Novembre 1975

Chantal a rencontré quelqu’un. Tout le monde en parle à Baulà. C’est un roi du pétrole en Arabie. Non, c’est un cousin de la Princesse Liliane. N’importe quoi. C’est vrai qu’on la voit moins, mais on l’a aperçue un dimanche chez ses parents, sa MG rouge remplacée par une Porsche 911 noire, ses cheveux blonds toujours longs et bouclés, ses lèvres toujours rondes et remplies, sa peau éclatante, ses yeux océan ou jungle, cela dépend. Il suffit de citer son nom pour que la conversation s’anime. La plus belle fille de la région. Une salope. Une beauté. Elle est mannequin. Même pas, c’est une Marie-couche-toi-là. Elle est très intelligente. Non, juste une secrétaire. Elle a son cerveau entre les jambes. Faudrait pas qu’elle rapplique avec un polichinelle dans le tiroir, c’est son père qui tirerait la gueule. Bah, il a rien à dire. Si ça tombe, la Chantal n’est pas de lui. Ricanements. N’importe quoi, suffit de voir sa mère, une institutrice à la retraite. Ils ont eu Chantal tard et lui ont tout passé. N’empêche quelle beauté. Rien à envier à la Bardot.

Bernadette Badert tend l’oreille à tous les potins qui confirment que Chantal a la cuisse facile. Elle est soulagée que celle-ci se montre moins le samedi soir, son fiancé semblait un peu trop apprécier les charmes de cette chaudasse décolorée. La date de son mariage avec le Docteur Francis approche doucement. Dix mois de fiancailles, c’est sérieux. Pour leurs noces, la famille de Francis Delaunoy veut faire les choses en grand. Et la famille Badert dit oui à tout, ils ont les sous, ils paieront, la boucherie marche bien et leur fille va épouser un chirurgien.