Je tends la main pour les présentations. 

• Lorena, ma sœur. Victoria, la témoin de Nina.

 Elle se saluent avec bienveilance.

• Lorena et sa famille seront également présents le jour des noces, précisé-je.
• D'accord, eh bien, enchantée !
• Enchantée également ! Ravie de rencontrer la magicienne qui va faire danser mon frère !
• Ah ah ! Je n'ai pas eu tellement à insister, tu sais.
• Ah bon...

 Une remarque qui me vaut un regard surpris de ma sœur. C'est aberrant pour elle d'imaginer qu'Oscar Vázquez ne se débatte pas comme un damné à l'idée de se donner en spectacle. Elle n'a pas tort. Je cherche encore ce qui m'a pris d'accepter ?

 Pour détourner son attention, je propose de remplir les verres. Victoria, Lorena et son mari discutent avec un naturel déconcertant. C'est plaisant de les voir aussi à l'aise ensemble. Ça ne m'étonne pas, à vrai dire : bien qu'elle soit un peu timide, Victoria est une personne au contact facile.

 Il suffit d'une fraction de seconde - celle où je file à la cuisine pour récupérer les tapas tout chauds dans le four - pour que Lorena en profite pour se précipiter à mes côtés. Vu sa tête, j'ai terriblement envie de m'enfuir.

• Oscar ! Elle est chouette, cette fille !
• Elle est très sympa, oui. C'est cool de préparer le mariage avec elle, j'avais un peu peur de tomber sur une Nina bis !
• Ha ah, c'est sûr qu'elle semble bien plus patiente et compréhensive.
• Oui. Clairement.

 Bon, fausse alerte. Lorena se révèle plus sobre que j'imaginais: : elle n'a pas l'air de se laisser aller aux spéculations, finalement.

• Et... y'a pas un truc ?
• Un truc ? Quel truc ?
• Entre toi et elle ?

 Ah bah non, finalement, j'avais raison. Je la rabroue direct.

• Y'a un truc de deux témoins qui préparent un mariage.
• Oscarito, mon petit frère adoré...
• Non, Lorena, non.
• Oscar, admettons, ok pour toi. Mais elle, elle a un truc.

 Je reste interdit. Je ne vois pas pourquoi elle dit ça, mais si je lui demande ce qu'elle sous-entend par là, elle va s'emballer et me faire une démonstration en douze pages et m'en reparler matin midi soir. Les conséquences seront trop insupportables, aussi, je décide de garder ma curiosité pour moi.

• Je suis certain que tu te fourvoies, Lorena, je vais donc ne pas relever cette remarque fantaisiste et retourner auprès de mes invités avec ce très beau plat de tapas que nous allons dévorer avec plaisir et sans ambiguïtés.
• Mouai... D'autres personnes vous ont vus ensemble ?
• Non. Pourquoi ?
• Pour comparer les impressions...

 Putain, je rêve !

• Lorena ! T'es reloue là !
• Peut-être que si quelqu'un d'autre que moi te disait que...
• Tais-toi ! Tu me saoules ! Y'a pas moyen que j'adresse la parole à une fille sans que tu t'emballes ? Non mais t'as quel âge ?
• Lui adresse la parole ? T'es pas un peu gonflé ? Tu te débarrasses d'Andreas pour un dîner en tête-à-tête et toute une soirée rien qu'avec elle ! On en est à bien plus que simplement s'adresser la parole, là !
• Je me débarrasse de lui ?! Non mais n'importe quoi ! C'est pas du tout la première fois qu'il va dormir avec tes filles chez les parents ! Ils adorent les soirées chamallow-télé chez Papi et Mamie ! Ne transforme pas le truc comme si j'avais calculé mon coup pour un plan drague à la con !
• Et en vrai, tu la dragues ?
• Non !
• T'es con. Tu devrais.
• Je...

 Elle hausse les épaules avec une espèce d'ingénuité qui me laisse pantois. Je devrais ?