais en route pour le lycée, elle remarqua quelque chose d’encore plus étrange. Les animaux. Ils n’agissaient pas normalement. Les oiseaux, habituellement bruyants et désordonnés, chantaient d’une manière presque synchronisée, comme un chœur bien entraîné. Les cerfs, au lieu de fuir à son approche, restaient immobiles, leurs yeux fixés sur quelque chose à l’orée de la forêt.

Normalement, c’est là que toute personne sensée aurait continué son chemin, décidé de ne pas s’aventurer dans des trucs bizarres. Mais Emma n’était pas « toute personne sensée ». Curieuse, elle décida de suivre le regard des cerfs et s’enfonça dans les bois. Et c’est là qu’elle le vit.

Au milieu de la clairière, une silhouette imposante se tenait. Mi-homme, mi-cerf. Des bois majestueux s’élevaient de sa tête, se ramifiant comme des branches noueuses. Ses cheveux bruns, en désordre, lui tombaient sur le visage, encadrant des traits anguleux. Il portait une tunique en cuir ornée de symboles que personne ne pourrait déchiffrer sans un doctorat en mythologie. Mais ce qui frappa Emma le plus, ce furent ses yeux. Des yeux verts, comme la mousse qui pousse dans les sous-bois, pleins de sagesse et de tristesse.

« Salut, » dit-elle. Parce que, franchement, que pouvez-vous dire à une créature qui semble tout droit sortie d’un manuel de mythologie celtique ?

La créature la fixa, son regard perçant comme s’il pouvait lire en elle. « Approche, enfant des Hommes. » Sa voix résonnait comme le murmure du vent à travers les arbres, grave et ancienne, comme si elle avait traversé des siècles d’histoire.

Emma hésita. On lui avait toujours dit de ne pas parler aux inconnus, et ce type-là, avec ses bois de cerf, n’était pas exactement le genre de personne qu’on croise tous les jours. Mais il y avait quelque chose en lui, quelque chose de profond, de primordial, qui l’attirait malgré elle.

« Qui êtes-vous ? » demanda-t-elle finalement, sa voix un peu tremblante.

L’homme-cerf sourit, un sourire empreint de tristesse. « Je suis Cernunnos, Gardien des Forêts, Protecteur de ce qui reste du monde naturel. Je suis celui que ton espèce a oublié. Mais je suis revenu, car l’équilibre est menacé. Et j’ai besoin de ton aide. »

Emma ouvrit la bouche pour protester – elle était une lycéenne, pas une super-héroïne. Mais les mots moururent sur ses lèvres. Car au fond d’elle-même, elle sentait que c’était vrai. Elle ne comprenait pas pourquoi, ni comment, mais elle savait qu’elle était liée à ce destin, à cette mission.

« Pourquoi moi ? » demanda-t-elle, essayant de comprendre ce que ce dieu ancien pouvait bien vouloir d’elle.

Cernunnos s’agenouilla pour être à sa hauteur. « Parce que, malgré tout, tu n’as pas encore complètement oublié. La nature t’appelle encore. Tu peux sentir ce que les autres ne sentent plus. Je t’offrirai une partie de mes pouvoirs, mais tu devras être prête à affronter de grands dangers. Car il y a des forces, puissantes et anciennes, qui feront tout pour nous arrêter. »

Emma déglutit. Elle n’avait jamais voulu être spéciale, et pourtant, tout à coup, elle se retrouvait à devoir sauver le monde. Ou du moins, essayer. C’était beaucoup à encaisser pour une seule journée.

« Alors, qu’est-ce que je dois faire ? » demanda-t-elle enfin, résignée mais déterminée.

Cernunnos se releva, sa silhouette imposante se découpant contre le ciel vert. « Tu devras porter mon message aux Hommes, leur rappeler ce qu’ils ont oublié. Ensemble, nous rétablirons l’équilibre. »

Et c’est ainsi qu’Emma Duval, une adolescente ordinaire du Vermont, devint l’émissaire de Cernunnos, dernier espoir de la Terre dans une bataille contre des forces bien plus grandes que ce qu’elle aurait jamais pu imaginer. Les anciens dieux étaient de retour, et le monde allait devoir réapprendre à les respecter, ou risquer de tout perdre.

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