Chapitre 26 - Le risque
Timothy
Mes étudiants sont partis se balader un peu et je me retrouve seul. Je suis heureux de cette situation car je vais pouvoir me concentrer sur la dure journée que je viens de passer. Je retire mes chaussures puis je m’allonge sur la couverture duveteuse du lit.
La journée avait pourtant commencé comme je l’avais prévu. Nous sommes arrivés à bon port sans encombre puis chacun est partie de son côté l’après-midi. Le ciel s’est assombrit lorsque qu’Elle m’a appelé. Rien que de penser à son visage tartiné de crème j’ai envie de vomir.
Toutefois, ce n’est pas son appel et ses menaces qui m’ont le plus perturbé. Malgré mon self control légendaire je n’ai pas pu repousser Elizabeth Davinson. Je n’arrive pas à croire que ce qui est arrivé dans le sauna est réel.
Je me suis toujours comporté comme un professeur envers elle tout en repoussant mes désirs. Dans un premier temps, la culpabilité m’a envahi. Puis, je me suis convaincu que dans un moment pareil aucun homme n’aurait pu réagir autrement.
Elizabeth est tombée et par réflexe de galanterie je l’ai rattrapée. Je ne compte plus les fois où mademoiselle Davinson se montre maladroite. Ses cheveux humides enroulés dans un chignon flou dévoilaient son cou délicat. Ses joues étaient rougies par la chaleur et ses yeux pétillaient de désir pour moi.
Impossible pour elle de cacher son attirance. Visiblement la vue de mon corps à moitié nu a abattu les dernières barrières. Mais je ne peux pas la blâmer parce que je n’ai pas fait mieux.
Quand elle m’a embrassé, tout le désir que je repoussais depuis notre première rencontre au club est revenu en vitesse. Je n’ai pas pu me retenir de lui rendre son baiser et elle était prête à aller beaucoup plus loin.
Bon sang ! Quand j’ai vu qu’elle ne portait rien sous sa serviette… Je n’ai pas résisté à l’envie de lui donner du plaisir et même un orgasme. Lorsqu’elle m’a appelé « professeur » en gémissant j’ai bien failli lui arracher le tissu de son corps.
A chaque fois qu’elle me nomme comme ça, elle me regarde toujours avec un regard pétillant et respectueux. Je ne comprends pas pourquoi son innocence et ce comportement me donne envie de faire des choses sexuelles.
Je suis ridicule, c’est tellement cliché et un fantasme que je ne pensais même pas possible. Pourtant, j’ai largement dépassé le stade de la relation prof élève avec Elizabeth, mais je ne regrette rien. Malgré mon désir de posséder mademoiselle Davinson, je ne veux pas que mon envie sexuelle se transforme en quelque chose de plus concret.
Je calme mes ardeurs lorsque je prends conscience que mon engin est au garde à vous. Je pose mes lunettes sur mon nez puis j’ouvre mon livre sur l’astronomie. Aussi bien pour elle que pour moi, je dois éviter le scandale. Désormais, je passerais à autre chose avant que cela ne prenne trop d’ampleur.
J’ai lu quelques lignes lorsque mon téléphone vibre. Je bondis sur l’objet en m’attendant à recevoir un message de Louis me prévenant qu’il a un problème. Je redescends sur terre lorsque je remarque un SMS de Georges.
J’accepte de boire un verre avec lui dans l’espoir de me changer les idées. Depuis qu’il a pris sa retraite, il passe son temps à voyager avec sa femme. Georges Higles est un homme que j’estime beaucoup. C’est le professeur le plus sympathique et brillant que j’ai eu la chance de rencontrer.
En fait, il me rappelle Elizabeth Davinson. Tout comme elle, il vient d’une famille modeste. Sa simplicité et sa persévérance lui ont permis d’étudier à Oxford. Ensuite, il est parvenu à mener une carrière brillante d’enseignant chercheur. Il est différent des autres professeurs qui ont le privilège de donner des cours dans les universités les plus prestigieuses du monde.
C’est pour cela que je suis aussi exigeant avec mes étudiants et que j’encourage Elizabeth. Elle a les capacités d’avoir une aussi bonne carrière que Georges. En revanche, je ne peux pas me prétendre aussi méritant.
Je viens d’une famille aisée qui a investit dans l’immobilier de la ville il y a plus de cinquante ans. J’ai intégré Cambridge grâce à l’argent de ma famille. A cette époque j’étais un marginal et un poids pour mes parents J’ai rencontré Georges Higles lors de ma première année qui m’a prouvé que j’avais les capacités. Ma passion pour les sciences s’est alors exacerbée et j’ai choisi de faire une double licence. C’est seulement grâce à lui que je n’ai pas fini délinquant et une honte pour ma famille.
Je souris avec nostalgie en repensant à la vieille époque. Je pousse mes élèves à donner le meilleur d’eux même et à ne pas abandonner. Un défi d’autant plus difficile à relever quand nous constatons la fainéantise croissante chez les jeunes confrontés à une société qui pousse à la performance.
Je me lève du lit, redresse mon col puis je repose mes lunettes ainsi que mon livre. Je ne veux pas faire attendre Georges qui m’attends au bar principal de l’hôtel.
Lorsque j’arrive en bas, mon ancien professeur m’attend accoudé au bar. Sa veste de costume élimée et ses vielles chaussures le font passer pour un homme sans un sou. Néanmoins, cet homme a acquis une petite fortune en menant une carrière aussi brillante. Malgré cela, il reste fidèle à lui-même et mène une vie simple. C’est pourquoi, Georges est toujours de bons conseils.
- Un verre de rhum, je demande poliment au serveur avant de m’asseoir près du retraité.
- Je crois me rappeler que l’alcool fort n’est pas trop ton truc, commence George en remuant son vin rouge. Sauf quand quelque chose te tracasse.
Je soupire en me tournant vers lui.
- Nous nous connaissons depuis plus de quinze ans Timy, reprend-t-il. Je suis observateur et je te connais très bien. Tu es comme un second fils pour moi et suis fier de la carrière que tu mènes.
- Cela me touche beaucoup d’entendre ça de votre part, je dis simplement en buvant une gorgé de rhum.
- Tu as ta manière à toi de montrer que tu tiens aux autres même si tu n’es pas du genre à exposer tes sentiments. Toutefois, j’ai ben vu comment tu regardais cette jeune femme à table.
Je secoue la tête sans rien dire de peur de m’enfoncer dans le pétrin.
- Je suis vieux mais pas aveugle, poursuit-il. Le désir est incontrôlable et peut faire souffrir. Mais il peut pousser à ressentir de l’amour et faire des choix irréfléchis.
- Vous essayer de me donner une leçon de philosophie ? je demande cynique.
- Non, j’essaye juste de te mettre en garde. Fais tes propres choix et n’essaye pas de suivre exactement la même carrière que moi. Vis ta vie seul ou avec les personnes que tu choisiras en suivant ton cœur.
- Si je comprends bien, vous êtes en train de me dire que je dois sortir avec mon étudiante ? je questionne bouche bée.
- Ce n’est pas ce que je t’ai dit, réponds Georges avec malice. Le risque Timy. C’est ce qui influence nos choix et nous mène parfois vers des chemins insensés. Es-tu prêt à prendre le risque pour elle ?
Sans ajouter quoi que ce soit, il se lève et sort du bar en me laissant seul avec le barman. Cette espèce de vieux sage m’a fait venir jusqu’ici pour de dire ça ? J’ai beau essayer d’être en colère contre lui, je n’y arrive pas. Le retraité a toujours le dernier mot et donne des conseils précieux même si sur le moment je les trouve inutiles.
Je grimpe dans ma chambre bien décider à prendre une décision. Je ne mérite pas d’être avec une femme comme Elizabeth Davinson. Malgré notre différence d’âge, elle est la personne la plus douée que je connaisse. Sa curiosité et sa simplicité sont admirables.
Mon étudiante est timide mais je trouve que ça fait son charme. Je dois l’avouer, quand elle est près de moi je me sens plus léger. Son travail d’assistante m’aide énormément et elle est le rayon de soleil qui adoucit mon cœur. Elle provoque également en moi de puissantes vagues de désir.
Dans une université normale, ce genre de relation serait mal vu mais pas sanctionnée. En revanche Cambridge est une université de renommé mondiale et le doyen est par conséquent prêt à tout pour conserver la crédibilité et la réputation de son établissement. Si une relation de ce genre était mise en lumière alors nous serions renvoyés tous les deux. Cela compromettrait de manière irréversible l’avenir de mademoiselle Davinson.
Je ne dois pas me montrer égoïste. Il faut que je lui montre que c’était une erreur et que je l’empêche de s’imaginer des choses pour la protéger. Alors non, je ne peux pas prendre le risque…
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