En ces terres, un échange de pensées s'effectuait grâce à un lien de confiance. Ainsi le voulait la bienséance.

Pourtant, un mage se fichait bien de ces conventions. Seul le savoir comptait pour lui. Jouer le jeu du temps l'insupportait, bâtir une relation dans les règles demandait trop d'efforts pour un résultat incertain. L'idée de s'investir pour finalement tomber dans les griffes du mensonge le terrifiait.

Alors, fort de ses sorts, il s'infiltrait au plus profond de l'esprit de ses interlocuteurs à leur insu. Rien de méprisable, était-il persuadé. Il s'amusait ensuite à parsemer la conversation de sous-entendus sur les souvenirs extorqués, l'air de rien, tant pour s'enivrer de son sentiment de supériorité que pour simuler une osmose. Enfin, arrivait le coup de grâce. Imparable. La révélation d'une confiance à sens unique.

Peu lui importait le choc, le dégoût ou la colère que ressentaient les personnes qu'il trahissait. Parce qu'il savait. Il savait de quel bois elles étaient constituées. Quant aux réactions brutes à son encontre, il ne s'en souciait guère. Elles disparaîtraient vite. Nul ne lui tournait jamais le dos. Il savait faire accepter à chacun le déséquilibre de leur relation.

Cependant, un point essentiel échappait à ce mage bouffi d'orgueil. Détenir certains épisodes d'une vie ne signifie pas saisir les mécanismes qui la régissent. Aucun raccourci n'existe pour comprendre la complexité des liens entre ces rouages, l'essence d'un être. Et ce, qu'importe la puissance des arrogants. Leurs méthodes déloyales ne les protégeront pas de l'inconnu.