Chapitre 1: Le moulin à eau

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Pour qu’une graine pousse, il faut : un terrain riche en terre, un bon bain d’eau, un rayon lumineux proportionnel à la jeune plante et un vent léger, pour qu’elle puisse récolter sa propre moisson. Or, pour qu’elle se multiplie, il faudrait un plus grand terrain. Ma proposition serait qu’elle : s’épanouisse dans une terre altérée, ni trop chaude, ni trop froide ( à vérifier la température ), que l’embryon s’enveloppe de façon homogène et que les racines s’ancrent au cœur même de la propriété. Elles prennent en taille, je dirais, en moyenne par jour, de un à trois centimètres.

J’imagine un espace, d’environ, plus de dix nectars pour planter : du blé, du seigle, et de l’épeautre. Je désire faire mon schéma, mais il ne faut pas que le professeur de français me voit. C’est un ennui mortel son cours. Il parle des bases grammaticales. Facile, je connais par cœur, mais pourvu qu’il ne me dérange pas au milieu de mon dessin. J’hésite à faire un tableau pour classer par ordre alphabétique mes sachets de graines. Tant pis, je laisse de côté cette idée. Je vais plutôt réfléchir à : comment créer mon moulin ? Puisque je désire changer mon blé en farine. Pour ça, il va me falloir un peu de matériel.

Je cherche dans mon sac. Évidemment, la règle et le compas sont en métal. Je vais éviter de faire du bruit, mais au moment de lever mon sac, mes affaires tombent au sol. Mince, le professeur de français m’a entendu. Mes camarades de classe se tournent vers moi. Je me sens extrêmement tendu.

— Il n’est pas encore l’heure de ranger vos affaires, monsieur Loyal. Pour la peine, vous resterez à la fin du cours.

Je lâche un petit soupir. L’heure sonne enfin. Casse-bonbon, de son vrai nom, Polycarpe, salue de la main et quitte la salle de classe. Monsieur Périphérial n’est point heureux de mon comportement. Il me demande de tendre la main. Honteux, je sors de ma poche le dessin que j’ai fait et le lui donne. À la fois prétentieux et agréablement surpris, il caresse légèrement son menton, mitigé. Était-il toujours en colère ?

— Vous connaissez le règlement monsieur Loyal. Il est interdit de dessiner, dans n’importe quelle matière.

— Oui monsieur Périphérial…

— Vous pourriez avoir une punition.

Mes yeux se sont soudainement baissés.

— Vous pourriez dire à madame Loyal de venir me voir la semaine prochaine, mais faites attention, que cela ne se reproduise plus dans mon cours.

— Oui monsieur !

Pendant que je prépare mes affaires, le professeur Périphérial tire les rideaux et range les derniers cahiers traînant sur son bureau. Je sors de la classe en courant en lui disant « au revoir » et saute quelques marches d’escalier pour rentrer à la maison. Mes projets sont en train de se concrétiser. J’imagine la construction d’un moulin qui pourrait éventuellement voler dans les airs. Pour ça, il faudrait que le volume soit à base d’oxygène et dioxygène, avec un peu d’azote et d’argon, pareillement pour les cuves. Mais quelle excellente idée ! Arrivé au pied d’un marronnier, je reprends un rythme normal et commence sincèrement à réfléchir. Non, je dois me rendre à l’évidence, un moulin volant dans les airs, ça n’existe pas. Mais un moulin qui fonctionne avec l’eau, ça oui ! Cela doit bien exister ! Et pour ça, il faut que j’en parle à papa ! À mon avis, il doit bien s’y connaître en moulin à eau !

* * *

— Maman, maman ! Où est papa ?

Maman, qui était en pleine couture, me fixe avec des yeux ronds et s’exclame.

— Athanase ! Aviez-vous perdu la tête ? Vous n’avez même pas enlevé votre manteau et votre cartable !

Intimidé, j’enlève mon sac en le posant au bord des paniers à chaussure et suspends ma veste au porte manteau.

— Avez-vous passé une bonne journée à l’école ?

Je suis pressé de voir papa, mais maman veut d’abord que je raconte ma journée à l’école. J’attrape un bout de tissu et le malaxe en lui racontant mon cours de français.

— Enfin Athanase, vous devriez savoir qu’il est important d’écouter en cours.

— Oui maman…

— Et il voudrait me voir la semaine prochaine ?

J’acquiesce.

— Vous lui répondrez que j’ai bien reçu son message et que j’y serai précisément, vendredi prochain, à dix heures du matin.

J’attends que maman termine de passer le fil dans le tissu avant de poser ma question. Je suis très intrigué par le travail minutieux que fait maman. Elle répare mon béret que j’ai décousu accidentellement, la semaine dernière.

— Vous désirez voir votre père ? Il est au fond du jardin, en train de ramasser les derniers épis de blé. Il aura besoin d’aide pour ranger les sacs.

— Merci maman !

Je l’embrasse tendrement sur la joue et pars à la recherche de papa. Je passe au-dessus d’un petit ruisseau qui longe le long de la forêt et traverse une passerelle pour me rendre de l’autre côté du jardin. Je le vois, en train de trier les différentes épis de blé dans trois gros sacs difformes. Il vérifie leurs tailles, tout en notant leurs nombres de graines produites par jour.

— Ah, mon fils ! Heureux de vous revoir ! J’aurais besoin de votre aide pour ranger les sacs dans la grange. Faites très attention, car certaines sont plus légères que d’autres et ne pèsent pas le même poids.

— Bien papa !

— Classez-les bien dans le bon ordre. Les blés avec les blés, les seigles avec les seigles, le maïs avec le maïs...

Je soulève le premier sac, contenant de l’orge et le pose brutalement sur mon épaule gauche. J’attends que papa termine de passer sa loupe sur chaque plante, pour identifier leurs bactéries et range ses outils pour m’aider à porter le sac d’avoine.

— Je n’ai pas vu votre frère aujourd’hui.

— Il doit être très certainement en train d’étudier.

Papa ne réfléchit pas et s’élance à grands pas. Il ouvre la grange, remplie des stocks de l’année dernière et nous passons à l’étage du dessus. Papa est très habile dans les gestes qu’il exécute. Il pose avant tout son sac, positionne correctement l’échelle aux planches et grimpe, en prenant le contenant sous son bras droit, pour ne pas tomber à l’arrière. Lorsqu’il a fini de grimper, je monte à mon tour, en restant prudent. Une fois en haut, je pose comme prévu le sac d’orges et aide papa à ranger le sien.

— Merci mon fils, vous êtes un brave garçon.

Son compliment m’arrache un sourire.

— Dites-moi papa ? Comment fabrique-t-on un moulin à eau ?

Papa ne répond pas tout de suite, le temps de sortir une feuille, un crayon et une gomme de sa poche. Il la pose sur une planche à bois et m’explique le mécanisme d’un moulin.

— Vous le voulez comment votre moulin ?

— Je veux qu’il soit très haut en longueur et très fin en largeur.

— Il n’y aura pas assez de place pour faire tourner votre machine à farine s’il est fin en largeur.

— Non, puisque je vais y fabriquer trois étages ! Un étage où il y aura la machine pour compresser le blé avec l’aide de l’eau, un autre étage pour stocker la farine et un autre pour y dormir !

Papa a eu un petit fou rire et pose sa main à travers mes cheveux.

— Voyez-vous, mon fils, l'eau est amenée par une sorte de tuyau en bois dit trompe. La roue est installée dans un bassin circulaire. L'eau s'y déverse à hauteur de la face supérieure de la roue, créant un tourbillon qui l'entraîne dans un mouvement giratoire. Vous le voyez ?

— Oh oui, sur le dessin, je le vois très bien ! Merci papa !

— Vous voulez le faire en combien de longueur votre moulin ?

— Mmm, je dirais, aux alentours de quinze mètres, pour que je regarde les oiseaux.

— Quinze mètres ? Mais c’est énorme Athanase!

Nous entendons un bruit provenir de l’échelle. Nous nous arrêtons de parler, jusqu’à ce que nous voyons le visage d’Alphonse dépasser de l’échelle.

— Bonjour papa, bonjour Athanase ! J’ai un message de la part de maman : nous allons passer à table.

— Oh, bonjour Alphonse ! Dites lui que nous arrivons.

Je salue mon grand-frère d’un mouvement de tête et suis papa, qui commence à descendre l’échelle, en premier.

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