Chapitre 9

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Écrit en écoutant notamment : Klanglos – Hard Times (live) [Melodic Techno]

Je sens quelqu’un me secouer violemment et me mettre des claques de plus en plus soutenues sur les joues. Pourquoi tant de violence ? J’ai juste envie de dormir encore un moment. Je pousse quelques grognements, mais cette maltraitance ne cesse pas.

— Bordel Baptiste, lève-toi ! s’agace Andreas.

— Mmh… je veux pas…

Il me menace de retirer la couverture, sous laquelle je suis nu, alors je finis par obtempérer. Tout ça pour constater qu’il n’est que sept heures moins le quart.

— Bouge-toi le cul, ça fait dix minutes que les gens du contrôle anti-dopage sont là !

Je m’habille, encore plongé dans un demi-sommeil, et suis sans trop réfléchir Andreas et les deux hommes. Pas facile ce réveil, mais ça va passer ! Nous descendons au rez-de-chaussée, où les agents du contrôle nous distribuent chacun une fiole et nous indiquent des toilettes afin de réaliser « la collecte de l’échantillon ». Des bouteilles d’eau sont mises à disposition pour ceux qui auraient plus de mal ; pour ma part, ça devrait le faire sans.

Pourtant, une fois que je me suis enfermé dans une des cabines, une irrépressible envie de sommeil me reprend. Quelque chose ne tourne vraiment pas rond, c’est clair ! Ne me dis pas que je suis tombé malade, ça serait vraiment trop con ! Après avoir tant bien que mal rempli les différentes formalités du contrôle, je vais au petit-déjeuner avec Andreas. Constatant lui aussi mon apathie, il me conseille deux bonnes tasses de café pour me remettre d’aplomb. Bien que je n'apprécie pas beaucoup le goût, celles-ci combinées au repas me font le plus grand bien ! Par mesure de sécurité, je passe voir le staff médical pour prendre ma température. 36,6 degrés, tout va bien ! Par contre, à mon retour, Andreas présente une mine complètement défaite :

— Mauvais nouvelle... Le coureur luxembourgeois a déposé une réclamation contre moi. Ok, j’ai légèrement mis l’épaule, mais de là à me disqualifier, ça me dégoûte… Ce pays ne sert à rien en plus !

— Oh les bâtards !

— Tu l’as dit… ça me déprime… T’as intérêt à me venger !

— Ouais, je ne le sens pas trop mal !

Ma course aura lieu en début d’après-midi, à 13h30. Ainsi, nous prenons le bus vers 11h30 – Andreas vient également pour m’encourager – et arrivons au stade vingt minutes plus tard. Je m’estime un peu mou sur l’échauffement, mais sais bien que ces sensations ne sont pas forcément prédictives de la performance à suivre. Quelques minutes avant le départ, mon entraîneur vient me glisser ses derniers conseils, souvent judicieux. Il faut dire qu’il a eu une belle carrière et sait de quoi il parle…

Par le hasard du tirage au sort, je me retrouve dans le couloir adjacent à celui d’Ilya. Nous nous faisons un check du poing pour nous rappeler notre défi proposé la veille, avant de nous mettre en place sur la ligne.

Mon départ est plus mauvais que d’habitude, mais je devrais bien réussir à reprendre ces quelques dixièmes de seconde ! Je parviens péniblement à remonter pendant la première moitié de la course, mais au bout de trois cents mètres, je sens mes jambes me lâcher complètement. Mon cerveau me commande de continuer l’effort, mais j’en suis physiquement incapable ; j'ai juste l'impression que je vais trébucher d'une seconde à l'autre. La plupart des concurrents me dépassent aisément… c’est fini. Je me force à terminer de la manière la plus digne possible, même si le chrono sera catastrophique.

Je traverse la ligne avec la vision qui se brouille et m’écroule sur la piste comme si j’avais terminé un marathon. Je suis bon dernier… Je sens ma tête tourner, mon pouls cogner extrêmement fort et d’étranges frissons parcourir mes mains. Puis plus rien.

***

Je reprends connaissance, toujours allongé sur la piste, mais entouré de médecins qui s’affairent autour de mon corps. Il n’a pas dû s’écouler beaucoup plus que quelques minutes. Andreas est aussi penché au-dessus de moi, très inquiet.

— Baptiste, est-ce que tu penses pouvoir te lever seul ? me demande un des médecins de l’équipe de France.

Tous mes muscles – même ceux des bras – sont en compote, mais par fierté personnelle, je parviens à me remettre difficilement sur mes deux jambes.

— Eh ben, ce n’était pas mon jour, soupiré-je.

— Oui, c’est certain, mais tu devras très sûrement passer des examens cardiologiques avant de recourir en compétition. Ce genre d’accident n’est pas anodin, surtout sur un sprint.

— D’accord… mais je me sentais déjà malade ce matin…

— Cela pourrait l’expliquer, mais les tests seront nécessaires. En attendant, il vaut mieux que tu retournes te reposer à l’hôtel. Ta tension et ton rythme cardiaque sont tout à fait normaux, mais préviens-nous immédiatement au moindre signe suspect.

— Allez, je t’accompagne, dit Andreas.

***

Quelques heures plus tard.

— Putain mais c’est la première fois qu’un truc pareil m’arrive ! Tu crois vraiment que je peux avoir un problème cardiaque ? Je me sens beaucoup mieux, là.

— Je sais pas du tout…

— T’imagines si je ne peux plus faire de compétition ? dis-je avec la gorge serrée. À la limite, je m’en fiche d’avoir planté cette demi-finale…

— Allez, c'était sûrement juste un coup de moins bien ! Ça doit pouvoir arriver à tout le monde sans qu’il y ait aucun souci. Le 400 m est quand même ultra-violent comme effort !

— Ça me stresse trop…

Je n’ai plus le souvenir d’avoir déjà été submergé par les larmes de cette manière. Andreas se rapproche de moi et me serre contre lui en me caressant lentement le dos.

— T’es un guerrier, tu vas t’en remettre dans tous les cas !

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