Il acquiesça en riant, cette remarque l’amusait beaucoup, et l’idée de voir Alcestis débarquer en Asgard le faisait d’autant plus rire qu’il l’en savait capable. Elle néanmoins, elle ne riait pas le moins du monde, les choses avancées enfin, elle refusait de le voir mourir, pire, elle refusait d’arriver, et de trouver son cadavre. Sachant parfaitement que le temps était compté, elle et se hâta de partir, regardant en arrière alors qu'Askr pénétrait à nouveau dans la grotte, arme dégainée, prêt à se battre. Le chemin en direction de la tente de la Dux était long, bien plus qu’elle ne le pensait, combien de kilomètres avaient ils marché ? Sanctuaire était-il si grand que cela ? Pourquoi n’avait-elle pas encore rejoint les autres ? Le temps semblé distordu autour d’Alcestis, son cœur battait le tambour.

Askr ne perdit pas de temps à se cacher ou établir une stratégie. Il fit marche. Marche vers l’Archange qui se dressait face à lui. Ce dernier fut choqué par la présence du jeune homme, il n’avait rien à faire là, cette réunion devait rester secrète, c’est pour cela qu’elle avait lieu si tard dans la nuit. Les choses se compliquaient et cela ne lui plaisait pas le moins du monde.

Mikaël s’approcha d’Askr, lui souriant, se voulant rassurant et aimable, malgré la vilenie de l’acte dont il s’apprêtait à être l’auteur, il ne voulait pas causer plus de souffrance. En tant que Chef des Armées du Firmament, il ne pouvait qu’obéir aux ordres de l’Unique, c’était sa vocation, sa raison d’exister, exécuter les ordres. Et cet ordre était simple, cruel, et lâche, mais simple. Évincer discrètement, ceux qui pourraient se mettre en travers de sa victoire, ou en tout cas, qui pourraient mettre son plan en péril.

“ Askr d’Asgard, fils de Freyja, représentant du Nord, quelle surprise de vous voir ici à cette heure-ci, je vous demanderais de quitter les lieux au plus vite. Je ne souhaite pas avoir à vous combattre. Vous n’avez pas à mourir ce soir. “ 

La réponse ne se fit pas attendre. Askr empoigna sa hache avant de la projetée de toutes ses forces en direction de l’archange, qui la bloqua avec aisance de son bouclier qui n’essuya pas la moindre égratignure après l’impact aussi brutal, fut-il. Mais cette attaque n’était qu’une diversion, utilisant sa maîtrise sur la terre, Askr causa un séisme sous les pieds du chef des armées célestes. Le plafond de la grotte s’effrita rapidement sous la force des tremblements avant de s’écraser sur le guerrier de l’Unique. Le Nordique avait un coup d’avance, pour cette fois. Sous la terre de la grotte, il avait creusé à la hâte, un réseau de tunnels menant à l’extérieur. Enfin, hors des décombres, il vint écraser son poing au sol et du sol s’arracha un dôme de roches qui servirait d’abri pour la Shintô.

Sa mission menée à bien, il sortit de terre, se préparant au combat, à ce qui serait probablement sa dernière bataille. Il était prêt à mourir et rejoindre Asgard, sa Mère, sa sœur et ses frères d’armes. Il souriait, voyant en face de lui une mort glorieuse, une mort de guerrier qu’on lui envierait et dont il pourrait se vanter lors de ses dîners au Valhöll. Les portes de la neuvième Hall s’ouvraient à lui.

Faisant voler en éclats la roche, lévitant au-dessus du sol, se présentait l’être divin. Baignant dans une lumière d’or et d’argent qui se reflétait sur son armure qui ressemblait à s’y méprendre à celle d’un guerrier latin. La partie abdominale de cette dernière semblait dessiner le corps d’un homme puissant et musclé affublé d’une étrange croix. Il était armé d’une épée ouvragée et d’un bouclier sur lequel on pouvait lire “ Quis ut Deus ? “ Forgé dans un or d’une pureté inégalable. Au niveau des bras, on pouvait apercevoir ce qui devait être une chemise qui devait avoir pour objectif d’éviter le contact entre la cotte de mailles et la peau de l’être divin, passé la ceinture, d'étranges plaques de bois formait une jupe proche de celles des gardes de Bellona. Dans son dos, il arborait deux ailes couvertes de plume d’un blanc de marbre, et se présentait devant Askr, comme un géant d’Albâtre et d’or, immobile. Contre toute attente, là où le jeune homme pensait voir un visage dur, inexpressif, il pouvait lire la pitié. Le chef des armées ne voulait pas se battre, mais le choix ne lui était pas donné. À ses côtés en revanche, William, lui semblait bien décider à en découdre, son arme en main, la malice se lisait dans son regard.

Ne laissant pas le temps d’ouvrir la bouche à leurs opposants, Askr sauta dans la bataille. La fureur des neufs mondes dans les yeux, il frappa de toutes ses forces sur le bouclier de l’Archange. Malgré la puissance de la frappe, le bouclier ne sembla pas en ressentir l’impact. Avec un regard triste, le combattant baigné de lumière frappa le visage du guerrier du Nord du plat de son bouclier, le faisant reculer d'un pas.

“ Impossible de traverser ce bouclier sans y aller à fond hein ? “

Dans un hurlement d’outre-tombe, le guerrier du Nord fit appel à la foudre qui vint frapper directement l’Archange tout d’or vêtu. La rage du Valhöll imprégnant chacun de ses coups, il noyait son opposant dans un torrent d'acier, déchaînant la violence des éléments, il ne lui offrait pas la moindre ouverture. Tout Archange qu’il était, son armure d’or commençait à plier sous les attaques incessantes. Le bouclier commença à de moins en moins absorber les assauts répétés d’un Askr imprégné de la fureur du Nord. La hache du jeune homme faisait plier petit à petit la défense qui semblait au premier abord impénétrable. Quand Mikaël eut senti que son bouclier allait lâcher, il asséna un puissant coup de ce dernier au visage du Nordique. Rien à faire. Askr ne semblait pas vouloir s’arrêter de frapper. Mikaël avait beau contre-attaquer, Askr continuait ses assauts. Tant et si bien qu’il ne remarquât pas l’épée qui lui venait d'au-dessus. Ce fut la foudre qui vint frapper son assaillant, Thor lui-même avait pris part au combat. Tournant son attention vers William, il fit voler la tête du Demi-dieu d’un coup de sa hache. Malheureusement, cet instant fut suffisamment long pour que l’Archange ne mette de la distance entre eux. Pour qu’il puisse reprendre son souffle et inspecté son équipement. Débarrassé de l’insecte, Askr revint à la véritable menace.

“ Pourquoi avoir enlevé la fille de la Déesse Shintô ? Dans quel objectif ? Les dieux uniques ont peur de perdre face aux autres Panthéon ? “

L’Archange lui offrit un simple sourire triste avant de répondre.

“ L'Unique ne connaît pas la peur jeune homme. Mais malheureusement, nous devons nous assurer la victoire par tous les moyens. Soyez sûr que cela ne me plaît pas plus qu’à vous, mais notre ennemi est trop vicieux, trop sournois pour que nous puissions nous permettre le luxe de le laisser vaincre. Ce jeu n’en est pas un, il s’agit d’une guerre, une guerre sans pitié dont vous êtes les soldats, dites-vous qu’en faisant cela, nous réduisons les morts. Cette fillette ne sera pas blessée, elle sera renvoyée chez elle, comme si elle avait été simplement bannie de Sanctuaire. “

Askr crut entendre les paroles de son ami Louis, cet ennemi, était-il si dangereux ? Était-il une menace au point que l’Unique mette en danger sa position sur Sanctuaire dans le but de s’assurer la défaite de ce Dieu ? Nombre de questions se bousculèrent dans sa tête, mais il n’avait pas le temps de trouver une réponse à toutes celles-ci.

Un éclair de lumière doré vint frapper Mikaël. Il reprit sa posture de combat, enveloppé dans ce qui semblait être la puissance d’un dieu, le Dieu Unique observait et semblait s’être décidé à intervenir. 

L’intervention divine rendit sa vigueur au guerrier ailé qui ne laissa pas à Askr le temps de réagir. Mikaël reprit la charge, et vint sonner le nordique d’un coup de son bouclier d’or. Assommé, le jeune homme ne put réagir à la prochaine attaque, une véritable tempête de lames s’abattit sur lui. Le torse meurtrit, il tomba au sol, Mikaël l’observant avec attention, ses paroles étaient honnêtes, il ne souhaitait pas prendre la vie de cet adversaire.

Mais il était de son devoir de mettre fin à cet affrontement. Une larme coula sur sa joue au moment où son épée vint percer le cœur du garçon. La foudre frappa Sanctuaire au moment même où l’acier vint embrocher la pierre du courage. Les éléments se plongèrent dans une fureur insondable. La foudre vint s’abattre sur le corps du jeune à de nombreuses reprises avant qu’un éclair démentiel ne le fasse se lever. Son corps était mû par la force de Thor et malgré son état pitoyable, le corps en lambeau du guerrier du Nord fit son premier pas en direction du combat. Les éclairs s’abattaient autour de lui. À cet instant, Mikaël crut voir Le dieu du Tonnerre en face de lui. Le jeune homme retourna à l’assaut avec une force divine, les éléments frappaient autour de lui, la bête était réveillée. Celui que l’on nommait Gullinbursti étaient devenu Berserkr, le guerrier de légende à la peau d’Ours. Sa rage était telle qu’il en oubliait l’existence même de Sanctuaire, de ses camarades, de tout ce qui trouvait autour de lui, et même de cette arme qui aurait pu l’aider à venir à bout de son adversaire. Il frappait avec acharnement sur le bouclier de l’archange qui finit par fondre sous la chaleur de la foudre. Chaque coup recouvrait un peu plus le poing du jeune homme de cet or pur. Et chaque couche de cet or lui brûlait la peau et alimenter la rage. L’Archange était impuissant.

Mikaël était bloqué, face à lui se dressait les Neufs Mondes. La tâche qui lui avait était confiée, bien qu’originellement simple, lui semblait à présent irréalisable. Son adversaire était prêt à tout perdre pour ce combat, il était mu par la guerre, par cette envie d’en découdre, de sortir vainqueur qu’importe le prix. Une détermination qui le fit se questionner sur ses propres agissements. La tâche que lui avait confiée son maître était justifiée, mais était-elle juste ? L’Unique avait il fait fausse route ? Si un garçon si jeune était prêt à tout sacrifié pour un combat, comment Dieu lui-même pouvait il considéré une option aussi lâche que celle de l’enlèvement d’une fillette ? Avait-il si peu foi en leurs champions ? D’où lui venait cette vigueur ? Cette ferveur au combat ? De quoi était fait ce guerrier qui pourtant lui était bien inférieur ? Toutes ses questions se bousculaient dans la tête de l’Archange.

Mais la chance ne l’avait pas abandonnée. Entourée des autres Demi-Dieux, Alcestis arriva sur les lieux. La vue de son ami dans un état aussi pitoyable lui brisa le cœur. Elle était incapable de bougée, tremblante, elle resta immobile. C’était sa chance. Mikaël se saisit de son épée et dans un geste de désespoir, il se jeta sur celle-ci en sachant parfaitement que le guerrier du Nord s’interposerait. Et cela ne manqua pas, faisant bouclier de son corps, Askr se fit à nouveau empalée sur l’épée du suivant de Dieu. Posant sa main sur la lame, jeta un dernier regard à son adversaire. Mikaël comprit, à cet instant, que qu’importe ce qu’il ferait, il ne pourrait venir à bout de ce guerrier, que sa fureur et sa rage de vaincre ne saurait se taire. 

Mikaël, avait enfin accepté sa défaite, il semblait perdu, la lumière du Dieu Unique ne suffisait pas, il lui fallait prendre la fuite. Mais quelle honte pour le Chef des Armées, pouvait, il fuir devant un tel ennemi ? Aurait-il le cran de fuir après les efforts déployés par son adversaire pour vaincre ? Il avait été assez lâche pour une seule soirée, kidnappé une enfant, puis se servir d’un être aimé pour vaincre, il s’était assez déshonoré. Non, Mikaël malgré sa défaite évidente, refusa de fuir. Il se leva, prêt à subir le coup de grâce de la part de son opposant, acceptant avec honneur et fierté sa mort, il avait vécu par le fer et mourrait par le fer.

D’une main, Askr se saisit de sa hache une dernière fois, il leva la tête vers les cieux et rugit avec une force telle que le firmament sembla s’ouvrir pour lui. La foudre répondit une dernière fois à son appel et vint lui offrir une ultime frappe. Il abattit son arme sur le crâne de l’Archange qui se brisa sans opposé plus de résistance. 

Mikaël n’était plus, mais malheureusement, Askr non plus, ses blessures étaient bien trop profondes. Il mourut, la hache à la main, debout, protégeant son amie de l’ultime tentative de cet ennemi mortel.