5.Une pluie d'espoir

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En soirée, Ken était allongé sur son lit pensif. Il réfléchissait à la situation avec Amelia et la mort de son père. Il se demanda s’il n’y aurait pas une corrélation avec son passé. Ses pensées s’interrompirent lorsque sa cousine Lora ouvrit tranquillement la porte de sa chambre. Ken lui fit signe de rentrer, mais Lora hésita. Ken la regarda perplexe, voyant l’inquiétude se refléter sur son visage.

– Quelque chose ne va pas ? lui demanda Ken

– Est-ce que tu vas mieux ? lui répondit Lora

– C’est plutôt à moi de te demander comment tu vas ?

Elle s’approcha enfin de Ken en marchant timidement. Son regard balayait le sol et autour du lit, ne cherchant pas de point en particulier, mais elle semblait être perturbée par des idées qui se bousculaient dans sa tête.

– Ça va, marmonna-t-elle, posant ses yeux sur Ken qui la fixait consterner.

Depuis l’incident de la nuit dernière, il devait savoir ce qu’elle avait vu pour comprendre sa peur.

– Ce qui s’est passé la nuit passée… tu veux en parler ?

– Tu ne vas pas bien, commença-t-elle avec tristesse en se frottant doucement le bras gauche.

– Pourquoi penses-tu cela ? l’interrompit Ken, en restant calmement assis sur le bord de son lit.

Il contempla sa cousine se refermer sur elle-même, apeurée de divulguer des informations.

– Tu souffrais comme la dernière fois, quand tu as été blessé à la joue par ce garçon qui été possédé par un démon. Quelque chose d’obscur est après toi… Peut-être un démon, mais… mais je ne suis pas sûre, lui avoua-t-elle la voix tremblante.

Elle baissa son regard pour ensuite reculer d’un pas. Ken resta perplexe par l’attitude distante soudaine de sa cousine. Il réalisa qu’elle semblait le craindre pour une raison qu’il ignorait.

– Tu me fais confiance Lora ? s’enquit Ken, fixant sa cousine de son regard franc et perçant.

Elle leva vivement la tête en s’accrochant à ses yeux et balaya d’un coup les doutes qui avaient effleuré son esprit pour ensuite acquiescer.

– Mais pourquoi, c’était après toi alors ? lui demanda-t-elle d’un ton préoccupé, en emboîtant quelque pas vers Ken.

– Ce sont des réponses que je recherche encore aujourd’hui… Mais si tu t’inquiètes toujours pour moi, continue de croire en moi et aux anges. Tu m’as déjà sauvé une fois, tu sais. Mais je ne veux surtout pas que tu t’inquiètes pour moi.

– Non, je suis forte ! Et tu l’as dit toi-même, je t’ai sauvé une fois ! s’exclama-t-elle avec bravoure en croisant ses bras, retrouvant sa jovialité.

Un large sourire se dessina sur le visage de Ken, soulagé. Lora se détendit enfin. Elle s’assit à côté de lui sur le bord du lit, puis en fixant ses petites mains, elle se dit en soupirant :

– Je crois que c’est ce qu’il a essayé de me dire et de me réconforter…

– De qui parles-tu ? s’enquit Ken, en tournant la tête vers elle, intrigué.

– Je ne suis pas sûre … mais quand je dors, il y a un monsieur tout blanc et lumineux qui vient visiter mes rêves. Il me chuchote des choses. Souvent c’est à propos de toi.

Les yeux de Ken s’écarquillèrent de stupeur.

– Est-ce que tu fais encore ces rêves étranges? lui demanda-t-elle soudainement.

– Que veux -tu dire ?

– Tes rêves de ta première vie humaine ?

Ken la fixa incrédule. Ne comprenant pas comment elle pouvait savoir qu’il faisait dernièrement des rêves lucides alors qu’il ne comprenait pas encore leur sens.

– Comment es-tu au courant de mes rêves ?

– Il m’a dit de te rassurer que tu vas trouver tes réponses en restant vigilant de ce qu’ils peuvent te transmettre, continua-t-elle.

Épaté par son esprit très éveillé, Ken acquiesça avec compréhension.

– Tu as tout à fait raison. Tu vas toujours continuer de m’impressionner, avoua-t-il.

– Tu sais qui vient dans mes rêves ?

– Je suis pas mal sûr que c’est un ange.

– Un ange ? Mais il paraissait plus grand que ça.

– Un Archange peut-être ? Tu pourras lui demander son nom la prochaine fois qu’il te rendra visite.

Lora hocha la tête souriante. Le regard de Ken se tourna ensuite vers sa table de chevet. La photo de son frère attira son attention, puis son pendentif reposant aux côtés du cadre. Il ressentit une étrange vibration émane de la tourmaline orange.

– Je crois que je sais où trouver mes réponses, se réjouit Ken en se levant d’un bond.

Lora le regarda ravie et se sentit accomplie.

Il courra à l’étage du bas retrouver sa tante dans la cuisine qui était en train de couper des légumes pour le souper.

– Où as-tu rangé les boîtes avec les photos de mon enfance ?

– Je les ai organisées dans des albums. Ils sont rangés dans la bibliothèque du salon. Pourquoi ?

– Parfait merci !

Sans répondre à sa question, il s’empressa d’aller dans le salon et prit tous les albums de sa jeunesse. Elle transféra les légumes fraîchement coupés dans un chaudron, puis les couvrit pour les laisser mijoter. Ensuite, elle alla le rejoindre et le retrouva assis sur le sofa en train de feuilleter les pages avec grand intérêt.

– Ken, que cherches-tu exactement ? demanda-t-elle en s'asseyant à côté de lui.

– Il y a une fille dans ma classe qui s’appelle Amelia . Je ne pense pas l’avoir connu avant… Mais il y a quelque chose d’étrange à propos d’elle… j’ai cette forte impression de devoir la protéger de quelque chose qui lui veut du mal. Je ne sais pas comment l’expliquer. Elle m’a mentionné dernièrement qu’elle a vécu à Torbay et son père est mort quand elle avait douze ans, au même moment où sont survenus les événements de mon ancienne maison. Je ne sais pas s’il y a un lien réel …

– Donc tu essaies de voir si tu peux trouver des éléments confirmant ton hypothèse ? appréhenda sa tante.

Il hocha de la tête, puis soudain son œil tomba sur une photo de lui âgé de dix ans avec son frère. Ils se lançaient le ballon sur le terrain de l’ancienne maison de sa tante. Au loin, de l’autre côté de la rue, il remarqua une jeune fille du même âge que lui sur un vélo sur le trottoir.

– Tu connais cette fille sur la bicyclette ? demanda Ken intrigué.

– Oui c’était la fille du policier de la ville, Amelia Hardy, si je me souviens bien …. Oh … Attends. Si c’est la même Amelia dont on parle, mais quelle chance que vous vous êtes retrouvés dans les mêmes circonstances et à la même école ! s’exclama Elena.

Ken hocha la tête d’approbation. Sur la photo, il repéra soudainement un oiseau blanc perché sur l’arbre derrière Amelia . « C’est encore cette colombe ? » pensa-t-il.

– Je ne me rappelle pas d’avoir joué avec elle ou lui avoir parlé à cet âge ? s’enquit Ken.

– Normal, vous ne vous êtes jamais vraiment amusé ensemble. Tu n’étais pas un enfant très sociable. Tu préférais rester avec ton frère et elle était plutôt timide de son côté.

Elena réalisa ensuite que la mort du père d’Amelia fut choquante pour la population et avait créée un vide dans la banlieue. Ce fut un homme qui s’était beaucoup impliqué pour la ville.

– C’est une chance que vous vous soyez retrouvés pour que tu sois là pour elle, dit-elle en serrant la main de Ken en guise de compassion.

Mais Ken douta que cela fût le hasard.

Pendant son sommeil, Ken fit son retour dans cette forêt mystérieuse, mais familière. mais cette fois, l’ambiance fut paisible et aucun sentiment menaçant à l’horizon. Il observa autour de lui à la recherche d’un point de repère ou un chemin où se diriger. Cependant, il resta sur place, comme s’il devait attendre quelqu’un. Un vent s’abattit sur lui, fit virevolter les feuilles et des oiseaux perchés dans les arbres, prirent leurs envolées. Le vent se calma, mais continua de siffler aux oreilles de Ken. Malgré le son des feuilles, il pouvait entendre une faible voix en écho.

– Je suis heureux qu’on puisse se revoir dans cette vie mon ami. J’ai toutefois une requête à te proposer. Je te demande de la protéger sous tes ailes.

Ken chercha avec espoir d’où pouvait provenir cette voix. Il balaya son regard partout autour de lui, mais en vain. Soudain, devant lui, un chemin de pierres se forma. Il aperçut au loin, un point lumineux se transformant en une forme humaine peu distincte. Ken voulut s’y approcher, mais à l’instant qu’il effectua quelques pas, tout explosa dans un éclat de lumière.

Il se réveilla de son rêve, qui lui laissa encore plus de questions que de réponses. Malgré le fait qu’il soit juste une heure du matin, il ne ressentait plus la fatigue et ne put retomber dans son sommeil. Ken se leva et marcha jusqu’à sa fenêtre. En ce mois d’octobre gris et pluvieux, Ken observait les gouttelettes de pluie couler le long de la vitre. Il pria pour avoir les conseils d’Angie. Elle entendit son appel, puis apparut sous sa douce lumière blanche derrière lui.

– Est-ce que tu peux m’éclairer sur la signification de ce rêve ? Cette présence semblait me connaître, mais je n’ai aucune idée de qui il s’agissait. Puis, faisait-il allusion à Amelia lorsqu’il m’a demandé de la protéger ?

Elle lui transmit par la pensée :

– C’est l’éveil de ton âme, alors que ta conscience et les souvenirs de toutes tes vies passées sont masqués. Ton corps énergétique est un corps lumineux. Cette personne dans ton rêve l’utilise comme véhicule pour voyager vers d’autres dimensions afin de communiquer son message et ta mission.

– Que veux-tu dire ?

Angie apparut sous sa forme humaine et s’avança à côté de Ken pour prendre sa main.

– La réincarnation est l’occasion pour les âmes d’accomplir les devoirs qu’elles n’ont pas eu la possibilité d’accomplir dans une incarnation antérieure.

– Donc, je l’aurais en fait déjà connu dans une autre vie ?

Angie hocha simplement la tête.

– Je ne connais pas le lien avec Amelia … Du moins, si c’est vraiment d’elle qu’il parlait, il prit une courte pause, c’est comme si elle était ma mission…

Angie sourit.

– Tu es plus proche de nous, bien plus que tu ne peux t’imaginer. Tu es un frère incarné.

– Que veux-tu dire exactement ?

– Tu es un être de la lumière…

– Tu veux dire que je suis comme vous ? Un ange ?

Le sourire d’Angie s’élargit en hochant la tête en guise de confirmation.

– C’est exact Vehuel…

Par ce temps maussade, Amelia était agenouillée sur son lit dans la noirceur, les bras appuyés contre la bordure de sa fenêtre. Elle porta une écoute au son de la pluie qui clapotait sur la vitre. Sa mère travaillait cette nuit-là et elle ne trouvait pas le sommeil. Elle se sentait si seule et ne put s’empêcher de penser désespérément à Ken. Amelia tourna son regard attristé vers son violon, puis vers ses livres d’anges empilés sur son lit. Une colère l’envahit et les poussa en bas de son lit. En regardant la photo de son père, sa frustration et sa peine prirent de l’ampleur. Ce monde, dans lequel elle vivait, lui paraissait si injuste et son bonheur lui paraissait inatteignable. Abattue par ses émotions, elle fixa l’extérieur en espérant revoir Ken. C’était le seul qui la comprenait et qui réussissait à lui apporter de la gaieté, peu importe les circonstances.

Couvert par son parapluie, une main dans la poche de sa veste à capuche noire, Ken marchait dans l’obscurité sous cette douce pluie, éclairé par la lumière d’Angie à ses côtés. À la suite de la révélation sur sa véritable nature, il a ressenti un grand besoin d’aller prendre l’air et d’éclaircir ses idées.

– Angie, si je suis comme l’un d’entre vous, pourquoi je n’ai pas le pouvoir de me transformer comme bon me semble ?

– Tu as été privé de tes capacités angéliques et envoyé sur terre pour vivre la vie d’un être humain normal avec l’obligation de remplir ta mission. Ta vie sur terre sera ardue et remplie d’embûches, mais grâce à la régence de l’Archange Haniel, nous sommes affectés à ta protection, afin de veiller à ce que tu te concentres sur ta mission. Elle a toujours cru en toi, Vehuel.

– Haniel ?

– Lorsque tu étais encore parmi nous dans les cieux, tu étais gouverné par Haniel. Elle possède l’énergie de la lune et elle représente le calme, la patience, le mystique.

– Je vois… Et les ailes noires, qu’est-ce qu’elles veulent dire ? Est-ce mes véritables ailes ?

Angie prit une courte pause. Elle semblait refuser de lui dévoiler la vraie raison pour laquelle il a développé cette noirceur en lui. Pour la première fois, elle lui répondit d’un ton de voix, laissant paraître une légère déception envers lui.

– Oui …

– Mais est-ce que je vais un jour ravoir mes ailes blanches comme toi ?

– Je ne peux te dire…mais aussi longtemps que tu garderas la foi et l’Archange Jophiel avec toi, nous pourrons fusionner avec ta lumière et te redonner tes pouvoirs célestes.

Ken acquiesça. Sa vraie nature lui apportait plus de sens à sa vie. Il a finalement compris pourquoi, lorsqu’il a vécu la mort et rencontré Angie dans l’au-delà, il ne s’est jamais senti aussi bien et chez lui.

Puis, il sourit intérieurement en réalisant que sa jeune cousine, Lora, avait raison depuis le début.

– Mais Angie pourquoi m’avouer maintenant que je suis l’un d’entre vous et ne pas l’avoir fait l’année passée ?

– Tu n’étais pas encore prêt à entendre la vérité. Les humains sont des êtres très fragiles et vulnérables, cela aurait été trop à assimiler pour ton mental. Mais aujourd’hui tu as énormément évolué.

Ken hocha la tête avec appréhension. Totalement absorbé dans ses réflexions, il passa devant la demeure d’Amelia . Cette dernière le remarqua de sa fenêtre et submergée d’une joie, elle accourut à l’extérieur le rejoindre.

– Ken ! s’écria-t-elle en sanglots.

Il se retourna aussitôt et surpris de la voir dehors sous cette pluie, il rebroussa chemin pour immédiatement la rejoindre devant son entrée en la protégeant sous son parapluie.

– Amelia ? Mais que fais-tu là en un temps pareil ?

Mais aucun mot ne sortit de sa bouche. Amelia fut si comblée de le voir finalement devant elle, qu’elle ne put contrôler ses larmes. Ken la fixa inquiet par son silence. Ressentant qu’il allait lui poser d’autres questions, elle l’interrompit en se jetant dans ses bras et elle l’étreignit contre elle. Saisi sur le coup, il ne réagit pas pendant un instant. Sentant ses bras se serrer autour de sa taille, sous le bruit de la pluie tombante, il entendait ses pleurs contre sa poitrine. Il enlaça Amelia à son tour, partageant enfin son étreinte. Tentant de se calmer, elle décolla légèrement son visage.

– Reste auprès de moi… Je me sens si bien quand tu es là, admit-elle en reniflant un bon coup, tout en essuyant ses larmes du dos de sa main.

Ken put ressentir Angie lui sourire à ses côtés. Il ne savait pas quoi répondre, mais il comprenait très bien qu’elle avait besoin de lui.

– Viens à l’intérieur. J’aimerais juste que tu restes un peu avec moi, proposa-t-elle timidement en évitant son regard.

Il garda le silence, puis décida de la suivre jusqu’à la porte.

Ken déposa son parapluie contre le mur et prit soin d’enlever ses souliers mouillés. Elle le guida jusqu’à sa chambre située à l’étage. Ils passèrent devant celle de sa mère et il remarqua l’absence de celle-ci. Pendant qu’Amelia alla dans la salle de bain se changer et se sécher les cheveux, Ken en profita pour entrer dans sa chambre et scruter les alentours. Il trouva une jolie guirlande de marguerites blanches tricotée, suspendue sur le rebord d’une étagère. En s’y approchant pour examiner de plus près les détails du tricot, son regard tomba sur deux photos. Dans l'une, il a vu Amelia, six ans, assise sur les genoux d'une vieille dame qu'il présumait être sa grand-mère. Puis dans l'autre, c'était la mère enceinte d'Amelia, posée à côté de son père. Il toucha le ventre rond du bout des doigts. Cette même énergie vibratoire, qu’il avait éprouvée lors de sa rencontre mystérieuse dans son dernier rêve, se fit ressentir sous son touché. Il eut une intuition qu’elle était enceinte non pas seulement d’Amelia , mais aussi de son jumeau. Ken tissait enfin le lien. Amelia revint le rejoindre dans la chambre maintenant plus détendue. Elle était vêtue d’un jogging et d’un chandail ample à manches courtes bleu pâle et se peignait les cheveux en direction de son lit. Ken la suivit du regard ne pouvant pas nier sa gêne de se retrouver seul dans son intimité. Soudain, son attention tomba sur une pile de livres étalés au sol. Sur le point d’aller les ramasser, Amelia lui dit d’un ton ferme :

– Non ! Ne te donne pas la peine.

Sans répliquer, il alla s’asseoir à ses côtés sur le bord de son lit et chercha à aborder un sujet pour qu’elle puisse s’ouvrir à lui.

– Je vois que tu te sens vraiment seule. Ta mère est rarement présente ?

– Elle travaille toujours de nuit, même si elle m’avait promis qu’elle changerait son horaire, dit-elle d’un air renfrogné.

– As-tu des frères ou sœurs ? lui demanda-t-il afin de confirmer ses doutes à ce sujet.

– Non pas vraiment… hésita-t-elle.

– Pas vraiment ?

– Et bien ma mère m’a déjà appris que j’avais un frère jumeau. Elle l’avait nommé Ethan. Mais il est mort quelques minutes après ma naissance.

– Ça n’a pas dû être facile pour tes parents.

– Non pas tant. Surtout pour ma mère. Ce n’est pas quelque chose qu’on parle facilement, plus particulièrement de la mort de mon père. Elle évite le sujet… comme si elle cherche à l’oublier, elle a probablement fait la même chose avec mon frère, termina-t-elle d’un ton irrité.

Ken prit une pause en réalisant qu’il venait de vibrer une corde sensible. Cherchant à changer de sujet, il reprit en fixant l’ornement de marguerites :

– C’est joli la guirlande de fleurs. C’est fait à la main ?

– Oui c’est ma grand-mère, Isla, qui l’a tricotée pour moi. J’ai toujours aimé les fleurs, surtout les marguerites. Je les trouve si belles et j’aime leur signification.

– Ah oui ?

– Ma grand-mère m’a expliqué qu’elles symbolisent la pureté, l’innocence et un nouveau départ. Elle m’a aussi raconté qu’elle avait offert une fleur de marguerite à ma mère à l’hôpital quand elle nous a donné naissance à mon frère et moi. Selon une légende celtique, Dieu répandait des marguerites sur la terre pour remonter le moral des parents qui avaient perdu un enfant.

– Elle semble vraiment gentille ta grand-mère, sourit Ken, touché par son histoire.

– Oui, fit-elle avec son sourire nostalgique, l’année où mon père est mort, pour ma fête, elle m’a offert des graines de marguerites. Elle voulait que je lui promette de les planter au prochain printemps afin de les voir pousser et revenir chaque année.

– Est-ce que tu la vois encore souvent ?

– Non, pas depuis l’année passée. Elle est partie vivre au Mexique et je ne l’ai plus revu.

– Sais-tu pourquoi ?

– Ce que j’en sais, c’est qu’elle était une personne très spirituelle et avait apparemment un don de voyance. Elle nous a juste dit qu’elle devait absolument aller au Mexique. Qu’elle avait quelque chose d’important à faire là-bas. Je sais que j’ai un oncle qui vit là-bas depuis dix-huit ans. Elle est sûrement partie le retrouver, mais je ne sais pas pourquoi… Juste avant son départ, elle m’a donné tous ses livres d’anges. Dans l’un d’eux, j’ai découvert qu’elle avait glissé un message. Je l’ai toujours gardé.

Amelia ouvrit le tiroir de sa table de chevet,sortit un petit papier blanc qu’elle lut à Ken :

– Reste forte ma belle fleur. N’oublie pas que tu es guidée par des êtres comme les anges et il dois savoir qu'ils peuvent t'aider. Apprends à t’ouvrir à la communication avec les anges. Ainsi tu pourras t’aligner sur ta mission de vie.

Ken la fixa compréhensif. Cette dame, Isla, venait étrangement piquer sa curiosité. Elle semblait être une femme bienveillante, mais à la fois mystérieuse. Ça le rassurait de voir qu’une personne dans la famille d’Amelia était autant ouverte spirituellement.

– Elle tenait beaucoup à toi. Je trouve que ce sont de très beaux souvenirs d’elle.

– Oui vraiment, sourit Amelia de sa douce voix nostalgique.

L’incident en classe vint effleurer l’esprit de Ken.

– Je n’avais pas osé te questionner sur ce qui s’est passé la dernière fois en classe… Mais ce que tu as ressenti était malsain et je me demandais si tu avais une idée de qui voudrait te faire du mal ?

Les yeux rivés au sol, Amelia garda le silence brièvement. Ken voyait bien qu’elle ne semblait pas à l’aise pour discuter de la situation qui l’avait tant traumatisée.

– Je n’en sais rien, lui dit-elle finalement en tournant légèrement la tête vers lui.

– Est-ce que tu as toujours vécu ça ? Ce genre d’événement étrange ? Menaçant même ? poursuivit Ken avec ses questionnements.

– C’est pire depuis la mort de mon père, avoua-t-elle.

– Je sais que ce n’est pas toujours évident d’en reparler… Mais il est décédé comment exactement ?

Ken voyait son hésitation.

– Je m’excuse je n’aurai pas dû… regretta-t-il.

– Non, c’est correct, le rassura-t-elle en secouant la tête.

– Pendant une poursuite en voiture, il avait réussi à rattraper l’homme en délit de fuite. Mais cet homme accélérera et chargea sur la voiture de police dans laquelle se trouvait mon père. Il le tua sur le coup. Mais l’homme qui a frappé mon père, a réussi à s’enfuir avec presque que rien… Il y avait un témoin qui disait que l’accident n’était pas normal . Comme dans un film, il crut avoir vu une aura noire entourant l’homme dans sa voiture après l’impact.

Ken la contempla avec compassion, mais perplexe à la fois. Cela lui confirmait que c’était effectivement étrange. Qu’il y avait évidemment une cause surnaturel qui ait ordonné à cette personne de faire l’irréparable.

– Je comprends mieux maintenant pourquoi ta frustration et ton sentiment d’injustice à la suite de sa mort.

– Je ne sais pas comment faire pour me sentir mieux ou cesser de me sentir si pleine de haine… partagea Amelia les poings fermés agrippés au bord de son lit.

– Tu dois faire confiance et croire qu’une puissance supérieure assure tes arrières.

Il réussit à attirer toute son attention.

– Je ne pense pas être capable.

– Ce ne n’est pas ce que ta grand-mère a tenté de t’apprendre en te donnant ses livres sur les anges ?

Elle détourna son regard et hocha la tête lentement.

– Tu es capable. Tout le monde peut y arriver, il suffit d’y croire.

Maintenant plus relaxes, ces mots faisaient amplement du sens pour Amelia .

– Je ne me suis jamais sentie aussi bien et en confiance avec personne autre que toi, lui avoua-t-elle gênée.

Ken lui sourit, ravi. Une fatigue soudaine s’empara d’elle. Ses paupières devinrent lourdes et il remarqua qu’elle semblait combattre son sommeil.

– Je vais te laisser dormir, lui dit-il sur le point de se relever, mais Amelia agrippa son poignet.

– Non. S’il te plaît, reste encore un peu, supplia-t-elle ensommeillée en s’allongeant le dos à Ken. Ce dernier hésita. C’est alors qu’il sentit le toucher d’Angie sur son épaule, l’encourageant à rester. Convaincu, il demeura assis à ses côtés en la contemplant de son doux regard bienveillant.

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