4. Une mélodie mélancolique

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Le quatuor marchait dans le couloir en direction des casiers, lorsque le son mélodieux d’un violon résonna au loin. Intrigué, Ken se sentit guidé vers la salle de musique au bout du corridor. Ses amis le regardèrent s’éloigner sans bouger.

Devant la porte fermée, Ken s’arrêta, un instant, espérant découvrir qui était la personne jouant à la perfection cet instrument. Il l’ouvrit tranquillement et avec étonnement, vit Amelia au fond de la pièce, face à la fenêtre jouant cette chanson mélancolique. Discret, Ken referma doucement la porte derrière lui, puis l’écouta silencieusement. Émerveillé par son talent, il avait l’impression d’entendre son histoire. Amelia effleura sa dernière note d’un mouvement doux et fluide. Elle laissa aller toutes ses tensions aux épaules et relaxa son bras qui tenait son archet. Amelia se retourna, puis sursauta en réalisant la présence de Ken.

– Tu ne m’avais jamais dit que tu avais un talent en musique.

Amelia soupira en laissant échapper des larmes qu’elle ne pouvait plus retenir. Ken s’approcha lentement. Elle déposa son violon et son archet sur un bureau à ses côtés. Ne voulant pas lui faire face immédiatement, un sourire se dessina sur ses lèvres. Lorsqu’elle se tourna finalement vers lui, Ken savait bien que derrière ce sourire se cachait une profonde tristesse.

– Disons que… Mon violon est mon seul ami proche qui a toujours été là quand je me sentais triste. La musique est le seul moment où je peux m’évader et retrouver un réconfort.

– C’est quoi que tu recherches tant à t’évader ?

– J’ai découvert ma passion pour le violon grâce à mon père. Ensemble, on écoutait souvent de la musique d’orchestre symphonique et des musiciennes jouant du violon en solo. J’adorais les entendre. Mon monde semblait s’arrêter. À mes huit ans, mon père m’a offert pour ma fête, mon premier violon. Il m’a depuis ce jour, toujours encouragé à jouer. Toute ma jeunesse, j’ai souffert d’intimidation… J’ai changé plusieurs fois d’écoles.

– Sérieusement ?

– Tu sais… les jeunes peuvent être parfois tellement méchants. On se moquait souvent de moi, juste parce que j’aimais lire beaucoup de livres mythiques comme les fées et les esprits. Je me sentais à part des autres vu que je ne partageais pas les mêmes intérêts que les autres enfants. Je préférais me tenir loin des autres et je parlais rarement. Ils m’ont ensuite traité comme étant le fantôme de l’école. Des rumeurs fausses circulaient à mon sujet, surtout si par malheur quelqu’un égarait un objet, on me blâmait immédiatement. J’étais la risée de l’école.

Ken l’écouta l’air outré et à la fois attristé.

– Malgré l’enfer que je vivais, ma mère était toujours trop préoccupée par son travail de nuit, donc seul mon père était présent pour me protéger et me rassurer. Je me perdais facilement dans mes pensées et dans mes émotions négatives. Il m’a fait promettre de ne jamais arrêter de jouer, que ce violon devait m’accompagner dans mes bons et mauvais moments. Donc, depuis la mort de mon père, jouer du violon est mon seul souvenir de lui.

Avec désolation, mais grugé par sa curiosité, il ne put s’empêcher de lui demander :

– Je suis désolé… et quand est-il mort… ?

– Quand j’avais douze ans, dans le temps où je vivais encore à Torbay… Il était policier et il est mort tragiquement lors d’une arrestation qui a mal tourné…

Les yeux de Ken s’écarquillèrent.

– J’ai moi aussi déjà vécu à Torbay plus jeune.

– Ah oui ?

– Te rappelles-tu exactement quand c’est arrivé ? osa-t-il demander.

– C’était dans le temps de Noël ...

Même s’il voulait poser de nombreuses autres questions, il sentait qu’il ne devait pas insister maintenant qu’elle avait commencé à s’ouvrir à lui. Amelia reprit son violon et le serra contre elle, absorbée dans ses pensées nostalgiques. Ken ressentit sa fragilité et eut envie de la prendre dans ses bras pour qu’elle se sente en sécurité. Il s’approcha d’elle lentement, puis déposa une main sur son épaule.

– Je sais que parler de la mort de ton père peut rouvrir de vieilles plaies non cicatrisées… mais laisse-moi te rassurer que tu ne dois plus te sentir seule. Car tu ne l’es pas, lui dit-il compatissant.

Sans croiser son regard, Amelia haussa les épaules en soupirant. Elle effectua un pas chancelant vers l’arrière, brisant le contact avec Ken.

– J’essaie de le croire… répondit-elle en un souffle.

Ce geste fit réaliser à Ken la peur et la solitude qu’il avait autrefois en commun avec elle; il savait qu’il ne devait rien précipiter et la laisser s’ouvrir à son rythme. Il ne voulait surtout pas déranger le peu de consolation qu’elle a eu dans sa vie tourmentée, il craignait de faire plus de mal que de bien.

– Est-ce que je peux te raccompagner jusque chez toi aujourd’hui, proposa-t-il.

Amelia leva les yeux vers Ken. Elle se sentait toujours aussi mal à l’aise face à toute cette gentillesse, qu’elle avait de la difficulté à bien démontrer sa reconnaissance. Heureusement, il percevait toujours cette lueur d’espoir dans le bleu de ses yeux. Voyant sa sincérité sur son visage, elle hocha finalement la tête en esquissant un sourire discret.

Ses amis se tenaient derrière la porte en observant discrètement la scène. Pendant que Zoé et Blair rêvassèrent en voyant le rapprochement de Ken et d’Amelia, Brendan se questionna soudainement au sujet d’Angie :

– J’y pense… Qu’est-ce qui est arrivé avec Angie ? Ken ne semble plus en parler.

Blair constata que Ken ne lui avait jamais mentionné la vraie nature de cette dernière.

– Oh, il ne t’a pas dit ? Angie a malheureusement déménagé et elle est dorénavant loin d’ici. Mais il a toujours gardé contact avec elle et ils sont restés de très bons amis, bredouilla-t-elle comme excuse.

– Je vois, alors tant mieux, elle était si mystérieuse, mais si bien pour lui…

Ken et Amelia s’approchèrent de la porte.

– Ils arrivent ! s’exclama Blair en poussant Brendan et Zoé loin de la porte, afin de prétendre qu’ils ne les espionnaient pas.

Lorsque Ken et Amelia sortirent de la salle de musique, il resta surpris en voyant ses amis.

– Vous êtes encore là ? s’exclama Ken.

– En fait, on tenait absolument à t’attendre, pour qu’on puisse partir tous ensemble, répliqua Zoé.

Blair s’avança promptement vers Amelia et avec enthousiasme, elle lui dit qu’elle tenait à se présenter.

– C’est vrai, tu n’as jamais eu la chance de connaître mes amis, répondit Ken.

Brendan et Zoé se présentèrent avec leur plus beau sourire accueillant. Amelia fut ravie de faire leur connaissance.

– Serais-tu intéressé de nous accompagner demain matin pour admirer les baleines ? suggéra Blair.

Amelia est touchée par cette proposition.

– Sérieusement ? Je crois n’avoir jamais vu de baleine de mes propres yeux.

– Quoi ! Alors une raison de plus pour que tu sois là. C’est une expérience impressionnante à ne pas manquer ! s’exclama Blair avec passion.

– Très bonne idée Blair ! s’écria Zoé.

– Bay Bulls est la meilleure place pour aller les observer en kayak. Alors si vous voulez, Ken et Amelia, vous pouvez me rejoindre chez moi vers 10 h. Mon frère pourra aller nous porter. C’est quand même à vingt-cinq minutes d’ici, proposa Blair.

– C’est parfait ! De mon côté, je demanderai à mes parents de venir me porter avec Brendan, répondit Zoé toujours aussi enthousiasmée.

Tout le monde acquiesça avec joie et quitta enfin l’école.

Comme promis, Ken raccompagna Amelia chez elle. Ils marchèrent sans trop bavarder pendant la moitié du chemin. Amelia avait réussi à garder les yeux droits avec le peu de confiance qu’elle avait gagnée, mais elle baissa lentement la tête après un moment. Cette fois, pour une raison quelconque, elle ne pouvait pas contrôler. Par la timidité qui la terrassait, son regard se tourna vers la main de Ken. L’envie de la prendre effleurait son esprit, mais elle secoua la tête pour échapper aux idées qui la gênaient plus qu’autre chose.

– Je suis content que tu viennes avec nous demain, dit Ken pour briser le silence.

– Quoi ? Eh oui moi aussi, se ressaisit Amelia de ses rêveries, ils sont gentils tes amis.

– Ce sont aussi tes amis maintenant, lui répondit-il souriant tendrement.

Amelia fut touchée et ne put s’empêcher de rougir. Charmer par son sourire, mais surtout par sa gentillesse qui la faisait sentir si importante.

– Merci, Ken, lui dit-elle en s’arrêtant devant chez elle, j’ai hâte à demain matin.

De la fenêtre du salon, sa mère observait la scène d'un air interrogateur. Ken lui envoya un dernier signe de la main avant qu'Amelia franchisse la porte.

– Enfin tu es rentrée. Mais qui était ce garçon ? l’interloqua-t-elle de son ton autoritaire.

– Et c’est maintenant que tu t’intéresses à ma vie ?

– Le fait que tu ne reviens pas à l’heure habituelle à la maison. J’ai des raisons de me questionner !

– C’est Ken, un ami de ma classe. Il m’a invité avec ses amis pour aller voir les baleines, demain matin.

– Un ami ? Je suis heureuse que tu aies été capable de te faire des amis, dit-elle en se radoucissant.

– Ah oui ? Tu l'aurais su si tu avais pris le temps de t'arrêter et de t'occuper de moi alors que je t'avais déjà glissé un mot, mais bien sûr, tu as oublié. Comme parlé de mon père. Je ne t’ai jamais entendu parler de lui à qui que ce soit, comme s’il n’existait plus ! cria Amelia offensée.

C’était le genre de confrontation qu’elle entretenait avec sa mère depuis l’absence de son père. L’incompréhensibilité, le déni et la colère furent malheureusement les émotions qui baignaient dans cette maison. Soudain, le téléphone sonna. Sa mère hésita un instant avant d’aller répondre, voulant continuer cette discussion qui allumait des flammèches.

– Tu ferais mieux d’aller répondre ça doit être le travail qui t’appelle, dit Amelia d’un ton embêté.

Puis, d’un pas impatient, elle s’enferma dans sa chambre sans laisser terminer sa mère s’exprimer.

– Amelia ! Reviens ici !

Découragée, elle alla répondre à l’appel qui fut effectivement l’hôpital où elle travaillait en tant qu’infirmière. Elle se sentait inévitablement déchirée d’entretenir ce genre de relation avec sa fille, mais elle ne ressentait pas avoir d’autres choix que d’accepter ces heures d’urgences et instables. Elle ne voulait que le bien-être de sa famille, enfin de ce qu’il en restait. Au fond d’elle, elle savait que c’était sa manière de fuir le quotidien alors qu’elle n’était pas encore prête à aborder toute la personne qu’elle retenait depuis le décès de son mari.

Au milieu de la nuit, une mince fumée noire s'échappa d'une plaque de ventilation sur le sol de la chambre de Ken. Il dormait profondément quand ce nuage serpenta lentement jusqu'au lit, formant un brouillard dense. La porte entrouverte, Miko se faufila dans la pièce et s’immobilisa en voyant ce phénomène étrange. Apeuré, son corps se rétracta, agitant sa queue et plaquant ses oreilles contre sa tête, le chat se mit à grogner avec colère.

Ken marchait sur un chemin en pierre qui lui semblait familier. Il pouvait apercevoir au loin une forteresse entourée d’une forêt, là même qui lui remémorait son dernier rêve. Il continuait d’avancer, lorsque l’atmosphère devint soudainement brumeuse, grisâtre et hostile. Il se retourna et vit une grande femme aux cheveux noirs droits. Malgré son aura très sombre, elle reflétait une beauté intimidante. Son regard était d’un noir profond et perçant.

– Enfin on se rencontre, dit-elle d’une voix lugubre.

Lora se réveilla par le miaulement agressif de Miko. Dans la noirceur de sa chambre, elle se leva de son lit insécure. En voyant que sa jeune sœur dormait encore dans son lit à côté, Lora décida d’aller inspecter ce qui se passait.

– Miko ? chuchota-t-elle en avançant dans le couloir d’un pas hésitant.

En entendant le grognement provenant de la chambre de Ken voisine à la sienne, elle poussa doucement la porte et remarqua le chat qui fixait le lit.

– Qu’est-ce qu’il y a Miko… débuta Lora pour alors se taire aussitôt qu’elle remarqua un nuage noir flotter sur Ken. La peur monta en elle et plaqua ses mains contre sa bouche pour contrôler son envie de crier. Elle recula de quelques pas, pour s’arrêter avant la première marche des escaliers.

Toujours absorbé dans ce rêve, un frisson parcourut tout le corps de Ken. Il était confus, et tentait de se convaincre qu’il ne faisait pas face à un autre démon.

– Qu’est-ce que tu veux de moi ? Et où je suis !

La femme aux cheveux noirs lui sourit malicieusement pendant que des ailes aux plumes noires poussèrent dans son dos. Elle s’avança d’un pas menaçant vers Ken qui resta pétrifié sur place. Son énergie était si puissante qu’elle le paralysa. Elle lui toucha le visage de ses bouts des doigts sensuellement. D’une voix provocatrice, en prenant plaisir de sa peur, elle lui dit en pesant ses mots:

– Tu es en ce moment dans ton sommeil le plus profond et le plus vulnérable. Ton âme ne peut s’envoler, ton être tout entier fait silence et c’est la meilleure opportunité pour te passer ce message que je voyage avec moi depuis longtemps : Je suis celle qui venge. Et les rêves sont comme un champ de bataille où tout peut se briser, s’écraser, où des êtres peuvent être tués…

Elle posa sa paume de main contre le front de Ken et une douleur vive, migraineuse, le réveilla brutalement de ce rêve. Lorsqu’il sursauta, cette fumée opaque fonça vers Lora qui se mit à hurler, terrorisée. Alarmé par son cri, Ken tourna vivement la tête vers sa cousine qui fut projetée en bas des escaliers.

– Lora ! hurla Ken en bondissant de son lit.

Hors de ses attentes à mi-chemin dans les airs, une vive lumière apparut et des ailes angéliques se déployèrent pour amortir sa chute. Lora fut ensuite déposée doucement dans l’escalier. Ken échappa un soupir soulagé. Réveillée par les cris, Elena, sa tante, fit irruption hors de sa chambre en panique pour le retrouver au milieu des escaliers auprès de Lora en larme. Confuse, Sonia sortit à son tour.

– Qu’est-ce qui se passe ? demanda Sonia.

– Ma chérie ! Dis-moi que ça va ?! s’écria Elena.

Sous le choc, elle hocha simplement la tête, les yeux en larmes.

– Ça va maman… marmonna-t-elle.

Les yeux larmoyants et inquiets de Lora croisèrent ceux de Ken. En la contemplant, il pouvait percevoir sa crainte. Il reconnaissait ce regard.

– Qu’est-ce qu’il y a Lora ? Tu as vu quelque chose ?

– Je l’ai vu… Et Miko ne l’aimait pas… Il y avait un nuage noir au-dessus de toi… bégaya-t-elle encore sous les émotions.

Ken écarquilla ses yeux.

– Qu’est-ce tu veux dire Lora ? s’enquit Elena.

– J’ai eu peur et ce nuage m’a poussé… c’était si mauvais… expliqua-t-elle difficilement en éclatant en sanglot dans les bras de sa mère.

– C’est correct ma chérie, ça va aller maintenant. On en reparlera une prochaine fois. Viens dormir avec moi, consola Elena en la prenant dans ses bras.

– Moi aussi ! s’exclama Sonia, nerveuse à l’idée de dormir seule.

Elena remonta de quelques pas pour finalement se retourner vers Ken, encore assis dans les escaliers, pensif.

– Ken, tu vas être correct pour la nuit ?

– Oui… marmonna-t-il la tête basse perdue dans ses idées.

Il se releva enfin, regarda autour de lui en essayant de tisser les évènements entre son rêve et ce dont Lora a été témoin.

Le lendemain matin, en sortant de la voiture de Curtis, Amelia, Blair et Ken se dirigèrent vers la rive où les autres les attendaient déjà. En chemin , Amelia remarqua la mine morose de son ami Ken.

– Tu es resté silencieux durant tout le trajet dans l’auto. Est-ce que ça va ? demanda-t-elle inquiète.

Ken hocha lentement la tête.

– Tu es sûr ? Tu as l’air super fatigué, affirma Blair.

– Ouais , je n’ai pas tant dormi.

– Un autre rêve ? supposa-t-elle.

– Je ne peux vraiment rien te cacher. J’ai rêvé à une démone.Enfin je crois. Mais je ne suis pas sûr de qui elle était vraiment…

– Que veux-tu dire par là ?

– Elle n’était pas si effrayante que ça physiquement, mais elle m’a dit quelque chose de troublant que je ne pense même pas trouver un sens.

Il fit une pause et tenta de mettre de l’ordre dans ses idées perturbées. Amelia garda le silence. Elle préférait rester attentive à leur conversion sans interférer.

– Quelque chose a attaqué ma petite cousine…

Blair le contempla d’un air perplexe.

– Elle a été poussée dans les escaliers, finit par dire Ken troublé.

– Oh, mon dieu, comment va-t-elle ?

– Heureusement tout s’est bien terminé, elle a été attrapée par un ange pour la protéger…

– Ouf! Tant mieux, s’exclama Blair soulagée, sinon je soupçonne si ce n’est pas un démon ça pourrait être un ange déchu qui est venu te rendre visite dans ton rêve ?

– Probablement.

– Tiens-moi au courant si jamais tu fais d’autres rêves étranges comme ça.

Ken acquiesça.

– Je suis désolée d’entendre cela, dit Amelia avec compassion.

Leur conversion s’interrompit abruptement lorsque Zoé s’écria au loin sur le rivage.

– Hé ! Enfin vous êtes arrivé !

Après que Blair, Amelia et Ken s’excusèrent de leur retard, le groupe s’approcha du quai pour écouter les instructions du guide pour le kayak. Ils enfilèrent ensuite leur gilet de sauvetage. Amelia exprimait à peine son excitation face à l’expérience qu’elle était sur le point de vivre, mais elle était comblée intérieurement.

– Tu es prête ? demanda Ken souriant en s’installant dans son kayak flottant à côté d’elle.

Amelia lui répondit par un hochement de tête. Ils poussèrent leur kayak à l’eau et commencèrent à pagayer.

– J’espère tellement qu’on aura la chance de les voir, douta Zoé.

– Bien sûr ! Ce sont des bêtes extraordinaires, elles viendront, je suis certaine, la rassura Blair.

Mais après vingt minutes sans apercevoir une baleine à l’horizon, Amelia commençait à perdre espoir. Ken et Blair, qui pagayaient à la même vitesse qu’Amelia ,pouvaient apercevoir sa déception. Il échangea avec Blair un regard affligé, mais elle lui sourit avec assurance. L’inquiétude de Ken s’estompa sachant qu’il devait faire confiance à la certitude de son amie. Jamais elle ne s’est trompée dans ses intuitions. Elle croyait réellement que ces bêtes étaient des êtres sensibles et que c’était son plan depuis le début pour émerveiller Amelia sous un autre niveau.

– Regardez là-bas ! Je vois quelque chose bouger sous l’eau ! s’exclama Brendan en pointant au loin.

Sous leurs regards excités, une ondulation se forma dans l’eau. C’est alors qu’ils aperçurent une grosse baleine à bosse nager dans leur direction. Elle s’approcha du kayak d’Amelia et nagea autour d’elle. La nageoire pectorale de la baleine était sous les kayaks. Elle exposa ensuite sa tête hors de l’eau, Amelia pouvait voir ses grands yeux légèrement au-dessus de la surface, comme si elle avait surgi pour lui dire bonjour.

Partout où ils sont allés, pendant que le groupe pagayait dans les criques, la baleine nageait à leurs côtés. Ken réalisa enfin pourquoi Blair les admirait autant. En plus d’être des créatures énormes, elles sont vraiment très douces et conscientes de ce qui se passe autour d’elles. Il était heureux de voir enfin Amelia réjouie par ce merveilleux échange que la nature lui offrait. Comme Blair l’avait présagé, ce fut un moment mémorable pour Amelia.

Quand ils sont finalement revenus sur le rivage, la baleine se retourna et leur partagea son chant mélodieux. Elle nagea ensuite au loin rejoindre son groupe. Amelia sourit, puis la regarda s’éloigner et ne put s’empêcher de fermer les yeux, puis écouter le son enchanteur de la baleine. Ce moment ne la laissa pas indifférente. Elle avait l’impression que cette baleine savait qu’elle n’allait pas bien. Au moins, à cet instant même, elle ressentait enfin une gaieté et une paix intérieure.

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