Chapitre 5 : Un invité surprise
Sethis regardait attentivement la scène, quand son conseiller Knox apparut près de lui dans une longue tunique noire au col relevé jusqu'à ses yeux. Il avait attaché ses cheveux noirs comme un chignon placé au-dessus de sa tête.
« Sa majesté semble apprécier le spectacle.
— Je croise les doigts pour que Lisanna baisse sa garde ne serait-ce qu’un peu. Je reste cependant très perplexe mon cher Knox. Au final je perdrai un allié précieux.
— Vous n'y êtes pour rien Votre Majesté, ces deux royaumes n'ont jamais cessé de faire la guerre. Ils refusent de changer de position pourtant, vous avez trouvé un compromis qui nous arrangent tous dans cette affaire.
— Le futur en sera à jamais changé.
— En effet. Je viens aussi vous prévenir que les préparatifs pour cette guerre sont toujours en cours.
— Dans le plus grand secret, ne l'oubliez pas.
— Oui Votre Altesse, dès que votre fille aura choisi son futur roi, un mot de votre part et nos troupes se présenterons aux portes de Miduzi ou bien ceux d’Aldor.
— Tel est le meilleur moyen de prendre le dessus.
— Pourtant je vois que son Altesse est contrariée à cette idée.
— Avoir une armée assez grande pour la diviser sur deux fronts n’est pas à la portée de tous mais vois-tu Knox, je trouve ma stratégie un peu lâche.
— Vous êtes un grand roi qui guide son peuple à la victoire. Je ne vois rien de lâche dans ce combat mais plutôt un roi qui honore son contrat. »
Sethis garda le silence un instant et contempla sa fille danser aux bras du roi Miduzien puis il resserra le poing sur l'accoudoir de son trône.
« J'ai pris une nouvelle décision. Si un roi doit mourir, je préfère qu’il soit dans ses terres. Le perdant aura une chance de retrouver sa patrie avant l’attaque. Prends bien en compte ma directive.
— Ce n'était pas convenu lors des réunions secrètes, rappela Knox d’une voix imperturbable.
— Ouvre un peu les yeux ! Regarde ce portrait devant nous. Ces deux rois essaient de capter l’attention de Lisanna. Ils jouent le jeu. Jamais ces hommes ne m’ont trahis, ni aucune de leur famille avec qui j’ai eu l’occasion de traiter. En l’honneur du passé, je me dois de laisser le perdant retrouver son royaume pour y mourir dignement.
— Vos désirs sont des ordres Votre Majesté », dit-il en hochant la tête.
Sethis ajouta, après une gorgée de sa boisson : « Concernant la garde rapprochée Miduzienne et Aldorienne…
— Nous les avons envoyés séparément dans deux auberges que vous avez convenu.
— Leur réaction ?
— On m’a rapporté que tout s’est fait en silence dans une atmosphère tendue.
— Tout ce qui m’importe c’est qu’ils obéissent. Continuez à les surveiller. Ceux sont tous des guerriers aguerris ; Aucun ne doit quitter leur auberge. Veillez à ce qu’ils ne manquent de rien en attendant que le contrat se termine. »
Knox hocha une nouvelle fois la tête pour acquiescer les ordres. Le roi Sethis pencha son regard vers sa fille dansant avec Khalel, puis il sourit. « Penses-tu savoir qui ma fille choisira comme son époux ? »
— Hélas les histoires de cœur, Votre Altesse ne sont pas mon point fort. »
Sethis ricana « Quel dommage, j’aurai aimé parier avec toi. »
— Je suis un piètre joueur, Votre Altesse. Puis-je vous demander de me retirer à présent ?
— Allons Knox, profitez un peu de la soirée.
— Merci Votre majesté, mais très peu pour moi, je préfère retourner aux occupations militaires et sa logistique car il nous faudra être prêt le moment venu. »
Sethis n’insista pas. Il fit un geste de la main permettant à son conseiller de s’en aller aussi discrètement qu'il était arrivé tandis que la musique festive, avec le cri de joie des invités, s'intensifiait dans toute la salle.
***
« Vous êtes un excellent danseur roi de Miduzi, lança Lisanna dans un pas de danse dynamique.
— Cela fait partie de l’éducation d’un roi mais dites-moi ma chère, pourquoi vous êtes-vous adouci à ce point ?
— Je fais ce qu’il me plait et vous avez suscité ma curiosité.
— Oh ? Je vous intéresse ? »
— Vous vous méprenez, je cherche surtout vos points faibles ! se défendit-elle.
— Et qu'en ferez-vous après ? dit-il en la collant fermement contre lui.
— Je l’exploiterai pour vous tuer bien évidemment, vous et Hayden. » répliqua-t-elle le visage légèrement rougis.
Khalel libéra un sourire malicieux sans la quitter du regard. Ses lèvres semblaient se rapprocher dangereusement des siennes. Lisanna le repoussa en se dégageant de ses bras et tourna sur elle-même pour s'éloigner du roi. Hélas, Khalel en bon danseur qu’il était, n'eut aucun mal de la rattraper par la main puis l’attira de force contre lui à nouveau. Il n’était pas prêt à la voir s’en aller.
« Hayden, hein ? reprit-il souriant sans prendre en compte sa tentative de fuite, puis-je suggérer de le tuer en premier ?
— C’est possible. Il est méprisable ! Je comprends pourquoi vous tenez tant à lui faire la peau ! »
Khalel la fit tourner deux fois sur elle-même et la ramena à lui. Son air devint sérieux, il répondit : « Faire la guerre n’est pas un jeu princesse.
— Vous auriez dû y penser avant de demander l’aide de mon père. C’est par votre incompétence que je me retrouve collée à vous deux ! »
Khalel fronça les sourcils devant son offense. « Avec tout le respect princesse, vous devriez ménager vos paroles.
— Parce que vous êtes un roi ?
— Parce-que nous sommes deux rois excellents dans nos affaires et c’est bien le problème. Je vous prie d’excuser notre puissance, surtout qu’elle ne fait que s’annuler à chacune de nos confrontations.
— Quel suffisance ! » méprisa-t-elle.
Khalel embrassa sa main puis il répondit : « Vous êtes la seule à être capable de nous différencier.
— En vous épousant par exemple ? »
Khalel plongea son regard noisette dans ceux de la princesse. « Une idée qui me plait, je dois dire. Si j’ai accepté de vous conquérir c’est aussi parce qu'on m’a assuré que vous en valiez la peine. »
Son regard était rempli de sous-entendue, Lisanna répliqua d’un sourire arrogant.
« Veuillez préciser roi de Miduzi.
— Vous êtes belle, forte et cet aplomb à me faire face, ça me plait… oui, vraiment beaucoup.
— Il a de l’assurance ce Miduzien. » pensa-t-elle agacée.
Lisanna serra les dents tandis que son visage changeait de couleur à mesure que les secondes passaient. Ses paroles dénuées de filtres parvenaient à traverser son armure de glace. Pourquoi diable ne pouvait-elle pas lui résister ? Au moment où elle se préparait à répondre, une main vive l’arracha des bras de Khalel. Le changement de partenaire était rapide et sans équivoque. Le roi de Miduzi ne put rien faire quand il se retrouva avec une autre femme heureuse dans ses bras, tandis que la princesse se retrouva appuyée sur un nouveau torse ; plus musclé, il appartenait à Hayden. Le roi Sethis s’amusa beaucoup de suivre ces échanges depuis son trône.
« Vous ? s’étonna-t-elle dans une nouvelle danse.
— C’est mon tour.
— Parce-ce que vous l’avez décidé ?
— J’ai aussi des choses à vous dire !
— Voilà qui change tout, moqua-t-elle avec dédain.
— Vous ne m’aimez pas et c’est réciproque !
— Voilà un point auquel je vous accorde roi d’Aldor. Je pense que vous avez mal compris les règles du jeu.
— Veuillez cesser, coupa-t-il avec irritation, je ne vais pas tourner autour du pot, voici mon offre.
— Votre offre ?
— Marions-nous, purement et simplement par affaire. »
La danse était plus rythmée. Les deux danseurs royaux devaient suivre la cadence silencieusement, puis ils reprirent au moment le plus calme.
« Se marier comme une affaire politique ? Mais enfin, avez-vous pensé à ce que je veux ?
— Comment ça ?
— Et si je préférais vous tuer tous les deux ? C’est pour moi la meilleure des solutions ! Je cherche encore le moyen d’y parvenir en gardant les bonnes grâces de mon père. »
Hayden la fit tomber légèrement en arrière. Le bout de ses cheveux noirs caressait sa poitrine. La sensation était agréable mais il était hors de question de le lui montrer. Devant son silence, Hayden leva la tête vers le visage de la princesse. Ses yeux bleus fixèrent avec détermination les siens. Un instant silencieux que Khalel depuis sa place, ne voyait pas de bon augure.
« Que ce soit clair, je respecte votre père ; c’est un grand allié mais en sommes madame, je me fou du titre de roi de Soranda. Mon royaume est rempli de minéraux que tout Cimeterra envie et que j’utilise spécialement pour réaliser des prototypes que nous appelons « armes à feu ». Avec votre technologie, je pourrai accélérer l’avancé de ces recherches et par conséquent, ces recherches vous appartiendrez.
— Intéressant, vous seriez prêt à me léguer une telle technologie en retour ? »
Hayden n’exprimait aucune émotion contrairement les yeux de la princesse dans laquelle, une petite lueur de désir brillait.
« Peu m’importe, tout ce que je veux c’est le détruire ! »
Le temps paraissait ralentir quand le roi d’Aldor la releva avec douceur. Lisanna cherchait à percer ses raisons qui lui donnaient autant de volonté à anéantir cet ennemi. « Il n’est pas qu’un simple homme de plus à abattre pour vous n’est-ce pas ? Il n’y a pas que ses terres que vous convoitez. »
La princesse sentit le bras du roi se serrer autour de sa taille qui l’amena à se plaquer contre lui. Lisanna pencha légèrement sa tête en arrière en signe de défense mais Hayden était déterminé à lui répondre avec froideur : « Ce ne sont pas des histoires de bonnes femmes, aussi royale soit-elle. »
Son offense était de trop. Lisanna fronça les sourcils et se dégagea sans grâce de son emprise pour stopper la danse. Il n’était pas question de lui laisser le dernier mot. L’index pointait sur lui, elle était prête à faire à lui faire un scandale en plein milieu du bal.
Pourtant la princesse s’immobilisa quand elle le vit lever les yeux avec inquiétude vers l'étage derrière elle. Hayden avait repéré un homme, entièrement habillé de noir. Son visage était camouflé par un masque en forme d’une tête de renard blanc. Son étrange apparence n’était pas ce qui le surprenait le plus mais bien son geste, prêt à lancer un long couteau dans la foule. Non, il n'allait pas le lancer au hasard, il visait l’indisciplinée princesse.
Lisanna lui demanda ce qui n'allait pas mais n’obtenant aucune réponse de sa part, elle décida de se retourner pour tenter de comprendre ce qu’il fixait avec tant d’inquiétude et de rage. Au même moment, l’étrange individu lança son couteau avec une grande précision et une rapidité qui surpris Hayden. Khalel avait aussi remarqué l’assaillant depuis le balcon au milieu d’un groupe d’invité — insouciant de ce qui se passait sous leur nez. Le roi de Miduzi alerta le monde de ce qui se passait mais il était déjà trop tard. Il posa son regard avec effroi sur Lisanna, or, Hayden avait réagis à temps. Quelques instants auparavant, le roi d’Aldor avait tiré sur le bras de la princesse pour l’amener de force contre lui et se tourna pour faire bouclier. Un léger bruit d’impact semblait doux d’abords aux oreilles de Lisanna avant qu’un cri de douleur la fit affoler. Hayden souffrait tant qu’il ne put contenir son cri de douleur.
Incapable de réunir ses idées, Lisanna se figea comme une statue. Elle ne ressentait aucune douleur mais le corps qui la maintenait, relâcha un peu trop vite sa pression puis se laissa tomber sur elle. Lisanna se secoua la tête pour le rattraper à temps. Néanmoins, Hayden était si lourd et imposant qu’elle s’écroula avec lui sur les genoux. Ses bras entouraient ce corps inerte comme pour le rassurer que ça irait mais c’est avec effroi que la princesse vit le couteau planté dans son dos. Plusieurs femmes autour de Lisanna et d’Hayden, hurlèrent, épouvantées par ce spectacle créant une panique et un brouhaha incontrôlable dans le hall. La musique se stoppa et le roi de Soranda se leva précipitamment de son siège, ordonnant à ses soldats de protéger les rois et sa fille.
L’assaillant prit le temps de vérifier l’état de sa cible puis il s’enfuit au premier cri, par l’un des couloirs de l’étage. Khalel ne l’entendait pas de cette oreille. Il avait déjà pris l’initiative d’abandonner sa cavalière de fortune et courut en direction des escaliers les plus proches — quitte à bousculer certains invités du roi sur son passage. Les soldats de Soranda qui avait pour ordre de le protéger ne purent l’arrêter dans sa volonté de poursuivre l’assaillant. En effet, Khalel passa subitement par-dessus d’eux d’un bond surprenant. Ils avaient ressentis un fort courant d’air glissant sur leur visage puis un second coup à l’arrière de leur tête, lorsque le roi bondit une nouvelle fois dans les airs. Néanmoins son saut manquait de précision. Khalel espéra s’agripper à la balustrade en pierre d’où s’était tenu le coupable ou bien il chuterait lamentablement et subirait l’humiliation de l’échec. Heureusement, il était agile et ce n’était pas son premier saut ; il arriva à son objectif. La plupart des invités dans la salle restèrent ébahis par l’envolé du roi Miduzien (bien que maladroite) comme si la gravité n’avait eu aucun effet sur lui. Il fit un dernier bond pour passer sur l’étage sans effort. Devant certains couples abasourdis par son exploit, Khalel vérifia que ses bottes de couleur argent brillaient toujours. Mei lui ferait la morale pour avoir utilisé cette technologie à la vue de tous, puisque s’était bien ses bottes qui le propulsaient dans les airs en libérant sous la semelle un puissant jet d’air. Elles avaient cependant besoin de se recharger cinq secondes après deux coups d’utilisations. Pour l’heure, esquissant un sourire satisfait, il reprit sa course dans le château.
Tous les regards étaient à présent sur eux. Lisanna maintenait fermement le roi dont son sang continuait à couler hors de lui.
« J’espère que je vais… gagner des points…. », dit Hayden avant de perdre conscience.
Lisanna eut un haut les cœurs quand elle ne sentit plus aucun muscle se contracter. Du sang coulait sur ses mains et sa vision se troubla. Malgré tout, ses bras refusaient de le lâcher — aussi lourd était-il. Elle s’accrocha à lui comme une bouée de sauvetage. Puis en relevant ses yeux humides, la princesse s’estomaqua et jura quand elle vit le couteau planté dans le dos, s’incruster dans la peau plus profondément encore. Sans savoir pourquoi, après quelques battements de paupières, ses mains maintenaient le manche pour l’empêcher de s’enfoncer davantage tandis que le reste de son corps maintenait celui du roi Aldorien. Du sang sortie de la bouche d’Hayden et coula sur l’épaule de Lisanna. Elle serra les dents, bien déterminée à réprimer son envie de vomir ainsi que d’empêcher cette foutue arme s’enfoncer davantage. Le couteau était hélas bien réticent pour se laisser faire. Ses mains tremblaient et manquaient de force pour le retirer. Aucun invité n’osait intervenir, rigidifié par l’état de choc créé par la scène d’horreur. Seul l’arrivé de son père lui redonna de l’espoir. Sethis retira les mains de sa fille du manche pour l’empoigner à son tour. D’un geste brusque il extirpa l’arme du dos de l’Aldorien. C’est alors qu’il autorisa à ses servants et majordomes de prendre en charge le roi inconscient. Lisanna se releva, maintenue par les soldats rapprochés de son père. On nettoya ses mains tandis que ses jambes vacillaient et manquaient de la faire chuter à tout moment, tant ses nerfs étaient à vif.
Sethis examina davantage l’arme du crime. La pointe de la lame ensanglantée possédait trois petites accroches de chaque côté qui continuaient à s’agiter au contact du sang. Ce n’était pas un couteau courant et il n’existait qu’un seul royaume pour inventer une arme aussi vicieuse…
« Père ? Est-ce qu’il va s’en sortir ? »
Lisanna était vraiment inquiète. Sethis plus calme, posa le couteau sur un plateau d’argent que tenait l’un des servants et il se tourna vers sa fille.
« Tu as fait ce qu’il fallait pour lui laisser une chance de survivre. Te rends-tu compte de ton geste ? »
Non, Lisanna n’en savait rien, elle ne parvenait pas à croire ce qui se passait. En un éclair sa colère envers ces rois et ce jeu stupide avait été balayé par la peur et l’incapacité de faire plus, même en étant princesse. « J’ai agis sans réfléchir… » répondit-elle en fixant Hayden sur un brancard que deux servants venaient de rapporter.
« La mort n’est jamais belle à voir mais je suis heureux que tu l’es affronté. Tu seras une grande reine. Pour l’heure… » Sethis d’un air grave, observa la foule autour de lui dans un silence absolu. Tous attendait le roi se prononcer. Il fixa son conseiller Knox qui réapparut à ses côtés, toujours impassible quel que soit la situation.
« Le bal est terminé ! s’exclama subitement Sethis, aucun d’entre vous ne doit quitter ou rentrer dans le château sans mon ordre ! Que les soldats surveillent chaque porte et fenêtre, qu’il fouille dans chaque pièce, chaque couloir ; qu’on me trouve le coupable de cette ignominie et bon sang emmenez vite le roi Aldorien aux médecins royaux ! »
Knox donna les directives afin que les soldats puissent se disperser dans le château par groupe de quatre quand Sethis, posa une main ferme sur son épaule. Il écouta attentivement son roi.
« Qu’on me ramène le roi de Miduzi dans la salle de réunion et sans attendre. »
***
Khalel avait suivi les cris qui l’amena dans un couloir ou se trouvait trois grandes fenêtres côte à côte et une porte verrouillée tout au fond. L’intrus qui pensait avoir un instant de répit, s’assurait que son masque tenait en place puis il porta son attention sur le roi de Miduzi aux sourcils froncés ainsi qu’essoufflé. D’un sursaut, l’homme reprit sa fuite mais la porte du fond, s’ouvrit seule en laissant un groupe de soldat entrer avec leurs lances activées. Désespéré, l’intrus recula et fixa une des fenêtres avant de prendre deux boules grises accrochées à sa ceinture. Il les lança vivement sur le sol et les boules se brisèrent et libérèrent une fumée grise et dense. C’était des boules de fumigène que Khalel reconnut et qui servaient à se rendre invisible quelques instants aux yeux des autres. Le roi Miduzien ordonna aux soldats à l’autre bout du couloir de ne pas tirer ; persuadé que c’était le plan de l’intrus pour inciter les soldats à tirer à l’aveugle et qu’ils ne le touchent par accident pendant que l’assaillant se couche sur le sol. La fumée obstruait maintenant toute la vision sur ce couloir et quelques secondes passèrent encore dans une ambiance bien trop silencieuse au goût de Khalel. Il grimaça et se positionna de sorte que ses bottes puissent le propulser en ligne droite dans le brouillard. C’était un plan risqué mais il ne pouvait pas le manquer. Le couloir n’était pas très large. Khalel inspira et actionna ses bottes en appuyant sur un bouton vert, situé sur leur face extérieur. Celles-ci se mirent à briller et l’envoya comme une fusée en avant. Khalel avait bien tendu ses bras de sorte à pouvoir l’attraper mais il ne percuta que les soldats qui attendaient avec méfiance de l’autre côté du couloir. Les soldats grommelèrent et se relevèrent en dévisageant avec sévérité le Miduzien royal. Khalel se releva vite tout crispé et confus de l’avoir manqué.
La fumée se dissipa l’instant et la personne masquée avait disparu. Cependant l’attention du roi de Miduzi se porta sur le reste de fumée qui fut aspirée dans une paroi d’une des fenêtres. Pourtant, aucune d’entre elle n’était censée s’ouvrir. Khalel se rapprocha et sentit un courant d’air froid lui caresser le visage. Quand la dernière parcelle de fumée disparut, un trou de forme circulaire apparut dans le verre de la fenêtre du milieu. Il était assez grand pour qu’un homme puisse s’y engouffrer en se courbant.
Les soldats se rapprochèrent avec vigilance. Khalel passa sa tête dans l’espoir de voir l’assaillant quelque part, en vain. Il s’était probablement enfuit en direction de la cité, mais comment ? Les yeux de Khalel s’arrêtèrent à une branche située un mètre en dessous de lui. Elle était assez épaisse pour contenir le poids d’une personne ; il ne lui restait qu’à descendre par le tronc sans peine. Khalel pesta et conclu que cette attaque et sa fuite était prémédité.
« Majesté de Miduzi, lança un des gardes, veuillez reculer. »
Khalel s’exécuta avec rage. « Ce n'est pas compliqué à comprendre ! Cet enfoiré avait déjà tout planifié ! Il avait découpé le verre au préalable et n’avait plus qu’à le pousser pour sa fuite. Il ne lui restait qu'à sauter dans l’arbre et y descendre en quelques secondes. Descendez en bas, avec un peu de chance il s'est raté ou peut-être qu’il aura fait tomber quelque chose de ses poches !
— Majesté.
— A la vitesse dont il est descendu, il s’est au moins écorché ! On peut le retrouver !
— Que comptez-vous faire ?
— Le poursuivre, je pense pouvoir le rattraper.
— Certainement pas. » répliqua l’un des soldats qui l’attrapa par le col pour le jeter en arrière à ses collègues. Khalel d’abords maintenu fermement, se retrouva en un instant menotté.
« Puis-je savoir ce que vous faites ? demanda Khalel sidéré. N’avez-vous rien compris ?
— Le roi Sethis demande à vous voir immédiatement.
— Menotté ?
— Par précaution, veuillez nous excusez d’avance.
— Et le fuyard ?
— Toute la garde est à ses trousses. Deux rois blessés dans la même soirée serait le déshonneur de ce château. Veuillez nous suivre maintenant.»
La soirée se finissait mal. Le roi de Miduzi bien qu'exaspéré, les suivit docilement.
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