Le cadavre

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C’est alors qu’Alcestis, qui marchait sur les bords d’une rivière, sentit une main se saisir de sa cheville et l’entraînée au fond de cette dernière. Sous l’assaut d’un ennemi invisible, Alcestis, dont la vie était enfin mise en danger, sentit l'adrénaline envahir ses veines. Pour la première fois depuis bien longtemps, elle sentait la menace d’un monstre implacable, l’eau qui l’entourait été plus noire que la nuit. Il lui était impossible de voir quoi que ce soit autour d'elle. Le miasme dans lequel elle baignait était si épais qu'elle peinait à bouger les bras. Plus le temps passé, plus la main qui l'avait agrippé l'entraînée vers les profondeurs de la rivière. Jusqu'où celle-ci, plongeait-elle ? Mais Alcestis n'était pas prête à se laisser défaire. Malgré la difficulté, elle tendit sa main vers la surface. Dans un éclair de feu, La Lance et l'Égide percèrent les cieux, la surface, et les ténèbres qui l'entouraient. Les artefacts d'Athena lui offrirent la force nécessaire à défaire son attaquant. Serrant La Lance de toutes ses forces, elle empala la bête du crâne jusqu'à l'aine. La créature poussa un hurlement de douleur dont la force fit fuir les oiseaux aux alentours. Enfin libre, la fille de l’Olympe parvint à s’extirper de l’eau vaseuse, elle se traîna sur la berge, épuisée par ce court échange, à bout de souffle. Elle se releva, lentement, plus un bruit ne se faisait entendre, comme si la forêt entière était en alerte, attendant la suite de la bataille. Et la suite fut fulgurante, s’arrachant des ombres un être dont le regard exultait de malice se lança à l’assaut de la fille avant de disparaître sans laisser de traces. Alcestis était sur ses gardes, son souffle se ralentissait, sa concentration à son maximum. Elle scrutait chaque recoin de la forêt, chacune de ses branches biscornues, chacun de ses troncs déformés, la noirceur profonde des eaux, de la rivière dans laquelle elle pouvait aisément apercevoir de nombreuses paires d’yeux jaunes luisant. Si à son arrivée, la forêt lui avait fait une drôle d’impression, maintenant que la tension est au plus haut, celle-ci est tout autre. La lumière de la lune, filtrait péniblement à travers de lourds nuages noirs, ne permettant d'apercevoir que de faibles silhouettes au cœur de l’obscurité. Devant elle, rien, rien d’autres que d’insondable ténèbres. Pour la première fois depuis fort longtemps, Alcestis ressentit la peur. Une peur viscérale. Pour la première fois, elle était la proie, les rôles avaient été inversés, elle qui en général ne craignait rien, se prenait à envisager la fuite. Mais elle n’eut pas le loisir de se questionner plus longtemps. Venant interrompre ses pensées, l’ombre ressurgit et cette fois, il fit mouche, touché à l'abdomen, elle se réjouit d’avoir fait appel à l’Arsenal de l’Olympe. Une question lui vint, l’attaque venait il du même ennemi ? Où étaient-ils plus nombreux ? Et la réponse se fit entendre rapidement quand, brisant le silence, de nombreux cris désincarnés résonnèrent. Ils étaient nombreux, très nombreux, elle était complètement encerclée. Les assauts fusaient, elle ne pouvait que contre-attaquer et esquiver, bien qu’elle eût souhaité cet affrontement, elle ne pouvait chasser cette pensée de son esprit « Et si je mourais. Pourrais-je le revoir ? Rejoindrais-je Freyja ? ». Cette seule pensait l’empêcher de baisser sa garde pour passer à l’offensive. Elle ne pouvait que subir, et ce n’était qu’alors qu’elle s’était résolue à tout perdre, que la flamme s’embrasa. Lâchant la Lance et l’Égide, elle fit appel aux Cestes d’Héraclès et se lança à corps perdu dans la mêlée. Sous ses poings, les crânes se brisaient, les os volaient en éclats, elle sentait chaque organe éclatait sous la violence de ses assauts. L’affrontement était d’une rudesse peu commune. La bataille était longue et faisait trembler la forêt, Alcestis n’en voyait pas le bout. Plus elle s’enfonçait dans cette masse informe de créatures cauchemardesque plus ses ennemis étaient nombreux. À leur tête, elle pouvait l'apercevoir. Celui-ci qui menait la meute. Un monstre grotesque. De sa gueule dégoulinait le sang de sa dernière victime, celle-ci gisant à ses côtés, la tête quasiment arrachée par la bête. Ses yeux étaient vides de toute vie, seule une inextinguible soif de sang s'y lisait. La demoiselle se demanda comment sa tête, si imposante, pouvait tenir sur des épaules si frêles. Son corps était complètement émacié, ses muscles morts, ses jambes et ses bras semblables aux brindilles tombées d'un arbre. Le monstre était pathétique. Seulement, pour une raison étrange, Alcestis savait qu'il n'était pas un ennemi à sous-estimé. Dans un second souffle, elle reprit l’assaut. Alcestis se fraya un chemin à travers la masse informe de monstre qui se présentait à elle. Tandis qu’elle chargeait dans la direction de l’étrange quidam, celui-ci se saisit du cadavre à ses pieds. Mettant toute sa force à l’œuvre, l’hominidé émacié se saisit du cadavre à ses pieds, avant de le catapulter avec une surprenante aisance en direction de la guerrière d’Athene. Alcestis, prise dans son élan, n’eut pas le temps d’éviter le corps. Une seule option s’offrait à elle : continuer sa charge. Alors que le corps s’apprêtait à l’atteindre, elle leva à nouveau sa main, prenant la place des cestes, Le Xiphos d’Ares fit son apparition. D’un coup puissant de ce dernier, elle fendit le cadavre en deux. Muscles, os et organes ne purent résister à l’implacable lame divine. Semblable à un démon, Alcestis traversa le corps inanimé. Couverte de sang et des organes, continuant sa ruée infernale, Alcestis vint trancher la tête du monstre d’un coup de sa lame. Mais l’effet fut bien diffèrent de ce qu’elle imaginait. Le corps, bien que séparé de sa tête, frappa en sa direction, et malgré l’armure de l’Olympe, le coup se fit sentir dans chacun de ses atomes.

“Comment des bras aussi frêles, pouvaient-ils être aussi puissant ? ” Se demanda Alcestis qui tombait à genoux.

Son corps était lourd, ses forces n’étaient pas infinies. Et pour ajouter à sa détresse, le corps fit demi-tour et ramassa sa tête. Et alors qu’il la reposait sur ses épaules, Alcestis vit l’horreur de cette chose. Avant même que la tête ne se reconnecte au reste de son corps, ses veines, sa chair, chacun de ses muscles s’étendirent. Chacun de ses tissus s’allongèrent et virent à nouveau clamé le foyer de pensées. La bête ricanait, elle voyait déjà sa victoire s’annoncer, que pouvait bien faire cette pauvre humaine face à sa force implacable ? Alcestis elle-même ne se voyait pas vaincre cet adversaire. Elle serra ses poings, regardant le ciel noir.

“ Dame Freyja, si je dois mourir aujourd’hui, je vous demande de réclamer mon âme. “

Se relevant difficilement, Alcestis fit à nouveau appel aux Cestes du Champion. Regardant dans les yeux son adversaire, elle jeta ses derniers restants de vigueur dans un baroud d’honneur. Un dernier combat qui décidera de sa survie ou de sa mort. La vigueur de la bête lui semblait inaltérable, chacun de ses coups brisaient des os, mais il ne s’y intéressait que peux. Saisissant Alcestis à la gorge, il la souleva lentement. Sa poigne était de fer et elle ne pouvait y échapper. Les doigts de l’hominidé creusaient sa peau et lui infligeaient une douleur indescriptible. Mais alors qu’elle sentait sa colonne vertébrale sur le point de lâcher et qu’elle imaginait déjà sa tête roulée sur le sol, elle leva son poing. 

“ Meurt ! “ 

En hurlant cela, elle écrasa les Cestes contre le crâne de l’être implacable. La force de l’impact était telle que la bête fut propulsée plusieurs mètres plus loin. Enfin, son coup avait de l’effet. Le monstre finit sa course en s’empalant sur l’une des épaisses branches d’un chêne qui se tenait là, inébranlable. Libérée, Alcestis reprit son souffle, et observant la bête qui se débattait pour se dégager de sa situation. Elle avança, lentement, déterminée, elle avait enfin l’avantage. Serrant le poing, elle observa la créature aux longs crocs.

“ Tu as été un adversaire formidable. “

C’est dans un cri féroce qu’elle acheva son adversaire. À nouveau, son poing vint foudroyer le crâne de l’être acculé. Sous sa force, le crâne se brisa, elle en sentit chaque éclat osseux qui s’enfonçait avec elle dans le cerveau bientôt broyé de l’ennemi défait. Éclaboussant la forêt, le crâne éclaté vint souiller les habits et la peau d’Alcestis. Partout, autour d’elle, des cadavres de monstres gisaient, et devant elle, pendant au-dessus du sol, celui du monstre, décapité. Un spectacle de massacre, une véritable boucherie s’offrirait à quiconque s’aventurerait à cette heure dans cette forêt.

Elle était à bout de force, à peine capable de lever le poing, mais elle avait vaincue. Elle avait défait des monstres dont elle n’imaginait pas l’existence, et s’était vaincue elle-même. Épuisée, blessée et probablement intoxiquée, Alcestis tomba à plat ventre au sol. Sa dernière pensée avant de s’évanouir se dirigea vers celui qui l’avait sauvé il y a des années. Si elle mourait, si ce combat devait être son dernier, elle voulait rejoindre le Nord. 

Mais ce n’était pas la fin pour elle qui s’éveilla plusieurs jours plus tard dans un grand lit blanc, à ses côtés se trouver son amie de toujours qui veillait sur elle… Alcestis la regarda avec un air inquisiteur et suspicieuse avant de lui adresser la parole.

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