XXIII

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 Quelques semaines plus tôt, dans une plaine de l'est, Deux cavaliers s'étaient arrêté sur un ancien campement.

 Ode avait sauté si vite de sa monture que Calywen n'avait pu que l’observer. Malgré son affolement et l’angoisse qui lui broyait ses intestins, la jeune femme se déplaçait avec habilité, ne laissant presque pas de trace. Cela leur permettait à elle et à l’homme resté sur sa monture d’étudier la trace resté au sol. Ils pouvaient y lire ce qui s’était passé.

 Alors que les nomades s’apprêtaient à lever le camp. Que tout avait était rangé et que le départ allait sonner, quelqu’un avait dû crier, prévenant du danger. Mais, il était trop tard, le campement était déjà entouré. Les attaquants étaient formés de soldat de l’empire, de mercenaire et sans doute de chasseur d’esclave. Les nomades avaient aussitôt formé deux groupes. Un qui s’attaqua directement à leur opposant et un autre qui profité de la distraction pour emmener ceux qui n’était pas en mesure de se défendre à l'abri.

 La suite de l’histoire était plus compliquée à reconstituer. Il était presque impossible de savoir si certains avaient pu s’échapper et ce qui était arrivé au combattant.

 Plus elle regardait les traces laisser, plus la colère d'Ode montait. Une colère si forte qu’elle faisait vaciller les courants magiques. Une colère si forte que la nature s’était tue. Et, le vieux chevalier ne pouvait que compatir, ayant lui-même du mal à contenir sa propre colère.

 Soudains Ode cria. Elle cria si fort que son crie transforma en onde de choc. Elle était debout au centre, la tête haute, ses yeux brillant d’une rage et d’une colère si forte, ses cheveux courts volant comme s’il était animé par sa colère.

 Calywen cru un instant voir Rarlys personnifier devant lui.

— Ode, ma pauvre petite.

 La voix sortie de nulle part eut un effet apaisant sur la jeune fille dont le regard retrouva un peu d’humanité. Un vieux chaman s’approcha en marchant difficilement. Alors que Calywen cherchait à comprendre avec méfiance pourquoi lui chevalier chevronné ne l’avait pas senti arriver, Ode le reconnu aussitôt et, oubliant un instant sa rage, accouru à ses côtés.

— Chaman Azurin ! Vous allez bien ?

 L’inquiétude et la colère se lisaient sur le visage de la jeune fille. Elle avait toujours considéré le chaman comme quelqu’un de fort, jamais, elle ne l’avait vu courber le dos ou baisser les yeux. Il marchait toujours d’un pas résolu malgré son âge. Pourtant, devant elle se trouvait un vieillard, le dos vouté, la démarche hésitante, les yeux pleins de souffrance. Ses vêtements, habituellement propres et parfaitement en place, étaient aujourd’hui déchirées et ils restaient de nombreuses taches de sang.

— Oui ma fille, je vais bien. Je vais au mieux que je le pourrais au vu de la situation. Vous avez fait un long voyage pour nous trouver. Suivez-moi.

 Le vieil homme prit les devants, malgré sa démarche difficile, son visage sévère ne laissait rien paraître. Ils marchèrent quelques centaines de mètres quand Calywen remarqua la barrière magique. Il fut surpris, non qu’il n’en ait jamais vu d’ainsi faîtes, mais plutôt parce que sa réalisation semblait étrange. Cette barrière servait à dissimuler un campement, elle demandait une grande expérience en magie. Pourtant, si Calywen l’avait remarqué, c'est qu’elle présentait de nombreux défauts de débutant :

— Ne soyez pas si étonné, je n’avais plus la force de la construire par moi-même, j’ai reçu de l’aide, c'est même un miracle de Luclys si elle tient.

 Alors, ils passèrent la barrière. Calywen eut le cœur fendu par le spectacle. Un petit campement de fortune avait été monté avec ce qui restait des chariots et des tentes. Autours d’un feu s’activait ce qu’il restait de la tribu. La tribu d’Ode faisait partie des plus grandes tribus et était composée d’une vingtaine de familles ce qui donné une centaine de membres. Pourtant, autour du campement, il n’était qu’une vingtaine, la plupart des jeunes enfants et des ados. Le chevalier aperçu cinq adultes, deux femmes et trois hommes, tous équipés, prêt à combattre. Le plus âgé des enfants devait avoir tout juste quinze ans et une seule personne âgée se trouvait au centre des enfants pour les aider. Les plus âgés portaient tous un cache-œil, fait avec des restes de tissu usé, et tous les adultes portaient une écaille noire autour du cou, signe qu’ils avaient perdu un compagnon de vie.

 Ode s’écroula à genoux, les larmes coulant sur son visage. Des sanglots secouant son dos. Elle ne voyait ni ses parents biologiques ni ses frères et sœurs. Si chaque enfant était élevé par toute la tribu, cela n’empêchait pas les enfants d’avoir un lien fort avec leurs parents. C’était également le cas pour Ode même si elle avait quitté la tribu. Cela faisait maintenant sept ans qu’elle avait définitivement quitté la tribu. Elle n’y était retournée que par deux fois. La culpabilité de ne pas avoir été plus présente augmenta alors sa grande tristesse.

 Calywen s’agenouilla au côté de sa camarade et la prit dans ses bras. Il lui envoya une vague d’apaisement tout en fredonnant une berceuse. Un à un, toute la tribu vint entourer les deux arrivants et des mains se posèrent sur la jeune femme et son camarade. Cet instant de communion et de deuil ne dura que quelques instants. Mais, toute la tribu se sentit apaisée. On s’installa alors autour du feu et le chaman commença le récit.

 Les deux gardes avaient parfaitement bien compris le déroulement des évènements. Cependant, ce qu’ils n’avaient pas pu lire dans le sol s’était que le vieux chamane avait tenté de parlement :

— En m’approchant, je sentais leur hostilité. Mais, je ne pouvais pas reculer. Si nous combattions, nous étions perdus. Je lui ai alors demandé ce qu’il voulait. Par politesse, je me suis adressé à lui dans sa langue. Il m’a alors répondu que nous avions deux choix, se rendre ou mourir. Je lui ai demandé ce qu’il nous arriverait si nous nous rendions. Il a rigolé et a déclaré que des sauvages dans notre genre ne pouvaient faire que de bon esclave. J’avais oublié la raison pour laquelle nous avions abandonné nos routes descendant dans le sud. Il fut un temps où les frontières ne signifiaient rien pour nous. Quand les plaine et les forêts du sud ont été offertes à l’Empire, nous continuons à suivre nos routes. Mais plus les années passées, plus les habitants du sud nous ont méprisés. Nous le savions, on nous considérait comme des tueurs de bétail, des voleurs d’enfant et suppôt de dragon. Nous avons cessé d’y passer quand ce sont nos enfants qui ont commencé à disparaître. Je fais partie des derniers à me souvenir des routes du sud. Et, je n’ai su prévenir l’évidence. Nous avons oublié la haine de ces gens-là… Je ne savais pas quoi dire, mais nous ne pouvions nous laisser mettre en esclavage sans combattre. Mais, ils étaient trop nombreux et avaient un élu et plusieurs esclaves dotaient de magie. Leur nombre dépassait largement le nôtre. Nos guerriers ont bien combattu. Grâce à eux, une grande partie de nos enfants ont pu se sauver. Mais le… reste… Beaucoup ont été capturés vivant… Mais, est-ce vraiment un soulagement ? Quelles vies vont-ils devoir mener maintenant ?

 Le vieux chaman se tut. Autour du feu, il n’y avait plus que la vielle femme et les deux inviter. Les enfants étaient retournés à leur occupation et les adultes à leur tour de garde. Ode gardait la tête baisée. Plus aucune larme ne coulait, mais Calywen pouvait ressentir la colère bouillonnée en elle. Il posa une main sur son épaule et déclara :

— Vous avez fait ce qu’il y avait à faire. À présent, votre rôle est de protéger les enfants. Laissez-nous nous charger du reste.

 Le chamane le regarda avec insistance.

— Vous n’êtes que deux, que pensez-vous pouvoir faire ?

— Bien plus que vous ne pensez, répliqua le chevalier avec un regard sûr.

 Cependant, avant de pouvoir passer à l'action, il leur fallait se reposer et se préparer. Comme l'avait si justement remarqué le vieux Azurin, ils l'allaient devoir affronter une troupe complète.

 Pendant que Calywen discutait avec les survivants pour obtenir le plus informations possible, Ode était rentrée en méditation pour pouvoir reprendre ses esprits et regagner le plus de force possible avant le combat. Son palais intérieur était une petite oasis au bord de laquelle elle s’était arrêtée quand elle était petite. Elle n’avait jamais trouvé un lieu aussi apaisant pour elle. Après cela, ils avaient passé la nuit à bien se reposait sous les soins des nomades.

 Ils avaient finalement quitté les survivants en leur assurant que le secours allait rapidement arriver. Calywen ne chercha pas à parler à Ode qui, bien que plus calme, s'était renfermé. Lui qui était de nature jovial et qui était bien plus bavard qu’elle, se contenter de respecter son silence. Elle ne savait pas encore ce qu’elle ferait face à ceux qui ont détruit sa tribu. La seule certitude, c’est qu’elle sauverait ceux qui pouvaient encore être sauvé. Peu importe le prix.

 Il ne leur fut pas très difficile de retrouver le campement de ce qui avait attaqué les monades. Même si les soldats de l’armée impériale s’étaient retirés pour rejoindre leur troupe, les chasseurs d’esclave et les mercenaires ne passaient pas inaperçus. Ils se dirigeaient doucement vers le sud. Mais, le nombre de leurs prisonniers les ralentissait grandement. Il ne fallut que trois jours pour leur poursuivant pour les rattraper.

 Ce fut en fin de matinée que Calywen et Ode aperçurent enfin la grande colonne des prisonniers marchants en deux files indiennes enchainés les uns aux autres, encadré par de nombreux chasseurs et mercenaires.

 Ils les suivirent durant une journée. Une journée de supplice où ils durent se contenter de regarder sans pouvoir intervenir. Ils ne purent rien faire quand les prisonniers se firent fouetter, ils ne purent rien faire quand les chasseurs s’amusèrent à renverser la nourriture de leurs prisonniers, ils ne purent rien faire non plus contre les mains baladeuses et plus encore. Durant la journée, la colère froide d’Ode montait de plus en plus. Pourtant, son regard restait impassible, concentrée sur sa mission. Elle musela sa haine et sa soif de vengeance, il fallait attendre. Et, quand le moment sera venu, chacun d’entre eux allait regretter leur misérable existence. Quand le moment sera venu, ils regretteront chacun de leur acte.

 Et, quand l'ombre de la nuit recouvrit le campement des chasseurs d'esclaves, le cauchemar put avant commencer.

 Soudain un cor d’alerte raisonna dans la nuit. Puis un court silence suivit d'un hurlement de douleur. Les zhikerhotes encore debout sautèrent sur leurs armes. Certains tentèrent en vain de réveiller leur camarade endormit. Sans résultat, ces derniers étaient déjà emprisonnés dans un monde de cauchemars.

 La nuit était noire. Aucune étoile, pas de lune. Une à une, toutes les torches s’éteignirent. Laissant les chasseurs dans l’inconnue, avec, pour seul repère, des cris de douleur, des grognements étranges et des gémissements. Ils étaient devenus aveugles. Certains commencèrent par agiter leur épée dans tous les sens, blessants leur camarade. Le chaos était là.

 Les prisonniers regardaient ce spectacle sans comprendre. Pour eux, la douce lumière éclairait les chasseurs prient de folie. Deux silhouettes, mains dans la main, s’avançaient vers eux, passant entre des zhikerhotes totalement déboussoler, gesticulant dans tous les sens. La femme aux cheveux court et frisée ondulant sous la force de son pouvoir, les yeux vert brillant d’une lueur étrange. Malgré sa petite taille, son aura était terrifiante, les hommes tombés un à un sur son passage. Peu réussir à reconnaître Ode dans cette réincarnation de Nuxys.

 L’homme à côté était tout aussi impressionnant, d’une grande stature, ses yeux aussi verts que sa compagne semblait brillaient en union. Mais, seuls ceux suffisamment doués en magie pouvait comprendre la puissance du lien qui unissait les deux êtres devant eux. L’énergie circulait entre eux comme s’il s’agissait d’un seul être.

 L’homme s’agenouilla pour ramasser les clés auprès d’un des gardes et les lança à l’un des prisonniers d'une voix étrangement grave :

— Libérez-vous et fuyez aussi vite, vous pouvez vers le nord, vous y trouverez un campement, si nous ne sommes pas revenus au matin, reprenait la route pour l’ancienne capitale.

 Sans plus attendre, sans cacher leur gratitude cependant, les nomades disparurent dans la nature. Quand plus aucuns prisonniers ne furent dans le camp, les deux compagnons tournèrent les talons. Alors qu’ils sortirent du camp, la jeune femme s’effondra dans les bras de son compagnon. Il l’a porté avec douceur. Alors qu’il s’éloignait du camp, une lueur de colère rouge alluma son regard et les tentes s’enflammèrent.

 Certains disent avoir vu Rarlys portant Nuxys s’éloigner cette nuit-là. Et, c'est ainsi que naquit un mythe.

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