Chapitre 3

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Perchée sur des bottines chocolat, Marine est vêtue d’un gilet cintré de la même couleur, dont les bords frôlent la ceinture de sa jupe moulante beige. Celle-ci épouse délicieusement ses hanches, un brin plus arrondies.

Elle est parfaite, se dit-il.

Submergé par une sensation de plénitude, Kenna se sent comme entier. Marine se retourne et l’adrénaline gicle dans tout son Être à l’instant où leurs yeux se rencontrent.

« Tu es vraiment dans la merde, mon pote » murmure-t-il.

Des voyageurs défilent entre eux, leurs regards restent attachés l’un à l’autre comme s’ils craignent de disparaître, puis la vue s’éclaircit.

Les paupières de la jeune femme se ferment brièvement et ses lèvres se pressent, creusant ainsi deux fossettes dans ses joues, une mimique qui l’émeut toujours autant.

Sa poitrine se gonfle et s’abaisse vite, autant que la sienne. Kenna a peur de ce qu’il ressent, de ce qu’il croit percevoir chez elle.

Ne fais pas souffrir Aurèlie…, se supplie-t-il à maintes reprises comme pour retrouver sa raison.

Avant-hier, sa petite amie l’a clairement accusé d’avoir une autre femme en tête. N’ayant jamais été capable d’aligner des mensonges, encore moins cohérents, il s’est simplement tu. Face à cela, elle a attrapé un taxi, le laissant en plan dans le restaurant où ils dînaient.

Kenna s’est senti minable, et surtout, perdu. Aurèlie lui parait prête à le suivre même dans les tréfonds de la terre tandis que Marine ne veut pas vivre dans son pays, pas même pour un court séjour.

« Y a pas à réfléchir, raisonne-t-il tout bas en la contemplant, les sens en vrac, je ne peux pas foutre en l’air une relation sûre et saine pour une femme qui m'a trahi auparavant »

Cependant, son cœur s’emballe encore une fois lorsque Marine, radieuse, déploie de grandes enjambées pour le rejoindre.

Kenna se défait de ses craintes, de ses doutes et de ses certitudes, de la poignée de sa petite valise, et de son sac à dos qui émet un bruit sourd en tombant à ses pieds.

Ils se tiennent silencieux, ensuite sourires hésitants, œil satisfaits, puis leurs bouches entrouvertes lâchent des souffles courts qui se caressent. Le monde autour d’eux semble s’être envolé.

Il peut sentir la chaleur de Marine et ses sens se laissent agréablement envahir par son parfum.

Mon amour, se réjouit-il dans le secret de son âme.

— Amour de ma vie, glisse clairement Marine.

Les yeux brillants de larmes, elle pose tendrement une main tremblotante sur sa joue recouverte d’un léger duvet. À son tour, il prend son visage en coupe, repousse délicatement quelques mèches dans sa nuque et se perd dans ses prunelles voilées de désir, à l’égal des siennes, il n’en doute pas.

— Mon cœur, admet-il avant de la serrer contre lui.

Il inspire profondément comme pour se vivifier de son odeur.

— Tu m’as manqué, putain ! grogne-t-il dans le creux de son épaule.

Marine lâche un doux son guttural. Kenna l’écarte légèrement de lui et la scrute à nouveau avec ravissement, puis il capture ses lèvres.

— Ken… on ne devrait pas, murmure peu après la jeune femme essoufflée contre celles-ci.

— Tu as quelqu’un, c’est ça ? s’informe-t-il tout bas.

En réponse, elle soude leurs bouches avec gourmandise.

— On nous observe, remarque-t-elle par la suite.

Le jeune homme cède. Haletant, il colle leurs fronts et emprisonne son regard. Ils restent ainsi durant plusieurs secondes.

— Il n’y a jamais eu personne d’autre, lui avoue-t-elle.

Son petit sourire en coin renait, s’élargit avant de s’effacer d’un coup.

« Et toi ? » lui réclame sa conscience.

Il s’écarte vivement de Marine qui cille et le détaille avec insistance. Soudain, ses yeux s’assombrissent de tristesse, elle se détourne de lui et énonce sèchement :

— Allons par, là. Ma voiture est garée sur le parking Dépose-minute.

Ils quittent l’aéroport de Paris, Roissy Charles de Gaule dans un luxueux SUV et sous un silence pesant. Malgré tout, le cœur de Kenna n’arrête pas de s’enflammer au moindre regard en coin de son ex-fiancée.

Kenna lui annonce qu’il séjournera chez son meilleur ami.

— J’avais prévu que tu viennes à la maison… oh, bordel, non ! lâche Marine dans un souffle.

Son véhicule aux vitres teintées à l’arrière entre dans un trafic dense, ce qui les entraîne sur une discutions sur les incessants bouchons du périphérique parisien. Avec leur complicité d’antan, leur conversation débouche ensuite sur des morceaux de musique dont ils miment certains joyeusement; sur des séries qu’ils ont visualisées et leurs vies professionnelles. Marine lui rappelle que leur centrale d’achat génère maintenant de gros bénéfices.

— … je t’avais demandé de la garder.

— Y a pas de raison, nous l’avons créée ensemble. Tu y as des parts autant que dans l’entreprise de ta sœur et je refuse de les acheter.

— Toute seule, tu fais un gros taf depuis le début.

— Et je reçois un bon salaire pour ça.

Un lourd silence s’impose dans l’habitacle.

— Style, tu ne veux plus rien qui te lie à moi, le rompt-elle.

Kenna lâche un bref ricanement.

— Rassure-moi, c’est une blague ? ironise-t-il, tout sourire effacé.

Sans attendre une réponse de Marine dont les yeux sont rivés sur la route, il poursuit :

— Tu m'as jeté, et pour la seconde fois, à 3 jours de ton arrivée à Asmara (Érythrée), sans réelles explications, je croyais qu’on avait renoué ? s’énerve-t-il.

Elle continue de se taire.

— À la place de ma femme que j’avais hâte de revoir, j’ai reçu un mail de rupture ! signifie-t-il, sérieux, Marine, je ne méritais que ça ?

— Pardonne-moi, énonce-t-elle.

Ahuri, Kenna se tourne vers elle, mais il réalise seulement que le véhicule est en train d’entrer dans un parking souterrain.

— Une… une clinique ? questionne-t-il.

Tête baissée, elle arrête le moteur.

— Ça va, Mon cœur ? s’inquiète-t-il, saisi d’effroi.

La vie ne va pas me refaire un sale coup ? s’alarme-t-il.

— Euh, je dois te dire quelque chose de pas facile, euh, j’avoue avoir été en panique lorsque je t’ai contacté, mais le pire est passé.

— Rassure-moi, tu n’es pas malade ?

— Non, euh, nous, euh, je.... nous avions besoin d’une vraie discussion, déclare-t-elle à la hâte, le regard fuyant.

Kenna hoche la tête, dubitatif, puis il la saisit par le menton et plonge dans ses orbites.

— Sûr, tu vas bien ?

Elle acquiesce en silence. Il soupire de soulagement et l’examine avec soin. Tout à coup, le désir étincelle les pupilles de Marine et l’enflamme, malgré lui. Leurs respirations deviennent rapides et rythment à l’unisson.

D’un mouvement preste, Marine se rapproche de lui et l’entraîne dans une étreinte passionnée.

— … je t’aime, Ken’. Je n’ai pas cessé d'être amoureuse de toi une seule seconde, s’abandonne-t-elle en reprenant son souffle, pardonne-moi…

Il l’embrasse à pleine bouche, se détache d’elle et descend du véhicule en vitesse...

— Tu es toujours sous pilule ? s’informe Kenna, la gorge nouée par un étau de jalousie, nous n’avons pas utilisé de protection.

— Non, répond-elle en revêtant son gilet.

Installé à côté d’elle à l’arrière du SUV, il a un mouvement de recul et sourcille.

— Non ?! Mais… je viens peut-être de te faire un gosse, Marine ?!

Il estime que le bref silence de la jeune femme dure une éternité.

— Ce ne serait pas la première fois, lâche-t-elle.

— Pardon ?

— Pardonne-moi…

Sa voix se brise, elle se tait et des larmes gercent ses joues.

— Qu’as-tu fait, Marine ?

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