XIII - Patient
La Land Rover freina brutalement, faisant voler sable et poussière, mais personne ne se plaignit, personne n'y prêta attention parce que, normalement, le pick-up ramenait le Viking.
D'où le ramenait-il, c'est ce que tout le monde voulait savoir. La Compagnie toute entière était au courant de son enlèvement et tous - peut être pas Lullaby la cintrée, et pourtant, elle était partie à sa recherche - attendait de ses nouvelles avec angoisse.
Debout devant son bureau, dans sa tenue d'hôpital propre et stérilisée, Nounou à ses côtés, elle attendait de voir si… Ah, il était là. Il descendait lentement du plateau de la Land, posant délicatement ses pieds, s'appuyant à peine sur son frère.
Sa formation médicale lui permit de noter très rapidement ses blessures. Elle remarqua les pieds bandés, le sang sur le pantalon et le tee-shirt, l'épaule dans une écharpe de fortune, ensanglantée, le sang sur son visage, le sang – Mon Dieu, tant de sang sur lui, que s'était-il passé ?! – dans ses cheveux, puis il s'effondra, incapable de marcher, se plaignant du frottement, quoi que cela puisse être.
Kris le souleva, portant son géant de frère dans ses bras comme s'il ne pesait rien, faisant ainsi la démonstration involontaire de sa grande force physique. Kris était plus mince que son frère, plus petit aussi, mais pas moins fort, semblait-il. Nounou alla l’aider et elle leur fit signe d'entrer dans la salle d'examen.
Le géant était encore à moitié groggy et ils réussirent à le déshabiller rapidement, découpant tout simplement les vêtements abîmés pour les retirer de son grand corps. Ils étaient tellement imbibés de sang qu'ils étaient irrécupérables.
Nounou tenait le pantalon dans ses mains, un air étrange sur le visage. Elle se tourna vers lui pendant que Kris aidait Erk à s'allonger complètement sur la table d'examen, caressant doucement le côté droit de son visage - celui qui n'était pas une seule grosse blessure - pour le calmer. Elle avait vu les premiers soins que Kris avait faits à son frère et ils étaient suffisamment bons pour qu’elle prenne le temps de résoudre l’énigme de son infirmier regardant fixement une paire de pantalons de treillis en lambeaux.
Il lui montra l'assise du pantalon, traçant de son gros doigt une toute petite coupure, au milieu d'une tache de sang, qui se situait exactement là où…
Elle tourna la tête vers Kris qui caressait toujours le visage de son frère mais la regardait droit dans les yeux, n'ayant raté aucune de ses actions. Il acquiesça. Nounou déglutit et Doc grimaça. Ouille. Même si elle n'en avait pas, elle savait quels dommages une telle blessure pouvait causer à la psyché d'un homme, surtout si elle était faite exprès, comme celle-ci semblait l'être…
Le Viking était dans un sale état, frissonnant, tremblant, presque, mais pas tout à fait, gémissant. Très différent de son attitude habituelle, voire de la posture qu'il avait prise en descendant seul du camion, toujours calme et serein. Mais maintenant qu'il était loin des regards des autres, maintenant il laissait paraître sa douleur.
Kris le calma, parlant doucement en islandais, supposa-t-elle, caressant son visage, montrant tellement d'amour qu'elle commença à s'interroger sur ses penchants et sur leur relation. Il déposa un baiser très doux sur les cheveux dorés, les yeux fermés et une expression de douleur sur son beau visage.
Nounou l'aida à débarrasser le géant des bandages et de l'écharpe. Elle lui demanda de nettoyer l'épaule pendant qu'elle palpait doucement l'abdomen noir et bleu du blessé. Il gémit et elle s'arrêta.
- Erk, j'ai besoin de te toucher, pour connaître l'étendue des dégâts…
Le Viking frissonna, se roulant en boule, et Kris ne réussit pas à le faire se détendre mais Doc s'en fichait soudain, car elle venait juste de voir le bas de son dos et d’avoir, du coup, une bonne idée des dommages causés à ses testicules. Il y avait tellement de sang entre ses fesses et sur ses cuisses que la première chose qui lui vint à l'esprit fut un viol, et certains frissons et gémissements la faisaient pencher vers cette explication.
Elle regarda Kris, un doigt pointé vers le derrière de son frère. Il hocha la tête, se pencha plus près de lui et murmura quelque chose. Elle n'attendit pas, se concentra, se rappelant qu'elle faisait cela en tant que médecin, qu'il était son patient, pas un homme qui avait envahi ses rêves et lui avait fait d'innombrables choses merveilleuses dans ces mêmes rêves, et écarta doucement ses fesses pour examiner son scrotum, profitant de cette occasion pour jeter un coup d'œil à son anus.
Le géant, surpris par le contact doux mais ferme, se jeta au bas de la table et, malgré ses blessures, se précipita dehors, se retrouvant complètement nu devant ses camarades, criant que personne ne le toucherait. Kris, si patient jusque-là, s'emporta et le traita de roi des cons et de reine des chochottes, le distrayant assez longtemps pour que Lin l'assomme, le porte et le pose sur la table aussi doucement qu'elle le put.
Nounou la poussa dehors mais Kris resta à l'intérieur, de toute façon Nounou n'aurait pu l'éloigner de son frère, même avec un marteau-piqueur et une grue, et n'essaya même pas.
Inerte, inconscient, le Viking n'était pas plus facile à déplacer, mais au moins soigner ses blessures était plus simple. Kris fut d'une grande aide, tenant son frère, le déplaçant, toujours conscient de l'état de son corps.
Elle put enfin jeter un œil à son scrotum et à la minuscule coupure qui était la cause de tant de douleurs. Elle rassura Kris, la blessure était impressionnante mais mineure, très peu profonde, seule la peau avait été atteinte, le reste était intact. Kris lui dit que celui qu'il fallait rassurer était le géant, elle le concéda. Son coup d'œil rapide à son anus plus tôt lui avait montré qu'il n'avait pas été violé, le sang ne provenant que de la petite coupure
Avec les allergies des deux frères, elle ne pouvait utiliser de pansements papillons à cause de la colle, elle dut donc utiliser la plus petite des aiguilles et le fil de soie le plus fin et recoudre. Les deux hommes tressaillirent et frissonnèrent et elle eut un sourire narquois sous son masque chirurgical, nouant le seul et unique nœud qu'elle pouvait faire ici.
Une fois cette blessure mineure mais ô combien importante traitée, elle put se concentrer sur les autres, laissant Kris laver le bas du corps de son frère.
Nounou lui avait nettoyé l'épaule pendant qu'elle soignait la petite blessure et elle put alors utiliser une longue pince pour aller y chercher la balle et recoudre. Puis, utilisant la force et les connaissances de Nounou et Kris, elle remit en place son épaule déboîtée. Ils la placèrent dans un bandage très contraignant, l'empêchant de bouger, mais laissant un accès à la plaie.
Enfin, elle put soigner son ventre avec de l'hélichryse et vérifier ses pieds, qui avaient été très bien traités par Kris. Nounou les nettoya et refit les bandages pendant qu'elle regardait son visage, que Kris avait nettoyé du mieux qu'il pouvait pendant qu'elle recousait la blessure à l'épaule.
Elle ne put s'empêcher de passer ses doigts le long de la fine coupure de l'œil à la bouche. Bon Dieu, elle espérait qu'elle disparaîtrait…. Bien sûr, cela lui donnerait l’air d’un pirate, mais il était si beau qu'il n'avait pas besoin d'une cicatrice pour attirer l'attention. Elle était consciente que, dans sa langue maternelle, on faisait la distinction entre handsome, pour un homme, et beautiful, pour une femme. Mais si, en anglais, elle pouvait appeler Erk beautiful parce qu’il était un idéal de beauté, l’essence de la beauté, en français, la différence n’existait pas. Et, oui, Kris était (très) beau, mais Erk était absolument magnifique.
Cela leur prit un certain temps, à tous les trois, mais finalement le blessé fut allongé dans la petite salle de soins intensifs, juste à côté de son bureau à elle, raccordé à tous les appareils de surveillance qu'ils avaient, sous morphine pour permettre à son corps surmené de se reposer et se remettre.
Toutes ses blessures avaient été bandées, protégées de l'extérieur avec des couches de gaze et il restait le problème de la petite blessure… comment la protéger des bactéries et tout ça…
Ils utilisèrent l'un de ses boxers, coupant les côtés et ajoutant des boutons-pressions pour le refermer, pour pouvoir vérifier la blessure sans le déplacer et tenir les compresses de gaze. Mais il y avait un problème supplémentaire, dû aux allergies des frères, encore une fois. Le cathéter était en plastique et, en tant que tel, provoquerait de terribles réactions allergiques. Erk devrait donc être réveillé régulièrement et invité à se soulager dans l'urinal fourni. Les boxers modifiés aideraient là aussi.
Doc secoua la tête.
- Kris, comment… Bon Dieu, pourquoi êtes-vous allergique ? Comment peut-on être allergique aux… aux trucs synthétiques ?!
- J'aurais aimé le savoir, Doc, ça lui faciliterait tellement les choses…
- Et pas pour toi ?
- Mes allergies… Ce sont les mêmes que les siennes, mais les résultats sont moins spectaculaires, peut-être parce qu'il m'a guéri maintes et maintes fois, alors qu'il doit guérir lentement, à moins qu'on puisse l'amener à quelqu'un comme lui.
- Alors ce que Le Gros m'a dit est vrai ?
- À propos de son Don ? Oui, tout est vrai… Mais à sens unique.
Kris caressa les cheveux dorés en soupirant doucement.
- Il ne le reconnaîtra pas, mais son Don est extrêmement puissant. Je l'ai vu empêcher trois personnes de mourir tout en en Guérissant deux autres. Le prix à payer pour cela est double : il ne peut pas se soigner lui-même, et il est attiré par la souffrance, les champs de bataille et les accidents, où son Don sera nécessaire. Parfois, j'ai l'impression qu'il n'est qu'un outil entre les mains de Dieu, mais ce n'est pas comme ça qu'il le voit, alors je ne le mentionne pas et je lui apporte tout mon soutien, tout mon amour.
- Tu l'aimes?
- De tout mon cœur, de toute mon âme. Je serais dévasté s'il venait à mourir, bon sang, j'ai failli l'être hier matin…
Il n'y eut alors plus que le silence, car, comme tout le monde dans la Compagnie, elle avait été stupéfaite en apprenant sa disparition. Ils étaient censés être en sécurité dans l'enceinte, dans les limites du périmètre des sentinelles.
Ensuite, Kris demanda qu'un lit de camp soit installé dans cette pièce, afin qu'il puisse être là pour son frère, et il y avait tant de douleur, tant d'amour, tant d'espoir sur son beau visage qu'elle céda et accepta.
* *
Le temps passa, Lin fit sortir Kris de la pièce, leurs camarades se relayèrent pour veiller sur le Viking, lui tenir la main, lui parler… Il se calma, son EEG fut moins frénétique et c'était bien, mais il était quand même inconscient. Ce n'était pas tout à fait considéré comme un coma, et elle ne voulait pas prononcer le mot, ni même y penser, de peur que cela devienne une réalité.
Il devait faire des cauchemars, se souvenir de son calvaire, car une nuit elle fut réveillée par des gémissements, qui s'apaisèrent rapidement, donc celui qui veillait sur lui devait l'avoir calmé. Elle était épuisée, après l'opération sur le bras du Gros – encore –, elle ne se leva pas et se rendormit immédiatement.
Elle passait autant de temps qu'elle le pouvait à le regarder, à lui parler, à le toucher, et cela n'était pas uniquement parce que c’était ce qu’il fallait faire.
Le jour où elle avait replacé son épaule pour la première fois, après que son frère eut réussi à la déboîter dans un match d’ahemvé "amical", il avait refusé d'obéir à sa prescription de repos et avait joué le macho, l'embrassant et la soulevant sur son épaule, comme un trophée ! Mais elle n'était pas médecin pour rien, et ses deux petits poings se connectant violemment au bas de son dos (juste au-dessus de son cul magnifique…) avaient été une vengeance suffisante. Et pourtant… Ses lèvres étaient douces et habiles et les sensations engendrées par le baiser s'attardaient toujours et elle en voulait plus, elle voulait tout goûter, chez lui… Mais pas tant qu'il était inconscient.
Un matin, il ouvrit les yeux. Enfin, son œil, celui de gauche était toujours caché par le bandeau qui protégeait la moitié de son visage. Elle fut frappée par l'intensité de son regard, bien qu'il soit sous morphine. Elle se sentit attirée à ses côtés et prit sa main droite, son énorme main, dans la sienne, dessinant de lents cercles avec son pouce sur le dos de celle-ci. Elle pouvait sentir la pression, la force contenue de ses doigts sur les siens. Même à moitié shooté comme il l'était, il savait qu'il devait être prudent avec elle.
Il ouvrit la bouche et croassa. Aussitôt elle lui donna un verre d'eau, avec une paille, et le laissa boire juste un peu.
- Kris…
Evidemment qu’il demanderait Kris. Il y avait un lien tellement fort entre ces deux-là.
- Je vais le chercher, dit Nounou qui était dans son bureau et avait entendu.
Erk ferma les yeux mais ne lâcha pas sa main. Elle sourit en caressant sa grosse paluche, comparant leurs tailles respectives. Il était si grand… et pourtant si doux, si fort et pourtant si patient. Ses mains étaient énormes, comparées aux siennes mais, comme tout chez lui – et après avoir recousu la petite coupure, elle savait –, étaient bien proportionnées à sa taille. Elles étaient élégantes, fortes et calleuses. Elle frissonna en imaginant les callosités sur sa peau, et son esprit l'amena un peu plus loin, quand ses yeux furent à nouveau attirés vers son visage, imaginant son bouc glissant entre ses cuisses…
Elle sursauta quand ses yeux s'ouvrirent alors que Kris se précipitait dans la petite pièce et s’avançait. Elle lâcha la grande main, laissant Kris la prendre et le Viking regarda son frère, sourit et ferma à nouveau les yeux, un sourire relevant encore un peu les coins de sa belle bouche.
Kris caressa les cheveux du géant, un sourire triste sur le visage.
- Eiríkur, murmura-t-il, je suis content que tu te sois réveillé quand j'étais à la base. Parce que je dois repartir en patrouille, pour quatre jours. S'il te plaît, repose-toi et… ça va paraître égoïste, mais j'aimerais être là quand tu rouvriras les yeux, mon grand. Cela me plairait beaucoup.
Il s'arrêta, ses yeux bleu-gris fixant toujours le visage de son frère.
- Oui, ça me plairait beaucoup. Mais si tu sens que tu dois ouvrir les yeux avant, fais-le, bróðir, ne m'attends pas.
Elle ne savait pas pourquoi elle se sentait si émue. Était-ce le ton doux, plein d'amour, était-ce le fait que, malgré la proposition – soi-disant – égoïste, Kris était prêt à y renoncer pour la santé de son frère ? Elle ne savait pas, mais elle sentit les larmes monter et elle cligna des yeux avec force pour les empêcher de s'échapper.
Qu'est-ce qu'il y avait, chez ces deux-là ? C'étaient des énigmes ambulantes...
* *
Kris partit, Erk dormit, elle veilla sur lui et tomba amoureuse. A moins que ce ne soit que du désir. À ce moment-là, elle ne le savait pas encore et, pour être honnête avec elle-même, elle était, pour l’instant, plus attirée par son corps que par son… par le reste. C'était un homme magnifique, si grand, si fort, si beau, si splendide. Elle se souvenait de ses sourires, de l'étincelle malicieuse dans ses yeux juste avant qu'il ne l'embrasse et de son rire doux lorsqu'elle avait examiné son dos abîmé par les coups de fouet.
Bon sang, il était dans la Compagnie depuis deux mois et quelques et il avait déjà tant souffert. Avant, elle ne s'occupait que des maux de ventre lorsque la nourriture n'était pas trop bonne, malgré les efforts de Cook, ou de certains rhumes. Parfois, quand l’ancien lieutenant était vraiment échauffé, violent et sauvage, c'était elle qui s'occupait des conséquences. Mais c'était tout. Elle se rendit compte qu'elle ne pouvait pas comparer la situation actuelle avec avant, parce qu'avant, ils restaient dans l'enceinte ou, quand ils sortaient, ils étaient les agresseurs et choisissaient toujours des victimes qui ne riposteraient pas.
Ce jour-là, les blessures d'Erk, leur horreur, leur ampleur, lui ont rappelé avec force qu'ils se trouvaient dans une zone de guerre. Elle s’était rendue compte qu'avec l'arrivée du Lys de Sang et des deux frères, les choses allaient changer radicalement. Et l’un des changements était que maintenant elle utiliserait toutes ses connaissances médicales. Et c'était bien. Parce que cela signifiait qu'elle soignerait des blessures reçues tout en essayant de faire ce qu'il fallait.
* *
Le temps passa, encore. Kris revint de sa patrouille, Erk ouvrit les yeux pour la deuxième fois. Et d'une voix monocorde, le regard de ses beaux yeux bleus à mille kilomètres de là, de la douleur sur son visage, il raconta son histoire à Lin, Kris et l’Archer.
Elle était à son bureau, faisant de la paperasse, et, à travers la porte reliant la petite salle de soins intensifs à son bureau, elle pouvait voir leurs trois visages. Elle vit les yeux de Kris s'écarquiller sous le choc, le beau visage sévère de Lin devenir de marbre et des larmes sur les joues de l'Archer. Il était censé prendre des notes, mais le plus souvent il mettait sa main devant sa bouche, l'air horrifié. Et il avait vu le résultat de la colère du Viking.
Cook vint, nourrissant le Viking à l'heure du déjeuner. Elle s'amusait à concevoir les repas du blessé avec l'Américain, et elle y goûtait toujours. Cook, Cook le silencieux, avait des séances de psy avec Erk pour l'aider à surmonter son traumatisme. Le petit-déjeuner et le dîner appartenaient à Kris, mais le déjeuner appartenait à Cook et il passait parfois tout l'après-midi à reconstruire le grand Islandais. Il utilisa également son propre Don, de faible puissance, pour le soigner.
Quand Kris repartit en patrouille, ce fut elle qui nourrit le géant. Les premiers repas furent une vraie corvée, il était trop fatigué, trop faible, trop apathique. Elle en eut assez et décida de le faire rire. Alors, avec l'aide de Nounou, du fil de fer et du carton, elle fabriqua une paire de lunettes géantes, ridicules, peintes en rose vif, et colla, en plein milieu de la "lentille" en plastique, une paire de grands yeux dont la « pupille » bougeait avec les mouvements de sa tête, reste d'une fête d’il y avait bien longtemps, avant que l'atmosphère de la Compagnie ne se dégrade.
C'était une bonne chose qu'elle sache exactement où tout se trouvait dans la chambre parce que ces yeux en plastique étaient un vrai problème. Mais le regard incrédule sur le beau visage, et le rire incontrôlé qui s'ensuivit valurent largement d'être à moitié aveugle.
Elle les garda pour le nourrir et heureusement qu’il était beau joueur, bougeant la tête pour s'assurer qu'aucun aliment ne lui échappait lorsqu'elle manquait sa cible.
- Tu peux les enlever, tu sais, dit-il, la voix rauque.
- Enlever quoi ? demanda-t-elle, sa voix basse ne la laissant pas du tout indifférente. Elle fut fière que cela n'affecte pas son discours.
- Ces choses sur ton visage…
- J'ai des choses sur le visage ? Où ça, où ça ? Est-ce que… ce sont… des araignées ?
Elle opta pour une bêtise et fut récompensée par un rire doux faisant, encore une fois, remuer certaines choses en elle. Elle ne put s'empêcher de rire et enleva les stupides lunettes.
Il avait un cocard spectaculaire autour de l’œil gauche, son visage portait encore la trace un peu jaune des autres ecchymoses, mais son sourire était le vrai, l’unique, sincère, chaleureux, heureux et elle rougit furieusement, car, dans ses beaux yeux, il y avait une étincelle très coquine qui promettait des choses que son corps ne pouvait pas encore offrir.
- Doc…
Il plia son doigt, lui faisant signe, et elle s'approcha. Il lui prit la main et, encore une fois, elle put sentir la puissance contenue de ces grosses pattes. Caressant le dessus de sa main avec son pouce, il l'attira plus près.
- Doc, il y a quelque chose que j'ai commencé et que je n'ai pas terminé…
- Oh? Qu'est-ce que c'est?
- Un baiser…
Elle sourit, se pencha et posa ses lèvres sur les siennes, rien de plus. Il ferma les yeux, leva la tête pour mettre plus de pression, puis ouvrit la bouche et, du bout de la langue, demanda l'entrée. Ses lèvres étaient aussi douces que dans son souvenir, son odeur était enivrante et elle céda, ouvrant la bouche et accueillant sa langue curieuse.
Etrangement, ce fut lui qui gémit de plaisir. Sa main droite prit sa tête en coupe, la rapprochant et elle suivit, posant ses mains sur l'oreiller de chaque côté de sa tête, après avoir écarté les mèches de cheveux soyeux et dorés. Elle se laissa consumer par la chaleur de ses lèvres. Il embrassait bien, avait une langue agile et bientôt elle mêla ses gémissements aux siens. Ils étaient doux, presque inaudibles, mais présents.
Ils se séparèrent, ayant besoin de respirer, et il reposa sa tête sur son oreiller, visiblement fatigué mais ne voulant pas s'arrêter. Il la lâcha.
- Je suis désolé, Doc...
- Pourquoi?
Elle était surprise de son excuse, ce n'était pas comme si elle n'avait pas accepté sa demande. Les yeux bleus quittèrent les siens, se dirigeant vers ses pieds. Elle tourna la tête et s'arrêta devant le… Elle le regarda avec un sourire narquois.
- Suis-je donc si douée pour embrasser que je peux te faire soulever ton drap comme ça ? dit-elle en montrant la preuve du pouce, par-dessus son épaule.
Il rougit furieusement, évitant son regard.
- Oh merde, t'es trop mignon quand tu rougis !
- Je ne suis pas mignon. Je suis trop grand pour être mignon.
- C’est vrai. Tu n'es pas mignon. Tu es magnifique.
Il rougit encore plus puis passa une main derrière sa tête pour l’attirer à lui et l'embrasser à nouveau. Elle lui rendit son baiser, cela faisait si longtemps pour elle, et elle le voulait depuis une éternité, qu’elle le repoussa doucement sur son oreiller, grimpa sur le lit et le chevaucha, les deux mains sur son visage.
Sa grande main droite glissa le long de son dos, prit doucement ses fesses en coupe, sans serrer, juste là, chaude, énorme, douce. Elle se pencha en avant, voulant lui donner un meilleur accès et il sembla comprendre rapidement, sa grande main glissant entre ses jambes, effleurant sa fente, la faisant frissonner. Il déplaça sa main vers l'avant, la glissa sous son haut, la posant sur sa poitrine.
Elle bougea, il gémit et elle s'arrêta, craignant de lui faire mal.
- Je suis désolé, Erk, je ne devrais pas…
- Ne t'arrête pas, s'il te plaît, pas maintenant…
- Je ne veux pas te faire mal.
- C’est t’arrêter maintenant qui me ferait mal, dit-il et sa voix était si rauque qu’elle sentait son diaphragme vibrer, s'il te plaît…
Elle descendit du lit, alla fermer les deux portes de la chambre. Elle se fichait que les gens la voient s'amuser, mais elle ne voulait pas qu'ils la voient profiter d'un homme alité.
Elle revint vers lui, l'embrassa doucement et souleva le drap. Ils lui avaient enlevé les boxers retaillés lorsque la petite blessure fut cicatrisée et, pour faciliter sa toilette, ils l'avaient laissé nu sous le drap. Ce qu'elle vit était une belle queue pointant orgueilleusement vers le ciel, gorgée de sang et pleurant déjà.
Elle le regarda, sourcil levé.
- Cela fait si longtemps, Doc, et… j’ai eu peur de mourir…
- Ne t'avise pas de me sortir le discours "J'ai failli mourir, il faut que je me reproduise vite", Erk, tu vaux mieux que ça.
- Je ne te sors pas ce discours. J’ai vraiment craint pour ma vie et mes… mes… testicules.
Ce dernier mot fut chuchoté.
- Eh bien, compte tenu de ta réaction présente, je peux t’assurer qu'ils fonctionnent correctement, du moins pour la production de testostérone. Si on regardait s'ils fonctionnent jusqu'au bout ?
Elle sourit et il lui adressa son grand sourire sincère et heureux. Elle le chevaucha à nouveau, l'embrassant, laissant une traînée des baisers dans son cou. Sa grande main essaya de la ramener à sa bouche mais elle dirigeait, ce soir.
Elle atteignit son mamelon, le suça et il gémit, essayant de se cambrer sous sa bouche et elle gloussa. Elle suça l'autre, tandis que sa grande main lui caressait le dos. Elle était contente d'être au contrôle, heureuse qu'il la laisse faire ce qu'elle voulait. Elle lui donnerait autant de plaisir qu'elle le pourrait, car il en méritait après toutes ces souffrances.
Elle se tourna vers l’objet de son désir, écartant le drap, sentant sa queue glisser le long de ses cuisses et de son ventre alors qu'elle se plaçait à califourchon sur ses jambes. Elle s'arrêta au buisson doré juste au-dessus de son membre et inspira son odeur entêtante et musquée. Puis ses lèvres trouvèrent la verge brûlante et l'embrassèrent, la léchèrent et le firent gémir, se cambrer et s’agiter.
Elle atteignit son gland, le léchant de sa langue aplatie, puis en enfonçant la pointe durcie dans le sillon et le faisant s’agiter et haleter. Il passa ses doigts dans ses cheveux, ne la dirigeant à aucun moment. Elle lui en était reconnaissante parce qu'il était très grand. Long, large… Bon sang, avait-elle eu les yeux plus gros que le ventre ? Il était vraiment énorme.
Elle embrassa son gland d’où coulait un peu de liquide séminal, goûtant la saveur à la fois amère et salée, et sa grande main quitta sa tête pour saisir le drap sous lui. Elle réussit à l'avaler un peu, et elle pouvait sentir ses lèvres s'étirer autour de sa circonférence, et il laissa échapper le bruit le plus merveilleux qu'elle ait jamais entendu de sa part. Alors elle insista, l’avalant, doucement, doucement mais, malgré un bon contrôle de son réflexe pharyngé, il était trop gros pour qu'elle le prenne en gorge profonde. Dommage, elle aimait ça. Ce qu'elle ne pouvait avaler, elle le caressa, se perdant dans son parfum, son goût, sa chaleur...
La grande main saisit sa queue de cheval, la tirant doucement vers le haut.
- Arrête… je vais jouir trop vite… et…
- C'est bon, Erk, je peux…
- Non, Doc, je ne prends pas sans donner. Jamais.
Il eut un doux sourire, un sourire qui disait : « s'il te plaît, laisse-moi te donner du plaisir à toi aussi » et elle céda.
Elle se déshabilla rapidement, sans perdre de temps, elle lui ferait peut-être un strip-tease un jour, et remonta sur lui. Il lui demanda de lui tourner le dos, la poussa à quatre pattes, doucement comme toujours, et la déplaça là il la voulait. Elle se retrouva à frissonner d'anticipation, un genou de chaque côté de sa tête, ses mains sur sa verge, sa grande main à lui sur sa cuisse.
Il embrassa son clitoris, le léchant, le titillant avec sa langue et elle oublia ce qu'elle avait dans les mains, frissonnant à chaque mouvement de sa langue trop agile. L'embrasser l'avait fait mouiller, mais sa bouche sur son clitoris lui donnait l'impression d'être l'océan. Il l'embrassa, la lécha, la titilla et elle en voulut plus et le lui dit.
Il glissa un doigt en elle, le faisant aller et venir en elle lentement mais ce n'était pas suffisant alors il en glissa un deuxième et cela s’approchait de ce qu'elle voulait. Elle tenta de bouger sur ses doigts, il n'allait pas assez vite mais cela éloigna son clitoris de sa bouche et comme ce n'était pas ce qu'elle voulait, elle renonça. Puis il trouva ce petit point en elle et le caressa du bout de ses doigts et elle se contracta, haleta, se cabra et ohmondieu….
- Encore, Erk, s'il te plait, Encore… Encore…
Une litanie de « Encore ». C'était tout ce que son cerveau hautement diplômé en médecine trouvait à dire.
Ses doigts glissèrent en elle, sa bouche embrassa et lécha et joua avec son clitoris et elle se détendit, s’ouvrant, et il glissa un troisième doigt et oh bon saaaang c'était si bon !
Ensuite, ce connard enleva ses doigts, la laissant vide, ce qui n'était pas bon du tout ! Elle se retourna, furieuse, il l’attira à lui et l'embrassa et elle se goûta sur ses lèvres et aima ça et dévora sa bouche et son visage de baisers, le nettoyant de son plaisir. Il gloussa, masculin, satisfait, et cela réveilla quelque chose en elle.
Elle glissa le long de son corps jusqu'à sa cible, prenant sa verge brûlante dans ses mains, la caressant un peu, voyant ses yeux se révulser et c'était bien aussi. Elle souleva ses jambes, il l'aida, posant ses pieds à plat sur le lit, et, s'appuyant sur ses genoux relevés, elle s’empala lentement sur lui.
Oh mon Dieu, oh mon Dieu, oh mon Dieu… Il était large et l'étira et elle remercia ses hanches larges, pour une fois, et continua sa descente, se délectant de la sensation de sa grosse queue glissant en elle. Elle ne pouvait pas accommoder toute sa longueur, elle était trop petite pour ça, mais elle pouvait s'adapter à sa largeur et c'était tellement bon…
Elle s'arrêta un instant, respirant fortement, et le regarda. La main sur sa hanche, les pupilles dilatées par le désir, les lèvres gonflées, un voile de sueur sur son visage, il était magnifique. Elle commença à monter et descendre sur son sexe, lentement, reprenant le contrôle. Sa main resta sur sa hanche, ne la forçant jamais à changer de rythme.
Et quand ce fut trop, il déplaça sa main vers le drap et l’agrippa comme si sa vie en dépendait.
Elle pouvait sentir la pression monter en elle et elle accéléra le rythme et il se raidit sous elle et son orgasme était juste à portée. Il jouit juste avant elle, attrapant sa hanche et donnant trois coups de rein puissants mais mesurés vers le haut, qui l’amenèrent à l’orgasme à son tour.
Il soupira, un long soupir heurté, et elle poussa un cri, la tête en arrière, ses parois se resserrant autour de sa verge.
Elle ne pouvait plus se tenir droite, alors, quand sa grande main la tira vers l'avant, elle se laissa faire, allongée sur son large torse, les bras repliés sous elle, sentant les battements de son cœur, la respiration rapide de son amant. Il était épuisé et s'endormit rapidement, embrassant ses cheveux puis la lâchant. Elle gloussa, donnant un petit baiser à son mamelon, n'obtenant aucune réaction. Elle ferma les yeux, comblée.
Plus tard dans la nuit, elle prit un linge humide pour les nettoyer tous les deux, vérifia ses signes vitaux pour s'assurer qu'il allait bien – et il allait bien –, changea le drap de dessus, remit sa chemise et son boxer et se glissa sous le drap pour se blottir contre son côté droit tout chaud, le rythme lent et régulier de son cœur l’amenant au sommeil.
Annotations