Chapitre 4
Après un moment à errer dans ces couloirs blancs, entre toutes ces portes, notre guide s'arrête devant un ascenseur nous demandant de monter dedans. Nous l'écoutons et je me place derrière Carol. Je la vois ainsi, du coin de l'œil, appuyer sur le bouton du niveau -10.
Dans l'habitacle, il y a un blanc. Personne n'ose faire de bruit ou alors tout le monde est encore dans l’incompréhension la plus totale. Après tout, nous ne savons pas où nous nous trouvons et personne ne se souvient de rien excepté de son identité. Enfin, s'ils sont tous dans mon cas.
Tout ça est très étrange. Pourquoi me suis-je retrouvée ici et comment ? Ai-je été enlevée ? Comment connaissent-ils toutes ces informations sur moi ? Attendez ! En quelle année sommes-nous ?!
STOP !
Inspire. Bloque. Arrête de réfléchir. Expire. Agis pour survivre. Souviens-toi toujours de ça Eliona. Toujours.
Je me surprends à ouvrir la bouche :
— Excusez-moi mais, en quelle année som...
— Bon, on arrive quand à cette foutue chambre, là ? Je veux que le service massage me débloque tous ces nœuds. J'ai vraiment mal partout, me coupe une pimbêche derrière moi tout à droite.
— Nous sommes en 34...
— Vous avez intérêt à avoir choisi la meilleure chambre pour moi sinon je dirais tout à... à... euh… Bref ! Peu m'importe, je trouverais bien quelqu'un, dit-elle avec cet air méprisant.
— Eh ! Tu peux pas la fermer, pétasse ! lance le gars à ma droite. On sait pas qui t'es et on veut pas le savoir. Déjà, on se souvient pas de nous alors on veut pas t'entendre parler de toi !
Nous nous regardons pendant un moment. Je le détaille et lui fait de même.
Ses cheveux sont châtains. Ébouriffés. Comme s'il venait de se réveiller. Ses yeux sont couleur émeraude. Profonds. Je vois ses lèvres bouger mais je n'entends pas.
Mais qu'est-ce qu'il dit ? Je ne comprends rien.
— Eh oh ! Tu m'écoutes Bunny ? me questionne le blond, me sortant de ma bulle. Je sais que je suis beau mais quand même, tu me flattes, là.
Et prétentieux en plus de ça. Je vois que Monsieur est joueur.
— Pourquoi Bunny ? le questionné-je étonnée de ce surnom. Je m'appelle Eliona.
— Désolée Bunny mais il fallait écouter. C'est ton nouveau nom à partir de maintenant alors va falloir t'y habituer, me répond-il, fier du mot employé.
Étonnée par sa réplique, je décide de rentrer dans son jeu, le sourire en coin :
— Peux-tu me donner la raison de ce surnom, mignon je dois l'avouer, mais que je ne comprends pas s'il te plaît ? Oh et au passage ton prénom, s’il te plaît ? Étant donné que je viens de te donner mon prénom, je pense avoir le droit de connaître le tien, comme ça, on sera sur un pied d'égalité, LOOSER.
Il me regarde à la fois, amusé et outré :
— Moi, Looser ? Ah ouais ? Bien Madame. Je ne devrais pas vous le donner suite à ce surnom très... douteux mais... tu as raison, BUNNY. Tu m'as donné le tien et comme je suis un très gentil ET beau gosse alors, continue-t-il en me regardant toujours autant amusé, gente damoiselle, ce seigneur présent devant vous se nomme Noah et vous ne connaîtrez pas la raison de ce surnom !
Une fille plutôt petite, un carré châtain et de grands yeux noisette rieurs, pouffe devant ce Noah. Je me retiens de rire également amusée par ces paroles.
— Êtes-vous contente ma mie ? demande-t-il amusé par l'effet qu'il me fait à moi et à cette fille.
Je veux répondre mais l'assistante nous interrompt, nous signalant notre arrivée au bon étage et nous demandant de descendre de l'ascenseur.
— Pour répondre à votre question de tout à l'heure, Mademoiselle Eliona Shields, nous sommes en l'an 3470, m'annonce-t-elle en ouvrant la marche dans ces couloirs blancs.
Je m'arrête, surprise de cette révélation.
Nous n'avons jamais été en 3470 ! Enfin, je crois. Après tout, je ne me souviens de rien mais c'est étrange, j'ai l'impression que quelque chose ne colle pas.
Je suis tirée de mes pensées lorsque Carol m'interpelle.
— Pardon, m'excusé-je en reprenant ma place auprès de Noah.
— Bah alors ? Faut arrêter de rêvasser Bunny, plaisante-t-il.
Nous continuons notre avancée dans le couloir, sans bruit, puis nous nous arrêtons devant une porte que Carol prend soin d'ouvrir tout en nous souhaitant la bienvenue dans notre nouveau chez nous.
Nous entrons chacun notre tour. Une grande pièce blanche nous fait face. Très spacieuse. Au fond, se trouvent deux grands canapés, des poufs ainsi qu'une table basse transparente. À droite, un îlot central nous laisse voir une cuisine aux placards blancs et au plan de travail en bois, ce qui donne un côté chaleureux à la pièce ouverte.
Plus j'avance et étudie cette pièce, plus je la trouve fictive. D'autant plus, cette vue magnifique. Nous nous trouvons au -10, comment de telles montagnes enneigées peuvent-elles se trouver ici. Bien trop belles. Bien trop blanches. Plus je m'approche, plus mon impression grandit. Je découvre finalement que ce ne sont pas de véritables fenêtres, mais des écrans. Pour ne pas trahir mes pensées, je fais comme si de rien n'était et range mes questionnements dans un coin de ma tête.
Un grand gars brun, baraqué avec une cicatrice sur l'arcade sourcilière droite s'exclame ahuri devant cette pièce. Il check du poing le « Looser », que je découvre grand et costaud, et se présente en tant qu'Alec Smith lorsqu'un autre vient à eux. Ce dernier a des allures de surfeur : cheveux bouclés, longs et blonds, peau basanée et musclée. Il s'appelle Liam Nelson.
De mon côté, je n'ai pas le temps de me présenter aux autres filles que Carol nous demande de la suivre une nouvelle fois. Nous traversons, tous, la pièce pour la retrouver dans un second petit couloir étroit que je n'avais pas vu sur la gauche de l'entrée. Nous y sommes serrés et Carol nous libère en nous montrant la seule porte qu'il reste.
Donc encore une pièce à découvrir. À inspecter. Une seule. Pas huit. Une. J'ai un mauvais pressentiment.
La seule chose qui pourrait se trouver derrière est une chambre. Mais nous sommes huit. Je commence à comprendre et je sens que cette pimbêche ne va pas apprécier du tout.
L'assistante toujours aussi délicate ouvre la porte.
— Je vous invite à entrer dans la pièce où vous pourrez reprendre vos forces. Ce qui sera non négligeable, précise-t-elle. Je vous laisserai choisir vos lits quand je serai partie.
— Comment ça, choisir nos lits ? crie la « pétasse » de l'ascenseur en poussant tout le petit groupe pour entrer et voir ce qui se trouve de l'autre côté de la porte. Pardon ! Non mais c'est quoi ça ?!
Nous entrons à notre tour pour découvrir un dortoir avec le bon nombre de lits.
Huit au total.
Huit couchettes se trouvent dans la pièce comme je l'avais pensé.
Une pièce totalement blanche, avec au fond de celle-ci une ouverture où l'on peut apercevoir du carrelage blanc et des pommeaux de douche.
J'étais sûre qu'elle n'apprécierait pas.
Après tout, on peut lire à travers ce genre de personne. Tout ce qu'elle pense est évident.
Bien évidemment, elle sera sûrement en désaccord avec la pièce du fond. Et moi aussi.
— Donc ça là, ces lits ! Rassurez-moi, ils sont pour les garçons ? demande-t-elle. Nan parce que là ça ne va pas le faire du tout. Je ne dormirai pas dans la même pièce que ces dégénérés ! Et puis au fond, c'est quoi ça aussi ! Une salle de bain collective ? demande-t-elle furax allant vers le fond de la salle. Vous voulez vraiment que l'on se frotte les uns les autres pour se laver ! Non mais c'est du gros n'importe quoi ! Vous avez rêvé ! Le salon et la cuisine sont géniaux et ensuite on part sur un dortoir pour soldats ! Je vais tout dire à... à...
Elle s'interrompt quelques minutes pour chercher ses mots.
— JE VAIS TOUT DIRE À VOTRE SUPÉRIEUR ! hurle-t-elle rouge de colère.
Essoufflée, elle cherche à se calmer.
— Je prends le lit du fond, continue-t-elle posée.
Quelle emmerdeuse !
Elle se dirige vers le fond à droite et s'installe sur la couchette.
— C'est bien mon supérieur qui vous prête cette suite le temps de vos épreuves, répond avec tranquilité notre guide.
— Vous avez dit le temps de nos épreuves ? Mais quelles épreuves ? Je croyais que nous avions été choisis pour être stagiaires au Centre de Contrôle de la Vie Extérieur ? questionne la fille aux yeux noisette.
— C'est vrai ça. Le directeur Bowers a parlé d'un stage et non pas d'épreuves, lance la dernière fille du groupe.
Elle est d'ailleurs magnifique. Aucune imperfection. La peau lisse et hâlée. Des yeux couleur or, fins mais observateurs. Et enfin des cheveux blonds presque blancs.
— Je crois que vous ne nous dites pas tout. Pourquoi nous avoir effacé la mémoire si ce n'est qu'un simple stage ? demandé-je me rapprochant d'elle.
La femme est prise de court à la suite de nos questions. Elle ferme les yeux, inspire puis les ouvre de nouveau.
— Je tiens à m'excuser pour ce malentendu. Vous êtes tous bien présents pour un stage en ces lieux, répond-elle finalement. Je vous prie de choisir vos lits, de suivre les instructions dans les lettres posées sur chacun d'eux pour ensuite revenir dans la pièce principale afin de mieux comprendre.
Elle part et nous laisse seuls, décontenancés par ces possibles mensonges.
Intéressant. Elle n'a pas démenti nous avoir effacés la mémoire.
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