David prit une décision : il ne se laisserait plus marcher sur les pieds sans rien dire, plus question d’être le brave garçon naïf que tout le monde croyait avoir connu. Pour couronner le tout, son chef l’avait convoqué quelques jours plus tard dans son bureau pour lui annoncer une autre « bonne » nouvelle : réduction du personnel ou autre chose encore. On n’avait plus besoin de ses services du jour au lendemain ! Il resta assis sans comprendre, la voix de son chef lui parut un brouhaha lui résonnant dans la tête. La surprise passée et ayant eu toute une journée pour réfléchir, il se dit qu’il montrerait à cet espèce d’enfoiré Machin-chose qui était David. Il était certain que la décision de le virer de la boîte venait de lui. Il n’était pas jaloux, ce n’était pas dans son caractère, mais ce type n’avait aucune capacité, c’était clair comme de l’eau de roche.

— Notre nouveau directeur… Monsieur Machin-Truc !

David, assis à table dans la cuisine se servit quelques verres de whisky continuant d’imiter son chef le jour où celui-ci fit son annonce.

— … La personne la plus qualifiée, bla bla bla, dynamique, qui la mettra bien là où on pense tous à David, bla bla bla, qui a tout sacrifié pour cette compagnie, bla bla. Ah ! Il s’est bien fait avoir ce pauvre idiot, on a réussi à lui faire croire jusqu’au bout qu’il aurait ce poste, et non : on l’a viré ! Vous auriez dû voir sa tête, c’était comique !

Il continua de boire de plus belle, toujours en prenant l’air d’un chef d’équipe s’adressant à une foule imaginaire.

— Ce que vous ignorez, mesdames et messieurs réunis ici pour cette assemblée extraordinaire, est que même sa femme, oui madame Claire elle-même, l’a pris pour le dernier des imbéciles !

Il se leva, prit la bouteille et but directement au goulot.

— Elle a rencontré un autre homme ! Oh non ne soyez pas choqués. Il lui plaît beaucoup plus que son mari apparemment. Celui-là même qui aurait donné sa vie pour elle ! Ah mais ce cher monsieur l’emmène en balade, lui envoie des fleurs dans ma maison, et a l’audace de lui téléphoner chez moi, sous mon nez ! Ils se foutent bien ma gueule tous les deux ! Et elle a le culot de me dire qu’elle ne m’a jamais trompé !

Les mains posées sur la table, David baissa la tête un moment puis en la relevant annonça comme une sentence :

— Ces chères personnes vont apprendre qui est réellement David Laroche. Ils vont tous le regretter amèrement croyez-moi, je vous prends tous à témoins mesdames et messieurs. Tout d’abord Claire et son amant, elle regrettera elle aussi de m’avoir menti. Ensuite cet Alexandre Machin-chose. Oh oui tous les trois le regretterons amèrement.

Ce dont David ignorait, était que celui qui lui avait pris son poste et celui qu’il pensait être l’amant de sa femme, n’était en réalité qu’une seule et même personne.