15. La force du courage

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— C’était un démon… ? Oh non, je l’ai libéré ! s’exclama Mandy d’une voix tremblante, les yeux larmoyants.

— Ça va aller Mandy, tu ne pouvais pas le savoir, répondit immédiatement Curtis, la serrant dans ses bras, voulant la calmer.

Ébranlée, Blair resta agenouillée, le regard rivé sur le plancher. C’est alors que son visage se crispa par une frustration qui voulait émerger.

— Ken ! Pourquoi n’as-tu rien fait ? lui reprocha Blair en se remettant sur ses pieds avec le peu de force regagnée.

— J’en sais rien, elle me paralysait. Je n’arrivais pas à penser clairement, se défendit-il, en se prenant la tête, perturbé et fuyant son regard.

— C’était bien Abaddon ? s’enquit Curtis, tu la connaissais ? continua-t-il.

Ken lui répondit par un simple hochement en levant son regard vers ce dernier.

— Je crois bien que oui, dit Ken troublé par sa propre réponse, pour ensuite baisser les yeux avec honte.

— Abaddon ? Quelles informations connais-tu sur elle ? demanda Mandy, maintenant un peu plus calme.

Curtis soupira, puis lui divulgua brièvement ce qu’il savait à son sujet.

— Et bien… Abaddon est connu comme étant « l’ange» de la mort, de la destruction et cheffe? des démons…

— Il faut y aller, on doit l’arrêter ! l’interrompit Blair impatiente de passer à l'action.

— Tu crois vraiment qu’on a le pouvoir de l’arrêter ? la découragea Curtis.

— Moi oui, je pense savoir comment, affirma Ken en fixant le ciel noir orageux par la porte patio.

— Alors allons-y ! fit Blair en se précipitant vers la porte, elle fit signe de la main à Curtis l’encourageant à la suivre. On doit se rendre rapidement, j’ai besoin de toi.

Curtis se tourna vers Mandy et lui promit de l’appeler plus tard pour savoir comment elle allait. Il prit sa main en l’ouvrant et y déposa une croix bénite qu’il sortit de la poche de son pantalon.

— S’il te plaît, faites attention, dit Mandy avec émoi.

Ken suivit Blair vers l’extérieur. Curtis était sur le point de franchir la porte d’entrée quand Mandy lui retint le poignet. Il se retourna face à elle voyant bien qu’elle avait autre chose à lui dire.

— Je suis tellement désolée… lui dit -elle en serrant la croix contre son cœur.

— Non, tu n’as pas à l’être.

Elle hésita un bref instant, puis se décida enfin à s’approcher de son visage et déposa un doux baiser sur la commissure de sa lèvre.

— Reviens vite, chuchota-t-elle avec insécurité.

Curtis resta surpris par son geste, mais cela le charma à la fois. Blair, qui attendait à côté de la voiture, brisa le moment en lui criant avec impatience :

— Allez, il faut partir !

— Je vais revenir et tu ne seras plus seule, lui répondit-il accompagné de son sourire confiant qui soulagea Mandy qui le laissa finalement partir.

Curtis se lança dans sa voiture et, aussitôt qu’ils bouclèrent leurs ceintures, passa brusquement en troisième vitesse. Ken et Blair, sur le siège arrière, basculèrent contre leur dossier. Le pied lourd sur l’accélérateur, il se dirigea vers Signal Hill.

— Tu sais où Mandy a trouvé l’urne ? s’enquit Ken.

— Sous la terre au pied de la tour Cabot, répondit Curtis sans quitter des yeux la route.

— C’est exactement là où a eu lieu l’accident d’Amelia ! Après sa chute, je suis passé par là et je me rappelle que j'ai ressenti une étrange sensation, quelque chose de mauvais sous mes pieds. Je ne comprends pas pourquoi je n'ai pas allumé à ce moment-là !

— Tu crois qu’Abaddon est la cause de tout ça ? Qu’elle veuille la mort d’Amelia pour une raison quelconque ? demanda Blair.

Ken hocha la tête. Terrifié à l’idée que plusieurs démons seraient à ses trousses, il avait la certitude que Lucifer était impliqué dans la mort de son amie. Il n’avait jamais ressenti aussi fortement son intuition sur un sujet, même si une partie de lui espérait avoir tort.

— Je me demande vraiment ce qu’ils ont contre elle ? se demanda Ken affligé.

— Je pense plutôt que c’est contre toi, pensa Blair, ils s’en prennent à elle pour t’affecter pour une raison que l’on ignore encore.

Ken dévisagea son amie, pour ensuite porter son regard vers la fenêtre, anxieux. Il était dominé par l’idée que le temps pressait et espérait profondément qu’Amelia était toujours en sécurité.

Après n’avoir parcouru que trois minutes, Blair se contorsionna sur son siège, le regard fixé sur la vitre arrière,

— Nous avons de la compagnie, annonça Blair.

Curtis leva les yeux dans son rétroviseur et vit une fumée noire se former derrière eux. Blair lui ordonna d’accélérer. Le pied planant au-dessus du frein, il hésita lorsqu’ils arrivèrent sur le sentier rural longeant la côte atlantique. Ken scruta l’obscurité qui se levait pour les envelopper. Blair pivota vers l’avant.

— Ne ralentis surtout pas ! Va plus vite !

Rassuré de voir le champ libre en cette fin d’après-midi, Curtis pesa sur l’accélérateur. Au moment où un grognement en écho survint, le brouillard ténébreux les rattrapa et se faufila sous la voiture. Un bruit mécanique jaillit sous Curtis. La panique monta en lui lorsqu’il réalisa que la pédale de ses freins ne fonctionnait plus et qu’il perdait le contrôle de son véhicule. Le volant tournait de lui-même de gauche à droite faisant tanguer la BMW. Les pneus protestèrent bruyamment pendant que Curtis agrippait le volant avec force pour rester dans la bonne direction. Le brouillard noir enveloppait dorénavant complètement la voiture. Curtis ne voyait maintenant plus rien devant lui. Craignant encore plus pour leur sécurité, il posa sa main sur le levier du frein à main et s’apprêta à ralentir, mais Blair l’y empêcha.

— Non ! s’écria Blair, on doit garder notre vitesse !

— Tu nous diriges droit vers la mort si je ne m’arrête pas ! Le précipice ne doit pas être bien loin ! s’affola Curtis.

— Attends et fais-moi confiance ! insista sa sœur en reprenant sa place.

Blair serra son cristal et pria pour l’aide de Raziel. Elle ordonna à Ken de répéter après elle. Ils fermèrent les yeux et Blair commença à réciter en latin une incantation. Ken les répéta mot pour mot. Curtis qui luttait pour garder le contrôle, laissa la peur s’emparer de lui.

— Blair ! Fais vite ! s’impatienta Curtis.

Enfin, bien que les secondes parussent des minutes, une lumière jaillit de leur pierre et de leur cristal, enveloppant la voiture d’un halo blanc, faisant fuir ce nuage ténébreux.

— Freine ! hurla Blair.

Curtis tira le levier du frein en tournant brusquement le volant à sa droite. Blair fut projeté contre Ken qui s’agrippa au dossier devant lui. La voiture sortit du chemin de terre, dérapa dans les herbes hautes pour finalement s’arrêter. Haletant et soulagé d’avoir immobilisé sa voiture, Curtis se croyait enfin sorti d’affaire. Aussitôt qu’il ouvrit sa portière, Blair lui cria:

– Fais attention !

Il remarqua alors, en penchant la tête, qu’ils étaient très proche de la falaise. En soupirant longuement, il sortit avec précaution en longeant le côté de sa voiture. Il pouvait voir les vagues frapper les rochers en bas du ravin. L'océan se déchaînait à cause du vent qui se levait. Ken s'éclipsa rapidement de la voiture et courut pour rejoindre l’autre bout de la falaise sans quitter Abaddon du regard. Vêtu de ses sombres ailes, celle-ci se tenait stationnaire haut dans le ciel orageux, entourée de nuages noirs formant un tourbillon.

Amelia apparut à côté de Ken. Il la regarda soulagé de la revoir.

– Amelia !

– Je sais que tu m'as dit de rester à l'écart! Je suis vraiment inquiète cette fois. Pendant que j'étais avec ma mère, j'ai vu à la télévision qu’ils parlaient d'apocalypse et c’était sur toutes les chaînes. La nature est enragée, partagea Amelia perturbée par la situation.

– C’est à cause d’Abaddon, affirma Ken en levant les yeux vers la démone dans le ciel.

– Elle a été libérée de son urne à ce que je vois, constata-t-elle avec crainte.

Il tourna légèrement la tête vers celle-ci:

– Je préfère que tu restes loin d’ici. Je prends un risque, mais si jamais Abaddon s'en prend à toi …

Amelia l’interrompit abruptement.

– Arrête de me rejeter ! projeta-elle irritée. Déjà, être un fantôme ce n’est pas facile, ça vient réveiller de vieux souvenirs désagréables, me faire dire de m’éloigner de toi… ça me fais mal, termina-t-elle blessée, en baissant la tête combattant les larmes qui voulaient se manifester.

– Si jamais Abaddon s'en prend à toi, répéta-t-il doucement en cherchant son regard, je ne crois pas être en mesure de te sauver cette fois, lui avoua-t-il à voix basse.

– Qu’est-ce que tu penses faire? s’inquiéta Amelia en rencontrant les yeux de Ken.

– Je vais l 'affronter, lui affirma-t-il, la voix s'élevant d’un demi-ton en se détournant d’elle et levant la tête vers Abaddon.

– Tu es sérieux Ken ? C’est ça ton PLAN ! s’écria Curtis au loin pour alors se précipiter vers lui tendu.

– Nous n'avons pas le temps pour ça, Curtis !

– Sais-tu vraiment qui tu t’apprêtes à affronter? C’est une mission suicidaire!

– Depuis quand t’inquiètes-tu pour moi ? lança Ken d’un ton si froid que Curtis fut saisi par cette réponse.

Blair arrivait tout près de son frère, portant un regard confus entre lui et Ken. C'était maintenant plus fort que lui, mais Ken bouillonnait de colère et de révolte. Sans attendre une réplique, Ken recula pour prendre son élan, ferma les yeux en serrant sa tourmaline, courut jusqu'au bout du précipice et s'élança dans le vide complètement illuminé d'une aura orangée éblouissante. Sous les yeux émerveillés de ses amis, des majestueuses ailes blanches se déployèrent dans son dos, puis il prit son envol haut dans les nuages. Une peur montait en Amelia plus elle le voyait s’envoler en direction d’Abaddon.

De la fenêtre de sa chambre, Zoé, accompagnée par Brendan, regardait troublée, les nuages noirs se former dans le ciel au loin sur les montagnes et les vents faisant vaciller violemment les arbres.

– Ça ne me semble pas être un phénomène normal, se persuada Zoé.

– Je le crois aussi…

– Penses-tu que Ken est quelque part là-bas?

Brendan resta silencieux, se rappelant que Ken devait rejoindre Blair pour une raison qu'il ignorait encore, mais il savait que cela ne présageait rien de bon. Le regard fixé sur la tour Signal hill, le visage crispé et le corps tendu, il cachait difficilement son inquiétude.

– Voir la face que tu fais, ça ne me rassure pas ! Si Ken est quelque part à l'extérieur, il est sans doute encore avec Blair, s’exclama Zoé affolée en s’emparant de son cellulaire sur son lit.

Pendant que le ciel grondait de plus en plus fort donnant une atmosphère intimidante, Blair sursauta en entendant la sonnerie de son téléphone portable. Elle le prit de sa poche de manteau et répondit sans hésitation en voyant le nom de Zoé apparaître sur l’afficheur. Blair devait s’assurer qu’elle n’était pas dans le pétrin.

– Blair ! Est-ce que ça va ? s’écria son amie à l'autre bout de la ligne, paniquée.

– Tout va bien Zoé, la rassura-t-elle, alertée par la voix énervée de son amie

– Mais toi ça va ?

– Oui, je suis chez moi avec Brendan, mais toi, où es-tu ? Tu as vu ce qui se passe à l'extérieur?

Blair ouvrit la bouche pour s’expliquer, mais elle se fit surprendre par deux éclairs qui explosèrent devant elle sur la terre. Les grandes herbes prirent feu et les flammes se propagèrent rapidement autour d’elle en un cercle. Blair ne put s'empêcher de lâcher un cri strident. Alors qu’elle protégeait son visage des flammes et de la fumée, elle échappa son cellulaire. Alarmé de voir Blair en détresse, Curtis courut et sauta par-dessus les flammes avant qu'elles ne soient trop hautes. Alors que le feu les engloutissait lentement, Curtis entoura Blair de ses bras en s'accroupissant sur le sol. Il tenta tant bien que mal de se protéger de la chaleur des flammes qui les retenaient prisonniers.

La panique s'empara de Zoé lorsqu'elle entendit les cris de son amie au téléphone tout en voyant, au loin, les éclairs frapper la terre de Signal Hill. Zoé se précipita à la porte de sa chambre sans réfléchir, mais Brendan lui attrapa la main. Il savait que quelque chose de grave venait d’arriver, mais il devait cette fois la retenir.

– Blair est en danger ! s’affola Zoé en larme, complètement hors d'elle.

Quand elle pivota vers lui, il la prit dans ses bras et la serra très fort.

– S'il te plait Zoé, murmura-t-il, je t'aime. Ne te mets pas plus en danger.

Touchée par ces mots, elle hocha la tête contre l’épaule de Brendan.

– J’espère tellement qu’ils vont s’en sortir… marmonna Zoé avec émoi.

– Je crois que oui… j’ai confiance en Ken, la rassura-il à voix basse.

Brendan resta silencieux quelques secondes l’air pensif.

– Zoé ? dit Brendan de sa voix à peine plus haute qu’un murmure.

– Oui ?

Il ravala sa salive, la serrant encore plus fort.

– Si jamais ça finit par se calmer dehors… Je veux aller voir ma mère, lui dit-il, la gorge serrée par une émotion douloureuse.

Zoé se décolla pour le regarder de face. Elle lui prit les mains avec une grande douceur.

– Si tu sens que tu es prêt, alors vas-y, l'encourage-t-elle.

Il s'éclaircit la gorge.

– J'aimerais que tu m'accompagnes.

Zoé accepta en hochant la tête touchée par sa proposition. Brendan baissa les yeux et mit les mains de Zoé sur son torse.

– Merci, répondit-il en souriant.

Zoé se leva sur le bout des orteils et déposa un tendre baiser sur ses lèvres.

Ken confronta Abaddon en gardant ses distances par précaution.

– Hé ! Abaddon! Pourquoi fais-tu ça ? hurla Ken, colérique.

Elle l’ignora et continua de prendre du pouvoir en absorbant l’énergie des émotions négatives provenant des humains partout sur le globe. Des filets brumeux noirs surgissaient de tous bords et tous côtés, pénétrant le corps d'Abaddon qui les accueillait les bras grands ouverts. Ken pouvait entendre des sons étouffés jaillir des filets d’énergies, comme des hurlements de terreur, des cris colériques, et des pleurs. Ken resta figé sur place, troublé par ce qu’il entendait. Quand soudain des rugissements et grognements retentirent autour de lui en écho. Il pivota rapidement sur lui-même, mais il ne savait pas où porter son attention. Finalement, ses yeux s’accrochèrent sur des bêtes démoniaques prenant forme en cercle. La respiration courte et profonde, Ken les fusilla du regard, les sourcils froncés, se préparant au pire. Les créatures crachèrent un hurlement strident et se projetèrent sur Ken. Réprimant un frisson, il les esquiva de justesse en battant des ailes frénétiquement en tournant sur lui-même. Ken s’efforça de rester dans sa position sans trop s’éloigner, mais toute l'atmosphère était brumeuse et lourde rendant sa vision floue. Ken cherchait à ne pas perdre ses repères pour garder en vue Abaddon, mais chaque battement d’ailes lui était périlleux. Avec l'aide d'Angie et le pouvoir de Jophiel, il créait des orbes de lumière à l'intérieur de ses ailes pour en faire des projectiles et les lancer en direction de la démone. Les boules se frayèrent un chemin en perçant la noirceur devant lui, mais les bêtes de l’abysse protégaient Abaddon de ses attaques.

Anxieuse et impuissante, Amelia furta le cercle de feu et le ciel maintenant complètement couvert. À chaque détonation qu’elle entendait, des éclairs de lumière éblouissante créaient des trous dans les nuages noirs.

– Il ne peut l’affronter seul, se dit-elle en secouant la tête, la voix tremblante, prise avec l’idée que Ken était coincé dans un combat sans pitié.

Elle ferma les yeux, puis retourna à côté de son corps à l’hôpital.

Amelia n’y était pas revenue depuis son accident. C'était douloureux de se voir dans cet état, intubée et branchée à des machines la gardant en vie, mais elle repoussa sa peur avec force. Elle prit son courage en main et s’approcha de son corps pour frôler sa pierre de lune à son cou. Avec la pleine intention de se connecter avec son Archange, Haniel, elle ferma les yeux et se concentra sur sa respiration. Au lieu de cela, elle se sentit transporter au bord de l'océan au clair de lune. Le bruit des vagues s'adoucit et s'estompa à mesure que la lune devenait plus brillante et se déplaçait vers elle, devenant plus proéminente. En se rapprochant, elle s'est transformée en une magnifique orbe rose et or. Amelia n'a pas réalisé qu'elle était en présence d'Haniel, mais elle a tendu la main devant elle et s'est connectée à son énergie. Ensuite, l'Archange apparu devant Amelia, qui était émerveillée par sa beauté mystique.

– Ken… débuta-t-elle avec émoi, mes amis ont besoin d’aide et je ne sais pas quoi faire.

L’Archange afficha un grand sourire compatissant.

– La réponse à ta demande se trouve auprès de celui qui détient la pierre pour faire appel à Michael.

– Kyle ? Mais je n’ai aucune idée comment le retrouver, je ne sais pas où il habite ? lança-t-elle s'efforçant de garder le courage.

– N’oublie pas la puissance de la volonté et de la pensée. Tu peux aller n’importe où et voir n’importe quelle personne qui t’es importante, il te suffit d’y croire. Tu le fais déjà inconsciemment.

Le regard d’Amelia s’illumina d’espoir. Haniel avait raison. La jeune fille acquiesça et la remercia avec gratitude. Sans plus attendre, elle ferma les yeux et se concentra à visualiser Kyle dans ses pensées.

Après quelques secondes seulement, elle se sentit se téléporter et lorsqu’elle ouvrit les yeux, elle se retrouva dans la chambre de Kyle. Le jeune garçon était assis à son petit bureau, concentré à écrire un texte pour un devoir. Elle devait rapidement entrer en communication avec lui , mais comment ? Sachant que ça ne sera pas une tâche facile, elle tenta tout de même de toucher son épaule. Debout derrière lui, elle avança doucement la main d’un geste hésitant. Mais Comme elle le présageait et avec déception, sa main passa à travers la matière. Lorsqu’elle la retira rapidement, frustrée, Kyle réagit à son mouvement et cessa soudainement d’écrire. Désemparée, convaincue que c'était peine perdu, Amelia ne le remarqua pas et détourna le regard rapidement. Faisant quelques pas vers la fenêtre derrière Kyle, submergée d'une grande tristesse, elle détestait se sentir si impuissante et inutile.

– Qui est là ? lança le jeune garçon, de sa voix remplie d’inquiétude en regardant par-dessus son épaule droite.

La surprise sur son visage, Amelia reporta son attention vers Kyle. Elle remarqua alors la peur qui se lisait dans le regard du jeune homme. Elle comprit qu'elle devait se calmer et lui offrir une énergie plus douce, plus paisible pour ne pas l'effrayer. Elle l’approcha lentement avec un regain d’espoir.

– C’est… Amelia, prononça-t-elle doucement, voulant annoncer sa présence doucement même si elle doutait qu’il puisse l’entendre.

Les yeux de Kyle fixèrent le vide un instant avant de retourner brusquement vers son devoir. L’avait-il entendu ou préférerait-il faire la sourde oreille? Remplie de questionnements, Amelia se tenait maintenant tout près du garçon. Elle l'observa un bref instant et constata qu’il serrait les lèvres les yeux fermés, la respiration saccadée.

– Kyle ? C’est Amelia, lui chuchota-t-elle à l’oreille.

– Qui ? fit-il en tournant seulement les yeux à sa droite sans bouger la tête. Son regard ne la fixait pas directement ce qui permis à Amelia de comprendre qu’il pouvait entendre la vibration de ses mots mais qu’il n'était pas en mesure de la voir. Elle lui répéta son nom et tenta de lui expliquer la situation, mais Kyle ne semblait pas saisir ce qu’elle disait.

Le regard d'Amelia fut soudainement attiré par le stylo qu'il tenait à la main. Elle s'était résolue à trouver un autre moyen de communication. Ne sachant pas si ce serait une bonne idée ni comment procéder, elle toucha l'avant-bras de Kyle, mais ne le sentit pas. Elle lui murmura qu’elle devait lui parler. Puis, elle se concentra sur le crayon et la feuille de papier qui avait déjà quelques lignes d'écriture. La sodalite, posée sur le bureau, brilla faiblement de sa couleur bleu royal. Les yeux fermés, Amelia mit toute son énergie et son intention dans sa main et se fondit dans celle de Kyle. Il sentit un léger frémissement dans le bras et dans sa main. Il a alors compris qu'une entité essayait de lui communiquer quelque chose. Grâce à l'effet de sa pierre, ce dernier se détendit instinctivement et respira calmement. Une fois qu'il s'était éclairci la tête, il a relâché la pression sur le stylo pour le tenir du bout des doigts. Submergée par l'excitation qu'Amelia devait contenir, elle pouvait maintenant manier le stylo. Elle griffonna d'abord une lettre illisible qui devait ressembler à un A, mais la connexion était plus difficile qu'Amelia ne l'avait prévu. Sans baisser les bras, elle se concentra sur ce qu'elle voulait lui transmettre par l'écriture automatique. Après quelque secondes, il sent que les mouvements de sa main ne lui appartiennent plus comme si quelqu'un le guidait et des mots, puis des phrases commençaient à se former. Le souffle de Kyle resta coincé dans sa gorge quand il lut le gribouillage qui était cette fois compréhensible.

— Je suis Amelia … Ken a besoin de Michael… à la falaise de Signal Hill.

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