• Merci beaucoup, dis-je à l'adresse de l'inconnue.
• Je vous en prie. Vous avez l'air d'avoir bien sympathisé avec Luna ?, me répond-elle avec un regard appuyé.
• Euh... Pas plus que ça, à vrai dire, mais elle n'a pas l'air du genre timide, hein ?
• Oh, ça, non ! Parfois, elle exagère un peu, il faut dire.
• Oui. Hum. Un peu, oui.
• Je n'avais pas connaissance de la présence d'une Alix, c'est un membre de la famille de Francisco peut-être ?
• Euh... non. Il n'y a aucune Alix ici, c'était juste une boutade... Bref. Euh, pardonnez-moi d'ailleurs, mais je ne sais même pas qui vous êtes ?
• Oh ! Bien sûr. Je m’appelle Marta. Je suis la maman de Victoria !
• Ah !

 J'essaie de masquer ma surprise, mais intérieurement, je panique un peu. Voilà probablement la raison du malaise de Victoria, finalement. Je me refais le film de la conversation avec Luna... mon Dieu, je meurs de honte.

• Victoria nous a beaucoup parlé de vous, Oscar !
• Ah bon ?
• Oh oui, cette histoire de dialogue et de danse, ça l'a animé durant ces quatre derniers mois !
• Ha ha, oui, j'imagine ! Ça m'a pas mal occupé aussi.
• Elle était véritablement ravie que vous acceptiez ses propositions.
• Oh, c'était pas grand chose...

 Hum. Oscar !

• Pour elle, c'était très important. Elle avait vraiment envie d'offrir ce spectacle à Nina, et elle angoissait un peu de tomber sur un témoin réfractaire !
• Euh, eh bien... Je vous avoue que je ne suis pas du genre artiste dans l'âme, mais vu l'entrain et le talent de Victoria, je ne pouvais pas le lui refuser !
• Oh, c'est gentil de votre part ! Vous avez bien fait, c'était un petit spectacle très réussi !
• Merci.
• Attendez, je vais vous présenter à mon mari !

 Ben tiens. Faisons connaissance tous ensemble sans Victoria, quelle bonne idée ! Je salue un grand monsieur un peu dégarni, qui me fait un clin d'oeil malicieux.

• Alors, vous avez passé une nuit en agréable compagnie, à ce qu'on a compris ?

 Mon dieu. C'est gênant, horriblement gênant.

• Euh... Je ne... Non. Enfin, si. Mais, pas comme vous pourriez l'imaginer...

 Il éclate de rire.

• Allons, je vous taquine. Vous faites bien ce que vous voulez, ça ne nous regarde pas !

 Je n'en suis pas si sûr, m'enfin, je m'abstiens de commenter. Les parents de Victoria changent de sujet : ils sont curieux de connaître les coulisses des J.O., et je leur fais le plaisir de répondre à toutes leurs questions.

• Papa ? Maman ?

 L'air abasourdi de Victoria nous coupe. Je tente un sourire confiant à son adresse.

• Vous avez pris Oscar en otage ?

 Une remarque étonnante qui les rend immédiatement mal à l'aise. Ils se tournent vers moi et se confondent en excuses.

• Désolée, vraiment Oscar, on vous embête !
• Mais pas du tout...
• On vous laisse retrouver vos amis !
• Ils se passent très bien de moi, je crois.
• Nous sommes désolés de vous avoir pris de votre temps !
• Non, vraiment, je vous assure que ça ne me dérange pas !

 Je lance un regard interrogateur à Victoria : qu'est-ce qu'elle me fait, là ? Elle-même semble embarrassée. Ses parents me souhaitent une bonne journée, et s'éloignent vers le buffet. Je regarde ma co-témoin.

• Qu'est-ce qui t'a pris ?
• Je voulais te libérer d'eux, ils peuvent être un peu collants !
• Ils ne me dérangeaient pas du tout !
• Mais tu as mieux à faire que de subir leurs élucubrations !
• … Victoria... ça te dérange que j'adresse la parole à ta famille ?
• Non, non, pas du tout !
• Tu préfères que j'évite ? Dis-le-moi, je respecterai ta demande.
• Mais non, tu parles à qui tu veux ! C'est juste que... ça me fait bizarre, voilà tout.
• Ah ? Pourquoi ?
• Parce que... ils te parlent sans savoir qu'ils s'adressent à... enfin, tu vois quoi... c'est bizarre, non ?
• Si, un peu, mais nous avions une conversation vraiment banale tu sais.
• Moui... J'aimerais mieux te les présenter de façon plus formelle. « Papa, Maman, voici mon... » euh ?
• Mon... ?

 Elle rosit, et ça ne manque pas de m'arracher un rire. Elle s'agace mollement.

• Oh, Oscar, tu te moques de moi ! Ça fait longtemps que je n'ai pas présenté quelqu'un à ma famille...
• C'est de la moquerie gentillette. Je ne me lasse pas de te voir rosir comme ça. C'est très craquant.

 Elle écarquille les yeux, et rougit totalement pour le coup. Je ris de plus belle.

• Tu veux m'achever devant tout le monde, c'est ça ? Tatata, je ne craquerai pas ! Je tiendrai mon rôle jusqu'au bout de la journée, Victoria.
• Et c'est quoi, ton rôle ?
• Le co-témoin plan-plan et crétin.

 Elle glousse.

• Ça te va bien !
• Hey !

 Je lui tapote le bras en signe de protestation bien peu convaincant.

• Bon, je ne m'approche plus de tes parents, on fait comme ça ?
• De mes frères non plus.
• Hum. Ok. C'est le gars là-bas, devant les charcuteries, si je me souviens bien ?
• Oui, c'est Dimitri. Et le grand baraque qui brasse de l'air devant les cousines, c'est Adrian.
• Ah ! Les cousines... Luna est plus en forme ce matin qu'hier soir, on dirait...
• Mouai. Elle est sympa, mais quand il s'agit des mecs, elle est insupportable. J'ai hâte qu'elle découvre qu'on sort ensemble ! Elle va être deg...
• Je ne suis pas certain d'avoir hâte, moi. Elle m'a fiché comme « le type qui a pécho la nuit du mariage », tu parles d'une gloire. Alors, quand ta famille saura qu'il s'agissait de toi...

 Je grimace. En fait, ça me fait même carrément peur, maintenant. Victoria hausse les épaules.

• T'inquiètes pas, Oscar. On verra ça en temps voulu. Je crois que là, si on veut rester discret, il va être temps qu'on reparte chacun de notre côté.
• Oui. Tu as raison.

 Dommage. Je passerai des heures à ses côtés.