Le monde qui ne dort pas aux heures des couchers est si vide et si beau. On ne le voit peut être pas lorsqu'on est dans son lit douillet mais une fois dehors, on s'y plaît. La vie est souvent assez ennuyeuse surtout quand on a le temps d'y penser. En revanche, avec de si nombreuses choses à observer la nuit, il serait sot de dire que l'on s’ennuie.
        Que peut-on voir dans un périmètre estudiantin, vide justement de ce qui fait sa nature : les étudiants. Détrompez-vous on y voit ces étudiants également, dans des postures parfois pas très recommandables si vous voyez ce que je veux dire… On y reviendra, dans un autre sujet peut être. Pour l'heure, je vous conterai mon aventure dans les entrailles de cet univers, au contraste assombri, si vous voulez bien me suivre jusqu’au bout. Qu'ai-je donc vu qui puisse vous plaire et que vous ne sachiez guère? À vos oreilles, du moins, à vos yeux.
        La Lune. Déesse de la nuit, gardienne des grenouilles, des lucioles et des autres espèces qui nous remplacent lorsque l'on va se coucher, elle est d'une beauté. Elle n’est certes pas pleine ce soir mais je la préfère ainsi car sa non-complétude reflète bien mon état d’esprit. Si je suis sorti aujourd’hui c'est principalement parce que je manquais d'une chose, je manquais d'une réponse. Je ne saurai vous en dire plus… la Lune par contre en sait beaucoup.
        À mesure que je marche, m’éloignant à petites mesures de ma chambre, de mon lit qui pleure mon absence, je l’observe et elle me regarde en retour. Comment le sais-je ? J'ai appris à lire ses signes, à la comprendre… c’est elle qui me l'a apprise, cette aptitude. Et aujourd’hui, ce n'est point le fruit du hasard si elle est partiellement découverte : elle sait ce que je cherche et elle me le fait savoir.
        De coutume, je me promène de part en part, d'obscurité en obscurité, dans les rideaux d'air frais que la nuit me projette. Cependant je ne trouve la paix qu’en un seul endroit, un seul espace où la Lune me berce de sa lumière : le terrain de sport. Qu'il soit éclairé ou non, ce lieu unique me permet de contempler la Lune dans toute sa splendeur. Nous y communiquons plus aisément. Quoique, vous vous en doutez certainement. En ce jour, particulièrement, elle me parle d'une toute autre voix. Cette fois, elle semble vouloir de moi plus que d'habitude, une plus grande attention. Elle m'appelle, elle me sourit. Cette fois est peut-être la bonne. Je saurai enfin la réponse que j'ai tant attendue, la vraie raison de ces nuits blanches. Son rideau se dévoile. Quelle grâce dans ce mouvement ! Elle n'a jamais semblé aussi belle. Ça y est ! Je connaîtrai enfin pourquoi les beautés du jour me tourmentent tant.
La Lune me parle… elle me dit que ces créatures sont inoffensives. Elle me dit qu'elles ont toujours vécu dans la lumière et dorment aux heures des couchers. Elles craignent ainsi l'obscurité, elles craignent ce qu'elles ne connaissent pas, ce qui est étrange à leurs yeux. La Lune me demande de leur pardonner. Sa voix devient de plus en plus pâle car elle a remarqué mon désarroi. La Lune, en larmes, me demande de pardonner à ces créatures. Elle pleure car elle sait que j'ai mal, mal des blessures que m'ont infligées les créatures du jour. Elle me supplie de pardonner et d’espérer. La voir ainsi me fait de la peine mais je sais qu'au fond, elle veut que je sois heureux même si cela prendra du temps.
        La Lune, en sanglots, se voile de nouveau, avec la même délicatesse que la première fois. Elle est très émotive. En quelques dernières paroles, elle s’évanouit dans son lit de nuages. Ce qui m'a fait repenser au mien qui pleure aussi toutes les mousses de son corps, à force de me réclamer.
        Sur le chemin du retour, tout en essuyant mes larmes, je me réjouis en repensant à la promesse que la Lune m'a faite avant de me quitter. J'attendrai avec impatience ce jour où elle me la montrera finalement… cette créature qui lui ressemble tant.

S.Ys.