Chapitre 22: De retour en France
Point de vue de Constantin
De retour à la civilisation, je lâche un long soupir de tristesse sur mon cheval et suis les mousquetaires, qui sont heureux de rentrer chez eux. Je repense à monsieur le curé, qui m’avait si grandement aidé ces derniers mois… je repense à nos échanges, à sa joie contagieuse, sa foi encourageante et à ses conseils, qui me manquent terriblement… lorsque nous arrivons à Versailles, nous sommes accueillis par le roi de France, qui nous remercie d’avoir combattu pour l’Amérique. Il est surpris de ne pas voir monsieur le curé et baisse les sourcils. Il est accompagné de mes amis, qui sont eux aussi, très tristes.
— Un groupe de pirate l’a capturé… nous n’avons rien pu faire pour le secourir… répond un autre mousquetaire à ma place.
Paul est assez triste de ces nouvelles et se réfugie sous son chapeau. Je lis sur leurs visages qu’il s’est aussi passé quelque chose pendant notre absence… où était notre colonel ?
— Le colonel Dubain est parti ? je demande.
Étienne ne répond pas tout de suite à ma question et baisse la tête.
— Pour toujours Alexandre, pendant votre absence, l’opéra a pris feu… il s’est sacrifié en sauvant le dauphin…
Nous n'annonçons que du mauvais… nous avons perdu à la fois monsieur le curé et notre précieux colonel… ce sont des âmes héroïques… le roi de France soupire et nous laisse entre mousquetaires. Mes deux amis se jettent dans mes bras.
— Nous sommes très heureux de te revoir.
Je sourie à Paul.
— Mon nom n’est plus Alexandre, je m’appelle Constantin, dorénavant.
Ils remarquent que j’ai énormément changé et que je ne porte plus d’épée.
— Attends Constantin, où sont tes armes ?
Je me gratte la tête, en soupirant.
— Je n’en porte plus, car j’ai fait une promesse au Seigneur… je ne veux plus tuer d’innocents…
Mes amis ouvrent la bouche en forme de « oh » et trouvent mes paroles très touchantes. Je n’arrive pas à croire que j’ai perdu mon père spirituel… et moi qui voulais continuer ma formation avec lui…
— Que vas-tu donc faire en attendant ?
La question de Paul est pertinente.
— Soupire… je… je voulais justement continuer ma formation avec monsieur le curé, mais comme il n’est pas là…
— Tu peux encore rester mousquetaire, tu en as encore tous les droits, me rassure Étienne.
Il pose une main sur mon épaule, amicalement.
— Tu ne vas tout de même pas partir maintenant, on a encore besoin de toi !
L’enthousiasme de Paul m’avait manqué. Je suis ému.
— Je peux savoir qui est le nouveau colonel ?
Mes deux amis me regardent, avant que l’un d’entre eux me réponde.
— Tu peux m’appeler, dorénavant, colonel d'Argenteuil, répond Paul avec un grand sourire.
* * *
Point de vue d’Étienne
Le roi a prévu de partir à Paris pendant quelques jours, pour y demeurer en paix et en sécurité avec sa famille. Il voulait d’abord attendre le retour des mousquetaires, pour partir. Il a donné la charge au duc de Bourbon de surveiller son palais et les besoins nécessaires, avant de rejoindre un grand ami à lui, à Paris. Il y va, avec quelques mousquetaires, tandis que mes amis et moi, n’avons pas le choix d’être avec le duc de Bourbon. Constantin a repris son rôle de mousquetaire et nous a raconté comment c’était en Amérique. La guerre continue encore de faire rage, mais il est persuadé que grâce à notre aide, l’Amérique pourra devenir indépendante et que les anglais, devraient déclarer forfait. Il a avoué à Paul qu’il était, jadis, un espion anglais. Notre colonel ne l’a pas trop cru au début, jusqu’à ce que je lui dise que j’étais bien au courant avant lui…
— Hé bien, qui l’aurait cru…
Nous demeurons un moment dans le silence, en profitant de ce bon soleil et de ces beaux jardins. Je vois près des bassins, la princesse de Bourbon, qui plonge sa main dedans, pour très certainement se rafraîchir… comme elle est belle… Paul passe sa main devant mon visage.
— Hé ho Étienne, on te parle.
Je retourne mon regard vers eux.
— Que se passe-t-il ?
Ils pouffent de rire.
— Il se passe que tu es amoureux de la princesse.
Je leurs donne une petite frappe à l’épaule.
— Pour tout vous avouer, nous sommes ensemble.
Ils n’arrivent pas à le croire. Paul a eu une réaction beaucoup plus grossière que celle de Constantin.
— Toi ? Et la princesse ? Non, je ne te crois pas.
— Pourtant c’est vrai.
— Et tu penses que ça ne sera pas compliqué pour le duc de Bourbon ? Il est au courant ?
— Je n’ai rien dit pour l’instant sur notre relation…
— À mon avis, il n’est pas bon que tu fréquentes la princesse… et si elle devait en épouser un autre ? Tu deviendrais quoi ?
Je lève les yeux au ciel.
— Pfff, Paul, tu racontes n’importe quoi.
— Non Étienne, je ne plaisante pas. As-tu envisagé cette situation avant de l’embrasser comme un débile ?
Sa question m’a soudainement fait mal au cœur. Pourquoi me parlait-il si méchamment ?
— Les gars, on se calme…
— Il faut qu'il réagisse si jamais monsieur le duc de Bourbon lui parle de cette manière.
Paul a visé juste et jamais je n’aurais jamais envisagé à ça…
— Pourtant, elle m’a dit qu’elle n’avait personne dans sa vie…
Paul soupire et enroule son bras autour de mon cou.
— Mais prépare toi Étienne, si jamais ça t’arrive…
Je soupire, les mains dans les poches. Pour le moment, je n’ai pas très envie de croire ce que m'a raconté Paul et me contente juste de sourire.
— T’inquiète, tu n’es pas le seul. J’ai demandé à Marthe si elle voulait bien être ma fiancée.
Nous sommes heureux pour Paul et nous nous réjouissons de ses fiançailles.
— Vous serez les bienvenus, mais ne le dites surtout pas à la reine. C’est une surprise que Marthe aimerait lui dire…
Mon cœur reste alarmé lorsqu’il voit la princesse. Nous la croisons aux pieds des bassins et vois que mes amis me laissent seule avec elle. Elle rit lorsqu’elle voit que j’ai arraché une fleur dans les haies pour lui offrir. Je m'assois auprès d’elle et la vois rougir.
— Vous vous y connaissez bien, monsieur le marchand de fleurs.
Je ris en me massant la nuque.
— Princesse ? Puis-je vous poser une question ?
Timide, elle me voit me mettre à genoux devant elle et lui prend sa main.
— Voulez-vous être ma fiancée ?
Exaltée, elle se jette dans mes bras et me couvre le visage de baiser.
— Oh Étienne, ça serait avec grande joie.
Je sors la bague et la dépose autour de son doigt. Elle est toute émerveillée.
— Mon Dieu, mais Étienne… c’est magnifique.
Je suis heureux qu’elle apprécie le safran. Elle la contemple, toute souriante.
— Je serais si heureuse d’être votre épouse.
Mais, elle titille la bague que je lui ai offerte et commence à s’attrister. Je m'assois auprès d’elle pour la rassurer, sur un banc.
— Mais j’ai bien peur que mon père ne le veuille…
Je la prends par sa main et caresse tendrement ses joues.
— Je comprends princesse… au pire, vous ne lui dites rien et nous pouvons éventuellement nous marier en cachette ?
Elle n’est pas contre mon idée et se lève pour me dire qu’elle était d’accord.
— Je vous aime tellement, princesse.
J’attrape ses mains et dépose un tendre baiser sur sa paume. Elle est très attentive à chacun de mes gestes et repart, en retirant ses doigts des miens. Son doux parfum me manque et me réjouis tout de même, de pouvoir éventuellement me marier avec elle.
* * *
Point de vue d’Adélaïde
Je suis la femme la plus heureuse sur Terre. Si seulement il savait à quel point mon cœur bat pour lui. Son amour me réconforte nuit et jour. Je ne peux pas m’empêcher de penser à lui. Rentrant dans le hall, sentant le parfum des bois sauvages, quelqu’un m’attrape par le bras et me tire pour me cacher sous les arbres. Effrayée, je remarque qu’il s’agit de mon frère.
— Je le savais. Tu es avec ce crétin de mousquetaire. Je vais le dire à papa.
— Non, Louis attend ! Ne le dis surtout pas à papa !
Je supplie mon frère de ne rien rapporter à papa et bloque soudainement le passage.
— Je ferais tout pour toi, mais je t’en supplie, ne dis surtout pas à papa que je suis amoureuse de monsieur Martel.
Un rire narquois sort de son visage et est intrigué par ma proposition.
— Tout pour moi ? Très bien, j’ai ma petite idée.
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