Lieu : Quartier Général des Roses Noire, Cité de Sarine
Temps : Aube hivernale, Année 610, 3ème année de guerre

Je reviens avec un autre cadavre de chien errant, le troisième et dernier de la nuit. J'ai longuement traqué cette bête qui ne m'a rien fait, mais que je déteste.

« Voilà le dernier, dis-je en jetant la dépouille aux pieds de l'exécuteur Courouge. Je ne veux pas ma paye aujourd'hui.
– Pourquoi ? me demande Courouge, étonné.
– Je veux un rendez-vous avec l'ordonnateur Bellioth. Je veux un autre travail.
– Dommage. Tu es efficace à ce poste, Byan.
– Je sais que je demande beaucoup. Mais je suis capable de mieux, dis-je en pliant mon filet.
– Je n'ai personne pour te remplacer. Je n'appuierai pas ta demande.
– Dans ce cas, je vais l'appuyer moi- même.
– Non. C'est une mauvaise idée. Va te reposer !
– J'en ai marre de tes ordres, Courouge. Ne t'oppose pas à moi.
– J'exécute les ordres de l'ordonnateur, et j'ai dit « non ».
– Tu es prêt à risquer ta vie contre moi ?
– La Justice avant tout, Byan. Les Roses Noires blessent mais ne tuent pas. Tu ne risques pas seulement ta vie : tu risques aussi ta place parmi nous, avec tes enfantillages ! »

Je vois bien que je ne suis pas pris au sérieux, et j'aimerais vraiment le convaincre. Il ne bouge pas d'un poil, et mes doigts se crispent sur mon filet.

« Si tu n'as pas d'autres arguments, va te coucher, Byan.
– Donne-moi ma paye, dans ce cas, dis-je, à bout de force.
– On est d'accord, fait-il en déposant ma bourse sur ma main. Ne me parle pas de l'ordonnateur ce soir. Va dormir, boire et manger, et ne discute plus les ordres. »

Je me retire, frustré. Je vais chercher mon vin, et m'interroge en voyant le soleil se lever. Suis-je condamné à passer pour un guignol ? Ne me prendra-t-on jamais au sérieux ?