— Me voilà encore là, soupira Claire accoudée sur le comptoir.

Rien n’avait encore changé la promotion de David tardait étrangement. Claire ne se faisait plus d’illusions, elle n’était pas bête. Qu’avait-il bien pu se passer ? Elle n’avait pourtant aucun doute sur les capacités de son mari. « Qui d’autre que toi mérite ce poste ? » lui avait-elle dit quelques semaines auparavant, le pensant réellement. Et elle ne s’était pas trompée, David aurait dû avoir sa promotion depuis un moment déjà. Alors pourquoi ?

— Elle arrive cette bière ? Tu la fabriques ou quoi ?

Le cri provenant du dehors la ramena sur terre, Claire leva les yeux au ciel en soupirant.

— Ouais, elle arrive !

Elle apporta le verre rempli de bière à son client, ô combien préféré, non sans rêver de verser son contenu sur sa tête. « La voilà ta bière, bien fraîche en plus de ça ! » Elle se força un sourire quand elle déposa le verre sur la table.

— C’est pas trop tôt ! Toujours dans les nuages !

Le client préféré ne prit même pas la peine de relever la tête, continuant la lecture de son journal si intéressant. Claire lui tourna le dos en faisant une grimace. « Je dois partir d’ici au plus vite » pensa-t-elle en retournant au comptoir. Un homme s’en approcha.

— Bonjour.

— Bonjour, lui répondit Claire sans lever les yeux sur lui.

— Ça fait plaisir d’être accueilli par un si joli sourire ici.

Claire redressa la tête et reconnu le charmant inconnu, elle sourit.

— Est-ce que je pourrais avoir une bière ?

— Bien sûr. C’est ainsi que l’inconnu se rendit au café tous les jours, discutant de choses et d’autres avec Claire qui semblait apprécier sa compagnie.

— M’accompagnerez-vous dîner un soir ?

La question ne manqua pas de surprendre Claire qui ne s’attendait certainement pas à une telle proposition.

— Je suis mariée, lui répondit-elle assez brusquement.

— Dans ce cas excusez-moi, mais je vous assure que je ne pensai à rien de mal. Je ne connais encore personne ici et je pensai à une sortie simplement pour faire un peu plus connaissance…

« Ben voyons, pensa Claire, faire connaissance et un peu plus si affinités… » Elle l’interrompit.

— Je n’ai pas pour habitude d’accepter une invitation d’un inconnu.

— Justement, répondit-il joyeusement, ainsi on ne sera plus des inconnus !

Claire ne put s’empêcher de sourire à cette phrase un peu banale, mais elle était flattée, sans vouloir l’admettre, qu’il ne se rendait pas aussi facilement.

— Un sourire ? Je gagne du terrain ! s’exclama-t-il.

Elle secoua la tête se forçant de ne pas rire.

— Alors, vous acceptez ?

Claire reprit son air le plus sérieux possible.

— Non.

— Si vous changez d’avis, l’invitation sera toujours valable.

— Ce sera toujours non.

Aucun dîner romantique ni chandelles et pourquoi pas une promenade au clair de lune tant qu’on y est ?

— Je vous assure que je ne pensai à rien de tout ceci, juste une soirée en toute amitié.

Claire ne se laissa pas convaincre ; sa première pensée fut qu’elle lui était apparue comme une fille facile parce qu’elle travaillait derrière un comptoir dans un café. L’inconnu se leva de son siège en s’excusant de l’avoir offensée et promettant de ne plus l’inviter à dîner.

— Vous ne m’avez pas offensée, lui répondit Claire alors qu’il se dirigeait vers la porte.

Il revint au pas de course et s’exclama en souriant.

— Vraiment ?

Claire acquiesça d’un signe de tête s’efforçant toujours de ne pas sourire. Elle espérait qu’il ne remarquerait pas qu’elle se retenait de rire et aurait ainsi pu penser qu’il gagnait du terrain, comme il disait.

— D’accord, plus d’invitation à dîner, mais on pourrait au moins se tutoyer ?

Elle répondit avec un sourire cette fois-ci.

— Ah ah tu cèdes. Au fait je m’appelle Alex, à demain Claire.

— Tu connais mon prénom ?

— Bien sûr, je connais toujours le prénom de jeunes femmes aussi charmantes.

Sa réponse fit rougir Claire malgré elle, qui pensa par la suite : « Mais il sort d’où celui-là ? » en riant.