XV
Trois jours plus tard, l'équipe d'Aramis, Lôrindel et Moyra qui devaient se rendre sur les îles, fut la première entièrement prête à partir. Leur itinéraire bien établi, Valia, le faucon de Lôrindel, partit en avance pour informer les alliés insulaires de l'arrivée des gardes. Leur départ étant prévu pour le lendemain, une grande fête avait été organisée en leur honneur au centre du campement. Tout le monde y était invité et l'on venu nombreux. Il fallait se vider la tête et s'amuser un peu pour pouvoir subir en restant droit les nombreuses difficultés qui les attendaient tous.
De plus, les gardes étaient très aimés dans le campement, toujours à apporter leur aide. Aramis adoré prendre en charge l'éducation intellectuelle et magique des enfants et jeune chevaucheur. Lôrindel et Valia en avaient impressionné plus d'un et apporter une grande aide durant les chasses ou pour retrouver un membre du campement perdu. L'amitié entre le faucon et l'humain était touchante pour tous. Quant à Moyra avec son sens de l'honneur et de la loi, elle avait su mettre un terme à de nombreuse situation de crise et de tension compréhensible dans les conditions actuelle.
La grande place aménagée au centre du campement était pleine de monde et de rire. On oubliait pour un soir ses malheurs dans les danses et la boisson.
Élentir dont le départ s'approchait également, cherchait activement Égilon. Durant ses préparatifs, elle n'avait pas pu lui adresser la parole, l'homme la fuyant. Elle ne tarda pas à l'apercevoir en grande conversation avec un guerrier de tribu nomade. Elle s'excusa auprès du guerrier et emmena son ami à l'écart.
— Je suis désolée de t'empêcher de participer à la fête. Mais, je n'ai pas le choix, je ne te trouve nulle part sinon. J'aimerais que tu me dises ce que tu penses de moi en ce moment.
— Tu es ma cheffe, je ne pense que du bien, le ton mordant d'Égilon ne correspondait pas au regard fuyant qu'il avait.
La jeune femme soupira. Elle et le chevalier, cela avait toujours été une amitié très mouvementée, mais le temps n'était plus aux disputes.
— Égilon, je pars bientôt. Il faut que l'on parle.
Enfin, son ami planta son regard bleu dans le sien.
— Je n'ai jamais su que penser de toi, déclara-t-il brusquement. Tu es forte, intelligente et sûrement la plus prometteuse de nous deux. Pourtant, tu te fiches de tes responsabilités. Tu es égoïste. En tant qu'ami, je te comprends et ne cesse de t'admirer pour ta liberté. Je ne pourrais jamais te détester. En tant que membre de la garde et chevalier, je ne peux que voir les dangers auxquels tu exposes tout le monde. J'ai du mal à l'avouer, mais tu m'as grandement déçu. Et, je suis triste de ne plus savoir jusqu'à quel point je peux te faire confiance.
La poitrine d'Élentir se serra. Elle portait grand intérêt à l'estime qu'avait son camarade pour elle. Elle qui ne portait que peu d'importance à ce que l'on pensait d'elle, avait cependant besoin de l'appréciation de ses proches. Cela était d'autant plus vrai avec lui. Bien que ce fut du passé, Égilon était l'une des rares personnes avec lesquelles elle avait partagé du sexe pour autre chose que le plaisir que cela engendrait, une des rares personnes à avoir entretenu avec elle une véritable relation amoureuse. Si leur alchimie avait été trop explosive pour rester partenaire, elle portait Égilon en grande considération. Savoir qu'il ne lui faisait plus confiance la blessait plus qu'il ne pouvait l'imaginer.
— Je vois.
Élentir se tut et baissa les yeux, chose rare chez elle. Quand elle reprit la parole, elle ne put totalement cacher la grande tristesse qu'elle ressentait.
— Je vais aller me coucher, mon départ ne devrait plus tarder également. Si l'on ne se voit pas d'ici là, je te demande de prendre soin de tout le monde. Je sais que tu sauras prendre les bonnes décisions. Je ferais mon possible pour être de retour avant la bataille.
Égilon la regarda s'éloigner. Il ne regrettait pas d'avoir dit ces mots durs. Il pensait sincèrement que c'est ce qu'Élentir avait besoin d'entendre. Mais, il ne pouvait être que désolée de voir dans quel état cela avait mis son ami.
Le lendemain, dès l’aube, Aramis, Lôrindel et Moyra entourés de la garde, de la famille d'Aramis et d'un prêtre de Stelasys s’apprêtaient à lever le camp.
Aramis fit un dernier au revoir à ces trois enfants en larme et un dernier baiser à son épouse qui lui souhaita bon voyage. Elle n’était pas inquiète, elle ne doutait ni de son mari ni de l’équipement qu’il portait. Pour cause, elle l’avait entièrement fabriqué et c'était sa plus belle œuvre.
Lôrindel lui rigola une dernière fois avec Auriane qui allait à présent bien mieux avant de grimper sur sa monture. Il avait hâte de retourner sur les archipels. Des terres qui, même si elles lui étaient hostiles, soulevaient une grande curiosité chez lui.
Moyra était déjà sûr sa monture à attendre le départ. Elle était déçue de ne pas pouvoir participer au préparatif de la bataille. Mais, elle comprenait parfaitement que son devoir était sur les archipels. Bien malgré elle, elle était devenue au fils des missions de réconciliation un atout important.
Une fois tous en selle, le prêtre qui était là à la demande d’Aramis fit une dernière bénédiction. Ensuite, ce fut au tour d'Élentir de faire un discours :
— Votre voyage sera long et votre mission encore plus difficile. Mais, j'ai confiance en vous. Vous savez à quel point cette mission est importante. Cependant, ne vous précipitez pas, prenait le temps qu’il faut pour convaincre les insulaires que nous avons besoin de leur aide, mais faites-le en vous protégeant. Faites bonne route. Et, que les consciences guident vos pas.
Tous regardèrent leur compagnon partir, ressentant un peu plus l’urgence de la situation. Puis, on se dispersa rapidement, chacun ayant bien des tâches à accomplir.
Peu après, ce fut au groupe d'Élentir de prendre le départ pour les montagnes. Ils avaient fini leurs préparatifs plus rapidement que prévu et ils choisirent donc de suivre leur camarade sur les routes. Ce fut à leur tour de faire leurs adieux.
À l'écart, Palantir discutait avec sa sœur. C'était la première fois qu’ils allaient se quitter pour une si longue période. Et, les deux jumeaux connaissaient la dangerosité de la mission de chacun, personne ne vint interrompre leurs adieux.
Dael lui rigoler avec une grande partie de la garde et fit ses adieux avec Niniel, l'herboriste de la garde et son amie d'enfance, qui lui avait préparé quelques onguents de sa conception. Elle ne se priva pas non plus de le mettre en garde contre les nombreux dangers des montagnes, surtout l’hiver.
Gwindor profita aussi de son temps d’adieux pour échanger des conseils avec Niniel. En son absence, elle devenait la seule guérisseuse du groupe, même si elle n'avait qu'une formation d'herboriste. Toutefois, il ne s’inquiétait pas, la grande mémoire de la femme possédait suffisamment de savoir et elle restait doué de ses mains. Il examina tout de même une dernière fois Auriane et ne se priva pas de donner des derniers conseils de médecin à tous ceux qui venaient lui dire au revoir.
Narmacile, chevalière et membre de la garde, quant à elle discuter très sérieusement avec un groupe de chevalier. Pour eux, elle était une garantie de plus que l’héritier serait en sécurité.
Quand Élentir eut fini ses propres adieux, elle donna le signal du départ. Une fois en formation, la petite troupe s’éloigna du campement. Elle partit le cœur lourd, n'ayant pas parlé à Égilon depuis la fête. Elle se sentait encore mal de le quitter sans savoir si elle allait le revoir et sans avoir pu se réconcilier. Ce qu'elle ne savait pas, c'était que son ami l'avait observé de loin son départ, priant les consciences qu'ils puissent se revoir.
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