16. Les ruines d'Esyadell

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La surface du sable ondulait au passage du vent, la chaleur était étouffante pour les cavaliers et leurs montures. Le grand chien se cachait dans l’ombre d’un dromadaire. Le chèche des voyageurs couvrait entièrement leur visage, ne dévoilant que leurs yeux. Sarshall avait trouvé refuge contre son compagnon, qui le protégeait par quelques morceaux de tissu contre son ventre.

Le trajet était fatigant, il était difficile de lutter éternellement contre les éléments naturels de ce royaume. Le paysage était inhospitalier, les êtres vivants y résidant étaient souvent dangereux, et l’eau se faisait rare, voire inexistante.

Mais le désert n’était pas fait que de grains de poussière, il abritait des massifs rocheux, des étendues de terre asséchées, et des cités qui résistaient à ce mangeur silencieux. Ce n’était pas anodin lors d’un voyage, de croiser des habitations engloutit par le néant, enseveli en silence, pendant de nombreuses années.

C’était le cas d’Esyadell, une cité proche des massifs rocheux de Sarrailh. Les dunes qui l’entouraient étaient la preuve du passage du temps, et de l’acharnement du vent. Autrefois, il s’agissait d’un village qui servait de point de relais entre les grandes métropoles. Désormais, ce n’était plus qu’une ville fantôme, une parmi tant d’autres.

La caravane continua son chemin sur la crête d’une dune, apercevant au loin les vestiges des habitations. Les lignes d’Anata entouraient l’intégralité de la ville, les fleurs de feu prenaient une dimension plus importante à ses abords.

Le regard curieux d’Onyx se leva vers les ruines qui se dressaient face à eux, le groupe s’approchait des premières bâtisses. C’était des habitations faites de terre et de pierre, enterrées de moitié par le désert. Ses yeux se promenaient un peu partout, le silence de ce lieu pesait sur son sang-froid.

— Détends-toi, tu ne crains rien.

Tilidad lui offrait un fin sourire dans le but de le rassurer.

— Qui habitait ici ?

— Des marchands principalement, des familles, c’était une ville de passage pour les caravanes. Et elle l’est toujours, même si tout le monde est parti.

— Comment est-ce arrivé ?

La jeune femme ne semblait pas savoir comment répondre à cette question, tournant son attention vers Unakite, qui vint les rejoindre.

— Une bataille a éclaté il y a quelques années entre les habitants de la ville et les paladins de Bladewar.

— Qui ça ?

— Tu ne les connais pas ?

Onyx secoua la tête en signe de négation, n’ayant jamais entendu parler de ces paladins.

— Ce sont des mercenaires, des combattants pour le mal qui ronge notre monde.

La voix méprisante de Jun surprit le nouveau venu, qui ne s’attendait pas à ce qu’il prenne part à la conversation. D’ailleurs, il remarqua également que la caravane ne se tenait plus en ligne, mais s’était regroupé depuis leur entrée dans la cité.

— Alors, pourquoi les appelés paladins ?

— Parce qu’ils pensent servir une noble cause, ce ne sont que des chevaliers errants.

Le regard des deux plus vieux se croisait dans une expression de tristesse, le visage du Jun quant à lui se couvrit d’amertume qu’Onyx ne comprend pas.

— Ils se déplacent en petit groupe ou en solitaire, ils sont à éviter durant n’importe quel voyage.

L’intervention de Badho clôtura la discussion. Les cavaliers formèrent des groupes et ne s’éloignaient jamais les uns des autres. Onyx se permit de ralentir l’allure afin d’observer plus en détail les ruines qui les entouraient.

Les bâtisses étaient pour la plupart en ruines, les toits s’étaient effondrés, les murs affaissés, les portes ou les fenêtres étaient condamnés. La grande mosquée n’avait pas survécu au désert, son dôme s’était complètement effondré. Le gypse qui le constituait s’était fragilisé avec le temps, qui laissait la poussière le constituant s’échapper au grès du vent.

Un détail attira la curiosité dévorante du jeune homme, qui tira sur sa rêne afin de guider sa monture vers une ruelle, sous les regards inquiets des plus vieux. Dans ce passage étroit, il remarqua des dessins tracés sur le mur des ruines, abimés par le temps. Il continua sa marche, suivant cette rue adjacente à l’avenue principale où se trouvait la caravane.

Petit à petit, il se rendit compte de la beauté cachée de la cité. Les murs étaient couverts de fresque dessinée à la craie et de mosaïque, représentant la ville dans son ancien temps. Des bâtiments colorés, des voyageurs, des marchands, des enfants qui jouaient dans les rues. Un sentiment de nostalgie l’envahit soudainement, sans qu’il n’en comprenne son origine.

Étrangement, Tenerice ne lui manquait pas, sans doute parce qu’il n’était parti que depuis quelques jours. Il n’avait pas de regret concernant ses actes ni sa fuite. Le seul regret qu’il avait, c’était de ne plus avoir sa grand-mère comme soutien.

Un soupire passa la barrière de ses lèvres tandis qu’il baissa le regard vers Sarshall. Ce dernier s’était redressé sur le pommeau de la selle, curieux de se trouver dans un nouveau lieu. Il remarqua la présence de l’Arise proche de sa monture. Un ricanement lui échappa en comprenant qu’il sera toujours surveillé, ou protégé, par la caravane.

Quelque chose vint l’éblouir, lui faisant plisser les yeux. Il s’approcha du mur appartenant à un bâtiment plus grand que les précédents, possédant d’étrange gravure dans la pierre. Sa main vint frotter la surface afin de retirer les grains de sable et de poussière qui s’y était incrustée, nettoyant le dessin.

Il se recula, observant avec attention les traits fins gravés dans le gypse. Il discerna la silhouette d’un grand reptile, serpentant autour d’Esyadell. Il reconnaissait les lignes d’Anata, qui semblait se former après le passage du serpent.

— Hazel, la gardienne d’Esyadell.

Il sursauta légèrement, tournant son attention vers le plus jeune des gardiens, qui s’était avancé à ses côtés. Le canidé retourna à sa place, proche de son compagnon de route, tandis que ce dernier regardait les gravures.

— Les lignes d’Anata viennent de lui ?

— Ce sont des lignes d’avertissement pour les voyageurs. Même si la cité est en ruine, il continue de la garder.

— Dans quel but ?

Le plus vieux se détourna de lui afin de rejoindre le reste du groupe qui s’était arrêté dans l’avenue principale. Mais il s’arrêta, tournant légèrement le visage vers Onyx, le regardant calmement. Il n’y avait plus ce mépris constant dans son regard, juste un calme inhabituel.

— Protéger la cité, éternellement. Le devoir que lui ont donné les déesses.

Il quitta la piste du plus jeune, regagnant le groupe. Le nouveau voyageur resta quelques secondes de plus face au mur, avant de s’en aller à son tour, retournant auprès de la caravane. Ils continuèrent leur chemin jusqu’à la sortie de la cité, afin de rejoindre la prochaine ville.

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