Comme un lion en cage
Plusieurs longues années passèrent. Et c’est au cœur d'une cité grandiose que marchent deux jeunes demoiselles, il leur serait difficile d’être plus aux antipodes. L’une d’entre elle, se déplace avec la grâce d’un félin et la douceur d’un pétale de rose, son regard d’azur brillait tel deux magnifiques étoiles et les traits de son visage semblaient avoir été peint par la main d’Apelle lui-même. La dame vêtue d’une simple toge blanche dépourvue de la moindre tare, rayonnait au milieu de la cité, l’incarnation de la beauté Athénienne même. Et bien que son amie n’eût rien à lui envier, son regard et sa tenue était loin de lui ressembler. À côté d’elle marchait une autre dame. Si son amie ressemblait en tout point à un la fleur d’un nénuphar, celle-ci semblait bien plus proche d’une épine de talus. Son regard est celui d’une guerrière et brûle d’un feu inextinguible. Le long de son avant-bras, courant jusqu’à son poignet, il est aisé d’apercevoir des lanières de cuir enserrant une sorte de manche de lin qui remontait jusqu’aux phalanges proximales de la demoiselle. Recouvrant ce tissu et entourant ses phalanges, une plaque de fer massive se présente à ceux qui auraient l’audace de lui faire face. Son torse nu, ne porte pour seul vêtement que de nombreuses bandes compressant sa jeune poitrine. Enfin, autour de sa taille pend l’habituelle jupe de latte des armées Atheniennes. Rien en elle ne laissait trahir cette douceur qu’elle s’efforce de garder caché au plus profond de son être.
-Alce’... Tu ne voudrais pas t’habiller comme une dame des fois ? Regarde-toi, tu es l’une des plus belles filles d’Athènes…Et tu te couvres de simple bande et d’une jupe de latte…Dit Amara, manifestement désespérée par le manque de féminité de son amie.
-On a déjà eu cette conversation des centaines de fois, en fait, à chaque fois que je m’apprête à me battre, je n’ai pas le temps pour ça, je n’ai pas le temps d’être féminine, je dois être forte, digne, rétorqua la dame en jupe de latte.
-Je le sais, répondit son amie, et à chaque fois, je te réponds la même chose, que tu peux être féminine, et forte, l’un n’empêche pas l’autre ! Que tu le veuilles ou non, tu restes une fille Alcestis...
La dame prit un petit temps avant de répondre, observant le Kallimármaro qui se profilait au loin.
-La question n’est pas d’être un garçon ou une fille, tu le sais très bien, la question est d’être à la hauteur, pour ma mère, je me dois d’être digne d’elle, et pour que lorsque nous mettrons les pieds sur Deus Terra, je puisse le regarder dans les yeux sans avoir honte de ma faiblesse.
Amara soupira, dépitée par la réponse de son amie.
-Tu fais encore une fixette sur ça ? Si ça se trouve, ce garçon ne sera même pas là ! Qui te dit qu’il était comme nous ? Ces gens étaient des barbares ! Peut-être était-il un simple humain ! Peut-être était-il simplement incroyablement fort ! Et même s'il était comme nous, il a eu la gentillesse de se mettre en danger pour nous sauver ! Tu crois qu’il voudrait te voir mettre ta vie de cotes comme ça ? Je te connais assez pour savoir que tu n’es pas heureuse ainsi... Et ta mère semble s’en fichait que tu sois digne ou pas, combien de temps cela fait-il qu’elle ne t’a pas adressé la parole ? Des mois ? Des années ? Athéna a beau être Athéna, ça ne l’empêche pas d’être une mauvaise mère, loin de là.
-Bonne ou mauvaise, elle reste ma mère, dit Alcestis qui commençait à s’agacer, je ne veux pas non plus avoir besoin de dépendre à nouveau de quelqu’un...
-Parfois, c’est agréable de dépendre de quelqu’un...C’est ce qui arrive quand on aime très fort, j’en sais quelque chose...
Alcestis ne répondit pas, elle savait parfaitement à quoi Amara fait référence et ne voulait pas la blessée. Ensemble elles marchèrent en direction du stade qui attendait la combattante.
Là, les deux filles se séparèrent, Amara prit la direction des gradins, Alcestis elle, celle de l’arène. A peine eut-elle le temps de posé le pieds sur le sol qu’elle fut accueillie par un tonnerre d’applaudissement et la voix du présentateur.
-Mesdames, messieurs et enfants qui nous observent ! Mon nom est Ulysse et aujourd’hui encore pour votre plus grand plaisir nous accueillons la reine du pugilat, aussi dangereuse qu’elle est belle, celle dont beaucoup disent d’elle qu’elle est le produit de l’union entre Athena et Aras : Alcestis ! Avec un record impressionnant de 672 victoires pour 0 défaites cette fille qui ferait peur aux Amazones se bats sur ce sol depuis ses 11 ans et n’a pas encore trouver adversaire à sa taille ! Aujourd’hui, sera-t-il diffèrent ?! En face d’elle, celui que le peuple de Sparte surnomma Héraclès, un ancien combattant du Siège de Phenice ! Capable de briser la nuque d’un lion ! Le vétéran, Orion ! Ce guerrier sauvage ne semble pas beaucoup s’intéresser à l'âge et au sexe de son adversaire et est bien prêt à en découdre ! Que la rencontre commence !
Les deux combattants se dévisageaient l’un l’autre et se jaugeaient. Alcestis était absolument immobile, elle sondait son opposant, détaillant chacun de ses traits, de ses muscles, à l’affût du moindre mouvement, du moindre battement de cœur. Quelques secondes plus tard, elle se détendit et soupira, souriant.
“Encore un qui n’était pas à la hauteur, pensait-elle.”
L’homme lui, la dévorait du regard, elle était jeune, elle n’avait que 14 ans. Mais cela ne semblait pas lui importait plus que cela, chez lui, une femme se marie parfois avant cela.
-Alcestis, 672 victoires achetées... Plutôt que d’offrir ton corps à tant d’hommes, pourquoi ne pas devenir ma femme ? Je pourrais t’offrir plus de pl-
L’homme n’avait pas fini sa phrase que son corps, qui frappait le sol, souleva un nuage de poussière. Il n’avait rien vu et était sous le choc, que s’était-il passé ? Pourquoi était-il au sol ? Le frappant tel un éclair la douleur du coup assenait par Alcestis le traversa. Il fut secoué d’un spasme violent et se résigna à rester au sol, l’écart était bien trop grand entre eux.
Souriante, Alcestis qui regardait l’homme de haut, lui adressa que quelques mots.
“Désolé, je n’aime que les Hommes, les fillettes ne m’intéressent pas, et si tu es aussi capable sous les draps que dans l’arène, je plains tes conquêtes.” Puis elle quitta l’arène sous les cris et applaudissement de la foule en délire.
Sous l’arche que formait la sortie de l’arène, elle patientait, Amara, soupirant à l’idée de revoir Alcestis, portait fièrement une nouvelle cicatrice... Mais il n’en était rien, cette fois-ci, la seule chose qui paraissait sur le visage de la demoiselle n’était autre que l’agacement, le combat ne dura que quelques secondes et lui avait laissé un goût de trop peux.
a fille de la guerre s’ennuyait, elle tournait en rond, ne trouvait pas un seul adversaire à sa taille. Sa beauté, sa force et son intelligence lui valaient les faveurs des hommes comme des femmes. Tant et si bien que dans sa jeune adolescence, elle s’attira l’attention de l’illustre Alexandre Trois dont tous disaient qu’il était destiné à devenir le plus grand des hommes.
À un âge encore jeune, elle avait pris les têtes d’hydres, de sirènes ou de méduses, elle faisait trembler les armées et plier le genou des cyclopes. Seuls les idiots lui auraient manqué de respect ou auraient osé la regarder dans les yeux. C’est cette grandeur et cette renommée que son acolyte de toujours, la Dame Amara plaignait en permanence. Elle savait mieux que quiconque à quel point le temps était long pour la dame qui n’attendait que son seizième anniversaire. Ce monde dont la plus grande qualité était sa paix et sa tranquillité, faisait le malheur d’Alcestis qui cherchait le combat, le défi. Elle, qui cherchait à se surpasser en permanence, à être à la hauteur de son héritage, tournait en rond dans ce monde bien trop calme. Elle se sentait comme un lion en cage, à l’étroit.
Mais elle n’avait pas à stagner pour toujours. C’est lors d’une visite d’Aphrodite à l’attention du peuple slave qu’Alcestis saisit l’occasion de combattre. Ces terres étaient connues comme particulièrement féroce, dangereuse, nombreuses étaient les légendes sur ces lieux hantés par des bêtes cruelles et malicieuses. C’était le lieu parfait pour s’entraîner. Et si elle avait réussi à tromper la vigilance d’Aphrodite en étant une enfant, elle pourrait le faire aujourd’hui. Lors de cette visite, et durant une seconde d’inattention, Alcestis se jeta dans le portail du Bifröst avant qu’il ne se referme.
Enfin, elles se dessinaient devant elle. Ce lieu terrible dont elle avait ouï dire qu’il ne connaissait pas le repos. Ces terres sur lesquelles rodaient bêtes et monstres sanguinaires. Elle pouvait enfin fouler ce monde hostile. Elle avançait, lentement mais sûrement. Autour d'elle la foret vivait. Il n'y avait pas que les bêtes qui bougeaient, qui remuaient, qui faisait craqué le bois des arbres. La foret elle même réagissait à la présence de la fillette, et sa réaction n'était pas une réaction de bienvenue.
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