Ma Grand-Mère Aux Trousses de la Mafia

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Vu que l’auteur a du mal à retranscrire la cohérence de mon personnage et de celui de mes deux potes, je vais prendre le relai, ça sera plus simple pour tout le monde. Moi, c’est Nancy. Et avec Toulouse et Alix on était sur le point de faire la plus grosse bêtise de notre vie. Un conseil, ne reproduisez pas ça chez vous les enfants.

Le plan était pourtant simplissime.

Toulouse pénètre avec Alix dans la banque. Ils braquent les deux guichetiers. Les guichetiers remplissent les sacs. Ils déclenchent l’alarme incendie. Je les récupère dans la rue sur laquelle donne la sortie de secours. On se taille chez Paris et on se planque jusqu’à ce qu’on reçoive les passeports. Après quoi, à nous la liberté.

Comment ça a pu partir autant en suçette ? Et surtout : comment est-on encore vivants ?!

C’était Alix qui avait échafaudé le plan. Je la trouvais un peu vulgaire au début, mais elle est pleine de ressources cette petite Alix, une bonne recrue. Elle avait une connaissance assez sommaire des lieux, dû à une vague connaissance qui lui avait filé des tuyaux sur le ton de la rigolade y a longtemps… enfin bref, pour les trois paumés en pleine puberté qu’on était, c’était amplement suffisant. Zéro expérience, le stress à son maximum, des flingues achetés au magasin farces et attrapes du coin de la rue : qu’est-ce qui pouvait mal tourner ?

A 10 heures pétantes, Toulouse et Alix s’enroulent une écharpe autour du visage à la manière des cow-boys. Dans ce que je me remémore a postériori comme un ralenti digne des films d’action les plus hollywoodiens, Alix et Toulouse sortent cheveux au vent de la petite Fiat Panda bleue en stationnement temporaire sur le carrefour face à l’entrée de l’agence municipale, plus que jamais prêts à en découdre. Après réflexion, avec ses cheveux gras en bataille et son large pansement sur le nez, Toulouse a un petit côté bad boy qui lui va plutôt bien.

Je n’ai pas vécu directement ce qu’il s’est passé dans la banque, mais je vous décris ce qui, après avoir recoupé les différentes sources présentes sur place, s’est très probablement passé.

Juste avant de franchir le Rubicon pour de bon, ils marquent une pause.

« Juste un truc. Ça le dérange pas, ton contact, que t’utilises les infos qu’il t’as filées pour braquer son lieu de travail ? » interrogea Toulouse, fronçant les sourcils dans un éclair de lucidité.

« Je vais me gêner, c’est mon ex. »

« Attends… tu veux dire… tu vas braquer ton ex, là ? Mais, attends ! »

Alix a déjà franchi la porte à ouverture automatique de l’établissement. Toulouse est sur ses talons. Ce qui devait arriver, arriva. La grand-mère de Toulouse faisait la queue devant le guichet B. Elle reconnait immédiatement son petit-fils chéri et lui fait signe de venir pour l’embrasser tendrement. « Mon pauvre poussin, tu t’es encore enrhumé ? » qu’elle lui dit en remarquant l’écharpe couvrant la moitié de son visage. « En plein été, si c’est pas dommage, ça ! » Tournant le regard vers Alix, elle demande, candide : « Et elle, c’est ta petite copine ? »

« Heu, non Mamie, elle, c’est, heu… c’est ma collègue… » répond l’adolescent gêné, haussant la voix pour se faire comprendre de la personne âgée.

« Enchantée, Madame. » sourit la jeune braqueuse avant de sortir son Glock 17 factice et de tirer trois coups de pétard en l’air. « Ceci est un braquage, tout le monde à terre ! »

Les clients se mettent à terre les uns après les autres. L’alarme retentit après quelques secondes et une grille de sécurité verrouille instantanément l’entrée principale et toutes les portes internes du bâtiment. La jeune criminelle s’approche de l’employé du guichet A, le plaque sur le comptoir et pose le canon de son arme contre sa tempe.

« Ecoute-moi bien, Guérande. Si ce sac n’est pas rempli à ras bord de billets de cinq cent euros dans trente secondes, je repeins les murs avec ta cervelle d’abruti, c’est compris ? »

« A… Alix ?! »

« Ta gueule et remplis le sac ! »

La grand-mère semble déboussolée par le vacarme. Mais Toulouse tente de maintenir hors de sa vue toute la violence de la scène.

« Qu’est-ce qu’il se passe ? C’est un tremblement de terre ? »

« Heu, oui Mamie, c’est ça, il va falloir évacuer le lieu ! Mais les portes sont verrouillées, viens t’asseoir en attendant qu’elles se débloquent ! »

Passant de l’autre côté du comptoir, il fait assoir sa grand-mère sur une chaise de bureau derrière un de ces murs mobiles qu’on utilise dans les open-space. Il vide ensuite les imprimantes et les étagères de toutes leurs rames de papier et les rassemble sous le détecteur de fumée, sort un briquet de sa poche et met le feu au tas de paperasse. Pendant ce temps, Alix veille au grain sur le remplissage du sac de sport.

C’est là que ça se complique. Il se trouve que l’un des clients réguliers de l’agence est un vétéran de la Légion, et que le gars en question se trouve à cet instant précis étendu sur le sol du hall d’entrée. Voyant que personne n’est resté surveiller les clients, il s’arroge la liberté de se relever et, après avoir bien épousseté sa chemise, de dégainer un authentique Glock 17 et de mettre en joue les deux lycéens.

La grand-mère, voyant la fumée suspecte, s’est levée et se retrouve, à dix mètres de distance, face au militaire en colère et à son arme à feu.

Stop. C’est le moment. Chauffe, Marcel ! https://www.youtube.com/watch?v=KiaSHg6BsXg

Ok, alors je résume. On a deux adolescents en train de braquer avec des pistolets de farces et attrapes la plus grosse banque de la ville, dont toutes les issues sont verrouillées, avec à l’intérieur : la grand-mère de l’un des braqueurs, un début d’incendie et une machine de guerre qui a déjà été parachutée sur plus de théâtres de guerre qu’il n’y a actuellement de billets dans le sac Decathlon entre les mains du guichetier.

Là, on est vraiment dans la merde.

La fumée monte jusqu’au détecteur. L’alarme incendie remplace l’alarme de sécurité et tous les accès électroniques des portes se débloquent d’un coup.

« Cours ! » gueule Alix à son complice en saisissant le sac d’une main. Les balles sifflent, faisant virevolter les feuilles restées sur les bureaux derrière le comptoir et les billets abandonnés en cours de route.

« Mamie, ramène-toi ! »

La petite équipe sort quelques secondes plus tard par la rue de derrière. Je les attends là comme prévu.

« Vous êtes sérieux ? Pourquoi vous avez kidnappés une vieille ? »

« Ta gueule et démarre ! » crient en cœur Alix, Toulouse et sa grand-mère.

Sentant le danger arriver, je mets le pied au plancher. La voiture part à toute vitesse.

« On a eu chaud ! » lâche Toulouse juste avant que la vitre arrière n’éclate sous le coup des balles du militaire à la retraite qui nous visait depuis la sortie de secours.

La Fiat fait un dérapage contrôlé. Nous voilà hors de portée.

En faisant le compte, on a récupéré pas loin de deux cent mille euros, largement assez pour payer les faux passeports, louer une robe de mariée discount et se payer des vacances prolongées vers un pays du Tiers-Monde.

« Et un faux passeport pour Mamie ! » ajoute Toulouse tout sourire, passant sa tête entre Alix et moi.

Avec Alix, on se regarde, interloquées.

« Bah oui, confirme la grand-mère, pour la police, je fais partie du gang maintenant… »

Elle percutait vite la vieille.

La voiture se gare dans le terrain vague avoisinant la maison de Paris et ses quatre occupants sortent une bâche du coffre pour la mettre à l’abri des regards indiscrets.

Première phase de la mission achevée, y a plus qu’à rester planqués.

C’est là que la plus grosse coïncidence de l’histoire des coïncidences a lieu. (Relance la musique, Marcel : https://www.youtube.com/watch?v=KiaSHg6BsXg) Moi-même j’avais du mal à y croire. Piotr et cette brute d’Igor venaient de se garer là, à à peine quelques centaines de mètres, devant nous, et s’éloignent de leur grosse Berline, sans nous avoir remarqués.

Je me tourne vers mes coéquipiers.

« Vous pensez à ce que je pense ? »

« Je sais pas est-ce que tu penses, « Au mon Dieu, au mon Dieu, on va se faire exploser la cervelle dans les plus brefs délais. » ? » me répond Toulouse.

« T’es con, ils nous ont pas vu. »

« Moi je pensais plutôt « En définitive, c’est quoi le pire entre vivre trois jours chez Paris ou se faire poursuivre par les Russes ? » » renchérit Alix.

« Et moi, je pensais à mes géraniums. » lâche enfin la grand-mère.

« Faites-moi confiance, les gars. » Ni une, ni deux, je vide le contenu du sac dans le coffre de la voiture en prenant soin d’y laisser une dizaine de milliers d’euros. Je me dirige ensuite d'un pas déterminé vers la bagnole des Russes. Arrivée devant, j'hésite sur la manière de procéder.

Mère-Grand me prend le sac des mains. « Laisse-moi faire petite, j’ai un vieux compte à régler avec ces ruskofs-là. » Brandissant sa canne, elle fracasse la vitre arrière de la voiture et glisse le sac de sport à l’intérieur.

Alix n’a pas perdu de temps, elle est déjà au téléphone avec la police pour faire une dénonciation anonyme.

On a pratiquement rejoint la Fiat qu’une voiture de police patrouillant dans le coin ralentit déjà aux abords de la Berline et se gare un peu plus loin. On patiente jusqu’au retour des malfrats, assistant à leur arrestation pour le moins musclée.

Plus de mafieux signifie plus de raison de se cacher chez Paris le temps que les passeports arrivent. Et ça en plus du plaisir de voir ces deux connards se faire coffrer pour le seul crime qu’ils ont pas commis, ça valait bien les dix mille.

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