Violette

— Tu ne m'as toujours pas répondu à propos de Trump, qu'est-ce que tu en penses ?

Germaine, sérieuse

— Louis II, mon petit-fils, dit qu'il s'agit avant tout d'un vote populiste. Et j'aurais tendance à penser comme lui. Tu sais qu'il a fait de grandes études ?

Violette, étonnée

— Personnellement, j'en doute. Non, il a plutôt la tête d'un homme de terrain, fruste, qui s'est fait à la force du poignet. On ne ressent aucune finesse d'esprit et de corps en le regardant, en l'écoutant. Il est épais, comme son ossature d'ailleurs.

Germaine, choquée

— Mais enfin, qu'est-ce qui te prend de parler de lui ainsi ?

Violette

— Tu parlais de Louis le deuxième ? Pardonne-moi, je pensais qu'il s'agissait de Donald. D'ailleurs, quelle idée d'avoir appelé le fils et le petit-fils comme leur père ! Je ne t'en avais encore rien dit, mais à la maison de retraite tout le monde se moque de toi, lorsque tu parles de ton petit-fils en disant : Louis II ceci, Louis II cela, etc. Ils trouvent tous que tu te donnes des grands airs. Cela étant dit, pour être tout à fait honnête, ce n'est pas banal, j'y retrouve même un certain relent de royauté, tu n'es pas d'accord ?

Germaine, contrariée

— Mais pas du tout ! Tu parles des commères de mon étage ? Ah, évidemment, dès qu'il s'agit de critiquer, ce sont les premières, elles ne laissent jamais passer leur tour ! Si tu veux tout savoir, c'est Louis, mon mari, qui a insisté. Il voulait perpétuer la tradition.

Violette

— Écoute, je trouve cela un brin ridicule, mais ce n'est pas bien grave. Revenons plutôt à nos moutons. Tu sais, il n'y a pas besoin de faire Sciences Politiques pour se rendre compte que ce président excelle dans l'art de dire au peuple ce qu'il a envie d'entendre... Quel est son slogan déjà ? Ah oui : « Redonner sa grandeur à l'Amérique » ! Comme quoi, ce mot n'a visiblement pas le même sens pour tout le monde ! Aussi étonnant que cela puisse paraître, qu'il soit vulgaire et parfois brutal, ne semble pas les déranger...

Germaine, bloquée sur les études

— Mais ça aide drôlement de faire de grandes écoles, Violette, pour comprendre comment fonctionne le monde ! Tu vois, je ne suis pas allée plus loin que le certificat d'études, eh bien je serais incapable de t'expliquer d'où vient cet engouement pour un tel individu. Moi, j'en suis restée à la lutte des classes, à la paupérisation toujours plus grande de certaines couches de la société et même si cela ne date pas d'hier, j'ai vraiment l'impression qu'elle est en train d'atteindre ses limites, comme en 36. Tout cela va mal finir...

Violette

— On dirait surtout que ce nouveau président met un point d'honneur à effacer tout ce qu'a pu faire son prédécesseur.

Germaine, soudain inquiète

— C'est ça... Violette, j'ai peur.

Violette

— Mais de quoi au juste ?

Germaine, angoissée

— Et si à force de chercher à le diviser, le peuple américain se révoltait ? S'il y avait une nouvelle révolution ?

Violette, railleuse

— Écoute, la dernière fois tu craignais une troisième guerre mondiale... Il faut faire confiance à ceux qui gouvernent. Lorsque tu montes dans un avion, tu fais bien confiance au pilote ?

Germaine, choquée par la comparaison

— Mais ce n'est absolument pas la même chose ! En plus, tu oublies les nombreux crashs aériens de ces dernières années ! On pourrait bientôt se retrouver avec le même problème en France ! Regarde donc ce qui se passe aux Etats-Unis ! Et si après les étrangers, ils s'en prenaient également aux personnes âgées, parce qu'elles leur coûtent trop cher ?

Violette, taquine, puis sur un ton rassurant

— Nous y voilà... Nous sommes assez nombreux pour nous défendre ! Et puis la France n'en est pas encore là, fort heureusement.

Germaine, religieusement

— Que Dieu t'entende !